Tous des abrutis, TOUS [Elliot #3]

Je compte bien me venger à la place d’Ellen, puisqu’elle ne le fera pas, elle est trop gentille pour ça. Mais ce mec doit payer pour le lapin qu’il a mis à la rouquine, c’est franchement pas sympa de sa part. Et puis je suis sans doute un peu trop féministe quand on y pense. La discussion s’oriente finalement vers la confidence, chose avec laquelle je ne suis pas très à l’aise. Je préfère de loin poser les questions plutôt qu’y répondre. Alors je lui demande l’air de rien ce qui pourrait être potentiellement son type de mec, au cas où j’en connaisse dans mon entourage. « Dans tes potes hyper branchés qui organisent des fêtes chez papa/maman ? » Je hausse les épaules en riant. « C’est pas ces gars là que je fréquente en général non. C’est pas vraiment mon milieu. En général, je connais pas les gens qui organisent les fêtes, je suis plutôt rameutée par des potes qui s’y invitent. » Je ris un peu, même si c’est pas tout à fait la vérité, il y a quand même un peu de ça. « Et puis j’en ai quelques uns qui se rapprochent plus de ton âge que du mien, alors on sait jamais, je me renseigne ! » Je lui souris un peu et la laisse poursuivre pour me donner sa réponse. « Non en vérité je pense que je n’ai pas d’idéal. Je voudrais juste quelqu’un avec qui ce soit fluide, avec qui je puisse discuter des heures sans trouver le temps long, avec qui j’ai des choses en commun sans en avoir trop, pour en apprendre de lui, ou d’elle d’ailleurs, au point où j’en suis. » Surprise par la fin de sa tirade je m’éloigne un peu pour la regarder avec de grands yeux ébahis. « Elle ? » Alors celle là c’est la meilleure. « Et bah, j’sais pas si c’est moi qui déteint sur toi mais c’est pas joli joli… » Je me fous un peu d’elle mais c’est de bonne guerre. Je ris un peu, mais m’arrête lorsque la discussion revient sur moi. « Et toi, elle ressemble à quoi la femme idéale, à part à Sofia ? » Je fronce un peu mon nez parce que je suis pas la plus à l’aise du monde à parler de ça. « J’ai pas de style non plus. Pas de femme idéale. J’ai pas besoin qu’on ait de points communs, je veux juste que le feeling passe bien. Pour le reste, je m’en fous totalement… » Un haussement d’épaules plus tard, je tente de retourner la situation à mon avantage. « Allez, donne moi trois choses sur toi qui pourraient convaincre quelqu’un d’accepter un rancard avec toi, ou autre d’ailleurs… »

« C’est pas ces gars là que je fréquente en général non. C’est pas vraiment mon milieu. En général, je connais pas les gens qui organisent les fêtes, je suis plutôt rameutée par des potes qui s’y invitent. » « Je vois le genre, t’as vu de la lumière alors t’es entrée. » Me foutant un peu d’elle au passage, mais je sais pertinemment qu’Eliot le prendra bien. De toute façon le jugement des gens, elle s’en contrefous, ça n’est pas son problème, et j’aime ça chez elle. « Et puis j’en ai quelques uns qui se rapprochent plus de ton âge que du mien, alors on sait jamais, je me renseigne ! » « Tu me cherches un petit vieux confortable là ?! » J’hallucine ! Bon, pas que j’ai 20 ans mais un vieux beau, divorcé et riche à milliards non merci. Je les préfère simples et drôles. Mener la grande vie ne m’a jamais vraiment branché. De toute façon avec Loan, on a toujours préféré s’éclater que de rentrer dans un moule, quel qu’il soit. Même si le mien était d’office plus standard.
Je lui donne un peu les critères attendues concernant un homme idéal, ou une femme d’ailleurs. « Elle ? » « Quoi, et pourquoi pas ? » Loan m’a toujours vanté les mérites de l’amour libre, de l’amour auquel on croit et pas des dictats imposés. « Et bah, j’sais pas si c’est moi qui déteint sur toi mais c’est pas joli joli… » « Mais je t’en prie, tu n’as pas le monopole de l’histoire tragico-sexy. » La regardant d’un air de défi. Je dois avouer que son histoire avec Sofia est touchante, et qu’elle est malheureuse comme les pierres depuis qu’elle l’a perdue. Mais elle tournera la page, il le faudra et elle a encore des tas d’histoires à vivre, je crois.
« J’ai pas de style non plus. Pas de femme idéale. J’ai pas besoin qu’on ait de points communs, je veux juste que le feeling passe bien. Pour le reste, je m’en fous totalement… » « Tu es consciente que ça laisse la place à des milliers d’histoires d’amour possibles ? » C’est plutôt une bonne idée ça, non ? Et une bonne nouvelle. Pour elle en tout cas.
« Allez, donne moi trois choses sur toi qui pourraient convaincre quelqu’un d’accepter un rancard avec toi, ou autre d’ailleurs… » Je fais mine de réfléchir, et lui souris, amusée. « Déjà… regarde-moi ça. » Me désignant de haut en bas. « Non, je dirais… Que je suis d’un naturel extrêmement tolérant. Que je ferais un effort pour me faire jolie et que… je sais rouler un pétard. Mais le genre de la mort qui tue, le genre qu’il ou elle n’a connu que dans les années facs. Ça, c’est un foutu argument, crois-moi… » Eliot est trop jeune pour avoir connu la débauche étudiante, et tout ce qui s’y rapporte, si elle avait connu Loan à l’époque de nos études, elle en serait tombée raide amoureuse, à coups sûrs !

« Tu me cherches un petit vieux confortable là ?! » J’éclate de rire ne plus naturellement du monde. « J’ai pas dit vieux, j’ai dit plus vieux que moi ! » Et entre elle et moi, y’a un peu de marge quand même. Elle pourrait peut-être être ma mère, mais bon, franchement j’en ai rien à foutre. Je suis surprise de l’entendre parler d’une potentielle histoire avec une femme. Je lui demande si j’ai bien entendu, mais visiblement oui. « Mais je t’en prie, tu n’as pas le monopole de l’histoire tragico-sexy. » Je ris à nouveau et secoue la tête, amusée. Elle me fait rire. Ses questions sont justifiées, on apprend à se connaître, et j’essaie de répondre au plus juste même si je suis pas des plus à l’aise pour parler de moi. Je fais l’effort, pour elle. « Tu es consciente que ça laisse la place à des milliers d’histoires d’amour possibles ? » Je lui adresse un sourire exagérément charmeur. « Qu’est-ce que tu crois ? C’est un plan élaboré de longue date ! » Et je me mets à rire à nouveau, loin de l’image que j’ai renvoyé à notre première rencontre. A son contact je m’ouvre un peu plus chaque jour, sors de ma zone de confort sans avoir l’impression de me mettre en danger, et c’est agréable. Finalement, à moi de reprendre l’avantage, je lui demande ce qu’elle a à proposer en échange d’un rancard et plus si affinité. « Déjà… regarde-moi ça. » Dit-elle en se désignant en totalité. Je souris de plus belle. « C’est un bon premier argument ! » Bah quoi ? Elle est plutôt pas mal pour son âge ! Je dis pas qu’elle est vieille, elle a juste plus vingt ans, mais c’est aussi ce qui fait son charme. « Non, je dirais… Que je suis d’un naturel extrêmement tolérant. Que je ferais un effort pour me faire jolie et que… je sais rouler un pétard. Mais le genre de la mort qui tue, le genre qu’il ou elle n’a connu que dans les années facs. Ça, c’est un foutu argument, crois-moi… » J’arque un sourcil. « Ah ouais ? » Je feint l’étonnement, même si ça ne m’étonne pas tant que ça. « Je demande à voir quand même. » Mutine, je me lève sous son regard interrogatif, et vais retrouver ma veste, sortant de la poche intérieure zippée un petit paquet d’herbe, et tout ce qu’il faut pour rouler un joint. Je reviens près d’elle et pose devant elle le tout, avant de m’affaler dans le canapé. « Allez, montre ce que tu sais faire ! » Visiblement amusée, elle prend le défi au pied de la lettre et s’applique. « Tu roules seulement ou tu fumes aussi ? » Parce que là, ça peut être intéressant. J’aime bien fumer toute seule pour me détendre, mais à deux c’est carrément autre chose, et on peut partager des trucs assez fous. Je serai curieuse de découvrir la Ellen qui aurait fumé la moitié d’u pétard.

« J’ai pas dit vieux, j’ai dit plus vieux que moi ! » « Et ben ça fait du monde, t’es un bébé ! » Ce n’est pas péjoratif, bien au contraire. C’est une jeune femme, tout ce qu’il y a de plus intéressant. Elle a de multiples facettes que je découvre chaque jour et je prends un malin plaisir à la voir s’épanouir autrement depuis qu’elle est ici. Elle est plus ouverte, plus confiante et surtout, elle est moins dans le rejet d’elle-même. Elle aurait des tas de raisons de s’aimer, elle le peut, et moi-même j’y tiens beaucoup. Je crois que cette maison n’a jamais été aussi vivante et rassurante que depuis qu’elle y a élu domicile. « Qu’est-ce que tu crois ? C’est un plan élaboré de longue date ! » Je ris, parce qu’en plus de ses talents de bricoleuse, elle est franchement drôle. A sa façon, un peu caustique, mais je suis très sensible à tout ça. Je n’apprécie pas franchement la condescendance et je dois dire que le franc parlé d’Eliot me fait du bien.

Quand elle me demande ce que j’aurais à avancer comme argument, je me présente moi-même, pure ironie, parce que l’emballage est un peu passé de mode, et de fraîcheur. « C’est un bon premier argument ! » Concernant le reste de mes qualités, je sais aussi rouler un bon joint accessoirement. C’est ridicule à mon âge. « Ah ouais ? Je demande à voir quand même. » « Génération de petits cons, elle a raison Loan ! » Ils sont tous plus imbus d’eux-mêmes les uns que les autres, ils pensent tout connaître alors qu’ils n’ont même pas connu les années 70, ils ont tout raté. Surtout la révolution sexuelle. Mais ça me fait rire de les voir passer ces générations, à la fac, et de me rendre compte qu’on est tous jeunes et cons à un moment de notre vie.
Je ne pensais simplement pas qu’elle me prendrait aux mots quand elle débarque avec son pochon d’herbes et son matériel. « Allez, montre ce que tu sais faire ! » Je lève un sourcil et hausse les épaules, je peux le faire, si elle le veut. Après tout, j’ai un honneur à défendre là, non ?
« Tu roules seulement ou tu fumes aussi ? » « Tu m’as prise pour qui exactement ? Une vieille prof de fac sénile qui a oublié toute sa jeunesse ? Donne-moi ça. » Je m’applique à faire quelque-chose de joli, et plutôt chargé d’ailleurs… Je ne suis pas irresponsable mais je crois que la taille de ce joint pourrait faire pâlir certains amateurs. Dieu merci, il n’y a que nous deux, talent que je cache quand je suis entourée.
Une fois terminé, je le dépose entre les lèvres d’Eliot et le lui allume. « Alors ? J'ai perdu la main ? » On n’est pas belles là, assises toutes les deux sur le canapé après une soirée foirée, et un pétard entre les mains ? De la drogue, rien de moins, et même si ça n’est pas la première fois, il n’y a rien de moral ou de légal à ce que je suis en train de faire…

 « Génération de petits cons, elle a raison Loan ! » Je me marre un peu, elle parle souvent de sa meilleure amie, du fait qu’elle était - est d’ailleurs encore ? - du genre à draguer tout ce qui bouge, et que je lui aurai plu. Mais à vrai dire, je m’en fous un peu. Pour le moment, je suis concentrée sur Ellen et les conneries qu’elle me raconte. Elle se fait passer pour une femme qui n’a pas grand chose d’intéressant à apporter mais en réalité, elle est beaucoup plus intéressante qu’elle n’y paraît. D’ailleurs, on est en train de parler de rouler un joint, faut le faire quand même ! « Tu m’as prise pour qui exactement ? Une vieille prof de fac sénile qui a oublié toute sa jeunesse ? Donne-moi ça. » Amusée plus qu’autre chose, je lui donne le sachet d’herbe et la laisse me montrer ce qu’elle sait faire. Elle est franchement craquante quand elle est concentrée, et je me prends à la regarder faire en souriant un peu bêtement. C’est vrai qu’elle se débrouille bien ! « Alors ? J'ai perdu la main ? » Elle le glisse entre mes lèvres et allume la flamme pour débuter les hostilités. « De toute évidence, non. Et si tu les roulais tous comme ça, tu devais être un gouffre à fric, et défoncée en 2-2 ! » Ça me fait rire, elle l’a bien bien chargé. Mais ça va, une fois de temps en temps, ça ne sera que plus marrant. Je tire une première latte et plisse un peu les yeux. Ça faisait un moment que j’avais pas fumé d’herbe, et ça pourra pas me faire de mal. Je lui tends finalement le calumet de la paix pour la laisser tirer dessus à son tour. J’initie un rapprochement - inconscient - en lui demandant qu’elle me fasse une soufflette, je m’attendais à devoir lui expliquer mais de toute évidence je n’ai rien à lui apprendre. Une fois le joint terminé, je me laisse tomber, la tête sur ses cuisses, et je joue avec le bout de ses cheveux roux. « Tu m’as pas raconté, pourquoi t’es toute seule ? » Je crois que c’est encore le meilleur moment pour parler de ce genre de choses, lorsque les sensations sont altérées… Je reste là à la regarder, bloquant sur chaque détail de son visage, de sa peau, ses petites tâches de rousseur qui sont vraiment trop mignonne…

« De toute évidence, non. Et si tu les roulais tous comme ça, tu devais être un gouffre à fric, et défoncée en 2-2 ! » « Je les roulais tous comme ça et j’avais des amis très bien placés figure-toi.  Le fric c’était leur affaire et rouler c’était la mienne. Mais ouais, se défoncer, on savait faire. » Je préfère passer sous silence la période où nous révisions nos partiels, ou étions censés le faire. Je crois que la moitié du programme a été ingurgité et envoyé dans nos cerveaux sous l’emprise de la drogue. Mais aux vues de nos résultats, nous n’étions pas si mal. La méthode avait peut être finalement un avenir.
A mon tour de tirer dessus, après avoir obtenu l’aval d’Eliot et quand elle me demande une soufflette, elle paraît même surprise de ne pas avoir à expliquer son terme. Je me place bien en face d’elle, nos visages tout près l’un de l’autre afin de la rendre la plus efficace possible. Le tour est joué.

Eliot fini par s’installer confortablement sur mes genoux, la tête posée sur mes cuisses, croisées en tailleur, adossée contre le dossier du canapé. A soirée perdue, pas pour tout le monde. Elle se met à jouer avec mes cheveux alors que je tire une nouvelle fois sur l’objet du délit. Je dois lui reconnaître avoir du goût, et un sacré pour ce genre de choses.
« Tu m’as pas raconté, pourquoi t’es toute seule ? » Oh, la question à trois millions. « Oh… » Je me donne un peu de courage en tirant dessus une nouvelle fois avant de le lui tendre, coincé entre mes deux doigts. « Parce que le karma a eu la bonne idée de n’emporter que mon fils et mon mari… » Je ne suis pas encore assez stone pour me détacher de ma culpabilité. Pour autant, elle me pose une question et je pense que si on doit vivre ensemble, il faut qu’elle soit au courant. « Ils ont disparus dans un accident de voiture. Tous les deux, en même temps. Comme ça, sans prévenir. Le karma je te dis, un putain d’enfoiré. » Je m’affale un peu plus dans le canapé, ma main dans les cheveux bruns de mon invitée, que je caresse avec une tendresse et une douceur que je ne calcule même pas. « Ca fait 6 ans. Télio aurait… 14 ans aujourd’hui. Et au lieu de rouler un joint, je serais sans doute en train de le pister pour savoir si c’est lui qui les roule avec ses copains… » Le regard dans le vide, je tends mes doigts pour attraper le joint et tirer une nouvelle fois à mon tour dessus, puis je lui rends. « Voilà… pourquoi je suis seule. Mais c’est peut-être le prix à payer. Qui sait. » Je ne suis pas larmoyante, je suis laconique, tout simplement. Comme un constat que je fais sur ma propre existence, nécessaire pour avancer. Et ma main parcours toujours les cheveux d’Eliot.

Avec ce qu’elle nous a roulé, c’est pas bien compliqué de planer là. Mais je me sens bien, comme il y a longtemps que je ne m’étais pas sentie aussi bien. C’est pas chez Willie que j’aurai pu faire ça, elle est flic. Je suis totalement détendue, allongée sur le canapé la tête sur les jambes d’Ellen. Sans trop réfléchir aux conséquences de ma question, je lui demande ce qui est arrivé à sa famille pour qu’elle se retrouve seule comme ça. « Parce que le karma a eu la bonne idée de n’emporter que mon fils et mon mari… » Je grimace un peu, et la regarde, par en dessous. J’ignore depuis combien de temps elle est seule, mais elle a pas l’air d’avoir fait son deuil. « Ils ont disparus dans un accident de voiture. Tous les deux, en même temps. Comme ça, sans prévenir. Le karma je te dis, un putain d’enfoiré. » Ouais, je connais ça aussi l’enculé de karma. Je viens tendrement glisser mes doigts sur la joue de la rouquine, comme pour lui faire comprendre que je suis là, même sans un mot. « Ca fait 6 ans. Télio aurait… 14 ans aujourd’hui. Et au lieu de rouler un joint, je serais sans doute en train de le pister pour savoir si c’est lui qui les roule avec ses copains… » J’esquisse un sourire à sa manière de ramener les choses à la réalité, mais c’est triste quand même. La pauvre. « Voilà… pourquoi je suis seule. Mais c’est peut-être le prix à payer. Qui sait. » Je secoue la tête. « Le prix à payer de quoi ? T’as fait quelque chose de mal dans ta vie pour mériter un truc pareil ? J’en doute franchement. » A la base, c’est ça le karma. Récolter ce qu’on a semé. Et moi j’ai pas demandé à être abandonnée à la naissance, par exemple. « Et puis, ça a fait de toi une femme forte aussi. » L’air de rien. Je lui adresse un léger sourire et termine le joint qu’elle vient de me rendre dans une dernière taffe. J’écrase le mégot et repose mon regard un peu trouble sur la rouquine. « 6 ans, et t’as pas trouvé un seul mec capable de te satisfaire. Gosh. Ça remonte à loin la dernière fois que t’as pris ton pied ? » C’est un peu osé de lui demander ça mais franchement j’y pense même pas c’est tellement naturel. Et puis je suis pas non plus dans mon état naturel, donc on va dire que j’ai des circonstances atténuantes…

« Le prix à payer de quoi ? T’as fait quelque chose de mal dans ta vie pour mériter un truc pareil ? J’en doute franchement. » Le regard dans le vide, j’entends d’une oreille ce qu’elle me dit, et je me pose la même question qu’elle, je n’ai pas franchement de réponse, tout comme je n’ai toujours pas accepté leur départ. Je ne peux pas prononcer le mot juste, c’est encore trop difficile, même dans ma tête. Je survis depuis des années, je donne le change mais quand parfois je me retrouve seule chez moi, et que les fantômes viennent me visiter, je me rends compte que non, je n’ai pas encore tourné la page et que j’en suis très loin. Je me contente juste de poursuivre ma vie puisque c’est ce que la force supérieur qui nous dirige, si force il y a, a décidé pour moi.
« Pas que je me souvienne. Mais y a forcément un truc que je paye. Ça peut pas être si injuste ou arbitraire. » Et c’est une prof de lettres qui parle. Pour ce qui est de la justice, ce n’est qu’un vaste sujet de philo. « Et puis, ça a fait de toi une femme forte aussi. » « Tu parles, une femme forte, tu la vois où toi ? » Je lui souris légèrement, j’aime ses doigts sur ma joue. Je crois que j’aime toute forme d’affection. J’en manque, ça c’est certain, et puis j’aime qu’elle soit là. Je ne suis plus aussi seule et j’ai quelqu’un avec qui échanger. Eliot peut parler de tout et m’en apprendre sur le monde que je croyais connaître.
« 6 ans, et t’as pas trouvé un seul mec capable de te satisfaire. Gosh. Ça remonte à loin la dernière fois que t’as pris ton pied ? » « Hey, j’ai pas dit ça ! » Me mettant à rire à sa réflexion. « J’ai eu des coups d’un soir très corrects. » Je la rassure en me rassurant moi-même. « Mais personne que je n’ai voulu installer ici. Pas plus d’une nuit ou deux, pour les plus sympas… » Retour à ce regard dans le vide. Je n’ai pourtant pas le délire triste en général, mais c’est sans doute le sujet de notre conversation. « Quant à la dernière fois… ouais, trop loin pour être reluisant. C’est quoi loin pour toi ?... » Levant un sourcil inquiet. Je sais que la vie sexuelle de ma meilleure amie est active, et que loin pour elle s’approche de la semaine ou deux sans activité conjugale. Mais je serais curieuse de savoir ce qu’Eliot appelle une pénurie.

Je me tente à poser les questions qui me trottent, parce que je me dis que c’est encore le meilleur moment, maintenant qu’on est en train de planer. Elle l’a bien chargé c’est clair. Elle m’explique, l’accident, le fait qu’elle soit veuve depuis tout ce temps. Elle a l’air de s’en vouloir, de penser qu’elle l’a mérité, et ça me fait mal au coeur. J’essaie de lui faire prendre conscience que tout ça l’a endurcie aussi, a fait d’elle une femme forte, forte parce qu’elle est encore debout, là où d’autres aurait jeté l’éponge. « Tu parles, une femme forte, tu la vois où toi ? » Je lui rends son sourire et continue de caresser son visage. « Là… là… et là aussi… » mon index glisse sur sa joue, son nez, son front, sa pommette de l’autre côté puis ses lèvres. « Partout. Je la vois partout. » J’essaie de lui remonter un peu le moral, j’apprends à la connaître aussi. J’espère juste qu’elle est pas du genre à planer-déprime. Alors je reprends la parole, sur un ton plus léger, pour la taquiner un peu sur son activité sexuelle. Depuis le temps. « Hey, j’ai pas dit ça ! J’ai eu des coups d’un soir très corrects. Mais personne que je n’ai voulu installer ici. Pas plus d’une nuit ou deux, pour les plus sympas… » Je souris, presque victorieuse. « Oh, alors j’en ai de la chance !! J’suis installée là alors que tu sais même pas si j’suis un coup d’un soir correct ou pas. » Je me marre un peu alors qu’elle reprend pour cette fois répondre véritablement à ma question. « Quant à la dernière fois… ouais, trop loin pour être reluisant. C’est quoi loin pour toi ?… » Je me laisse un instant de réflexion et fais une petite mine pensive. « Hum. Disons que ça dépend un peu quand même. Pour moi une semaine c’est déjà trop. Mais on a pas le même âge ni la même façon de voir les choses… » Non et puis, j’ai toujours eu des besoins assez conséquents à ce niveau là, sans doute pour continuer de penser que je suis assez bien dans un domaine. C’est même pas une question de prendre mon pied, mais plutôt de le faire prendre aux filles que je rencontre. « Mais si ça dépasse un mois, là ouais franchement tu dois être rouillée c’est pas possible ! » Je ricane à nouveau et me redresse un peu pour la regarder, plus sérieusement. « Quoi ? Ça fait plus d’un mois ? Deux mois ? Trois mois ? Six mois ? » Je continue d’énumérer tant qu’elle ne valide pas, et je commence à prendre peur. « Putain arrête, mais ta libido doit être au fond de tes chaussettes ma pauvre ! » Je sais même pas comment elle peut tenir aussi longtemps. « J’espère que tu te satisfait toute seule, un minimum quoi ! » Oui, zéro filtre. Je suis comme ça !

« Là… là… et là aussi… » Elle pose le bout de ses doigts sur mon visage et ça chatouille. Il faut dire aussi que je suis parfaitement défoncée. « Partout. Je la vois partout. » Elle parvient à me faire sourire, même si je ne sais pas pourquoi je devrais le faire étant donné que je viens de révéler une partie de moi que seule Loan connaît. « Oh, alors j’en ai de la chance !! J’suis installée là alors que tu sais même pas si j’suis un coup d’un soir correct ou pas. » « A en croire tous ceux qui te tournent autour, ou celles d’ailleurs… C’est que ça doit être quelque-chose… » Tirant une dernière taffe sur le mégot qu’elle me tend.
On bifurque finalement sur mon désert sexuel. Non, sérieusement ? Après tout, pourquoi pas, c’est un sujet comme un autre et je suis assez ouverte d’esprit pour parler de n’importe quoi. C’est que je ne dois pas avoir encore totalement perdu la main pour tout ça. « Hum. Disons que ça dépend un peu quand même. Pour moi une semaine c’est déjà trop. Mais on a pas le même âge ni la même façon de voir les choses… » « Voilà, on n’a pas le même âge. Tu vois que ça compte d’une façon ou d’une autre. » Simple constatation, en passant ma main dans ses cheveux qui forment des vagues brunes sur mes genoux.
« Mais si ça dépasse un mois, là ouais franchement tu dois être rouillée c’est pas possible ! » Je fronce les sourcils, sans répondre, qui a pour effet de visiblement beaucoup l’inquiéter. « Quoi ? Ça fait plus d’un mois ? Deux mois ? Trois mois ? Six mois ? » Elle poursuit et quand elle arrive à presque 8 mois je la stoppe. « Oui, ben écoute, si je répondais à tous les petits étudiants qui me draguent sans regarder, je m’enverrais sans doute un peu plus souvent en l’air. » Je constate et je reconnais, seulement ça n’est pas censé se passer tout à fait comme ça. Son regard sur moi tend à changer radicalement. « Putain arrête, mais ta libido doit être au fond de tes chaussettes ma pauvre ! » « J’ai arrêté de chercher où elle se trouvait… » Les yeux dans le vague, je constate, encore une fois. J’ai plus de 50 balais, elle peut entendre que je ne sois pas aussi énergique qu’à l’époque de mes 20 ans. « J’espère que tu te satisfait toute seule, un minimum quoi ! » « Oui… tout va bien de ce côté-là, je te remercie. » Non mais je tiens quand même à rappeler que je ne suis pas totalement au fond du gouffre et malheureuse non plus, je me maintiens. Fierté oblige. « Si je te disais que j’ai besoin d’une connexion, en tout cas que j’en ai envie. Et qu’au lieu d’un inconnu, je préfère attendre quelqu’un avec qui il se passe réellement quelque-chose. Pas le grand amour, juste un petit quelque-chose. » Ca y est, je me mets à philosopher. Purée. « Je meurs de faim. » Les fringales d’après défonce, forcément.

 « A en croire tous ceux qui te tournent autour, ou celles d’ailleurs… C’est que ça doit être quelque-chose… » J’arque un sourcil, alliant à cette mimique un sourire mutin. J’avoue qu’il ne m’est encore jamais arrivé de ne pas faire grimper une femme aux rideaux, et sans vouloir me vanter, je crois que je suis plutôt bonne dans ce domaine. Mais je n’en dirai pas plus. J’essaie de savoir depuis quand elle n’a pas eu de relation avec un mec, et elle me demande quel est mon seuil à moi, pour que ça semble être ‘trop longtemps’. « Voilà, on n’a pas le même âge. Tu vois que ça compte d’une façon ou d’une autre. » Je secoue un peu la tête, dépitée qu’elle revienne sur le sujet, et continue de la titiller pour savoir exactement depuis combien de temps. J’augmente les mois, de plus en plus choquée alors qu’elle ne m’a pas encore arrêtée. Huit mois. Gosh. Elle doit être rouillée j’en ai peur. « Oui, ben écoute, si je répondais à tous les petits étudiants qui me draguent sans regarder, je m’enverrais sans doute un peu plus souvent en l’air. » Je souris de plus belle. « Pourquoi tu t’en empêches ? » Ça pourrait pas lui faire de mal. Les p’tits jeunes ça pourrait lui redonner un coup de fouet, une nouvelle libido, j’en sais rien. Je lui demande d’ailleurs si cette fameuse libido ne se trouverait pas dans ses chaussettes, et sa réponse me fait rire. Je cherche quand même à savoir si elle sait a moins se satisfaire seule, en attendant. « Oui… tout va bien de ce côté-là, je te remercie. » Je me marre un peu, légèrement rassurée d’entendre cette réponse. même si à cet instant précis je me mets à l’imaginer en train de se toucher sous la douche et j’avoue que ça me fout un petit coup de chaud d’un seul coup. « Si je te disais que j’ai besoin d’une connexion, en tout cas que j’en ai envie. Et qu’au lieu d’un inconnu, je préfère attendre quelqu’un avec qui il se passe réellement quelque-chose. Pas le grand amour, juste un petit quelque-chose. » Je hausse un peu les épaules. « Je comprends. » Moi j’ai pas toujours besoin de ça, même si c’est tout de suite plus agréable, on est d’accord. « Je meurs de faim. » « Je ne suis pas comestible. » que je lâche instinctivement avant de rire un peu. « Enfin pas tout à fait. » Je ris encore un peu et me relève doucement en prenant soin que ma tête ne tourne pas trop. « Tu me laisses te faire mon sandwich spécial défonce, le Eliot Sandwich ? » Elle va pas l’oublier celui là. Elle me laisse faire et nous allons toutes les deux dans la cuisine. Je sors le pain de mie, le beurre de cacahuète, et les tortillas. Oui. « Ça, c’est de la grande cuisine. » Je referme le pain, coupe le sandwich en deux dans deux triangles presque égaux, et lui tend la moitié avant de croquer dans le mien. « Y’a que quand j’suis défoncée que j’peux manger ça. » Et ça me fait rire. Je me hisse sur le plan de travail et mange ma tartine avec appétit, attendant qu’Ellen goûte le sien, même si je suis presque sûre qu’elle va pas aimer.

Une génération d’écart, tu m’étonnes que ça finisse par peser. Nous n’avons plus la même vision des choses et si j’avais la sienne quand j’avais son âge, force est de constater que j’ai passé tout ça. Même Loan s’est rangée des voitures avec Stella, enfin presque… je dis bien presque. Elle aurait pu ! Quoi qu’il en soit, Eliot est une jeune femme de la nuit, elle aime vivre quand les esprits sont plus ouverts, quand les âmes sont à nues, et je l’ai tout de suite remarqué, sans doute son côté constamment à fleur de peau, prête à exploser, mais cherchant désespérément à se contrôler pour ne pas tout foutre en l’air. Des fois ça foire, comme la fois avec Sophia sans aucun doute. Et c’est pour ça qu’elle est ici. Elle est plus fragile qu’elle ne veut bien le prétendre, et si elle a besoin de reprendre des forces en se posant quelque-part, je serais honorée d’être son quelque-part.
Eliot me fait savoir qu’elle comprend quand je lui dis que je recherche une certaine connexion avec mon plan cul à venir. Non pas que le détachement soit totalement contraire à mes envies mais ça j’ai déjà donné et ça ne marche pas mieux… J’aime l’humain, c’est sans doute ce qui fait de moi quelqu’un de vulnérable et de naïf.
« Je ne suis pas comestible. Enfin pas tout à fait. » J’éclate de rire. Sa vanne n’était pourtant pas la meilleure mais je crois que je suis plus sensible à tout et n’importe quoi. J’aurais dû y mettre moins de tout ça dans ce joint.
« Tu me laisses te faire mon sandwich spécial défonce, le Eliot Sandwich ? » Je lève un sourcil, surprise. Et la suis dans la cuisine. Spécial défonce, rien que ça. Je demande à voir. Les petites combines d’Eliot qui semblent totalement incongrues se révèlent souvent être d’une efficacité miracle. Je la regarde faire, pourtant sceptique, mais elle est tellement convaincue. « Ça, c’est de la grande cuisine. » « D’accord, alors la prochaine fois que tu rentres du boulot, je vais te faire de la gastro style Paris XVI° tu vas rien comprendre… » A côté de ça, faites un bœuf bourgignon et vous remportez trois étoiles au guide Michelin.
« Y’a que quand j’suis défoncée que j’peux manger ça. » « Je… je peux comprendre. Je dois manger ça ? » Elle me fait signe que oui, et me le tend avec tellement de gourmandise, que je ne peux que l’imiter. « Je dois être carrément hors de mon corps pour te dire que je trouve ça super bon. Y a qu’une femme enceinte pour te suivre dans ton délire sur ce truc-là… » Je ne le suis pas qu’on soit bien claires. Mais les envies de femmes enceintes sont comment dire… honteuses. Et les miennes en particulier.
Je pose soudain mon sandwich et la fixe, enfin fixe une partie de son visage. Ça y est, je suis en plein trip. « Quelqu’un t’as déjà dit à quel point tu étais canon sous la lumière du néon ?... » Ellen… Bois un coup, ça ne pourrait pas être pire. Je suis encore maquillée et apprêtée de ma chemise blanche et de mon pantalon de tailleur. Même mes cheveux sont encore attachés. Mais intérieurement, je suis aussi décontractée qu’un dimanche en jogging… « Et tes yeux… Ils sont combien à résister à leur couleur ? » Et je parcours carrément son visage du bout de mes doigts en l’observant sous toutes les coutures…

Je la fais rire, aux éclats même. C’est une victoire quand on sait que quelques minutes plus tôt elle me parlait de son deuil. Je suis plutôt fière de moi. Je lui propose de lui faire mon sandwich, c’est pas de la grande cuisine contrairement à ce que je lui fais croire, mais ça m’amuse pas mal de me dire que y’a que dans ces moments là que je peux bouffer un truc aussi infecte. « D’accord, alors la prochaine fois que tu rentres du boulot, je vais te faire de la gastro style Paris XVI° tu vas rien comprendre… » Je ris, amusée face à ses références de prof, et elle me demande si elle doit manger ce que je lui tends. Evidemment. « Je dois être carrément hors de mon corps pour te dire que je trouve ça super bon. Y a qu’une femme enceinte pour te suivre dans ton délire sur ce truc-là… » Je continue de sourire de toutes mes dents, fière qu’elle puisse aimer, même si elle n’aimera plus jamais ça après ce soir.

Mais il y a comme un déclic en une fraction de seconde dans son regard et je peine à comprendre ce qui peut bien se passer. Elle me regarde fixement, je termine d’avaler ma bouchée et ne lâche pas son regard, comme pour essayer de comprendre. Elle va pas partir en bad trip hein ? « Quelqu’un t’as déjà dit à quel point tu étais canon sous la lumière du néon ?… » Je ne peux m’empêcher de rire un peu. « Quelqu’un t’a déjà dit que t’avais le potentiel de drague d’un enfant de quatre ans ? » Ça me fait rire mais je trouve ça en même temps super mignon. Elle s’approche encore et instinctivement j’écarte mes jambes pour la laisser de faufiler et prendre place entre ces dernières. Elle laisse glisser ses doigts sur mon visage, je suis pas sûre que ce soit l’idée du siècle. Elle va me donner des envies franchement pas de son âge la quinqua ! « Et tes yeux… Ils sont combien à résister à leur couleur ? » Elle me regarde un peu comme une bête de foire, mais elle est trop près pour que ce soit décent. « Elles. Elles sont zéro. Tu as pris ton ticket ? » Je souris davantage sans rompre le contact de nos regards. « Tu es la prochaine sur la liste… » que je lui murmure à la manière d’une tueuse en série. « Tu sais ce qui est génial quand on est défoncée. Hormis le sandwitch je veux dire…? » Elle continue de me regarder et je souris de plus belle. « Un bain de minuit ! » Je la pousse un peu et saute du plan de travail, attrapant sa main pour la guider jusqu’à l’extérieur de la maison où se trouve la piscine. Ça ne sera que notre 2ème bain de minuit après tout. « Allez, désape-toi, sinon je t’aide ! » Et ce ne sont pas des paroles en l’air.

Je reste persuadée que ça fait bien trop longtemps que je ne me suis pas retrouvée dans cet état pour savoir le gérer. La défonce, en tout cas, ça ne m’était sans doute pas arrivé depuis… la fac ? Ca m’a repris quand je me suis remise à bosser à la fac, une fois mon mari et mon fils… Enfin, une fois seule. Je trouvais ça moins difficile à supporter. La douleur, la solitude, si pendant quelques heures il m’était permis de décrocher. Cependant, je suis assez lucide pour savoir que ce n’est pas un état que je peux me permettre tout le temps. Même si ça me soulage. Alors je fais preuve de courage et d’auto-persuasion et j’avance.
« Quelqu’un t’a déjà dit que t’avais le potentiel de drague d’un enfant de quatre ans ? » « Heu… Oui. Ça on me l’a déjà dit. » Hochant la tête en croquant dans mon sandwich. Loan, il n’y a pas si longtemps, dans sa période intitulée : je vais recaser ma meilleure amie ne serait-ce que pour son amour propre. Et puis ça a fini par lui passer, mais elle a longtemps désespérée, et se demandait même comment j’avais réussi à choper Thomas à l’époque de la fac. Bien que je me sois empressée de lui répondre que c’était plutôt lui qui m’avait choppée, elle n’a pas tant trouvé à redire. Miracle. « Elles. Elles sont zéro. Tu as pris ton ticket ? » « Le ticket… » Je cherche autour de moi, un ticket ? Une raison ? Je ne sais pas en fait, je regarde autour de moi, et j’ignore même ce que je cherche. « Tu es la prochaine sur la liste… » « Oh… Et… C’est une bonne ou une mauvaise nouvelle ?... » Je pourrais la laisser m’enfermer dans son coffre sans me débattre. C’est même très craignos comme comportement… « Tu sais ce qui est génial quand on est défoncée. Hormis le sandwitch je veux dire…? » Notre proximité est telle qu’on ne s’en rend même pas compte, mais elle a l’air plus lucide que moi alors je lui confie toute ma confiance. « Un bain de minuit ! » Elle saute du plan de travail et fonce droit vers la place, elle n’a qu’à traverser la maison et descendre depuis la terrasse. Je la suis, non sans me cogner vertement contre le coin de la table extérieure. « Aïe… » Ca m’énerve, mais je dois suivre Eliot, alors pas le temps de pester contre le matériel. « Allez, désape-toi, sinon je t’aide ! » « On verra à quelle allure tu les retires tes fringues avec 25 ans de plus ! » Je tente de lever la voix pour que mes propos lui parviennent jusque-là où elle est déjà, dans l’eau, noire. Et j’aime pas franchement ça. « J’arrive, ça va ! » Et retirer un slim en tenant à peine debout tient de l’épreuve. Je fini par le retourner et le retirer à l’envers. Tant pis, je le plierais plus tard, ou même pas du tout tient. En sous-vêtements, je rejoins Eliot dans l’eau. « Je vois pas le fond et j’aime pas trop trop ça… » Elle peut sentir la bête d’eau que je ne suis pas là tout de suite. « Tu voudrais pas… revenir vers le bord ? C’est loin là… » Trouillarde ? Pas du tout… Mais j’ai un truc avec l’eau. J’aime voir le fond, je ne suis pas très à l’aise. Allez savoir pourquoi. Toujours est-il que je ne suis pas rassurée. « Y a des tas de trucs qu’on connait pas là-dedans tu sais… » Et je continue mon monologue, attendant qu’elle ne daigne me rejoindre. Tu parles, elle n’a peur de rien, et c’est bien ça le problème ! « Franchement, tu en as emballé combien des nanas avec ton histoire de bain de minuit qu’on voit même pas où on met les pieds là ? »

Ellen est soudainement charmeuse, sous les effets de la drogue. Je trouve ça drôle, je ne peux pas dire que j’en suis totalement indifférente d’ailleurs. Je ne vais pas le cacher, même pour son âge elle reste une très belle femme, mais c’est pas forcément ce qui m’intéresse le plus. J’aime nos grandes conversations, nos différences. J’apprécie beaucoup sa présence et ça, c’est pas rien, surtout pour moi qui ai toujours eu l’habitude de vivre en solitaire. Sauf avec Sofia, mais même là, j’avais besoin de m’échapper de ma cage dorée. Je m’amuse, joueuse comme toujours, lui parle comme une tueuse en série, ou une dragueuse en série. Je pourrai en profiter, elle est juste à point, je n’aurai rien à faire, juste me saisir de ses lèvres, son corps. Elle ne refuserait rien dans cet état, mais je ne suis pas du genre profiteuse. Au lieu de ça, je propose un bain de minuit. Ce n’est pas le premier, et ce ne sera pas le dernier. Une fois devant la piscine, je me fous littéralement à poil, c’est le bain de minuit, on déconne pas avec ça. « On verra à quelle allure tu les retires tes fringues avec 25 ans de plus ! » Je ricane un peu et garde mon regard rivé sur elle. Il n’y a pas beaucoup de lumière, seulement la lune qui fait de jolis reflets sur ses formes fines, et la lumière tamisée du salon qui décroche sa silhouette. Rien de bien concret. Elle entre dans l’eau en sous-vêtements, elle triche. Ça commence mal ! « Je vois pas le fond et j’aime pas trop trop ça… Tu voudrais pas… revenir vers le bord ? C’est loin là… » Je ris légèrement pendant que je nage, je vois pas le fond j’en ai bien rien à foutre ! « Ohhh… t’as peur ? Y’a des requins au fond tu penses ? Qui vont venir croquer tes petits mollets ? » Oui je me fous de sa gueule, mais avouez que c’est drôle quand même ! « Y a des tas de trucs qu’on connait pas là-dedans tu sais… » Je hoche vivement la tête en me rapprochant d’elle. « Oui, peut-être quelques petits insectes. Et des poissons. Et moi. » J’émets un petit grognement, pas digne du tout d’un monstre d’ailleurs. Mais je suis sûre que c’est mignon. « Franchement, tu en as emballé combien des nanas avec ton histoire de bain de minuit qu’on voit même pas où on met les pieds là ? » Nouveau rire. « Aucune. La plupart avaient de la lumière dans leur piscine. Ça évitait ce genre de terreur nocturne. » Je m’approche encore d’elle et ma main vient chatouiller son ventre. « Attention une bête féroce apparaît ! » Je me mets dos à elle et continue de la chatouiller, profitant de la sentir se dandiner dans mes bras. J’approche finalement son corps du mien, mes bras toujours autour d’elle, et glisse quelques mots à son oreille. « T’es au courant qu’un bain de minuit c’est nu… tu triches… » Est-ce que ma main vient subrepticement de dégrafer son soutien-gorge ? J’en ai peur…