dangerous attraction (neelana 2)

Mon épaule en appui sur l’embrasure de la porte, je regarde ma femme en train de lire l’histoire à notre fille. Un part de moi se sent pleine de gratitude de pouvoir assister à ce genre de moment. Mais une autre part se sent triste. Parce que Zahara n’est pas souvent là pour partager ça avec Caleen. Je sais que je suis celle qui passe le plus de temps à la maison, même si je n’ai pas moins de boulot pour autant. Mais être freelance apporte pas mal d’aisance au niveau de l’emploi du temps. Ma femme travaille beaucoup, mais elle en oublie de ce fait qu’elle a une famille. Deux personnes qui aimeraient qu’elle passe plus de temps à la maison. Et je sais d’avance qu’après avoir embrassé le front de notre fille, elle me dira qu’elle a du travail.
Dans la poche arrière de mon jean, je sens mon téléphone qui vibre. Je sors le smartphone et découvre le sms de Sana. Dans un réflexe, je relève les yeux vers Zahara et Caleen, qui sont toujours concentrées sur les images du livre, la voix de Zee berçant celle de la petite fille qui lutte déjà pour ne pas s’endormir. Après une courte hésitation, je réponds par la positive à l’invitation de Sana. J’en ai marre de m’adapter toujours à ma femme, attendre qu’elle daigne me donner du temps. Ce soir, je sors. C’est décidé.
L’histoire terminée, je m’approche pour embrasser ma fille, son autre mère la borde et l’embrasse à son tour, et nous quittons sa chambre après avoir tiré la porte. Je ne perds pas de temps. « Je vais aller dîner avec une amie que je n’ai pas vue depuis longtemps. » Je sens une interrogation dans les yeux de ma femme. Elle connaît toutes mes amies, le fait même que je ne lui donne aucun nom semble la faire tiquer. « Il reste de dahl de lentilles dans le frigo, j’en ai fait un peu trop à midi. » Je dépose un baiser furtif sur ses lèvres et m’éloigne sans tarder pour rejoindre l’entrée de la maison. J’enfile une paire de chaussures, récupère mon sac à main et adresse un dernier signe de main à ma femme avant de quitter la maison familiale. Mon coeur est un peu lourd, mais je crois que j’ai besoin de souffler. L’atmosphère est devenue vraiment pesante entre nous, et mes retrouvailles avec Sana me donnent une impression de pouvoir respirer à nouveau, sans que je ne puisse me l’expliquer.
Le coeur battant, je me rends à l’adresse reçue par sms, et après un léger soupir pour me donner un peu de courage, je presse la sonnette, attendant que la brune ne vienne m’ouvrir. A l’instant où je plonge mon regard dans le sien, un sourire étire mes lèvres. « Bonsoir. » Elle me laisse entrer et je ne me fais pas prier. Après tout, je suis là pour dîner avec elle, pas pour rester prostrée sur le paillasson. Dans un regard panoramique, je balaye l’intérieur de son appartement. Il lui ressemble. « Merci, pour l’invitation. Ça me fait plaisir de passer un peu de temps avec toi. » Et ça me fait plaisir qu’elle ait fait un pas vers moi, j’ai vraiment pensé qu’elle ne me recontacterait jamais… Je suis bien contente de m’être trompée.

C’est un jeudi soir. Il n’y a aucune raison, rien à fêter, pas d’excuse plausible. Pourtant lorsque ton livreur te dépose ta commande, c’est presque de manière effrayante que ton esprit pense à Neela. Il y a bien trop de nourriture. Tu es seule. Tu as promis à Soledad de lui laisser du temps et de l’espace. Tu tentes de diminuer ta consommation d’alcool, de rentrer dans les rangs. Plus ou moins. Alors, inconsciemment, ton être cherche à remplacer le manque. Il cherche probablement une nouvelle habitude. Une addiction. En tout point, Neela rentrait dans les critères. Elle n’était pas la solution à tes problèmes. Loin de là. Elle portait peut-être même en elle, bien plus d’aspects négatifs pour toi que l’inverse. Il y avait là un pattern dont tu devenais de temps en temps consciente mais dont la réelle profondeur t’échappait complètement. Quoi qu’il en soit, tu avais fait ton choix et ne reviendrais pas en arrière. Pourquoi ? Tu n’en avais encore aucune idée. Le piquant de la curiosité avait juste été plus fort que tout.

Le sms est envoyé aussi rapidement que deux comprimés de codéine sont avalés. Pour te calmer. Te sentir plus légère. Juste un peu. Ton coeur à le temps de battre un peu fort le temps de recevoir la réponse de ton ex. Un oui. Entre surprise et soulagement, tu laisses ton visage s’étirer en un fin sourire et sors une seconde assiette du placard. Jetant un oeil autour de toi, ton intérieur te pousse à ranger quelques affaires, pousser quelques autres derrière une porte fermée, et jeter certains vêtements du côté de la buanderie.

Son arrivée ne se fait pas attendre. Tu ouvres la porte et la lumière de son visage semble communicative. « Bonsoir. » Tu souris à ton tour et te décales de l’entrée, accompagnant le mouvement d’un geste l’invitant à rentrer. « Merci, pour l’invitation. Ça me fait plaisir de passer un peu de temps avec toi. » Neela est devant toi, tu l’observes avancer dans ton environnement et ne peux t’empêcher de trouver cette vue étrange. Comme sortie d’une réalité parallèle. Elle ne devrait pas se trouver là. Tu ne devrais pas partager ici ce temps en sa compagnie. Cependant, elle est là. Elle y est et tu n’aurais pas envie de changer quoi que ce soit en cet instant. Tu en veux plus. Encore un peu. Tu es intriguée. Intéressée. “Remercie Liam, mon livreur” réponds-tu en accompagnant le tout d’un clin d’oeil alors que tu dépasses sa silhouette dans le salon. Tentative d’humour, de mise à distance peut-être ? De sécurité ? “Je t’en prie, installe-toi. Je te sers un verre ?” Ta voix s’intensifie légèrement au fur et à mesure de ton éloignement vers la cuisine. Ainsi un peu cachée par l’enclos formé par cette pièce séparée, tu te permets d’ajouter : “Ca me fait plaisir aussi que tu aies accepté.” Tu réapparais avec le sac plastique plein à craquer que tu déposes au centre de la table à manger. “Mais j’aurais compris que tu dises non. Tu avais peut-être d’autres choses de prévues ce soir …” Avait-elle changé de plan à la dernière minute ? S’ennuyait-elle de solitude chez elle ? Avait-elle échappé à quelqu’un d’autre ce soir ? Avait-elle hésité ? Ou pas du tout ? Autant de questions te brulant les lèvres mais dont tu savais ne pas pouvoir formuler le corps.

feat. @Neela Barnett

« Remercie Liam, mon livreur » dit-elle en guise de réponse à ma formule de politesse. En réalité, ce n’était pas seulement de la politesse. Je suis vraiment heureuse qu’elle m’ait invitée à partager avec elle ce dîner, j’avais vraiment besoin de prendre l’air, penser à autre chose. Je réponds à son clin d’oeil par un sourire, alors qu’elle me propose de m’installer. « Je te sers un verre ? » « Volontiers ! » Ça ne pourra pas me faire de mal. Je suis venue en taxi, je peux boire autant que je veux si l’envie me prend. Il ne faudrait pas trop abuser, il y a longtemps que je n’ai pas bu plus de deux ou trois verres de vin. « Ca me fait plaisir aussi que tu aies accepté. » avoue-t-elle depuis la cuisine, ce qui me fait étirer un sourire conquis. Sana n’a pas souvent été du genre à dire ce qu’elle pensait au plus profond d’elle-même, surtout quand il s’agissait d’un quelconque sentiment. « Mais j’aurais compris que tu dises non. Tu avais peut-être d’autres choses de prévues ce soir … » lâche-t-elle pendant qu’elle dépose sur la table les victuailles de sa commande un peu trop remplie. Je plonge mon regard dans le sien, le coeur battant un peu plus fort. Je secoue alors sensiblement la tête avant de lui répondre. « Si j’avais voulu dire non, ou si j’avais eu quelque chose de plus important à faire, j’aurai refusé ton invitation. » Avec regret, je dois bien me l’avouer. Etre ici est vraiment étrange, autant le fait d’être en sa présence, que le fait de me trouver dans l’appartement dans lequel elle vit. Je suis chez elle. Dans son monde, ou au moins une partie. « Pour être franche, je m’attendais à ce que mon numéro ne te serve jamais à rien. » Je la regarde et hausse les épaules, un très léger sourire au coin des lèvres. « C’est si… soudain. Nos retrouvailles. » Ça n’aurai pas pu en être autrement. Je n’aurai - je crois - jamais tenté de la retrouver de manière volontaire. Le fait même que la vie nous ait remises sur le même chemin me donne un sentiment étrange. Mais c’est comme une évidence. Si je l’avais recroisée il y a quelques années, alors que mon couple allait bien, je ne me serai même pas posé la question. Je n’aurai peut-être même pas cherché à la revoir, ou même pas eu l’envie. En réalité, je n’en sais rien trop. Ce que je sais, c’est que je suis heureuse de pouvoir me retrouver en face d’elle ce soir, partager un repas, un verre ou deux… « Comment vas-tu, depuis la dernière fois ? »

Neela prend place à table alors que tu lui montres deux bouteilles entre lesquelles tu hésites. Pas de grands crus. Deux vins populaires, plutôt pas mal, mais restant dans les normes du raisonnable pour ton portefeuille. De toute façon, tu avais toujours préféré la bière ou l’alcool fort. Suivant un signe de la main de ton ex, tu débouchonnes celle de son choix. Devant toi, deux verres. Tu remplis le premier, t’arrêtes un instant et observes le second. Tu avais dit que tu continuerais d’être sage aujourd’hui. Que de l’eau t’irait parfaitement bien. Pas vrai ? Un seul coup d’oeil au visage de Neela et tes convictions s’envolent. C’est pas pour cette fois. C’est pas si grave et puis … c’était quand même plus poli et convivial de l’accompagner, n’est-ce pas ? Sans compter que, l’air de rien, tu sentais en avoir besoin. Sa présence te remuait. Beaucoup.

Tu déposes les victuailles sur la table ainsi que les deux verres. Vos regards se croisent à nouveau. Une fois de plus. Oui, définitivement, tu allais avoir besoin de ce vin. « Si j’avais voulu dire non, ou si j’avais eu quelque chose de plus important à faire, j’aurai refusé ton invitation. » Et bien oui. C’était pourtant évident, Sana. Alors qu’elle te répond, tu prends automatiquement conscience de la stupidité de ta précédente remarque. Tu secoues la tête presque imperceptiblement alors que tu retournes en cuisine pour attraper la vaisselle adéquate. « Pour être franche, je m’attendais à ce que mon numéro ne te serve jamais à rien. » Tu reviens, prenant enfin place à table à ton tour. Elle t’observe, hausse les épaules et laisses naitre un fin sourire aux coins de ses lèvres. Dieu qu’elle était belle. Tu n’avais absolument aucun droit de lui dire, de le penser. Tu n’aurais peut-être même pas eu envie qu’elle l’entende … Et pourtant. « C’est si… soudain. Nos retrouvailles. » C’était le moins qu’on puisse dire. Ce n’était pas prévu et particulièrement chamboulant. “J’ai pas tout à fait l’habitude de faire dans la subtilité et les détours … Alors je suppose que ça devait se passer comme ça” Réponds-tu avec un certain amusement presque détaché par rapport à la manière dont tu menais ta propre vie. “Je ne sais pas vraiment pourquoi je t’ai envoyé ce message.” Avoues-tu de but en blanc. Sans artifice. “J’ai répondu à une simple pulsion” Tu inspires profondément et tends une grosse cuillère à la brune pour qu’elle se serve. “Ou peut-être que j’ai juste enfin trouvé la parfaite occasion de me venger en empoisonnant ta nourriture …” Tu hausses les sourcils, laissant planer le doute, une seconde à peine, avant de rire doucement et de venir piquer ta fourchette dans un des plats. Enfournant celle-ci dans la foulée, tu n’avais pas vraiment besoin de préciser qu’il s’agissait là d’une maladroite et stupide blague.

« Comment vas-tu, depuis la dernière fois ? » Cette question là, peu importe de qui elle venait et peu importe la situation, tu ne savais plus y répondre. Que voulait réellement entendre les autres ? Les détails les plus profonds de ton quotidien ? Le mensonge que tout allait bien ? Probablement ni l’un ni l’autre mais l’entre deux te semblait flou. “Ça va. J’ai troqué ma carrière de dépanneuse pour retrouver les forces de l’ordre. C’était le bon choix je pense.” Tu étais tout bonnement incapable de t’ouvrir. De lâcher prise. D’arrêter l’humour insignifiant. Tu t’énervais toute seule intérieurement. C’en était pathétique. Tu attrapes ton verres et en boit une bonne gorgée. “Tu as trouvé une nouvelle voiture ? Ou un nouveau chauffeur ?” Alors que Neela est concentrée sur son assiette, tu l’observes avec attention, souriant sans t’en rendre compte en observant qu’elle avait gardé les exactes mêmes manies qu’à l’époque. Certains aliments ne devaient en aucun cas se toucher et les féculents se retrouvaient toujours en haut d’assiette. Tu n’avais rien oublier … rien du tout.

feat. @Neela Barnett

Sana n’a jamais été le genre de personne très expansive. J’ai été habituée à parler pour deux, mais je savais la comprendre, lire en elle même si elle ne disait rien, ou se contentait de peu. Aujourd’hui, je ne la connais plus, je ne sais pas qui elle est devenue. Avec les années, les épreuves, on change, tous. Et retrouver quelqu’un après tant d’année ce n’est pas toujours évident. Parce que la personne que nous avons connue n’est plus exactement la même. « J’ai pas tout à fait l’habitude de faire dans la subtilité et les détours … Alors je suppose que ça devait se passer comme ça » affirme-t-elle de manière détachée, mais avec une petite subtilité. Un léger brin de malice dans le son de sa voix. « Je ne sais pas vraiment pourquoi je t’ai envoyé ce message. J’ai répondu à une simple pulsion. » Une pulsion. Ce simple mot me procure un frisson. Ça ne devrait pas, mais je n’ai rien contrôlé.
Je récupère la cuillère qu’elle me tend sans dire un mot, me contentant de l’écouter, me familiarisant à nouveau avec cette voix qui m’était autrefois si précieuse. Elle, elle n’a pas changé. « Ou peut-être que j’ai juste enfin trouvé la parfaite occasion de me venger en empoisonnant ta nourriture … » Pendant un court instant, mon geste se coupe net, arrêtant le chemin de ma cuillère en direction de mon assiette. Je relève le regard vers elle, sans aucune peur pourtant, mais me délecte sans tarder de son rire amusé. « Je suis sûre que tu as aussi mis de la drogue dans mon verre, pour abuser de moi d’ici une heure ou deux. » Ça, peut-être que c’était en trop. Je me rends compte de mes mots et me rends compte que je ne peux de toute manière pas les récupérer, alors je décide de m’enfoncer. « Les flics aujourd’hui, c’est plus ce que c’était… » A mon tour de rire un peu, finissant de servir nos assiettes.
Après une courte accalmie, je lui demande de ses nouvelles, sur un ton plus posé, bien que très intéressée par la réponse. « Ça va. J’ai troqué ma carrière de dépanneuse pour retrouver les forces de l’ordre. C’était le bon choix je pense. » Un léger sourire étire le coin de mes lèvres face à son don naturel pour tenter de détourner la vérité et ne pas se livrer pleinement. « Je suis sûre que la salopette pleine de cambouis t’allait bien pourtant… » Je bois une gorgée de ma bière avant qu’elle ne pose à son tour une question. Ma voiture. Je hausse les épaules. « Elle est au garage, je sais pas ce qu’ils vont pouvoir en faire. En attendant ils m’en ont prêté une, pas beaucoup mieux. Je fais avec les moyens du bord ! » dis-je en déplaçant les aliments dans mon assiette. Je relève les yeux vers elle, croisant son regard avec une certaine intensité. « Ne te moque pas. Les habitudes ont la vie dure. » Je l’ai vue regarder mon assiette. Déjà à l’époque elle se foutait de ma gueule. « Je te rassure, j’ai arrêté de trier mes vêtements par couleur, et de les étendre avec des épingles identiques. Je me soigne. » Je ris un peu, mais me sens vraiment heureuse de retrouver une certaine complicité naturelle. Tout ce dont je me rends compte, c’est qu’elle a toujours ce charisme qui m’a plu dès le premier jour où je l’ai rencontrée. Certaines choses ne changent pas, heureusement.

A ta petite ‘blague’ faisant non subtilement référence au passé, Neela se stoppe net. La cuillère dans l’air, à mi chemin entre l’assiette et sa bouche. Tu as du mal à te retenir de lâcher un petit rire. Son regard croise le tien alors qu’elle aussi se permet cet amusement qui t’avait pourtant tant déchiré par le passé. Elle n’a pas peur. Ne doute pas une seconde. Au contraire, elle renchérit. Fidèle à elle-même. Tu n’aurais même pas du en être surprise. « Je suis sûre que tu as aussi mis de la drogue dans mon verre, pour abuser de moi d’ici une heure ou deux. » Un éclair vient te fendre le ventre sans crier gare. Tu déglutis, la gorge soudainement légèrement plus étroite. Oh-Oh. Danger … Et en même temps, le plaisir de ce jeu retrouvé te grise. Il ne devrait pas. Toujours pas. Mais depuis que tu l’as recroisée, tu n’as pas encore vraiment pris de bonnes décisions. Tu n’as pas été prudente. Tu t’approches d’un feu duquel tu connais pourtant bien les brûlures. Il faut croire que tu n’es rien d’autre qu’un insecte voué à se griller les ailes dans sa lumière …
Le ton plus assuré et le regard plus appuyé qu’il ne faudrait, tu te contentes de répondre comme une évidence : “Et moi je suis sûre que pour ça, je n’aurais besoin d’aucun poison …” Vos yeux s’agrippent l’un à l’autre deux secondes. Deux longues et profondes secondes avant que vous ne tentiez de repartir sur des bases plus neutres.

Vous reprenez des nouvelles l’une de l’autre. Plus comme une convention qu’autre chose. Car ni l’une ni l’autre ne semble livrer les vérités les plus profondes de son quotidien. Du moins pas toi. Ce n’est pas dans tes habitudes et - l’air de rien - un voile de retenue et de protection semble flotter entre elle et toi. Peur de te mettre complètement à nu. Peur de perdre pied. Peur d’avoir mal à nouveau. Peur enfouie et dont tu as à peine conscience. Assez présente pour ne pas joué carte sur table, mais pas assez pour t’empêcher de t’engager sur un terrain miné. Le comble n’est-ce pas ? « Je suis sûre que la salopette pleine de cambouis t’allait bien pourtant… » Elle lâche ce genre de petites phrases avec autant d’aisance qu’à l’époque. Neela a toujours été tout autant charmante que charmeuse. Des fois même à son insu. C’était sa personnalité. Et probablement ce que tu avais autant aimé chez elle. Ce naturel si … envoutant et que tu avais pu faire tien pour un temps. Une belle victoire n’est-ce pas … ? Tu ne réponds rien d’autre qu’un sourire en coin  et ses quelques mots : “J’avais mes fans, oui …” Bon. Moving on ! « Elle est au garage, je sais pas ce qu’ils vont pouvoir en faire. En attendant ils m’en ont prêté une, pas beaucoup mieux. Je fais avec les moyens du bord ! » Lorsque Neela redresse le regard vers toi, c’est une mine amusée qu’elle observe. Tu tentes de retenir ton sourire, lèvres pincées. « Ne te moque pas. Les habitudes ont la vie dure. » Clairement ! « Je te rassure, j’ai arrêté de trier mes vêtements par couleur, et de les étendre avec des épingles identiques. Je me soigne. » Elle rit. Toi aussi. Tu te délectes de ce moment de partage. De cette complicité retrouvée. Tu dévores le son de son rire, observant avec une pointe d’effroi que le manque n’avait jamais réellement et entièrement disparu. Il était juste caché et presque invisible. De l’entendre aujourd’hui, de constater la joie que cela te procure, te prouve qu’au fond, Neela a toujours compté. “Waw. Plus de 10 ans … quelle avancée” lâches-tu le ton moqueur avant de venir picorer ton assiette et, surtout, boire une gorgée de ton verre. Cette fois plus sérieusement, tu la regardes en haussant les épaules : “Tu peux prendre la mienne en attendant.” C’est sorti presque tout seul. A nouveau, c’est une mauvaise idée. “La voiture.” Nouveau haussement d’épaules. Comment pourrais-tu expliquer cette disparition temporaire de ta voiture à Sol ? Et pourtant, tu t’enfonces avant même que Neela ne réponde quoi que ce soit. “J’ai ma moto et une flotte de quatre roues au poste. Puis y’a celle de ma coéquipière.” Ta fourchette remue ton assiette bien plus que tu ne manges. Tu n’y arrives pas vraiment. La faim semble avoir quitté ton corps. Pour ainsi dire. Par contre, ton verre descend et se lie aux deux comprimés de codéine avalés plus tôt. Tu te sens plus légère, plus à l’aise. Les garde-fou se brouillent … “J’aurais pas vraiment envie que tu te retrouves au bord d’une nouvelle route de campagne à la merci du premier venu. J’aurais pas vraiment envie non plus de me faire voler mon rôle de ‘sauveuse’ …”

feat. @Neela Barnett

Je m’amuse que Sana prenne des nouvelles de ma voiture. Après tout, c’est grâce à elle que nous avons renoué, et que donc, je suis ici ce soir. Je ne la remercierai jamais assez d’avoir claqué au milieu de cette route. Disons que ça fait passer la pilule un peu mieux. Je remercie aussi la vie d’avoir poussé Sana à emprunter cette route à cette heure précise. Rien n’est dû au hasard, je le sais depuis longtemps, mais encore plus depuis ces retrouvailles avec mon premier amour. Le dîner se poursuit, et je sens le regard insistant de la jeune femme au moment où je commence à trier les aliments dans mon assiette. Je me défends du mieux que je peux, mais ça la fait rire. Est-ce qu’elle se fout de moi ? « Waw. Plus de 10 ans … quelle avancée » lâches-elle cyniquement. Je récupère un petit pois dans mon riz cantonnais et lui jette à la figure en riant. Je ne joue pas avec la nourriture d’habitude, mais là, elle l’a bien mérité. Sans plus attendre, elle me propose d’utiliser ‘la sienne’. Je ne comprends que lorsqu’elle précise que c’est de sa voiture dont elle parle. « J’ai ma moto et une flotte de quatre roues au poste. Puis y’a celle de ma coéquipière. » Pourquoi quand elle parle de coéquipière j’ai un espèce de pincement au coeur. Comme une sorte de jalousie qui n’aurait pas lieu d’être. Je trouve néanmoins que sa proposition est très gentille, je ne suis pourtant pas sûre que ce soit une bonne idée que j’accepte. Comment expliquer à ma femme que la voiture que je conduis - et qui est franchement mieux que celle que le garage me prêtait - appartient à mon ex petite amie, mon premier amour. Il n’y aurait pas meilleur moyen pour la voir sortir de ses gonds. C’est déjà assez fréquent entre nous ces derniers temps, je ne voudrais pas tenter le diable. « J’aurais pas vraiment envie que tu te retrouves au bord d’une nouvelle route de campagne à la merci du premier venu. J’aurais pas vraiment envie non plus de me faire voler mon rôle de ‘sauveuse’ … » Oh. Nous y voilà. Pourquoi mon coeur s’emballe-t-il d’un seul coup ? Je souris et baisse la tête, pour rougir très légèrement en espérant que rien ne se remarque. « Ne t’en fais pas, l’honneur est sauf, tu seras toujours ma sauveuse. Et je ne compte pas emprunter cette route à nouveau, encore moins avec un vieux tacot. » Je ne vais pas défier le destin une nouvelle fois. A moins d’être sûre que ce soit pour la voir débarquer à nouveau sur son deux roues. « J’ai vraiment eu de la chance que ce soit toi… » dis-je légèrement pensive. Pas seulement parce que j’aurai pu tomber sur une personne mal intentionnée, mais surtout parce que c’était elle, et que je n’aurai pu espérer mieux, même dans mes rêves les plus fous. « Je veux bien utiliser ta voiture, le temps que la mienne retrouve sa jeunesse. J’espère que ce ne sera pas long. » Je vois une gorgée de mon verre et précise. « Et puis, ça me donnera l’assurance que je te reverrai, après ce soir. » Je lui offre alors un léger sourire, lourd de sous-entendus.

Alors que Neela replonge le nez dans son assiette, il te semble la voir légèrement rougir. Ton sourire en coin traduit de ta satisfaction, de ce plaisir de la comprendre toujours sensible à tes charmes. C’est une petite victoire de savoir que tu ne la laisses toujours pas indifférente. Dans le scénario idéal, l’inverse ne serait pas réciproque. Quelque part, ce serait là ta plus belle victoire. Mais la vérité résidait ailleurs … Car de la voir là, chez toi, manger à ta table, te sourire, rire avec toi et rougir lorsque tu la flattes, … ça te fout les papillons dans le ventre. « Ne t’en fais pas, l’honneur est sauf, tu seras toujours ma sauveuse. Et je ne compte pas emprunter cette route à nouveau, encore moins avec un vieux tacot. » ’Toujours sa sauveuse’. Les mots prononcés dans sa bouche prennent un sens plus profond encore. Tu l’avais toujours été à l’époque. Neela pouvait compter sur toi. Tu mettais un point d’honneur à ce qu’elle se sente toujours en sécurité. Peu importe les situations rocambolesques dans lesquelles vous vous foutiez des fois. Au final, malgré le temps et les années, ce fait n’avait pas franchement changé. Sans même connaitre la femme qu’elle était aujourd’hui, tu le ressentais au fond des tripes : tu ne pourrais en aucun cas la laisser livrée à elle-même et/ou en potentiel danger. C’était tout bonnement inconcevable. Bien que ton badge t’en confère le pouvoir, tu ne jouais pas spécialement les gardes rapprochées avec toutes les jolies paires de jambes qui passaient. Tu pouvais certes en profiter, mais le reste, très peu y avait droit. Il y avait juste eu Neela et puis … Sol. Les seules et uniques à avoir eu droit au traitement complet. « J’ai vraiment eu de la chance que ce soit toi… » Tu clignes lentement, laissant un sourire plus franc s’établir sur ton visage. De la chance. Tu avais envie de dire pareil mais seul l’avenir vous confirmerait ou non si tel était bien le cas. Tu termines ton verre et grignotes du bout de ta fourchette. “Je pense que je devrais aussi te dire merci car j’étais franchement en excès de vitesse. Tu m’as forcé à ralentir la cadence et tu m’as peut-être évité une sortie de route un peu mouvementée” Tu lâches un petit rire, sachant parfaitement que le risque encouru n’était pas une exception chez toi. Il y en avait eu auparavant et en aurait d’autres par la suite également. « Je veux bien utiliser ta voiture, le temps que la mienne retrouve sa jeunesse. J’espère que ce ne sera pas long. » Elle accepte. Une légère surprise doit se lire sur ton visage. Bien que la proposition ait été sincère, tu doutais qu’elle ne soit prise au sérieux. “Prends tout le temps qu’il te faudra. Vraiment.” Tu te lèves et quittes la table. Tu rejoins le couloir d’entrée et plonges la main dans le vide poche. De retour à ta place, tu déposes la clé de la jeep au centre de la table. « Et puis, ça me donnera l’assurance que je te reverrai, après ce soir. » Son sourire décroche une flèche qui t’atteint en plein dans les entrailles. Ta main sur la clé que tu as continué de glisser vers la brune, finit par entrer en contact avec celle de Neela. Tu n’ôtes pas tes doigts de suite. Comme paralysée. Envie de sentir ce contact se prolonger. La chaleur de sa peau sur la tienne. D’ailleurs, de manière douce et presque imperceptible, ton index et ton majeur s’échappent du métal pour rejoindre les phalanges de ton ex avec lesquelles tu joues doucement. Quelques secondes à peine avant que tu n’arrêtes. A contre coeur. Tu laisses ton dos retrouver le dossier de ta chaise en expirant profondément mais silencieusement. Tu déposes tes couverts en travers de ton assiette, capitulant l’idée de te nourrir correctement ce soir.
A nouveau, te voilà debout sur tes deux jambes. “Bouge pas” Tu disparais dans l’encadrement de la porte et files à l’étage. Apres quelques minutes de fouilles, tu redescends, un bout de tissu en main. Tu le tends finalement à bout de bras. Le tee-shirt déplié a tout du vintage. Le ton légèrement amusé, tu expliques : “Je t’avais dit l’avoir brulé …” Un des vêtements préférés de Neela à l’époque. Vous le portiez l’une et l’autre à tour de rôle, mais lors de votre rupture, la peine et la colère t’avaient poussé à le lui cacher. Surtout ne pas lui rendre. C’était risible mais tu estimais qu’elle ne le méritait plus.

feat. @Neela Barnett

J’aime le sourire qui étire ses jolies lèvres. Peut-être bien qu’il m’avait manqué, celui-ci. « Je pense que je devrais aussi te dire merci car j’étais franchement en excès de vitesse. Tu m’as forcé à ralentir la cadence et tu m’as peut-être évité une sortie de route un peu mouvementée » Mon rire se mêle au sien. « Ok, tu es peut-être encore en vie grâce à moi, je prends. » C’est plutôt une belle idée. Elle est ma sauveuse, et moi la sienne, d’une certaine façon.
Finalement, après une courte hésitation, j’accepte d’utiliser sa voiture un certain temps, que je n’espère pas trop long, pour ne pas qu’elle en soit privée trop longtemps, au cas où. Elle dit ne pas en avoir l’utilité, mais on ne sait jamais. Elle me rassure, me laisse tout le temps dont j’en aurai besoin. Mais je me connais, je sais que je n’abuserai pas. Je sais accepter une main tendue, ce n’est pas pour autant que j’abuse de la gentillesse des gens.
Sana se lève pour aller chercher les clés de sa voiture, du moins j’imagine, l’entendant fouiller dans le vide-poches à l’entrée. Elle revient, me tendant les clés que je récupère, en profitant pour caresser sa peau, peut-être avec un peu trop d’insistance. Je rêve ou elle en fait de même ? Cette sensation est plus agréable qu’elle ne le devrait, je le sais, au fond de moi. Pourtant, ça fait un bien fou. Mon ventre me chatouille, il y a bien longtemps que je n’ai plus ressenti ce genre d’émotion, et je le déplore.

Sana se lève à nouveau, et je ne la quitte pas des yeux. Je ne dois pas bouger, c’est ce qu’elle me demande. Alors je m’exécute. Je ne vois pas bien pourquoi je me serai levée pour la suivre, ce serait déplacé, je crois. Elle revient quelques minutes plus tard, quelque chose entre les mains. Lorsqu’elle le déplie pour me montrer ce que c’est, j’ouvre grand les yeux. « Je t’avais dit l’avoir brulé … » « Mon t-shirt des Guns ! » Un de mes groupes préférés de l’époque, et même encore aujourd’hui, il m’arrive d’écouter leur musique, plus par nostalgie qu’autre chose. Je me lève près d’un bon et lui prends - sans aucune forme de rancune - le tissus d’entre ses mains. Sans attendre, je le porte à mon visage et respire l’odeur dont il a hérité, après tant d’années. Il sent Sana. Sa lessive peut-être, ou tout simplement elle. J’en conclus qu’il n’étais pas dans une boîte, enfermé depuis de longues années. « J’ai pas pleuré quand tu m’as dit l’avoir brûlé, mais je suis contente de voir qu’il est toujours là. » Si elle a menti, c’est qu’elle voulait le garder, et elle ne l’a toujours pas jeté. Cette attention me touche. Preuve qu’elle n’a jamais vraiment tiré un trait sur notre histoire, qu’elle en garde quelques bons souvenirs. « Tu peux le garder, si tu veux. J’avais fait un croix dessus, depuis longtemps. » Je lui offre un doux sourire et étends le morceau de tissus devant sa poitrine. « Hum, ouais, il te va toujours aussi bien. Mieux qu’à moi. » Il faut dire que j’ai changé de style depuis le temps. Ce qui n’est pas tout à fait son cas…

Ton retour fait son petit effet. Tu as toujours le vêtement à bout de bras et Neela ouvre aussitôt de grands yeux. « Mon t-shirt des Guns ! » Elle se redresse d’un bond spontané, sourire aux lèvres alors que le tien ne semble plus désirer te quitter. Qui l’eut cru … ?! Tu la laisses s’emparer du tissu et l’observes le porter à son visage. Ton regard se veut plus tendre encore alors qu’elle prend le temps de le respirer. Un réflexe. Tu t’en doutes bien. Mais son geste t’anime soudainement. Tu peux tout aussi bien imaginer le visage de ton ex venir se blottir dans ton cou. Te respirer. S’imprégner ton odeur. A peu de chose près, c’était exactement ce qui venait de se passer. Ce t-shirt n’était pas une simple relique. Il continuait de vivre. Tu le portais encore. De temps en temps. Pour dormir ou pour une journée relax à la maison. Il représentait un bout de ton quotidien, de ton intimité, … Il était désormais tien. Un point c’est tout. Avec tout ce qui faisait de toi, la personne que tu étais. Ton environnement, tes odeurs, … « J’ai pas pleuré quand tu m’as dit l’avoir brûlé, mais je suis contente de voir qu’il est toujours là. » Vos regards se croisent et se parlent, quelque part au-delà de vos consciences. Tu l’as maintenant bien compris, et ce, depuis vos retrouvailles sur le bord de cette route. « Tu peux le garder, si tu veux. J’avais fait une croix dessus, depuis longtemps. » Tu n’as pas vraiment le temps de rétorquer, ni même de réfléchir à ce que tu aurais réellement désiré que les mains de Neela entrent en contact avec tes épaules. Ton cerveau cesse instantanément toute activité ‘élaborée’. Neela étend le tee-shirt devant toi, visualisant ainsi la vue qu’elle aurait si tu le portais. « Hum, ouais, il te va toujours aussi bien. Mieux qu’à moi. » Tu ne crois pas un mot de ce qu’elle dit. Mais très franchement, là tout de suite, tu t’en fous royalement. Il n’y a plus grand chose qui compte. Plus grand chose qui a du sens. Ton esprit s’embue de plus en plus et la brune est autant à blâmer que quelconque substance coulant dans ton sang à l’heure actuelle. Tu te recules d’un demi pas et, dans un geste assuré, te débarrasses de ton haut. Le regard ne pouvant toujours pas quitter celui de Neela, tu reprends place sans dire un mot. Le silence vous envahi et les pupilles de Neela, soudainement immobiles, hurlent tant au danger qu’au désir. Une part de toi se félicite d’avoir provoquer chez elle cette réaction. Presque imperceptible. Mais tu la connais trop bien. Tu aimes la comprendre fébrile. Fragile à ta présence. Cela te rassure de ne pas être la seule dans le même état, à deux doigts de commettre une grosse connerie. Tu te rapproches encore un peu. Juste assez pour t’emparer de la relique et l’enfiler. “Puisque tu le dis …”

feat. @Neela Barnett

Je suis à la fois amusée et véritablement heureuse de revoir ce t-shirt. Plus que ça, je suis surtout touchée qu’elle l’ait gardé tout ce temps. Ce n’est pas rien, c’est un symbole, celui de notre histoire, de notre amour, même s’il n’existe plus aujourd’hui. Ou en tout cas, plus de la même manière. Sana est mon premier amour, mon premier vrai amour, et il est évident que je l’aimerai toujours, d’une certaine façon. Je pensais qu’il ne restait pourtant rien d’équivoque, mais lorsque je la sens s’approcher, et retirer son t-shirt, quelque chose en moi semble vriller. Je ne comprends pas. Mon sang se met à bouillir dans tout mon corps, mes tempes tambourinent au moins autant que mon coeur dans ma poitrine. Qu’est-ce qu’il se passe au juste ?
Sana est face à moi, à quelques dizaines de centimètres à peine, et désormais elle ne porte plus qu’une brassière cachant seulement une partie de son buste. J’aurai voulu pouvoir retenir mon regard de glisser sur elle, mais c’est impossible. Je m’en veux. Mes mâchoires se serrent et je me raidis légèrement lorsqu’elle approche à nouveau. Je peux sentir son souffle buter sur ma peau, alors que de mon côté, je crois que j’ai cessé de respirer. « Puisque tu le dis … » lâche-t-elle tout en s’emparant du t-shirt qui se trouvait encore entre mes mains, puis elle l’enfile sous mon regard, qui ne l’a pas lâchée une seule seconde.
Une fois fait, je ne me retiens pas cette fois de la regarder de haut en bas, avec ce t-shirt. Un sourire étire mes lèvres. « C’est bien ce que je disais. » Il lui va toujours très bien. Mais…
Cette fois, avec dangerosité, c’est moi qui m’approche d’elle, les mains au niveau de son ventre, j’attrape le tissus ample, rapproche les pans que je serre légèrement contre sa peau, retroussant l’étoffe pour qu’elle soit plus près de son corps, dévoilant même le bas de son ventre. C’était la mode au début des années 90. « Tu as toujours eu un joli ventre, ce serait dommage de ne pas en profiter… » dis-je d’une voix semi feutrée, avant de relever les yeux pour plonger mon regard dans le sien. Grave erreur. Notre proximité me retourne le cerveau, je suis prête à faire une grosse bêtise. Son odeur enivre mes narines, je n’arrive plus à contrôler quoi que ce soit. Pitié Sana, pour une fois, sois la raison, évite-nous de faire une connerie…

Tu avais joué avec le feu. Que tu le reconnaisses ou non, volontairement ou non, tu avais bel et bien provoqué l’étincelle et mis le feu aux poudres. Un comble pour celle qui pensait encore avoir tant de ressentiment pour Neela. Au final, peut-être plus tant que ça … Car de la voir là, sous tes yeux, semblait remettre certaines choses en perspectives. Ou plutôt, rendre tout plus flou encore.

Tu te changes devant elle, comme si de rien était, comme si ce simple geste d’antan ne vous remuerait ni l’une ni l’autre. Baliverne ! Au fond, tu savais pertinemment bien ce que tu faisais. Ce regard qu’elle vient de poser sur toi, tu l’attendais, tu l’avais cherché. Et de t’en délecter en cet instant même, tu te rends compte également qu’il t’avait manqué. « C’est bien ce que je disais. »

Tu te rapproches, juste un peu. Elle aussi. Juste un peu plus. De trop. Ta tête te crie de faire un pas en arrière. De t’éloigner. De la repousser. Mais ton corps, lui, n’a de cesse de vouloir se rapprocher d’avantage, frôler le sien. Lorsque ses mains viennent attraper le bas de ton tee-shirt pour le réarranger à sa manière, tu sens ton ventre s’enflammer, ton coeur manquer un battement et tu te maudirais presque d’être aussi faible. « Tu as toujours eu un joli ventre, ce serait dommage de ne pas en profiter… » Ce ventre qui n’en peux plus de crier en silence, ce ventre qu’elle vient caresser du bout des doigts dans son geste. Tu sens ton muscle et ta peau se contracter aussitôt qu’elle te frôle. Bon sang … si la luxure interdite devait être personnifiée, dans ton cas, elle ne pourrait être personne d’autre que Neela. Sa voix est plus posée et ses yeux viennent cette fois délibérément chercher les tiens. Elle les capture dans une étreinte invisible. Un regard profond t’invitant tout autant à l’abandon qu’à la raison.

Mais il n’était pas question de raison ce soir n’est-ce-pas ? Tu mords un moment ta lèvre inférieure avant de lâchement succomber à la tentation. Une de plus. Une fois de plus. Mais celle-ci possédait une saveur tout particulière. Tu n’aurais pu passer à côté même en le désirant du plus profond de ton être. C’en était devenu presque chimique. Tu étais dans l’impossibilité de faire marche arrière. Tu te penches, glisses une main dans la nuque de Neela et réduit le vide entre vous à néant. Ta bouche retrouve la sienne, tes mains sa peau, ses courbes. Ce baisers est emprunt d’une saveur émotionnelle toute aussi douloureuse que parfaitement délicieuse. Tu avais envie de te perdre en elle. Réouvrir, le temps d’une nuit, la porte d’un passé révolu. Tu la voulais contre toi, à toi, et ton corps se charge de lui faire comprendre. Tes mains glissent le long de son corps et finissent par venir attraper les siennes. Vos doigts jouent ensemble jusqu’à ce que ta main droite n’entre en contact avec un métal froid. Le contraste est saisissant. Et soudain, ton cerveau sonne l’alerte. Un pressentiment. Une soudaine certitude qui te paralyse et te coupe en plein élan pourtant bien engagé de ta part. Tu avais lâché les armes et te voilà prise au dépourvu, forcée de ramasser à la hâte ce qui pourrait te tomber sous la main pour te protéger. Trop tard ? Tes lèvres quittent les siennes, ton regard plonge et vient confirmer le tout. Trop tard. La main de Neela veut s’échapper en un mouvement de recul de réflexe mais tu la retiens. Tu restes calées sur la vision de l’anneau à te demander comment diable tu avais fait pour ne pas remarquer son alliance avant cette seconde …

A quoi t’attendais-tu ? Probablement à ce que la désillusion soit plus tardive. Différente également. Pour le coup, c’était un nouveau poing en plein coeur. En plein ego. La tête encore embuée, tu finis par redresser ton visage : “Mariée hein … ?” Tu lâches un soupir faussement amusé. “ Je m’étais arrêtée à ‘c’est compliqué’ " ajoutes-tu, faisant référence à vos retrouvailles de la dernière fois. Tu finis par lâcher lentement les mains de Neela. Mieux valait ne pas tenter le diable. Tu te savais bien assez égoïste pour ne pas toujours t’arrêter à ce genre de convention.

feat. @Neela Barnett

Je sais que ce n’est pas bien. Je le sens en moi au moins autant que la morsure du désir qui est en train de me consumer. C’est comme si je n’étais plus moi-même, La Neela d’aujourd’hui, mariée et mère. Je suis simplement cette fille, attirée par son premier amour. C’est comme si d’un seul regard, elle avait réussi à me faire revenir toutes ces années en arrière, lorsque nous n’étions encore que des enfants, mais éperdument amoureuses. J’oublie tout, je suis une autre, et je ne pense même pas à mal. Comme transportée dans une réalité virtuelle. Alors lorsque Sana s’approche et réduit le dernier espace entre nos corps, fusionnant nos lèvres, je me sen soupirer. Je ne ressens pas encore l’interdiction, la culpabilité. Mais elle ne tardera pas à faire son apparition. Pour le moment je ne suis même pas dans l’instant, en réalité, je suis dans le passé, et c’est justement tout ce qui fait l’excitation du présent. La passion refait surface, l’envie prend naissance, et déjà notre baiser se trouve être plus passionné, plus langoureux, aussi. Mais avant que je n’ai le temps de me rendre compte de quoi que ce soit, la magie s’éteint, comme un rêve qui se fane en un claquement de doigts. Je réouvre les yeux pour tenter de comprendre pourquoi elle est devenue si froide en un si court instant. La frustration se mêle à l’incompréhension. « Mariée hein … ? » demande-t-elle, de manière rhétorique. Machinalement, mon pouce gauche se plie pour venir toucher mon alliance, vissée sur mon annulaire gauche. Merde. Je suis en train de me prendre une claque monumentale, et je ne pense même pas à celle qu’elle vient de se prendre, elle aussi. « Je m’étais arrêtée à ‘c’est compliqué’ » finit-elle par affirmer, visiblement déçue. Je baisse la tête, confuse. « Je… » Soupirant légèrement, je tente de remettre mes idées en place. « C’est compliqué, c’est vrai. Je sais plus trop où j’en suis. » Ma voix se met à trembler, c’est tout ce que je voulais éviter. Penser à mon couple, ma situation. Je ne sais pas où je vais, ni comment, ni même ce que je veux, au plus profond de moi. Je secoue la tête, lasse de me battre contre la situation. « Oui je suis mariée, mais ça se passe très mal en ce moment, j’ai juste… enfin te retrouver m’a simplement donné l’opportunité de ne plus penser pendant un temps, et j’ai… peut-être un peu trop apprécié ça. » Je ne me sens plus légère depuis trop longtemps, et cette partie de moi amputée me manque. Avec Sana, j’ai pu me sentir légère à nouveau, alors que je n’aurai pas dû. « Je suis désolée. J’aurai dû être honnête… » Et maintenant, je ne sais plus où me mettre. « Il vaudrait mieux que j’y aille… » J’ai presque du mal à la regarder dans les yeux tellement j’ai honte à ce moment précis…

Si la frustration avait un nom, elle pourrait porter le tien en cet instant. Ton corps et ton esprit tout entiers doivent se remettre de ce rapprochement et de cette envie qui t’avaient empoigné les entrailles avec tant de force. Tu l’as lâchée mais tu n’as pas bougé. Comme incapable de digérer la nouvelle. Incapable de l’accepter. Incapable d’entièrement faire marche arrière.
Mariée … Au fond, c’était pourtant évident. Tu pouvais aisément comprendre que quiconque puisse tomber raide dingue de Neela. Dingue à en vouloir s’unir pour la vie. Qui sait, dans un univers alternatif, peut-être aurais-tu, toi-même, voulu lui passer la bague au doigt. Mais la vie n’était pas un étalage de ‘si’ ou de ‘peut-être’ et vos routes avaient bifurqué, il y a de cela, bien trop longtemps. Le silence s’installe, tu respires profondément. « Je… » Neela baisse le menton, se dérobe à tes yeux qui ne l’ont toujours pas quitté. « C’est compliqué, c’est vrai. Je sais plus trop où j’en suis. » Sa voix tremble, presque tout autant que ses membres que tu devines soudainement fébriles. Tu détestes la voir dans cet état. Et comme un réflexe enfoui depuis ta jeunesse, tu te sens à nouveau le besoin d’y palier. De jouer les héroïnes. Ce n’est pourtant et clairement plus ton rôle. D’ailleurs, tu aurais préféré ne rien ressentir de tout ça. Tu aurais aimé savourer la victoire personnelle qu’une certaine indifférence envers Neela aurait pu te procurer. Mais non … impossible. Pas avec elle. Pas avec le passé vous liant. Pas avec ses premiers sentiments qui vous brouillaient visiblement toujours l’esprit. « Oui je suis mariée, mais ça se passe très mal en ce moment, j’ai juste… enfin te retrouver m’a simplement donné l’opportunité de ne plus penser pendant un temps, et j’ai… peut-être un peu trop apprécié ça. » Ton esprit agité oscille entre les informations, entre les émotions. La savoir triste ne te plait pas. Tu te questionnes plus que de droit sur ce mariage alors que cela ne te regarde aucunement. Tu aimes également entendre qu’elle ait pu s’abandonner le temps d’une soirée avec toi. Qu’elle ait apprécié. “Un peu trop” dit-elle. L’idée la terrifie alors que, pour toi, ces mots sont plutôt agréables à entendre. Ils sont également dangereux. Bien trop. Bien plus que Neela ne puisse imaginer. Tu te mords la lèvre inférieure et détournes enfin le regard avant qu’il ne te pousse davantage sur le chemin du vice. « Je suis désolée. J’aurai dû être honnête… » Oui et non. Toi-même ignores ce que tu aurais préféré. « Il vaudrait mieux que j’y aille… » Elle piétine, hésite, son regard n’a de cesse de glisser sur toi sans jamais s’y accrocher. Elle fini par te tourner le dos, prête à aller attraper ses affaires et disparaitre. Tu devrais surement la laisser faire mais la voir t’échapper te serre le coeur. Tu sors enfin de ton immobilité et la rejoins dans un élan trop naturel. Ta main se dépose sur son avant-bras. “Attends”. Tu te décales pour lui faire face et laisses ta main glisser jusque’à la sienne que tu finis par récupérer. “Pars pas comme ça, viens” Tu l’entraines à ta suite vers le petit salon. Tu l’invites à s’installer dans le divan alors que tu vous sers deux verres. Un alcool que Neela avait toujours aimé. Du moins par le passé. Tu la rejoins et déposes vos verres devant vous, sur la table basse. “J’voulais pas te mettre dans cet état. J’suis désolée. Si j’avais su, j’t’aurais probablement jamais recontactée. Pas par manque d’envie mais … je me connais un peu trop sur certains points. Ça n’aurait pas été une bonne idée.” Au final, le résultat était le même. Mais jusqu’il y a peu, tu pensais être la seule à te mettre dans l’embarras. Tu inspires profondément avant de venir cueillir ton verre et en avaler une bonne gorgée. “Je suppose que tu as un petit million de potes à qui te confier, surement mieux placés que moi pour t’écouter mais …” Tu hausses les épaules avant de terminer : “Je suis là si tu veux parler. Ou juste déconnecter.” Parce que question “conseils”, tu n’étais pas franchement la bonne porte à qui frapper. Tu détournes le regard, te penches pour re-déposer ton verre et en un souffle bas, tu ajoutes simplement “J’aime pas te voir comme ça” …

feat. @Neela Barnett

Je me sens honteuse. La situation a complètement dégénéré, je ne m’attendais pas à ça. Mais peut-être au final que c’est un mal pour un bien, que cette bague m’a permis de ne pas faire la connerie du siècle, et m’en mordre les doigts jusqu’à la fin de mes jours. Comment j’aurai pu me regarder dans une glace tous les jours avec l’idée d’avoir trompé ma femme. Je lui ai juré fidélité, et voilà où j’en suis. J’ai envie que le sol s’ouvre sous mes pieds pour disparaître. Et d’ailleurs, je ne tarde pas à choisir le chemin de la sortie. Mais Sana me retient. Je sais que ce n’est pas une bonne idée, que je devrais partir, que je n’ai même rien à faire ici. Alors pourquoi son contact me fait-il autant de bien ? « Pars pas comme ça, viens » dit-elle en attrapant finalement ma main. Je sais que je ne devrais pas, mais je n’arrive pas à lui dire non. Au fond, j’en ai probablement trop envie. « J’voulais pas te mettre dans cet état. J’suis désolée. Si j’avais su, j’t’aurais probablement jamais recontactée. Pas par manque d’envie mais … je me connais un peu trop sur certains points. Ça n’aurait pas été une bonne idée. » Je dois comprendre qu’aujourd’hui, Sana ne semble pas avoir de scrupules à sortir avec une femme mariée, ou en couple. Ça ne m’étonne qu’à moitié à vrai dire.
Maintenant assise sur le canapé, comme un retour en arrière - mais un peu plus bizarre - elle me propose de me livrer à elle, même si j’ai d’autres personnes à qui me confier. Je la regarde, surprise, je ne sais pas comment analyser sa proposition. Lui parler de mon mariage qui prend l’eau alors qu’on était à deux doigts de finir la nuit ensemble ? Je me sens plus perdue que jamais. Je n’arrive pas à apaiser ma respiration, mes mains sont moites, et les frotter sur mon jean ne semble pas suffire. « J’aime pas te voir comme ça » Ma gorge se serre et mes yeux s’embuent légèrement. « Y’a pas grand chose à dire, elle est mariée à son boulot avant d’être mariée avec moi. Je la vois de moins en moins et… » Est-ce que je dois parler de Caleen ? Je hausse les épaules. « J’en sais rien, on s’éloigne de plus en plus, on n’arrive plus à se parler sans se gueuler dessus… » Je passe mes mains sur mon visage en soupirant, avant de secouer la tête. « J’ai pas envie de parler de ça avec toi, Sana. » Je suis sincère avec elle. Je suis venue ici pour m’échapper de mon quotidien, pas pour le ramener chez elle. C’est ridicule. « J’ai aucune envie de t’ennuyer avec mes histoires, j’aurai dû t’en parler avant, je sais pas ce qui m’a pris, à quoi je pensais… » Je ne me reconnais pas. « Je suis désolée. »[/color] Peut-être que je lui ai donné un espoir vain, et je m’en veux d’autant plus.