i'll be there for you, cause you're there for me too (lealyn 2)

Ma meilleure amie m’avait prévenu que sa soeur avait eu un accident de voiture, qu’elle avait été plongé dans un coma artificiel. Mais je ne m’attendais pas à recevoir un sms d’elle ce midi en me disant que c’était terminé. Je sens mon coeur s’alourdir en lisant son message, je n’ose même pas imaginer ce qu’elle peut ressentir. L’espace d’un instant, je pense à Billie et à Fred, si un jour je devais perdre d’une d’elles, je crois que j’en deviendrai malade. Je ne peux décemment pas laisser Jazz seule ce soir, ni même les jours qui suivent, elle a besoin de quelqu’un. Je laisse un mot sur le bar pour Nicola, lui disant que je vais aller vivre quelques jours chez Jazz, et que l’appartement est à elle pendant ce temps. Je prépare tout ce dont j’ai besoin, que j’enfourne dans un petit sac, et passe par l’épicerie du coin pour acheter une bonne bouteille de vin, et une autre de rhum. On va y aller franco. Je crois qu’elle va en avoir besoin. Je vérifie que j’ai bien tout ce qu’il me faut et je me rends directement chez Jazz, sonnant à la porte au cas où, avant d’ouvrir cette dernière. Elle est sur le canapé, je me doutais bien qu’elle ne devait pas être restée au boulot après une annonce pareil. « J’ai ramené les munitions ! » Je lui montre les deux bouteilles et tente un sourire mais ce n’est pas de circonstances. Après avoir déposé les bouteilles sur la table et mon sac sur le sol, je rejoins Jazz sur le canapé. « Allez viens là. » L’attirant dans mes bras, je la prends tout contre moi et la câline, pour qu’elle puisse évacuer ce dont elle a besoin. Je sens les soubresauts de ses sanglots et mon coeur semble n’avoir jamais été aussi serré. Je la câline tendrement, glissant mes doigts dans ses cheveux, l’autre main le long de son dos, et je dépose quelques baisers de temps en temps sur le sommet de son crâne. J’ignore ce qu’on doit dire dans ces moments là, j’ignore s’il faut dire quelque chose… Les minutes s’égrainent et elle finit par se calmer, pour cette fois. J’imagine que ça pourrait revenir rapidement. « Tu veux parler ? Ou boire ? » Je passe ma main sur ses joues pour essuyer ses larmes, je crois que c’est la première fois que je la vois comme ça, et pour cause. La mort d’un proche, si proche d’ailleurs, c’est une épreuve dont personne n’est préparé. « Je suis là. J’ai préparé quelques affaires, j’me suis dit que si tu veux bien de moi, j’pourrai rester quelques jours avec toi, pour te soutenir. » On se connaît depuis si longtemps, on s’est toujours soutenus, et ça me semblait normal d’être là pour elle dans cette épreuve. Mais s’il s’avère qu’elle a besoin de solitude, je pourrai comprendre et je rentrerai chez moi. Mais je veux pouvoir être là pour elle, parce qu’elle en a besoin.

Je savais que les espoirs étaient minces lorsque Stella a été admise aux urgences à la suite de son accident. Je me souviens avoir pensé ce jour là qu’il fallait se préparer au pire. Je suis médecin, je suis rationnelle, et malgré tout c’est une douleur immense qui m’envahie alors que tout se termine à cet instant. La décision a été prise, il faut la laisser partir. Le rythme régulier du bip de l’électrocardiogramme laisse place à une tonalité longue, son cœur jusque là maintenu en activité artificiellement vient définitivement de cesser de battre. Au moins nous avons pu lui dire au revoir… mais c’est une maigre consolation face à l’injustice de son décès prématuré. Je passe un peu de temps avec mes parents, puis finalement rentre chez moi. J’ai trois jours de congés, ils m’ont été imposé par mon chef de service. Je ne sais pas si c’est une bonne chose, j’ai peur de tourner en rond, de sombrer… il est midi quand j’envoie un message à Leah pour lui faire part de la triste nouvelle. Je parviens finalement à m’endormir sur le canapé en début d’après-midi pour me réveiller, pendant ce temps là au moins je ne pense pas et surtout je ne pleure pas. Deux heures plus tard je me réveille, tue le temps en regardant une série qui ne parvient même pas à vraiment capter mon attention. Je regarde mon portable, les photos prises avec ma sœur. Elle me manquait déjà terriblement depuis qu’elle était allongée dans ce lit d’hôpital, plongée dans un coma artificiel, mais depuis quelques heures c’est un vide immense que je ressens. La sensation est étrange, parce qu’une partie de moi est soulagée pour elle, sûre que désormais elle ne souffre plus du tout.
On sonne à la porte, je ne bouge même pas et finalement Leah entre chez moi. Sa simple arrivée me soulage, je pose mon téléphone. Il a ramené de quoi boire, je relève les yeux vers lui et je n’arrive même pas à esquisser un rictus. Mon meilleur ami me connaît par cœur, lui et Stella étaient les deux personnes à qui je me suis toujours confiée… Il me rejoint sur le canapé, m’offre ses bras protecteurs et réconfortants, je m’y blottis sans une seconde d’hésitation et laisse les larmes couler, encore. Je déverse ma peine sur son épaule, chaque perle salée représentant un fragment de ma douleur. Je finis par m’apaiser, me redresse et lui adresse un maigre sourire « Merci d’être venu. ». Il essuie mes larmes, un simple contact qui m’apaise encore d’avantage « On peut boire et parler… » dis-je, me penchant en avant pour attraper un mouchoir dans la boite sur la table basse. Leah m’indique alors qu’il a prit quelques affaires et se propose de rester ici quelques jours si je le veux. Pourquoi faut-il qu’il soit si parfait ? Ses mots font couler à nouveau quelques larmes, parce que de lui et de mes sentiments à son égard je ne pouvais en parler qu’avec ma sœur. Je hoche la tête « Bien sûr que je veux bien de toi. » je passe mes mains sur mes joues pour les essuyer « Va me falloir un punching ball. » j’esquisse un sourire puis désigne le rhum d’un geste de la tête « Sers moi un verre de ça s’il te plait. Je sais que c’est pas la solution, mais là j’en ai besoin. » même si je sais que le rhum est traitre et donne affreusement mal à la tête le lendemain, je crois qu’à cet instant rien ne peut être pire que la peine.

Je déteste la voir dans cet état, déjà parce que c’est très rare et que je n’ai pas l’habitude, et surtout parce que je suis tellement lié à elle que ça me déchire presque autant que si ça m’arrivait à moi. Je la rejoins sans tarder pour la prendre contre moi et lui transmettre l’énergie que je peux avoir, parce qu’elle doit être franchement à plat à force de pleurer comme ça. Mon soeur est serré dans ma poitrine, c’est douloureux, je n’ose même pas imaginer ce qu’elle peut ressentir. La seule personne proche que j’ai perdu, c’était un ami, mais ça n’a rien à voir avec une soeur. « Merci d’être venu. » Je lui adresse un sourire et glisse une mèche de cheveux derrière son oreille. « J’allais pas te laisser toute seule… » Surtout pas maintenant. Jamais en fait. « On peut boire et parler… » Je me contente d’un hochement de tête et la laisse sécher ses larmes à l’aide d’un mouchoir. Je me doute bien que ça n’en est pas fini avec les larmes mais son visage non inondé est toujours plus agréable, même si elle a les yeux rougis. Je lui annonce que je vais rester là quelques jours pour la soutenir dans cette épreuve « Bien sûr que je veux bien de toi. Va me falloir un punching ball. » J’émets un léger rire et hoche fermement la tête. « En chair et en os, pour vous servir ! » Elle me montre la bouteille de rhum d’un geste de la tête avant d’ajouter « Sers moi un verre de ça s’il te plait. Je sais que c’est pas la solution, mais là j’en ai besoin. » En même temps, je suis venu avec pour ça… « C’est peut-être pas la solution mais ça pourra pas te faire de mal. On a pas de voiture à prendre, et de compte à rendre à personne. Je t’accompagne ! » Je me lève pour aller nous chercher deux verres et nous les sers avant de lui tendre le sien et de faire claquer le mien contre celui qu’elle tient désormais entre ses doigts. « Allez, buvons à mon appartement que j’ai laissé à ta Don Juanette de copine, et qui va se faire plus de filles en 3 jours que je m’en suis pas fait en 3 ans ! » Je me marre un peu et avale le contenu de mon verre. Je suis aussi là pour la faire un peu rire, lui changer les idées, autant que je pourrai. Ça ne va pas être facile, mais être un ami, c’est aussi ça que ça signifie. Ça peut pas être facile tous les jours.

L’alcool n’a rien d’une solution, mais présentement quelques verres de rhum ne me feront pas plus mal que la douleur d’avoir perdu ma sœur. Et puis Leah a raison, pas de voiture à conduire, ma chambre n’est pas loin et dans le pire des cas je finirai affalée dans mon canapé comme j’ai passé toute l’après-midi ou presque. Mon meilleur ami m’a déjà vu ivre, nous avons sans doute vécu nos pires cuites tous les deux alors ça n’aura rien d’une nouveauté pour lui si je perds un peu pieds au fil des verres ingurgités. Deux verres, nous les faisons claquer l’un contre l’autre et Leah décide de boire à la liberté offerte à sa colocataire qui ne manquera sans doute pas d’en profiter. Je ne peux m’empêcher de rire « C’est vrai qu’elle a l’air de très bien s’en sortir. » j’avale l’intégralité de l’alcool d’une seule traite « Et tu le vis pas trop mal ? » je me ressers un verre « Qu’elle se tape plus de nanas que toi. » je marque une petite pause « Faut dire qu’elle est plutôt canon. Je crois que si j'étais attirée par les femmes, je ne lui dirai pas non. » je souris mais parler de ça me fait penser à Stella, ainsi qu'à Loan et leurs filles. Je crois que de toute façon peu importe le sujet aborder il y aura forcément un petit quelque chose pour mener mes pensées vers ma sœur. J’échappe un petit soupir « J’ai beau m’être préparée à cette éventualité qu’elle ne reviendrait peut-être jamais… c’est dur de me dire que c’est définitivement fini. » j’ai besoin d’en parler, d’évacuer ma peine ainsi, pas seulement par les larmes. « Je n’ose pas imaginer dans quel état doivent être les filles… » je les ai vu à l’hôpital mais nous étions tous dans nos bulles respectives, le chagrin a quelque chose d’égoïste dans des instants pareils.
Après un instant le regard perdu dans le vide je bois une gorgée de rhum puis regarde mon meilleur ami « Faudrait peut-être qu’on grignote un truc en même temps, non ? » je fais une moue « J’ai déjà un peu la tête qui tourne je crois. » j’ai bu vite, j’ai l’estomac totalement vide et je suis épuisée. La famille Moore a eu sa dose de coma, je vais éviter de sombrer moi même dans un coma éthylique, je crois que ça serait plus que ce que ne peut endurer mon entourage. Je me lève me dirigeant vers la cuisine « Chips ? » ça doit être à peu près la seule chose que j’ai dans mes placards. J’esquisse un léger sourire mélancolique, songeant une fois de plus à Stella, à toutes ces fois où elle venait ici et râlait de ne rien trouver dans mon frigo ou mes placard. Je lui disais souvent que j’allais faire des efforts, et n’en prenais finalement pas le temps. Posant les deux paquets de chips sur la table je me réinstalle sur le canapé, me blottissant de nouveau contre mon meilleur ami « Je sais pas trop comment je vais faire sans elle… » je sens une larme couler sur ma joue « Heureusement que t’es là. Je sais pas ce que je ferai sans toi non plus… alors tu vas nul part, ok ? » je relève le regard vers lui, observe ses traits parfaits, il émane de lui quelque chose de tellement rassurant et apaisant.

« C’est vrai qu’elle a l’air de très bien s’en sortir. Et tu le vis pas trop mal ? Qu’elle se tape plus de nanas que toi. Faut dire qu’elle est plutôt canon. Je crois que si j'étais attirée par les femmes, je ne lui dirai pas non. » Je souris un peu en entendant le discours de ma meilleure amie et hoche légèrement la tête. Nicky pourrait avoir n’importe quelle fille, même Jazz si elle poussait un peu le bouchon. Je trouve ça absolument dingue le pouvoir magnétique qu’elle a sur les gens, même sur moi, alors que je sais pourtant que je suis clairement à l’opposé de son genre. « Je vois pas pourquoi je le vivrai mal non. Ça me fait rire, ce genre qu’elle se donne. T’as jamais eu envie d’essayer toi ? » Je ricane légèrement et suis Jazz en buvant l’intégralité de mon verre. Mais pensant que cette discussion presque un peu amusante aurait pu changer les idées de ma meilleure amie, au contraire ça plombe encore un peu l’ambiance. En même temps, j’ai la sensation que peu importe le sujet, elle trouvera toujours un moyen de penser à sa soeur, ce qui est normal. « J’ai beau m’être préparée à cette éventualité qu’elle ne reviendrait peut-être jamais… c’est dur de me dire que c’est définitivement fini. Je n’ose pas imaginer dans quel état doivent être les filles… » Je caresse tendrement la joue de Jazz, remets une mèche de cheveux derrière son oreille. « Elles ont Loan, et leur père aussi, pour deux d’entre elles. Ça finira par aller, comme pour chaque personne qui perd un être cher. Pour toi aussi, même si ça sera sûrement long et douloureux… » Ça ne sert à rien de lui mentir, et puis elle n’est pas idiote, elle sait que ça fera mal encore longtemps, mais c’est comme ça que ça se passe. L’important c’est qu’elle ne soit pas seule. Et je suis là.

« Faudrait peut-être qu’on grignote un truc en même temps, non ? J’ai déjà un peu la tête qui tourne je crois. » Je hoche un peu la tête et la laisse se lever, je crois qu’elle a besoin de se dégourdir un peu les jambes. Je sors mon téléphone pour ouvrir l’application de livraison de bouffe, et regarde ce qu’on a comme choix. Je choisis un ensemble de tapas, histoire de grignoter à notre faim, parce que j’imagine que le frigo de Jazz est encore aussi vide que ma vie sexuelle. Bref. Elle ramène des chips et je lui offre un petit sourire. « J’ai commandé quelques trucs à grignoter, ça devrait arriver d’ici une petite demi-heure, on va essayer de pas se bourrer trop la gueule d’ici là ! » Elle revient se blottir contre moi et je l’enroule de mes bras protecteurs avant de déposer un baiser sur sa tempe. « Je sais pas trop comment je vais faire sans elle… Heureusement que t’es là. Je sais pas ce que je ferai sans toi non plus… alors tu vas nul part, ok ? » Je souris tendrement même si elle me fait vraiment de la peine. « Je vais nulle part, je te promets. Je suis là je bouge pas, tu vas pas te débarrasser de moi aussi facilement ! » Je ris un peu, cherchant à tirer quelques sourires sur son visage malheureux. « Tu sais quoi ? J’crois qu’on va bien se saouler, et au moins ce soir, on pense plus à des trucs douloureux. Qu’est-ce que t’en penses ? » C’est pas la solution, mais ça peut pas nous faire de mal, surtout pas à elle. Alors je nous serre de nouveaux verres, trinque et avale le contenu. « On devrait jouer ! Tu veux pas jouer ? Un truc con genre je sais pas, action ou vérité ?! » Ok on est en train de perdre quelques années là, mais c’est pas grave, si je peux réussir à lui faire penser à autre chose, par tous les moyens j’y arriverai.

Long et douloureux. Oui, c’est ce comme ça qu’est le deuil d’un être cher, d’une sœur, de ma sœur. Si j’évoque Loan, leurs filles, c’est pour ne pas m’enfermer dans une peine égoïste, mais la vérité c’est que j’ai peur de ce vide que laissé en moi par la disparition de Stella. Je crains de ne penser qu’à moi, ma propre peine et m’enfermer autour de celle-ci. Parce que tout peut me ramener à elle, nous partagions tant qu’il est impossible de ne pas penser à elle. C’est trop frais pour que je ne puisse tout gérer, je dois être plus indulgente avec moi et me laisser du temps. Leah est là, le pilier dont j’ai besoin, il va m’aider je le sais. Le rhum aussi m’aide, au moins ce soir, pour me changer les idées et probablement me coller un foutu mal de tête demain matin. Je propose que nous grignotons quelque chose en même temps, l’estomac vide je ne vais pas tenir bien longtemps, pas épuisée comme je le suis. De retour dans le salon, mon meilleur ami m’informe nous avoir commandé à manger. Je me blottie à nouveau contre lui « Merci. » je suis sans doute trop à fleur de peau ce n’est pas bien bon pour les sentiments que je combats, mais j’ai besoin de me réfugier dans ses bras. J’ai également besoin de parler, évacuer ma peine, mes pensées, mes questionnements suite à la disparition de Stella. Maintenant qu’elle n’est plus là je vais avoir encore plus besoin de mon meilleur ami, un des piliers de ma vie depuis presque toujours. Je souris face à ses efforts pour se montrer positif, il essaye de sortir la tête hors de l’eau, c’est ce que les amis font. Sa solution ? Une bonne beuverie comme on l’a commencé et plus de pensées douloureuses. Je ris, séchant les nouvelles larmes qui s’échappaient de mes yeux, ça s’assèche jamais ça ? « Ok chef. » dis-je avec la réelle volonté de faire cet effort, pour lui.
Un nouveau verre englouti et je m’empresse de piquer une poignée de chips pour éponger ça. Leah propose un jeu, une bonne arme contre la morosité et la tristesse. Je hoche la tête tout en mâchant mes chips dans un croustillement sonore « Va pour action ou vérité ! ». Je le pointe du doigt « Pas de triche, hein ? Quand je pose une question tu réponds, tu fais pas ta mijaurée. » déclaré-je en riant un peu. Je hausse les épaules et me lance « Vérité. » attendant la question de mon meilleur ami je nous sers deux nouveaux verres. On a dit qu’on allait pas abuser avant l’arrivée de la bouffe, mais ça va, on est large là, non ?

Je garde Jazz dans mes bras un instant, le temps de la rassurer, du mieux que je peux. Je ne peux qu’imaginer à quel point ça peut être difficile pour elle de vivre une telle épreuve. Je tente d’avoir des mots tendres et positifs, parce que je ne crois pas qu’elle puisse être la plus positive qui soit ce soir, et ça risque d’être le cas encore pendant un bon bout de temps. Mais elle se remettra, elle est solide. On se remet de tout, avec du temps et des gens bienveillants autour. Je lui promets d’être toujours là, même si je sais qu’elle le sait, ça me semble important de lui répéter. Finalement, je lui propose qu’on se bourre un peu la gueule, mais pas seulement. Un petit jeu ne pourra pas nous faire de mal. Action ou vérité. C’est un truc de gosses, mais on peut bien se marrer avec ça. « Va pour action ou vérité ! » Je suis content qu’elle soit partante et je souris largement, avant qu’elle ne me pointe du doigt. « Pas de triche, hein ? Quand je pose une question tu réponds, tu fais pas ta mijaurée. » Je lève les yeux au ciel en riant. « Ça va, depuis quand je triche moi ? Je triche jamais ! En plus tu sais très bien que je sais pas te mentir alors je vois pas comment je tricherai ! » Je joue les gars outrés, avec une mine limite déconfite, tout ça pour voir une esquisse de sourire au coin de ses lèvres. C’est déjà mieux que rien. « Vérité. » décide-t-elle tout en nous servant deux verres, et je récupère le mien sans tarder. « Ok. Alors laisse moi réfléchir. On va commencer par facile. Date de ton dernier rendez-vous galant ? Remarque quand même que j’ai commencé soft, j’aurai pu demander ton dernier rapport sexuel maiiiis j’aurai eu l’impression de me prendre pour un gynéco. » Je me marre un peu et bois mon verre, cherchant toujours à la faire au moins sourire, et rire serait une bataille gagnée pour ma part. Parce que personne n’aime voir les gens qu’il aime malheureux, et encore moins quand c’est quelqu’un aussi proche que l’est Jazzlyn pour moi. Je voudrais qu’elle soit toujours heureuse. Alors pour palier à l’absence de sa soeur, je vais devoir être là pour ma meilleure amie, deux fois plus que je l’étais avant. Je prends ça comme une mission de la plus haute importance.

Heureusement que Leah a débarqué. J’aurais peut-être fini par l’appeler, mais sans doute après avoir passé des heures à me morfondre et c’est dans un pire état qu’il m’aurait trouvé. Je me félicite de l’avoir comme meilleur ami, il est prévoyant, prévenant, gentil, protecteur… ouais parfait. J’ai dû mal à me retirer ça de la tête. Et pourtant il a tout un tas de défauts aussi, mais l’ensemble lui donne encore plus de charme. Merde. Je crois que le rhum commence déjà à me monter au citron, c’est pas bon du tout. Je vais chercher quelques munitions de malbouffe pour éponger un peu l’alcool, Leah s’est chargé de commander un vrai repas et en attendant il propose que nous jouions. Action ou vérité, tout le monde y a déjà joué au moins un fois dans sa vie, ne serait-ce qu’à l’adolescence. J’accepte de jouer, avec un verre de trop c’est toujours drôle ce genre de connerie. Ma seule condition, c’est que mon meilleur ami ne fasse pas le fragile si les questions deviennent un peu plus gênantes. Je le connais l’animal ! Air suspicieux à l’appui je le fixe alors qu’il plaide son cas « Ouais, ouais. Justement je sais quand tu mens et tu vas le payer cher si tu essais. » menacé-je, sans vraiment parvenir à être sérieuse. Deux verres de rhum c’est déjà trop pour que je puisse rester crédible. Je prends les devants, choisissant de commencer par un aveu. Petite réflexion de la part de Leah et il m’interroge sur la date de mon dernier rencard. Je me mets à rire un peu quand il se justifie, il commence soft c’est vrai, mais je sais aussi que la réponse à l’autre question le gênerait probablement. Je réfléchis un instant « Hum… Y’a deux mois… je crois. » j’esquisse un sourire en coin et ajoute « Mais tu ne sauras pas si c’est effectivement la date de mon dernier rapport ou pas. » je hausse les épaules « Sauf si tu poses la question à ma prochaine vérité. » ça tombe sous le sens. Je bois puis le regarde, l’invitant à se lancer à son tour « Alors, action ou vérité monsieur le pas gynéco ? ». Ça fait des lustres que l’on a pas joué à ce jeu, je ne me rappelle même plus de l’âge que nous avions la dernière fois. Ou peut-être avais-je trop bu, déjà cette fois là, et ne m’en souviens plus du tout. « N’ai pas peur O’Malley, je serai gentille. » et le rictus que j’affiche suite à cette déclaration, n’a sans doute rien de très rassurant.

« Ouais, ouais. Justement je sais quand tu mens et tu vas le payer cher si tu essais. » Je joue le gars outré, ouvrant la bouche, les mains en l’air comme si j’étais le plus innocent des mecs sur cette planète. Ok, je peux bien essayer de tricher, je sais - et elle sait - que j’en serai toute manière incapable. Je ne sais pas lui mentir. Pas à elle, elle me connaît beaucoup trop bien. Je me lance alors, posant la première question à ma meilleure amie, puisqu’elle a préféré vérité à action. Je l’entends rire, pour la première fois depuis que je suis là, et je trouve ma performance plutôt honorable vu la situation. « Hum… Y’a deux mois… je crois. Mais tu ne sauras pas si c’est effectivement la date de mon dernier rapport ou pas. Sauf si tu poses la question à ma prochaine vérité. » Je lève les yeux au ciel d’un air à nouveau innocent. « Non mais t’as raison, je suis pas sûr que j’ai envie de savoir. » Elle n’a pas dit à voix haute ce qu’elle a pensé tout bas, mais il y a certaines choses qu’elle n’a pas besoin de dire. « Alors, action ou vérité monsieur le pas gynéco ? » Je ris un peu, voyant qu’elle est entrée dans le jeu, et ça me fait du bien de voir qu’elle arrive un peu à penser à autre chose, grâce à moi. « N’ai pas peur O’Malley, je serai gentille. » Elle me sort son sourire diabolique et je fronce les sourcils. « Quoi ? C’est maintenant que je me sens comme dans un film d’horreur c’est ça ? C’est le moment où je choisis action et que tu me cours après pour me découper en morceaux ? » Je fais une grimace, très exagérée, juste dans l’optique de la faire rire un peu. Ce soir, je me transforme en clown, je suis là pour ça. « Bon, bah vérité alors. Je veux garder ma tête. Enfin. Sur mes épaules quoi. » Je sais qu’elle serait capable de me sortir une question très gênante, je l’attends au tournant. En attendant qu’elle y réfléchisse, je récupère mon verre que je remplis pour le boire d’une traite, et être sûr d’être au même niveau qu’elle niveau alcool dans le sang, même si proportionnellement vu nos carrures, je devrais sans doute boire quasiment le double d’elle pour être au même niveau. Je repose mon regard sur elle, mâchant bruyamment - et avec exagération - quelques chips. « Alors Madame la Marquise ? Les neurones ont du mal à se connecter ? Le rhum ça rend fou il paraît ! » Je hoche la tête, comme si je venais de donner une information importante dans une affaire de police.

Leah s’est donné pour mission de me changer les idées et je lui en suis infiniment reconnaissante, c’est pour ça que j’y mets du mien, adhérent à ses conneries et acceptant de jouer à ce jeu d’ado “action ou vérité“. Je pose mes conditions, interdiction de se défiler car même si je connais mon meilleur ami par cœur et qu’il ne peut pas me mentir, je sais qu’il est capable d’essayer. Il joue les innocents, mais il n’y a qu’avec moi que ça ne prend pas totalement, je sais ce qu’il se cache sous ce sourire soit disant d’ange. Bon ok, il est vraiment du genre droit dans ses bottes, mais ça ne l’empêche pas de se montrer rusé quand il le veut. Je commence avec une vérité, Leah se met presque mal à l’aise tout seul en m’interrogeant sur ma vie sentimentale presque intime. Je réponds sans détour, comme à mon habitude… la vie continue c’est ce que l’on dit, non ? Le rhum m’aide bien à relayer la peine au second plan, lui et mon meilleur ami sont de parfaits alliés. Sa réponse obtenu c’est à monsieur l’innocent de jouer, je lui affirme que je serai gentille, le jeu ne fait que commencer après tout. Mon sourire dit un peu le contraire, Leah ne manque pas d’y réagir en jouant les poules mouillées, me faisant rire au passage. Il est fort, vraiment très fort. « Tu la garderas au moins pour ce tour là. » répliqué-je en me mettant déjà à réfléchir à la question que je vais lui poser. A vrai dire j’en ai déjà tout un tas qui me viennent à l’esprit, le problème c’est plutôt de choisir celle que je vais poser maintenant, pour la première. L’alcool ne me rend pas plus rapide à me décider, au contraire et je sens mon meilleur ami s’impatienter un peu. « Si tu mâchais moins fort j’arriverai peut-être à m’entendre penser. » lui dis-je sur un air faussement moralisateur avant de hausser les épaules « Le rhum n’a rien à voir là dedans. » tu parles ! Je m’en sers un nouveau verre « On est déjà taré tous les deux, alors y’a pas de risque. » je bois et prends enfin ma décision « Est-ce que tu t’es décidé à coucher avec la nana que t’as rencontré sur l’application ? A moins que ça ne soit déjà fait. » je hausse les sourcils plusieurs fois, un sourire en coin « Don Juan. ». Comme une illumination soudaine, merci la boisson, j’ouvre plus grand les yeux et pointe Leah du doigt « Tu me l’as même pas montré ! » ou peut-être qu’il l’a fait mais j’ai oublié. Non je ne crois pas… sinon je l’aurais probablement traité de connasse, intérieurement. C’est ce qu’on fait nous les nanas, on se traite de connasse ou de pute selon le degré de beauté de la rivale. Enfin pas que je la vois comme une rivale, mais bon c’est mon meilleur ami à moi… alors qu’elle fasse gaffe cette pé… fille.

Je me dis que jouer est encore le mieux pour lui changer les idées, et je m’en félicite, parce que ça a l’air de plutôt bien fonctionner, elle rit même. Pour moi, c’est une première victoire. Je la regarde réfléchir à sa question tout en souriant. « Si tu mâchais moins fort j’arriverai peut-être à m’entendre penser. » Je joue la moue outrée, toujours plus pour essayer de l’amuser. « Le rhum n’a rien à voir là dedans. » lâche-t-elle suite à ma provocation sur ses neurones. Ça m’amuse. « Oui oui c’est c’qu’on dit ! » Et je continue de mâcher mes chips avec toujours plus d’exagération, pour l’emmerder. « On est déjà taré tous les deux, alors y’a pas de risque. » Je ris un peu tout en hochant la tête. Sur ce coup là, elle a pas tout à fait tort. Et enfin, elle reprend la parole. « Est-ce que tu t’es décidé à coucher avec la nana que t’as rencontré sur l’application ? A moins que ça ne soit déjà fait. Don Juan. » Oulà, elle met la charrue avant les boeufs là. Je vais pour ouvrir la bouche et la regarde me pointer du doigt. « Tu me l’as même pas montré ! » Je referme la bouche en faisant claquer mes dents avant de soupirer. « Non, je l’ai pas revue, pas encore. Je lui ai envoyé un message, on doit se revoir, mais je sais pas si… » Elle me pique mon téléphone et tape le code. « Hey ! » En même temps, je m’en fous, j’ai rien à lui cacher. Rien qui pourrait compromettre ma ‘réputation’ en tout cas. Et puis pas non plus des masses de conversations. « Ms Pepper si tu la cherches… » Visiblement, elle vient de tomber dessus vu les yeux qu’elle fait, et les miens grimpent au ciel d’un seul coup. « Je t’ai dit ! Elle est jeune ! » Oui, elle est très jolie aussi, je crois d’ailleurs que c’est ça qui m’a ‘intimidé’, ou du moins qui a rendu mon assurance chancelante. Ça, et son assurance à elle aussi, sa manière de me faire du rentre dedans sans se planquer. « Elle aime les filles aussi j’crois. Tu peux lui envoyer un message si tu veux ! » Jazz remonte son regard réprobateur pour me toiser et je ris un peu en haussant les épaules. « Mais quoiiii ??? T’as vu comment tu regardes ses photos là ? C’est bon, tu veux pas non plus nous imaginer au lit elle et moi non ? » Je bois mon verre de rhum et récupère mon téléphone. « Suffit les conneries. J’ai répondu à ta question, maintenant à toi ! Action ou vérité ? » J’arque un sourcil, et j’entends qu’on sonne à la porte. « Sauvée par le gong, mais tu vas pas t’en tirer comme ça ! » Je me lève pour aller récupérer la nourriture entre les mains du livreur et reviens auprès de ma meilleure amie. « Alors ? »

Spoiler:

Leah a choisit vérité donc je suis en droit de poser une question indiscrète, c’est même là tout le but de ce jeu. Qu’est-ce que j’ai envie de savoir qu’il ne me dirait pas forcément comme ça ou à condition que je le cuisine un moment ? Ma réflexion m’amène à cette rencontre qu’il a fait via l’application de rencontre à laquelle il m’a inscrite aussi. Curieuse, je l’interroge sur la suite des évènements si suite il y a eu. Et au passage je proteste de n’avoir eu aucun droit de regard sur la potentielle conquête en question. En tant que meilleure amie je veux voir à quoi elle ressemble, c’est normal. J’apprends donc que pour le moment il a seulement repris contact et qu’ils doivent se revoir « Intéressant. » je lui pique son téléphone et pars en quête de photo de cette jeune inconnue, on est jamais mieux servis que par soi-même. Je fouille dans les conversations, il m’indique son pseudo au moment où je clique sur le profil de la demoiselle. WTF ! Mais c’est quoi ce truc pas possible ?! J’écarquille les yeux, j’ai toute les raison de la traiter de connasse intérieurement. Leah me parle de sa jeunesse, là clairement je juge ça comme étant un détail. Je regarde chacune de ses photos avec attention… bordel elle est canon. C’est autorisé les gens comme ça ? Absorbée par ce que j’ai sous les yeux je donne de la matière pour que mon meilleur ami me taquine. Apparemment sa conquête est bi et il m’invite à tenter ma chance. Je relève sur lui un regard qui en dit long sur ce que je pense de sa remarque et il se sent aussitôt comme pris en faute, ce qui amène une tentative de défense de sa part. « Non mais… elle est pareille en vrai ? Parce que là y’a de quoi se demander si elle est pas photoshopée. » je grimace et secoue la tête « Mais non je vais pas vous imaginer au lit ! » certainement pas, d’ailleurs savoir qu’il va peut-être ce taper cette nana me laisse un goût étrange. Un peu amer, je crois. Leah nous ramène sur le jeu, c’est mon tour « Oui bah ça va ! T’as qu’à trouver des nanas moins… moins moins quoi. » je me racle la gorge, bois puis m’apprête à répondre quand on sonne à la porte. C’est la bouffe qui arrive, mon estomac est en joie. Mon meilleur ami dépose le tout sur la table basse et telle une morfale je m’empresse de me servir « J’allais dire action, mais j’vais partir sur vérité en fin de compte. J’ai trop faim. » c’est un argument comme un autre. Face au regard de Leah je me stoppe dans mon élan, je comprends très bien ce qu’il se passe « J’ai dit “j’allais dire action“ ça compte pas ! » je soupire « Tu vois quand je dis que tu triches… » je lève les yeux « Ok ça va. Action. Monsieur le tricheur. » quand je bois j’ai toujours un moment où mon âge mental décline, je dois être dans cette phase là…

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 « Non mais… elle est pareille en vrai ? Parce que là y’a de quoi se demander si elle est pas photoshopée. » Je ris à ses bêtises et hoche la tête. « C’est bien ça le problème, elle est pareille en vrai. C’est pour ça que j’me suis barré !! » C’est contradictoire, je sais. « Mais non je vais pas vous imaginer au lit ! » Je grimace et secoue la tête. « Erk, j’espère pas non ! » J’ignore si je reverrai cette fille, si je coucherai un jour avec elle ou non, je n’ai aucune envie de prévoir ce genre de chose. Alors au lieu de faire des paris sur l’avenir, je préfère jouer le roi de l’humour avec Jazz. A elle de répondre à la question, action ou vérité, mais le repas arrive et ça la sauve. Tant mieux pour elle, mais elle s’en tirera pas comme ça. « J’allais dire action, mais j’vais partir sur vérité en fin de compte. J’ai trop faim. » Je ris un peu et nous déballons notre repas avec appétit. Je dois dire que ça me fait plaisir de voir qu’elle a faim, c’est une bonne chose au vue des circonstances. « J’ai dit “j’allais dire action“ ça compte pas ! Tu vois quand je dis que tu triches… Ok ça va. Action. Monsieur le tricheur. » « Heyyyy mais m’agresse pas j’ai rien dit ! Je réfléchissais à la question que j’allais poser, j’suis pas v’nu pour souffrir okay ? » Je ris un peu et embraye. « Mais action c’est bien ! » Faut juste que de trouve quoi lui faire faire. Je réfléchis quelques secondes et pointe du menton les nouilles chinoises. « Tu vas manger exclusivement avec les baguettes. Pas de fourchette, pas de doigts. » C’est pas la plus douée pour se servir des baguettes et ça m’a toujours fait rire qu’elle galère, et qu’elle lâche l’affaire. Cette fois, elle a pas le choix, c’est le jeu qui veut ça. « Et moi, action. Tu me fais trop peur avec tes questions ! » Je me mets à rire un peu et commence à manger avec les baguettes en la regardant faire, amusé. Le but, c’est encore qu’on passe une bonne soirée, qu’elle pense à autre chose… Je suis là pour ça.

Il est là son plus grand pouvoir… celui de me redonner le sourire, me faire retrouver l’appétit juste en étant là pour jouer avec moi à ce jeu d’ado un peu idiot. Leah a toujours eu cet impact sur moi, depuis notre rencontre, alors que je vivais dans le silence me sentant isolée des autres. J’étais dans mon monde, il n’appartenait qu’à moi ou presque et il a su s’y faire une place. Maintenant je ne l’imagine plus autrement, je ne peux envisager ma vie sans lui. Je n’imaginais pas non plus la faire sans Stella mon autre pilier, pourtant il va falloir mais c’est seulement avec mon meilleur ami que j’y parviendrais. L’alcool aidant, j’ai laissé de côté mes pensées endeuillées et ma peine. C’est juste en stand by, au fond je le sais, mais il fait tout pour m’aider et j’ai toujours fais des efforts pour lui bien plus que pour quiconque d’autre. Comme celui de masquer cette pointe de jalousie ressentie bien malgré moi en voyant les photos de cette nana qu’il a rencontré. Elle est presque irréelle, le genre qui n’existe que dans les magazines… et pourtant. Leah admet avoir été intimidé par la jeune femme, il y a de quoi, j’imagine je ne suis pas un mec. Si une partie de moi le dissuaderait volontiers de revoir cette fille pour aller au bout du rendez-vous, l’autre veut l’encourager, parce que je sais que mon meilleur ami a besoin de sortir de sa zone de confort et se lâcher un peu. Mais il est malin, il ne veut pas m’entendre le pousser d’avantage s’empressant de me faire jouer plus vite. L’arrivée de notre repas me laisse un bref répit et j’opte pour vérité au lieu de l’action préalablement choisie. Le regard de Leah me traite de poule mouillée, enfin c’est comme ça que je l’interprète après plusieurs verres de rhum ingurgité, alors je rectifie mon choix non sans l’accuser d’être un tricheur.
« Ouais ouais ouais fais l’innocent… ton regard là. Pfff » c’est tout ce que je trouve comme arguments pour montrer que j’ai raison. Il triche, point. Et peut-être par vengeance pour mon “agression“ ou juste parce qu’il a un côté petit con inné, le salopiot me mets au défi de manger exclusivement avec des baguettes. Bien sûr Monsieur sait parfaitement combien je galère… on m’a expliqué plusieurs fois comment faire, mais je n’y arrive pas. J’ouvre la bouche prête à protester mais me ravise. C’est le jeu. Un soupir plus tard je déballe mes baguettes et me prépare à galérer encore plus que d’habitude, taux d’alcoolémie oblige. Leah choisit quant à lui action, effrayé par mes questions, je crois qu’il ferait mieux d’avoir peur tout simplement. « Très bien… Hum. » j’arque un sourcil et sourit, j’ai vite trouvé mon idée « Chaque fois que je fais tomber un truc de mes baguettes tu retire une fringue. » je hausse les épaules « On va voir si monsieur fait encore le malin quand dans deux minutes il devra manger à poils ! » je ris « Et promis je ferai pas exprès. » je fais une moue « J’ai même pas besoin de me forcer pour être nulle avec ça. » je montre les baguettes, sourire triomphant aux lèvres « Action. ».

C’est avec toute la bienveillance dont je fais preuve que je donne le défi à Jazzlyn. Je pense que ça va être marrant, vu comme elle se débrouille avec ses baguettes. C’est finalement à mon tour de choisir entre action et vérité, et étant donné le regard que me lance ma meilleure amie, je crois qu’il est plus judicieux de choisir un défi sous forme d’action. Jazz n’a pas trop besoin de réfléchir on dirait. Faut dire que l’alcool nous est déjà bien monté à la tête. Son sourire m’apparait comme machiavélique et je prends peur avant même qu’elle n’ait eu besoin d’ouvrir la bouche. Je regrette mon choix finalement. « Chaque fois que je fais tomber un truc de mes baguettes tu retire une fringue. » J’ouvre grand les yeux, la mine choquée. Quoi ? « On va voir si monsieur fait encore le malin quand dans deux minutes il devra manger à poils ! Et promis je ferai pas exprès. J’ai même pas besoin de me forcer pour être nulle avec ça. » Je reste bloqué un instant, ne prenant pas vraiment conscience que je vais réellement finir à poil d’ici très peu de temps. Elle a juste le temps de dire « Action » que ses baguettes lâchent malencontreusement la nourriture qu’elle avait essayé de pincer. Fait chier. Je soupire et commence par facile, et retire mon t-shirt. Je dis facile parce que je ne compte pas le nombre de fois où Jazz m’a vu torse nu, on est allés à la plage ensemble de nombreuses fois. Et même si le contexte est différent, elle connait mon corps, en quasi totalité. Il n’y a que sous mon caleçon qu’elle a jamais rien vu, quoi que je me souvient d’une fois où elle est entrée dans la salle de bain j’étais à poil, mais de dos, elle a dû entrevoir mon fessier. C’était y’a quand même quelques années, peut-être même dix, j’ai du mal à le souvenir. Toujours est-il que je me retrouve vite torse nu et réfléchis pour lui trouver une action. « Hum tu vas… aller mettre ton pyjama. Et ne triche pas, tu mets celui avec lequel tu as dormi hier ! » En espérant qu’elle ne dorme pas nue parce que là ce serait franchement embarrassant. « Et dans ta course, tu peux réfléchir à une vérité pour moi. » Je la laisse se lever pour aller dans sa chambre et essaie de manger un peu pour éponger l’alcool que je sens me faire déjà tourner un peu la tête. J’ai pas l’habitude, je sais que même si mon corps me permet de tenir mieux qu’un corps plus frêle comme celui de ma meilleure amie, je ne suis pas non plus le plus apte à tenir face à une forte dose d’alcool.