strangers by nature (+oksana)

strangers by nature
@Oksana Belyaev

Tu t’attendais à tout sauf à ce que ta vie soit mise sens dessus dessous par une blondinette à l’accent d’ailleurs. Les tabloïds et certaines de tes connaissances seraient probablement moins surpris, mais tu les as toujours balayés d’un revers dédaigneux de la main en affirmant à cors et à cris que tu avais confiance en ton mari et qu’il n’était pas le loup dans la bergerie comme ils étaient si nombreux à le clamer. Et même si tu les avais crus, la jeune femme dans les magazines devait être une maîtresse, personne n’osait seulement imaginer qu’il aurait pu te faire un bébé dans le dos.

Tu n’avais évidemment pas oublié le nom, Oksana Belyaev de celle qui avait débarqué chez toi à l’improviste en agitant son permis de conduire sous ton nez. Tu avais tout faire pour ne pas la croire sur le coup, même si elle avait réussi à instiller une étincelle de doute dans ton esprit. Tu avais prévu d’abandonner cette histoire dans un coin en la laissant prendre la poussière, mais c’était sans compter sur l’indélicatesse de votre ami et avocat. Il ne t’a pas fallu longtemps pour additionner 1 et 1, et comprendre que la britannique avait réussi à contacter Jack et que celui-ci, inquiet, s’est tourné vers son conseil juridique pour évaluer les risques économiques que cette intrusion provoquerait. Au téléphone, Arnold s’est empressé de te rassurer en t’expliquant qu’elle ne pouvait pas être une menace – pas au sens de la loi – et t’a demandé de transmettre le message à ton tendre époux, sans réellement réaliser que tu n’étais pas supposée être de la confidence.

Tu as beau faire ton possible pour te donner l’air de la femme puissante et affirmée que tu peux être dans un contexte professionnel, il y a dans tes yeux une lueur qui révèle le cyclone. Tu as donné rendez-vous à Oksana dans l’un de tes restaurants préférés, et t’es installée en terrain familier, sur la terrasse qui donne sur l’océan. Tu aurais aimé avoir un plan, un monologue déjà écrit, mais la vérité c’est que tu n’as aucune idée de ce que tu fais. Tu pars en roue libre, en improvisation totale. Ton invitée te rejoint assez rapidement, te tirant aussitôt de tes pensées, et tu l’invites à s’asseoir. « Thank you for joining me today. »  Tu lui offres le maigre sourire que tu parviens à esquisser, avant d’ajouter : « I suppose I should properly introduce myself.  I am Juliet Burton. Jules. »

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Elle ne s’était pas attendu à un tel coup de fil. Celui ci l’avait d’ailleurs tiré du lit. Les cheveux en bataille, la gueule de bois de la veille, elle s’était trainé jusque dans la salle de bain pour se rafraichir. Quelques notes sous la douche, avant que son voisin ne tape contre le mur pour lui sommer de se taire, et enfin Oksana était un peu plus présentable. Elle quittait très vite son appartement pour rejoindre l’adresse que lui avait indiqué madame Burton.

Une fois sur place elle repérait bien vite la rousse qu’elle avait rencontré quelques semaines auparavant. Elle la rejoignait en terrasse: « Hey there!  » Salutation joviale, Oksana tirait sa chaise, posant son sac au pied de cette dernière avant de s’installer en face de la rousse. « Thank you for joining me today. » Wow, le ton était sérieux, si bien que Oksana se redressait un peu sur sa chaise, retirant ses coudes de la table pour venir lisser les pans de sa veste. « No problem. » avait-elle tout de même lâcher à mi-voix avant que la rousse ne reprenne. « I suppose I should properly introduce myself.  I am Juliet Burton. Jules. » « Nice to meet you.  » répondait-elle simplement. « I’m Oksana, but you already know that. » notait-elle. Elle s’était en effet déjà présenté à la rousse, même si celle ci ne l’avait pas très bien accueilli. Depuis leur dernière rencontre les choses avaient bien changé. Oksana avait réussi à rencontrer son père, très brièvement. La rencontre ne c’était pas passé comme elle l’avait espéré, non. Pas d’étreinte, rien de bien chaleureux, au contraire elle avait eu le droit a un silence glacial, et une dédicace sur un bouquin qu’elle n’avait même pas lu. « I suppose you've talked to your husband… that’s why you’re meeting me, innit?  » Elle venait attraper la serviette en tissu qui se trouvait devant elle pour jouer nerveusement avec celle ci. « You know you have nothing to fear, I don’t think he likes me anyway… » Lâchait-elle sans vraiment réussir à cacher une pointe de tristesse dans sa voix.

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@Oksana Belyaev

« Nice to meet you.  » Tu as du mal à savoir dans quelle mesure la jeune femme est sincère. Depuis son arrivée, elle semble bien plus joviale que tu ne peux l’être, alors tu te dis qu’elle a peut-être réellement envie de te connaître, même si c’est probablement dans l’espoir d’atteindre Jack par ton proxy. Toi, c’est tout l’inverse. Tu ne veux rien avoir à faire avec la blonde, même si tu es forcée de reconnaître qu’elle est innocente dans cette histoire. Vous êtes deux victimes à part égale. « I’m Oksana, but you already know that. » Tu fais de ton mieux pour apparaître ouverte et avenante en hochant la tête.

« I suppose you've talked to your husband… that’s why you’re meeting me, innit?  » L’espace d’un instant, tu vois la lumière s’éteindre dans ses yeux. « You know you have nothing to fear, I don’t think he likes me anyway… » Devant toi, la jeune adulte confidante et assure se transforme en petite fille en quête de l’approbation de son père. « Actually… no. » Ton mari n’a aucune idée de ce rendez-vous que tu as donné à Oksana, ni du coup de fil d’Arnold, ni même de cette visite à votre appartement dont tu n’as jamais parlé. « I figured… We’re on the same boat, you know ? » La vérité c’est que tu es totalement perdue. La vie ne t’avait pas franchement préparée à affronter une telle épreuve à aube de ta cinquième décennie. « We both hold different pieces of the same puzzle. » Vous avez deux destins parallèles qui auraient pu ne jamais s’entrecouper mais qui sont pourtant fondamentalement liés. « I want to understand. » Tu imagines qu’elle cherche des réponses, elle aussi. Qu’elle a vingt ans d’existence à expliquer.

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« Actually… no.  »Oksana est un peu surprise par cette réponse. Elle ne communique donc pas avec son mari? « I figured… We’re on the same boat, you know ? » L’anglaise hochait la tête. Elle aussi cherchait des réponses, mais Oksana n’était pas certaine de pouvoir l’éclairer. « We both hold different pieces of the same puzzle. I want to understand. » Un cours silence s’installait, rapidement interrompu par un serveur qui voulait savoir si elles avaient fait leur choix. « No sorry, I haven’t even look at the menu yet… » avouait-elle en pouffant de rire. Le jeune homme s’éclipsait et elle reportait son attention sur Jules. « I’m not sure there’s more to tell about me, or your husband’s part in my life. » elle grimaçait un peu. « I didn’t even know what he looked like until a year or so. I had to stay home because of an injury, I got bored, found a book and a picture of him and my mum in it, and that’s when I thought: why not travel to LA and try to find him. » Elle attrapait le menu, l’ouvrant enfin, laissant ses yeux se balader sur la longue liste d’entrée, puis de plat. « I think my mum really loved him, but he was probably around for a month, maybe less, and then he left. » Elle reportait son attention sur Jules. « I realize now that coming here to find him was a bad idea. I’m sorry. » C’est sur que si la vie de son père n’avait pas été chamboulé par son arriver, Jules elle ne pouvait pas en dire autant. La pauvre découvrait l’infidélité avéré de son époux et une sorte de double vie qu’elle aurait certainement préférer ne pas découvrir. Oksana avait été naive de penser qu’il serait près a être un père pour elle, naive d’ignorer qu’il avait toute une vie dans laquelle elle n’avait pas sa place.

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@Oksana Belyaev

« No sorry, I haven’t even look at the menu yet… » Tu es à la fois impressionnée et terrifiée par la jeune femme qui semble bien plus à l’aise que toi, au point qu’elle plaisante ouvertement avec le serveur alors que tu n’es qu’une boule de nerfs. Tes jambes n’ont pas cessé de bouger depuis que tu es arrivée, un signe qui trahit ton état intérieur. « I’m not sure there’s more to tell about me, or your husband’s part in my life. » Ta poitrine se gonfle d’une inspiration que tu peines à prendre. Et même si ce n’est pas sa faute, et même si elle n’a pas grand chose à t’apprendre, les mots laissent des hématomes sur leur chemin. « I didn’t even know what he looked like until a year or so. I had to stay home because of an injury, I got bored, found a book and a picture of him and my mum in it, and that’s when I thought: why not travel to LA and try to find him. » Tu fronces les sourcils en te mordant la lèvre, ton cerveau beaucoup trop rapide et beaucoup trop lent à la fois. C’est pire que ce que tu pensais. S’il y a une photo, ça veut dire que ce n’était pas juste une fois, un accident, une erreur. Ca veut dire qu’il y avait quelque chose de plus. « I think my mum really loved him, but he was probably around for a month, maybe less, and then he left. » Comme si la blonde pouvait lire dans ton esprit, elle confirme tes craintes à demi-mot. Tu ne peux t’empêcher de baisser la tête avant de caresser ton front du bout des doigts, les yeux fermés. Peut être qu’ainsi, tu réussiras à repousser suffisamment la réalité pour qu’elle s’en aille et que tout redevienne comme avant.

« I realize now that coming here to find him was a bad idea. I’m sorry. » Tu finis par reporter ton attention sur Oksana. Tu as été tentée, au début, de la détester, de lui en vouloir de tout ton être, mais ce n’est pas juste, elle n’y est pour rien. « I don’t blame you, you have the right to know. » Il te faudra un moment pour faire disparaître toute trace d’amertume à son égard, mais au fond de toi tu sais qu’elle n’est qu’un dommage collatéral. « Do you know if he ever found out about you ? Before now, I mean. » Tes sourcils froncés, tu t’infliges une nouvelle question qui pourrait te faire encore plus de mal. Et en fin de compte, qu’est ce que ça changerait ? Qu’est-ce que tu préfèrerais ? Qu’il n’ait jamais rien su de la grossesse et qu’il ait appris l’existence de sa descendance en même temps que toi ? Ca ne fait pas une grande différence. « I wish I could be a little more graceful about this… But it’s not pretty…» La bouche pincée en une moue tu finis par te convaincre qu’elle mérite la vérité. Même si elle doit lui faire aussi mal qu’à toi. « 25 years ago… I was in the middle of chemotherapy. And Jack and I… we had already been together for a few years at that point. » Salut, ton père est un connard, enchantée.