walk of shame (kezai #5)

Tout s'est enchaîné un peu vite depuis notre voyage à Bali, et le retour à la réalité en est quelque peu difficile. Je n'arrive pas exactement à comprendre ce qu'il s'est passé avec Kai, comment on a pu en arriver jusque là, et surtout ce que tout ça représente. Je préfère pas penser aux conséquences de nos actes et à leur signification, vaut mieux pas en fait. C'est déjà assez le bordel comme ça dans ma tête. Je suis perdue, avec moi-même mais avec Kai aussi. Je sais pas, c'est bizarre. J'ai l'impression que cette parenthèse avec elle ne peut pas être vraiment réelle. En tout cas c'est plus facile pour moi de penser ça, et surtout d'essayer de m'en persuader, que d'assumer simplement. Mais c'est toujours là dans un coin de ma tête. Et je crois que ça ne va pas aller en s'arrangeant. Surtout après ce qu'il s'est passé hier soir. Mes retrouvailles avec Wyatt, sa surprise à l'hôtel, et une chose en entraînant une autre... je n'ai pas eu le courage de tout briser. Merde putain, qu'est-ce que j'ai fait ? Tout me revient brusquement en plein visage au petit matin. Et là c'est la merde. Un sentiment de culpabilité immense me ronge immédiatement de l'intérieur, c'est encore pire qu'avant. J'ai tellement honte. J'aurais peut-être mieux fait de lui avouer la vérité, au risque de le perdre, que de coucher avec lui, comme ça, après ce que j'ai pu lui faire. C'est encore pire que tout je crois. Je prétexte un impératif familial pour demander à Wyatt de me ramener le plus vite possible chez moi sans même prendre le temps de me doucher. Là, tout de suite, j'ai besoin d'être seule. Je ne me vois pas rester plus longtemps dans cette chambre d'hôtel avec lui dans cet état. Je suis incapable de faire semblant, et je ne veux surtout pas que Wyatt se doute de quelque chose. Par chance il ne remarque rien sur le trajet, et après un rapide baiser déposé au coin de ses lèvres, je tourne les talons. Il n'y a personne à la maison - c'est du moins ce que j'en conclus puisque la porte d'entrée est verrouillée. Une fois rentrée, mon premier réflexe est de m’écrouler contre la porte jusqu'au sol, la tête entre les mains. Je crois que je ne me suis jamais sentie aussi mal qu'à cet instant. Je me déteste tellement, j'ai envie de vomir. Quelques larmes s'échappent sur mon visage alors qu'un bruit dans les escaliers me fait sursauter. Merde, je ne suis pas seule. Je me relève à la vitesse de l'éclair, espérant secrètement ne pas avoir été vu par terre. Mais mon regard se fige lorsque je croise celui de la silhouette en question. Kai. Je grimace inconsciemment essuyant ma joue d'un revers de main. Je tente un espèce de faux-sourire en m'adressant à elle, incapable pourtant de soutenir son regard. « Merde, je pensais qu'il y avait personne. » Grillée. Avec les mêmes habits que la veille, les yeux humides, et la honte ancrée sur mon visage. Pitié qu'elle n'ait pas vu Wyatt par une fenêtre. « Je vais prendre une douche. » Fuir, au plus vite. Tout de suite, maintenant. Ne surtout pas rester là comme ça devant elle.

C’était une parenthèse. Juste une parenthèse. J’avais bu qu’un cocktail, ça peut pas être l’alcool, et clairement, personne a rien mis dans mon verre. C’était juste… bizarre. Je me souviens pas de tout ce qui a pu se passer cette nuit là, je crois que mon cerveau a volontairement viré une bonne grosse partie, pour pas que je parte en hôpital psychiatrique. Parce que si je cherche à me souvenir de ce qu’il s’est passé avec Kezia la nuit de son anniversaire, je pense que je perds pieds. Après ça, on a fait comme si de rien n’était, ou presque. Une fois la nuit tombée les jours qui ont suivi, on était quand même attirées l’une par l’autre comme des aimants, même si ça n’a pas été pareil que la toute première nuit. Heureusement, il n’y en a eu que deux après celle là, et retour à Los Angeles. Depuis qu’on est rentrées, elle m’évite, ou peut-être qu’on s’évite en fait. J’ai peur de ce que je peux ressentir, je m’efforce de ne pas y penser mais je n’y arrive pas. Pas beaucoup en tout cas. Alors je fais en sorte de ne pas rester seule par peur de trop penser, je m’occupe, et même si je cherchais à éviter Kezia je n’en aurai pas besoin, puisque visiblement c’est elle qui m’évite.

Le pire dans tout ça, c’est qu’elle n’a pas dormi ici cette nuit. Et moi dans ma tête, ça tourne en boucle, j’ai pas dormi de la nuit. On avait repris l’habitude de dormir toutes les deux dans mon lit depuis la fois où je me suis retrouvée cocue et que j’avais un peu trop bu. Cette fois où elle avait été là pour moi. J’avais abandonné le canapé pour dormir avec elle, et puis la soirée avec Wyatt a foutu le bordel, mais heureusement elle a accepté de venir avec moi à Bali, pour me faire pardonner. Mais vu ce qu’il s’est passé…Enfin bref, elle n’a pas dormi là cette nuit, et moi je flippe comme une conne alors que je devrais pas. Je suis sûre qu’elle était avec Wyatt, qui d’autre après tout ? C’est toujours son petit ami que je sache. Mais l’idée même qu’elle ait pu coucher cette nuit avec lui après ce qu’on a vécu toutes les deux à Bali, ça me rend dingue. J’essaie de me calmer comme je peux, mais quand j’entends la porte d’entrée s’ouvrir puis se fermer, mon coeur s’emballe. C’est sûr que c’est elle. Je descends et la trouve assise par terre contre la porte en train de pleurer. « Merde, je pensais qu'il y avait personne. » lâche-t-elle après avoir essuyer ses larmes. Je fais quelques pas dans sa direction, ayant bien remarqué qu’elle est habillée comme hier soir. Elle a juste découché. Très bien. « Et si. J’suis là. » Mon ton est froid, j’ai l’impression que c’est les montagnes russes entre nous. « Je vais prendre une douche. » « C’est ça. » Je serre les mâchoires, parce que ça fait mal de la voir pleurer, mais encore plus d’imaginer qu’elle a passé la nuit avec Wyatt. Qu’elle lui a offert ce qu’il convoite depuis longtemps. Bordel. Je patiente, quinze, trente minutes, et finis par monter pour la confronter. « Ça va mieux ? » C’est un peu rentre dedans, mais bon je vais pas jouer les midinettes. « C’était bien au moins ? » Aie…

Merde, merde, et merde. Je crois que ça ne pouvait pas être pire. Pourquoi a-t-il fallu que Kai soit là quand je rentre ? Fais chier. N'importe qui mais pas elle, surtout pas. « Et si. J’suis là. » Son ton est glacial, son regard assassin. J'ai l'impression qu'elle sait déjà ce qu'il s'est passé avec Wyatt. Qu'elle a compris direct en croisant mon regard. Comme si c'était écrit noir sur blanc sur ma tronche. C'est pas possible putain. Il faut que je trouve quelque chose, n'importe quoi, mais je ne peux pas rester là comme une conne. Je suis incapable d'affronter son regard plus longtemps. J'ai besoin d'être seule. Je me rue alors à l'étage pour prendre une douche. Le premier prétexte que j'ai pu trouver pour m'éclipser aussi loin que possible. Ouais bon tout est relatif... on est jamais assez loin l'une de l'autre quand on est sous le même toit comme ça. Et je sais que je ne vais pas pouvoir continuer de l'éviter éternellement, c'est bien ça le problème. Je profite de rester un maximum de temps sous l'eau chaude en guise d'ultime répit. Comme si, après ça, je pourrais trouver la force et le courage nécessaire pour me confronter à elle. Mais je crois que c'est pas gagné. Et le moment tant redouté finit par arriver beaucoup trop vite à mon goût. « Ça va mieux ? » Je hoche un peu la tête esquissant un sourire plus ou moins naturel, alors que je fuis toujours volontairement son regard. Mais je la connais par coeur et je sais qu'elle est en train de bouillonner de l'intérieur. Ça se voit comme le nez au milieu de la figure. Kai est comme une bombe à retardement prête à exploser à tout moment. Et malgré son côté parfois imprévisible, sur ce coup-là j'imagine très facilement ce à quoi elle peut penser bizarrement. « C’était bien au moins ? » Et voilà bingo. Je savais que ça allait finir par lui brûler les lèvres. Je secoue vivement la tête un peu par réflexe avant de répliquer. « Arrête Kai, c'est pas du tout ce que tu crois. » Pourtant si, c'est exactement ce qu'elle croit ; oui, j'ai couché avec Wyatt. Et je me sens horriblement conne. Je ne sais même pas pourquoi j'essaye de lui mentir... à part aggraver mon cas, je ne sais pas à quoi d'autre ça peut servir. Mais au point où j'en suis, un peu plus ou un peu moins hein, ça ne fera aucune différence. « On était à une soirée, ça s'est juste éternisé un peu. » Je hausse les épaules et lève un peu les yeux au ciel. Rien de plus banal en soit. Mais je suis aussi douée pour faire semblant que pour me foutre dans des situations aussi embarrassantes que celle-ci... autant vous dire que c'est la merde. Surtout quand on sait que ce n'est pas du tout mon style de découcher de la sorte. « T'as fait quoi toi ? » Ou comment essayer de changer de conversation. Mais si je pensais à me sortir de ce pétrin aussi facilement, c'était mal la connaitre. Et justement je la connais que trop bien...

Je bouillonne, je ne tiens pas en place et fais les cent pas dans le salon en entendant le douche couler à l’étage. Si je ne me retenais pas, je crois que je serai déjà en train de m’arracher les cheveux par poignées. Je déteste cette sensation qu’on me prend pour une conne. J’ai cru, j’ai cru que notre voyage à Bali aurait changé quelque chose entre nous, que ce qu’on a partagé toutes les deux, juste toutes les deux là bas aurait au moins permis à ce qu’elle ouvre les yeux sur sa relation avec Wyatt. Mais même pas. Quelle conne. Mais quelle conne ! Et maintenant j’ai l’impression que je vais exploser. L’eau s’arrête et je monte les marches trois par trois pour la rejoindre là haut et la confronter. Je lui demande si ça va mieux, elle trouve le moyen de me sourire, comment ose-t-elle ? Elle se fout vraiment de ma gueule y’a pas d’autre solution. J’en rajoute une couche et lui demande si c’était bien, je supporte pas qu’elle me mente. « Arrête Kai, c'est pas du tout ce que tu crois. » Mais c’est visiblement ce qu’elle a décidé de faire. Je ne la lâche pas des yeux alors qu’elle essaye de trouver des choses à faire pour ne pas avoir à soutenir mon regard. « On était à une soirée, ça s'est juste éternisé un peu. » Je serre les dents, j’ai envie de lui en coller une pour qu’elle revienne sur terre. « Ouais c’est pour ça qu’t’es rentrée en chialant. » Elle me prend vraiment pour une conne. « T'as fait quoi toi ? » Elle ose ? Elle ose faire comme si de rien n’était. Je vais exploser. « T’arrives à te regarder dans une glace ça va ? » Je la pousse dans ses retranchements, lui mets le nez dans sa merde, oui, mais je supporte pas qu’elle me prenne pour une conne. « Ah elle est belle la petite Kezia, le petit ange à qui tout sourit, celle qui ne ment jamais, qui fait tout comme il faut, pas un pas de travers. » Je ris, amèrement. « J’espère au moins que t’as pris ton pied. » J’ai envie de pleurer, de hurler. J’me sens comme une merde, ça me ramène à cette période horrible où j’étais la victime d’un groupe de gamines qui me foutaient plus bas que terre. Cette période horrible où j’ai fait de belles conneries. Pas question que je retombe là dedans. Pas question que je replonge à cause d’elle. Je lui tourne le dos parce que je ne veux pas qu’elle puisse voir mes yeux brillants. Je sors un gros sac de sous le lit et commence à foutre des affaires à l’intérieur. Je sais pas où je vais aller mais il est pas question que je reste sous le même toi qu’elle, sinon je vais vraiment mal finir.

La situation m'échappe, et j'ai bien peur que ça finisse par m'exploser en plein visage. Le semblant d'équilibre que nous avions pu retrouver toutes les deux - et peut-être plus encore, est certainement sur le point de voler en éclats. Et ça fait chier. Mais je ne peux m'en prendre qu'à moi-même. J'ai merdé et je suis loin d'en être fière. Honnêtement je ne sais pas comment je vais pouvoir me sortir de cette galère. Je ne sais pas mentir, encore moins à Kai. Et pourtant... je n'arrive pas à être complètement honnête avec elle, c'est trop dur. Non, je n'assume pas. Je ne veux pas assumer. Je ne veux surtout pas que tout ceci soit réel. Justement, ça ne l'est pas. Je refoule tous les souvenirs de ma nuit avec Wyatt jusqu'au point de me persuader que cette dernière n'a jamais existé. Si seulement. Mais Kai ne croit pas une seconde à mes conneries. « T’arrives à te regarder dans une glace ça va ? » Elle me fusille du regard en serrant la mâchoire. « Ah elle est belle la petite Kezia, le petit ange à qui tout sourit, celle qui ne ment jamais, qui fait tout comme il faut, pas un pas de travers. » J'encaisse ses reproches sans rien pouvoir dire pour ma défense. A quoi bon ? Je n'ai aucun moyen de me justifier de toute façon. Je ne sais même pas ce que je pourrais lui dire. Elle a raison, je suis loin d'être parfaite sur ce coup-là. Je suis loin d'être parfaite tout court. Et de toute évidence je mérite ses critiques. « Kai, arrête... je... » Mais je secoue la tête sans rien ajouter d'autre. Une boule se loge dans le fond de ma gorge alors que mon cœur se serre violemment dans ma poitrine. J'ai l'impression de recevoir un coup de poignard dans le ventre. C'est horrible putain. Mais le pire c'est que c'est de ma faute. « J’espère au moins que t’as pris ton pied. » Elle me tourne le dos et mon coeur se brise encore un peu plus. « Kai... » Je tente d'attraper son bras pour la faire me regarder mais au lieu de ça elle s'éloigne pour récupérer un sac sous le lit. Allez Kezia, c'est le moment de dire quelque chose. Trouve quelque chose, n'importe quoi. Mais parle putain. « Je suis désolée... je ne voulais pas... » Ouais non, c'est débile. C'est même pire que si je n'avais rien dis en fait. C'est comme un espèce de semi-aveu, des excuses lourdes de sens... mais qui, je le sais, ne seront sans doute pas suffisantes. Le cœur lourd, je la regarde fourrer des vêtements dans son sac complètement impuissante. « Kai, qu'est-ce que tu fais ? » Elle va pas partir quand même ? Pour aller où ?

J’en peux plus, je peux pas rester là à ruminer, il faut que j’aille la confronter. Je sais bien que ce qu’on a vécu à Bali n’était qu’une parenthèse, que c’était trop bizarre pour qu’on ait réussi à en reparler, ou ne serait-ce que le mentionner. Mais merde, j’étais pas toute seule à l’avoir vécu, on avait pas bu, on avait pas pris de truc chelou, c’était réel, c’était vrai. Alors qu’elle cherche à me fuir comme ça, qu’elle me mente sur sa nuit, qu’elle mente à Wyatt et qu’elle se mente à elle-même, ça me rend dingue. Oh non, je ne demande pas qu’elle assume au grand jour ce qu’on a fait quand on était que toutes les deux, mais qu’elle se l’assume à elle-même déjà, ce serait bien. Alors oui je sais je suis pas bien mieux, mais moi je trompe personne. Merde ! « Kai, arrête... je... » Quoi ?? Elle quoi ? Elle rien du tout, elle a rien à dire pour sa défense, je le lis dans ses yeux, et ça me rend dingue. Je suis blessante, mais c’est parce que j’ai mal aussi. Je devrais pas me l’avouer, parce que je ne devrais rien attendre d’elle. Tu parles. C’est le bordel dans ma tête, dans mon coeur, et je crois que là, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. « Kai... » Je la sens essayer de me retenir mais je l’en empêche. Je dois partir, pour aller où j’en sais bien rien, mais je ne peux pas rester sous le même toit qu’elle. « Je suis désolée... je ne voulais pas… » Je relève les yeux vers elle et lui adresse un regard assassin. Elle ne voulait pas quoi ? Coucher avec Wyatt ? Me faire de mal ? C’est trop tard pour tout ça. Je serre les mâchoires, baisse à nouveau le regard sur mon sac que je continue de remplir avec le strict nécessaire. Détour par la salle de bain, je récupère quelques trucs en vrac, et reviens tout mettre dans mon sac. « Kai, qu'est-ce que tu fais ? » « J’me barre. Loin d’ici. Finalement, me casser de San Francisco pour venir ici c’était la meilleure décision que j’ai prise. Et maintenant que t’es là, j’peux même plus rester. » Je dis tout ça avec un ton sec et froid. J’ai même pas de boule dans la gorge, parce que les blessures sont profondes, mais l’amertume est plus forte encore. Elle me déçois plus encore qu’elle ne me blesse. « Et puis ma grand mère t’adore, tu lui fais les yeux doux et je suis sûre que Wyatt pourra venir dormir ici avec toi. » C’est plus fort que moi. Je ferme le zip de mon sac et ne la regarde même pas parce que ce serait trop dur. Je n’ai rien à ajouter, je crois que c’est mieux de partir sans un mot de plus.

Les mots restent coincés au fond de ma gorge comme barricadés à l'intérieur. Et pourtant il y a tellement de choses que je pourrais lui dire, là, maintenant, pour lui ouvrir mon coeur. Des centaines de trucs dix fois mieux que ces excuses à la con. Mais j'en suis foutrement incapable, et y'a rien d'autre qui sort. J'ai l'impression que ça fait des siècles que je contiens mes sentiments dans un coin de mon coeur. Ils sont là, enfermés à double tour, totalement interdits. Et c'est justement ça qui me bousille de l'intérieur. Pourquoi tout paraissait si simple à Bali et maintenant si compliqué ? J'aimerais tellement pouvoir remonter le temps pour tout effacer. Mais le mal est fait, c'est trop tard. Je le sens dans ses yeux. Je la regarde faire son sac totalement impuissante comme paralysée. Les secondes s'égrènent et je suis incapable de faire quoi que ce soit d'autre que de lui demander ce qu'elle fait. Mais merde Kezia putain. « J’me barre. Loin d’ici. Finalement, me casser de San Francisco pour venir ici c’était la meilleure décision que j’ai prise. Et maintenant que t’es là, j’peux même plus rester. » Mon coeur se broie dans ma poitrine, et ça fait un mal de chien. La douleur paralyse même mon corps tout entier. « Et puis ma grand mère t’adore, tu lui fais les yeux doux et je suis sûre que Wyatt pourra venir dormir ici avec toi. » Elle ferme son sac et commence à sortir de la chambre. C'est à cet instant que je prends vraiment conscience de ce qui est en train de se passer. Tout me revient brusquement en plein visage comme un putain d'électrochoc. Si je la laisse partir comme ça sans rien faire, je la perds. Peut-être définitivement même. Et je ne peux absolument pas m'y résoudre. Pas une nouvelle fois. Mes jambes redeviennent soudainement actives et je me précipite devant elle pour lui bloquer l'accès aux escaliers. « Tu ne peux pas partir Kai. » Elle est ici chez elle, chez sa grand-mère. « C'est ta maison ici. » C'est sa chambre. S'il y en a une de nous deux qui doit s'en aller, c'est moi pas elle. Même si ce n'est évidemment pas ce que je veux. « J'ai fait une connerie, et tu as tous les droits de me détester pour ça, c'est vrai. Mais j'ten supplie ne pars pas... » Pas sur un coup de tête comme ça en tout cas. « Je crois qu'on a besoin de parler toutes les deux. » De parler de Bali, de Wyatt, de nous... on évite le sujet depuis trop longtemps maintenant, c'est plus possible. C'est maintenant ou jamais. « Parce que c'est pas avec Wyatt que je veux dormir en fait. » Je secoue un peu la tête avant de planter mon regard dans le sien, le coeur à vive allure. « C'est avec toi. » Je continue les yeux humides. « Je sais pas exactement ce que ça veut dire ou ce que tout ça représente réellement... mais j'ai pas envie de te perdre Kai. » Et ça c'est une évidence. « Je peux pas vivre sans toi. »

Je peux pas rester là. C’est trop dur. Trop dur de la regarder et de ne voir que les mains de Wyatt sur elle. J’ai envie de vomir. Alors je la regarde pas, et je n’écoute pas non plus ce que j’ai réellement au fond de mon coeur, tous ces sentiments qui s’animent que lorsqu’elle est là, près de moi. Je ne suis pas prête à assumer quoi que ce soit la concernant, et pour le moment, il est beaucoup plus facile de fuir. Parce que si je fais genre que je suis une forte tête, je suis surtout la reine de la fuite. De toute manière, elle n’a pas l’air de vouloir me retenir, elle ne dit plus rien. Tant mieux. Une putain de boule dans la gorge, je quitte la chambre pour me diriger dans le couloir, prête à quitter cette maison que j’aime pourtant, et que je n’aurai pas eu envie de quitter si Kezia n’avait pas brisé mon coeur. « Tu ne peux pas partir Kai. » lâche-t-elle en venant se positionner entre l’escalier et moi pour m’empêcher de descendre. « Pousse-toi. » Je ne la regarde pas, ce serait trop difficile. « C'est ta maison ici. » « Plus maintenant. » Ma voix est étouffée dans ma gorge. Je serre les mâchoires et finis par lui adresser un regard noir quand je comprends qu’elle ne veut vraiment pas me laisser passer. « J'ai fait une connerie, et tu as tous les droits de me détester pour ça, c'est vrai. Mais j'ten supplie ne pars pas... » Elle se fout de ma gueule ? Elle rentre comme ça au petit matin après avoir passé la nuit avec Wyatt, et clairement pas à enfiler des perles, et moi je dois simplement fermer ma gueule et encaisser ? Non. « Je crois qu'on a besoin de parler toutes les deux. » « J’ai pas envie de parler avec toi. » J’ai pas envie parce que j’ai mal, j’ai pas envie parce que j’ai peur. J’ai pas envie parce que je sais que si je la laisse poursuivre, je serai suffisamment faible pour lui pardonner, et je ne veux pas lui pardonner. « Laisse-moi passer. » Elle n’est toujours pas décidée, et elle a l’air de se foutre de ma demande. Faudrait pas que je la pousse quand même ? « Parce que c'est pas avec Wyatt que je veux dormir en fait. C'est avec toi. » Mon coeur fait un bond dans ma poitrine et je fais l’effort de la regarder à nouveau. Elle fait chier putain. « Je sais pas exactement ce que ça veut dire ou ce que tout ça représente réellement... mais j'ai pas envie de te perdre Kai. Je peux pas vivre sans toi. » « ARRÊTE ! » Je hurle, la faisant probablement sursauter. J’ai mal, parce que j’ai l’impression qu’elle joue avec moi, c’est le monde à l’envers putain. « Tu te rends compte de ce que tu es en train de faire là ??? Putain t’as passé la nuit avec Wyatt et tu me dis que c’est avec moi que t’as envie de dormir ? Mais t’es un monstre en fait ! » J’y vais pas de main morte, je sais pas faire ça. J’ai envie de chialer, mais je lui ferai pas ce plaisir. Elle le mérite pas. « Remets de l’ordre dans ta vie sentimentale et on en reparlera quand tu sauras vraiment ce que tu veux. » Mon ton est froid, sec, distant. Je ne peux pas me résoudre à lui pardonner, même avec le regard embué qu’elle m’offre. Il n’en est pas question. Cette fois je la pousse pour passer et descends les escaliers à toute allure pour quitter cette maison avant d’avoir envie de faire demi-tour.