☾ Love by the moon ☽ Séléné

Tout ce dont tu te souviens de ta petite enfance, c'est ce bâtiment qu'on appelait "L'abri des petites fées". Un orphelinat où vivaient uniquement des filles, allant de trois ans à dix-huit ans. Un orphelinat bâti à côté d'un autre, "L'abri des petits lutins", où les garçons s'y trouvaient. Tu y as vécu durant bien cinq ans. Cinq ans qui ont été plus difficile pour toi. Puisque qu'à ton plus jeune âge, ont à dû te diagnostiquer la maladie xeroderma pigmentosum dit XP, ou de manière plus métaphorique : l'enfant de la Lune. Tu ne supportes pas les rayonnements ultraviolets émis par le Soleil et certaines sources lumineuses artificielles. C'est à cause de tes rougeurs importantes apparaissant sur ta peau et des lésions oculaires dû à ta photophobie qu'on a posé ce diagnostic suite à une visite chez le médecin. Tu étais encore jeune pour le comprendre à ce moment-là, mais tu étais vouée, condamnée, à vivre une vie totalement différente des autres de tes camarades.

Et ça a débuté par l'orphelinat qui devait s'organiser. Pour ta sécurité, ta santé avant tout, on t'a préparé une chambre spéciale pour toi. Des fenêtres anti UV, des lampes artificielles qui ne pourraient pas t'affecter. En plus de t'avoir acheté ce genre de combinaison qu'on pourrait porter pour aller sur la Lune. Mais dont tu te sers quand il faut absolument sortir dehors pour des raisons exceptionnelles. Bien qu'au départ tu trouvais ça cool d'être aussi chouchouté et d'avoir un appareil d'astronaute comme Nieil Armstrong, au fur et à mesure du temps qui passait, tu te rendais compte des inconvénients de ta maladie. Quand tu entendais les rires et les cris des autres enfants qui s'amusaient dans la cour de récréation, toi tu étais sur ton lit à dessiner ou bien jouer avec ton tamagotchi. La solitude commençait à peser sur toi. Énormément. Les seules interactions que tu pouvais avoir étaient avec les infirmiers qui s'occupaient de toi et quelques surveillants qui s'assuraient de passer le plus de temps possible pour ne pas que tu te sentes complètement isolée, et qui t'autorisaient exceptionnellement des sorties nocturnes dans Paris. Grâce à ça tu as tout de même garder le sourire, mais un sourire qui cachait ta souffrance de ne pas pouvoir vivre ta vie de petite fille comme tu aurais pu le faire si tu étais normal. Si tu n'étais pas un... monstre. D'autant plus qu'au détour d'un couloir, la nuit, tu as su que ton espérance de vie était amoindrie. Et c'est à cause de cette maladie que la plupart des enfants ne voulaient pas t'approcher lors des soirées. Ils ne voulaient pas être "contaminés". Les surveillants faisaient tout pour qu'ils ne soient pas aussi méchant avec toi, mais au fond tu ne t'attendais pas à grand chose. Quand on est enfant, on ne mâche pas ses mots. On dit la simple et bonne vérité. "La vérité sort de la bouche des enfants" est une phrase que tu entendait souvent de par les adultes, et qui avait pris tout son sens à ce moment-là. Au moment où les regards posé sur toi n'étaient que rempli de dégoûts et de peur.

Néanmoins, il y avait une exception. Une exception du nom de Thibault. Un garçon qui vivait dans l'orphelinat des garçons, à côté du tien. Un simple petit muret vous séparait. Et lui, après avoir eu vent de ta petite frimousse enfermée dans sa tour, il est venu chaque soir pour te parler. Son petit rituel était de jeter trois petits cailloux sur ta fenêtre. Signe de sa présence. Tu aimais tellement l'écouter et le voir rire. Bien que ça te rendait envieuse quand il te racontait des mésaventures que toi-même tu ne pouvais pas faire, tu étais contente de voir sa petite tête. La seule tête masculine qui osait et aimait être à tes côtés sans avoir peur. C'était lui. C'était lui, ton premier amour d'enfant. Un premier amour que tu as pourtant dû quitter au bout d'un moment quand une famille a finit par t'adopter. Tu n'y croyais plus. Tu n'y croyais pas en fait. Tu ne croyais pas qu'une famille prête à s'occuper d'une enfant atteinte d'une maladie rare se présenterait à toi aussi rapidement. En peu de temps, tu es devenue Séléné. Séléné Prodi. Fille de Stéphanie et Mark Prodi. Des français purs souches adorables, qui avaient déjà adoptés d'autres enfants avant toi. Ils sont fous de mythologie grecque alors c'est tout naturellement qu'ils t'ont appelé Séléné. Séléné la déesse de la Lune.

Dix ans se sont écoulées depuis ton adoption, et te voilà majeure. Enfin. Cette deuxième partie de ta vie n’a pas été aussi palpitante, simplement remplie d’amour. Avant de vous installer à Los Angeles il y a deux ans de cela, vous habitiez dans une ville proche de la région parisienne, Montigny-Lès-Cormeilles. Une chouette ville, avec des habitants sympathiques, mais tu n’y sortais pas souvent la nuit. Simplement juste pour t’aérer un peu, mais sans plus. Tes frères adoptifs Orion, Hélios et Ulysse ont passé énormément de temps avec toi durant ces années. Et ils te surprotégeaient presque un peu trop. Mais le souvenir qui te reste et te restera toujours en mémoire, c’est quand ils sont sortis dehors avec les combinaisons XP, pour aller vers les personnes et leur expliquer la situation. Pour l’association dédiée aux enfants de la Lune. Ça t’a énormément touchée. Aujourd’hui, tu bosses avec tes parents dans leur restaurant, à Silverlake. Un petit restaurant cosy, pas trop loin du centre-ville mais assez pour que ce soit un endroit tranquille. Tu y travailles durant la nuit, puisque la journée tu passes la plupart de ton temps à dormir ou t’occuper de tes petites affaires, comme jouer de la guitare, l’une de tes passions. Mais aussi, t’occuper de ta petite chouette. Une autre de tes passions. Ces animaux te fascinent, depuis que tu as adopté cette chouette blessée dans le jardin de tes parents. Tu l’as appelé Maïa. Et depuis, elle ne te quitte plus. Tu voulais la relâcher dans la nature, mais le lendemain même, elle est revenue chez toi. Alors tu l’as gardé. Tu as aménagé une petite logia pour elle, avec une fenêtre que tu ouvres la nuit pour qu’elle puisse sortir comme bon lui semble.

Depuis ton adoption, aussi, tu as fait des recherches sur tes parents biologiques. Tu étais curieuse de savoir pourquoi on t’avait abandonné. Et la vérité qui est tombée t’a fait mal : tu n’étais tout simplement pas désirée. Tu n’aurais été qu’un poids en plus pour eux. Eux qui avaient déjà un enfant, un garçon du nom de Lim Chulhei. Alors oui, pendant un certain temps tu as pris tes distances avec cette histoire plus que bouleversante. Mais tu as fini par vouloir prendre contact avec ce frère que tu n’as jamais connu et qui ne doit sûrement pas savoir que tu existes. En sachant que ta mère biologique a accouchée à Paris, sans que personne ne soit au courant. Que ce soit son mari et le reste de sa famille. A l’aide d’Orion principalement, tu as pu trouver là où habitait Chulhei et là où il travaillait. Orion te ramenait des clichés, des vidéos même. Ça te faisait étrange, de te dire que cet homme bien plus âgé que toi a le même sang qui coule dans tes veines. Tu comptes bien aller le voir un jour, et lui parler de vive voix. Pourquoi tu ne pourrais pas en apprendre plus sur lui ? Dans tous les cas, tes parents adoptifs t’ont donné le feu vert. Reste à savoir s’il t’acceptera telle que tu es, ou bien s’il décidera de te rejeter aussi.