if i look in your eyes, i'll want you to hold me. (kealïs #4)

J’essaie de faire passer mon humeur un peu bancale, mon stress aussi, parce que c’est pas simple de me dire que je vais passer le reste de la soirée seule avec Loïs. Il y a tous ces sentiments qui se bousculent en moi, je n’arrive pas à trouver le bon chemin vers l’apaisement. Je sens mon corps électrique, sur le qui-vive, je déteste cette sensation. « Habituellement, je ne sais pas. Mais ce soir, on m’a assuré que nous avions le champ libre. » répond la jeune femme à mon interrogation. Immédiatement sa réponse me pousse à me demander pourquoi elle a posé la question à l’établissement. Je dois arrêter d’être toujours aussi suspicieuse. « C’est totalement pour ça que j’ai préparé un diapo. Parce que je savais que seule toi pourrais me juger. Ce qui est déjà beaucoup, si tu veux mon avis. » Elle se met à rire, elle est nerveuse elle aussi je crois, ça peut se sentir. Je lui offre un léger sourire en guise de réponse, pour lui faire comprendre qu’elle n’a pas besoin d’avoir peur. Mais je suis assez bien placée pour savoir que les peurs sont souvent infondées, c’est ce qui les rend plus difficiles à évincer. Loïs s’installe et je la suis, prenant le fauteuil près d’elle, pile au milieu de la salle. « J’espère que t’es prête à voir le meilleur power point de ta vie, hein ? » Je fais mine de bien m’installer dans mon fauteuil, et hoche la tête. « Je crois que je suis prête. » Loïs donne le top en levant la main et voilà que l’écran s’anime sous nos yeux. Je ne comprends pas bien le principe pour le moment, les escargots n’étant pas mes bestioles préférées - même si je ne leur veut aucun mal, pauvres bestioles. Je mets un léger temps avant de comprendre le sujet, et commence même à m’identifier à un des deux escargots. C’est ridicule, ridiculement mignon. Je me sens même touchée à certains moments, et quand vient la dernière diapo et le texte qui l’accompagne, je ne peux retenir une larme de glisser le long de ma joue, fort heureusement du côté inverse où se trouve Loïs. J’ai juste le temps de l’essuyer avant que la lumière ne se rallume, et que l’écran ne se fige. « Alors, t’en penses quoi ? » demande-t-elle finalement en brisant le silence. Je me racle un peu la gorge pour tenter d’évincer cette boule qui s’y trouve et entrave les mots. « Tu nous vois comme des escargots ? » Je tente de prendre les choses avec un peu plus de légèreté. « Je pensais pas que tu bavais autant. La nuit peut-être… » Je lui souris un peu et repose finalement mon regard sur l’écran, toujours allumé avec l’image de fin, ces deux escargots blessés l’un en face de l’autre, et cette phrase au milieu. « Bien sûr qu’on peut être amies. » Même si ça me bouffe, parce que donner l’amitié à qui veut l’amour, c’est un peu comme donner du pain à qui meurt de soif. Mais je me contenterai de ce qu’elle veut bien m’offrir. Je me tourne finalement vers elle et libère mon bras pour venir la prendre tendrement contre moi. « Merci, c’était joli. » Je m’imprègne de son odeur malgré moi. Etre amies. Est-ce que j’en suis seulement capable ? « On regard ce film pourri alors ? A moins qu’ils puissent brancher netflix avec ton ordi. » Je hausse les épaules, un peu nonchalante. Entendre du russe, ça me faisait plaisir, mais si c’est pour se taper une daube, je sais pas trop si c’est le bon plan.

Loïs sentait son estomac se tordre sous l’effet de l’attente. Elle se sentait envahie du démon de l’angoisse alors qu’elle se tournait finalement vers Keala, brisant le silence pour lui répéter à haute voix la question qui était affichée à l’écran. L’angoisse devait se lire sur ses traits, mais peu importait. Il était important pour elle d’enterrer la hache de guerre et d’obtenir une véritable réponse. Surtout après ce qui s’était produit au cours du trajet. « Tu nous vois comme des escargots ? » finissait par répondre Keala avec un sourire. Un vent de soulagement s’abattait alors sur la Garcia. « Faut dire qu’on n’ait pas des fusées. Mais des fois, ce n’est pas plus mal de prendre son temps. » Cependant, la russe semblait avoir une explication qui lui convenait bien mieux. « Je pensais pas que tu bavais autant. La nuit peut-être… » Loïs se laissait alors à rire, avant de lui tirer légèrement la langue. Touchée. Mais rapidement, elle retrouvait son sérieux alors que le regard de Keala se reportait sur l’écran, semblait relire les mots qui y étaient toujours projetés. « Bien sûr qu’on peut être amies. » Un vent de soulagement s’abattait aussitôt sur la Garcia. Un sourire venait reprendre place sur ses lèvres. C’était une excellente nouvelle et, au moins, elle pourrait annoncer à Dani qu’elle n’avait pas dessiné tous ces escargots pour rien. Par cette simple réponse, Keala soulageait deux membres d’une même famille. La russe venait finalement prendre la lieutenante de police dans ses bras. « Merci, c’était joli. » Loïs refermait ses bras autour de la jeune femme, la serrait fort contre elle. Ses yeux se fermaient durant quelques secondes alors qu’elle profitait de cette étreinte, avant que Keala ne lui échappe. « On regard ce film pourri alors ? A moins qu’ils puissent brancher netflix avec ton ordi. » La russe hochait les épaules, comme si rien de tout cela ne lui importait vraiment. Au final, Loïs était un peu dans le même état d’esprit. Le plus important s’était déjà produit. Le film, ce n’était que le petit plus, le prétexte afin d’aborder un sujet bien plus grand. « On peut commencer à regarder le film. Et s’il est trop nul, ce n’est pas grave, on sortira faire un tour. Après tout, on n’a rien payé nous. » Et puis, l’important c’était de passer du temps ensemble. C’était même tout ce qui comptait.