Acting natural (Rayden#4)

Rayan s’empresse se poser des questions rapport à l’audition, histoire de reprendre un peu l’avantage et ne pas trop se laisser embarquer par mon attitude de plus en plus charmeuse. Elle pourrait me remballer, me mentir en me disant qu’elle a quelqu’un, que ça la met mal à l’aise. Au lieu de ça, elle se laisse faire, je suis sûre qu’au fond elle adore ça. Tant qu’elle ne me fait pas comprendre que ça ne la dérange pas, je ne compte pas m’arrêter en si bon chemin, et surtout pas avec ce que je suis en train de boire. Je trouve la page et le passage en question, sur lequel portera très probablement l’essai, et la laisse lire. « C’est bien écrit. » Je souris et me contente de hocher la tête, voyant qu’elle a été émue par la scène qu’elle vient de lire, sans pour autant connaître le reste de l’histoire. « Je pense que c’est effectivement un bon test. Toute l’essence du personnage semble être représentée… » Je hoche légèrement la tête sans rien ajouter de plus alors que le serveur nus apporte nos deux nouveaux cocktails, les mêmes. Heureusement, parce que déjà que l’alcool fort ce n’est pas trop mon genre, si en plus je fais des mélanges, croyez moi, je dormirai sous la table sous peu. « Je vais avoir du boulot. » conclut-elle en poussant le scenario et je lui offre un sourire. « Oui, mais si c’est ce que tu aimes, ce sera pas vraiment du boulot… » Travailler quand on aime son travail, ça n’a rien de désagréable. C’est ce que je ressens depuis que j’ai changé de voie. Je fais tinter mon verre avec le sien lorsqu’elle le lève, et attire la paille entre mes lèvres pour en boire une gorgée. Le pire c’est que ce très est sucré, et que ça donne soif. Je crois qu’il est là, l’attrape couillon. « Je crois qu’après ce verre tu ne seras définitivement plus en état de conduire. Enfin je pense que c’est déjà plus le cas… » Dit-elle en riant. Je me contente d’un sourire, jouant à la grande dame que rien n’atteint. « N’importe quoi, je suis encore laaargement en état de faire tout ce que j’ai envie de faire. » Je souris, davantage mutine. « Tu as ton permis ? Je te laisserai les clés de ma voiture et tu me ramèneras chez moi, si ça te fait plaisir. T’auras même le droit d’appuyer sur le champignon, elle en a sous le capot… » Je lâche un petit rire adorable, beaucoup plus détendu qu’en temps normal, et bois une nouvelle gorgée de mon verre. « Je sais même plus ce qu’on racontait. Hum stip poker, AH OUI ! Tu me disais que tu n’avais jamais essayé avec une autre femme. » Je plisse un peu les yeux, penchant sensiblement la tête sur le côté. « Par manque d’envie ou d’opportunité ? » Je crois que c’est fini pour le discernement. Merci les cocktails, elle peut s’en prendre qu’à elle-même.

Bien que ça soit l’opposé de ma volonté, je suis en train de jouer avec le feu en laissant à Eden la possibilité de jouer son numéro de séductrice. Ses remarques et sous-entendus se font de plus en plus gênantes pour moi et pourtant je suis d’autant plus mal à l’aise à l’idée de remettre clairement de la distance avec elle. Même en la sachant capable de faire la part des choses, j’ai un peu peur qu’elle se vexe et de perdre sa précieuse aide. C’est sans doute le moment d’agir, la remballer gentiment en lui disant que je ne suis pas intéressée et qu’elle se fatigue pour rien… mais j’en suis incapable. J’ai beau être connue pour une certaine franchise, je ne parviens pas à formuler de réponse pour mettre un terme à ce jeu dont je ne maitriserai bientôt plus grand chose. Je me donne l’illusion de continuer à gérer les choses en orientant la discussion vers le casting. Malgré cette diversion la trêve est de courte durée, l’alcool fait son œuvre de désinhibiteur et la jolie blonde a très nettement changé d’attitude. Je la découvre sous un autre aspect de son intrigante personnalité, même en ayant un peu trop bu elle garde un charisme indéniable. Je souris à sa remarque concernant le travail « Fais un métier que tu aimes et tu n’auras pas à travailler un jour de ta vie. » cité-je en ayant oublié qui à dit ça « L’étymologie du mot travail vient d’un engin de torture le tripalium, et travailler c’était torturer. » expliqué-je pour donner d’avantage de sens à ma précédente citation et continuer à maintenir le cap d’une conversation sans possibilité de sous-entendus.
La quadra ne masque pas son engouement en trinquant avec moi et je ne peux m’empêcher une remarque sur son état. Il est exclu qu’elle reprenne le volant après cela, même si elle prétend en être tout à fait capable, et plus encore. Merde j’ai remis une pièce dans la machine on dirait. Cependant la suite de ses propos attirent mon attention. Elle me laisserait vraiment conduire sa voiture ? Apparemment oui. Je ne peux retenir un léger rire qui se joint au sien « Faut que j’arrête de boire maintenant alors. Mais le problème c’est rentrer ensuite depuis Beverly Hills… quoi que je peux faire le trajet en empruntant le vélo de ta fille ou sa trottinette. » plaisanté-je. Je bois ce qui sera sans doute ma dernière gorgée d’alcool, vraisemblablement au mauvais moment puisque je manque de m’étouffer lorsque Eden reprend la parole revenant tout naturellement sur mon inexpérience en matière de relation entre deux femmes. Elle se montre définitivement beaucoup plus curieuse et évidemment le sujet n’est pas choisi par hasard. Le moment est venu de couper cours à tout ça. Allez Rayan ! Ma toux se calme et je reprends contenance « Par absence d’intérêt. » répliqué-je, tout en sachant que c’est un mensonge. Voilà je suis encore plus mal à l’aise que si j’avais été clair plus tôt. Bordel pourquoi j’ai pas dit stop avant ? Je hausse les épaules « J’ai peut-être laissé penser que… je… mais non. » on a fait plus limpide, mais Eden va bien comprendre que je ne suis pas attirée par les femmes, donc pas par elle. Je crois que je tente d’avantage de me berner moi. Est-ce que ça marche ? Joker. Coup d’œil discret sur ma montre puis sur le verre de la productrice « Je vais régler la note et puis je te ramène ? » dis-je en me levant. Je ne cesse de repenser à ce que j’ai dit et comment je me sens depuis, je n’ai pas choisi le bon rôle cette fois. L’addition payée je rejoins la jolie blonde « Alors tu as confiance en mes capacités de pilotes ? » demandé-je avec le sourire.

Rayan gagne du temps, elle cherche à éviter mon charme qui je sais pourrait pousser bien des personnes dans leurs retranchements. Elle y est sensible, je le vois, son trouble est visible mais elle ne veut pas le voir. J’y arriverai. Lorsqu’elle parle du fait que je ne serai bientôt en état de conduire, je m’en amuse et lui propose de me ramener tout en testant ma voiture. Je ne sais pas si elle peut être sensible à ce genre de chose, peu de femmes le sont, mais conduire une voiture qui en a dans le ventre, c’est toujours agréable. Il suffit d’aimer conduire. « Faut que j’arrête de boire maintenant alors. Mais le problème c’est rentrer ensuite depuis Beverly Hills… quoi que je peux faire le trajet en empruntant le vélo de ta fille ou sa trottinette. » Je ris un peu bêtement rien qu’en imaginant la scène. Elle a de l’humour, et avec l’alcool je suis plus que bon public. C’est une affaire qui roule. « Je te payera un taxi. » Mon regard plongé avec intensité dans le sien, je finis par lui sourire. « Pour m’avoir évité de prendre des risques, c’est pas cher payé. » Je ne tarde pas, j’ai bien peur que nous n’ayons pas assez de temps, et je reviens sur le sujet qui m’intéresse le plus. Sa pseudo non attirance pour les femmes. Parce que ça m’intrigue, quand même, mon radar n’est pas très clair sur le sujet, c’est qu’elle ne l’est pas non plus. « Par absence d’intérêt. » Sa réponse est pour le moins claire. J’arque un sourcil sans la lâcher des yeux, et finis mon verre avant de lever les mains au un peu plus haut au niveau de mon visage, paumes ouvertes, en signe de capitulation. « Message reçu. » Je fais mine d’avoir saisi le message, mais je ne compte pas m’arrêter là tant que j’aurai des doutes sur sa supposée hétérosexualité. « J’ai peut-être laissé penser que… je… mais non. » Je lui offre un sourire sincère et secoue la tête. « Y’a pas de mal Rayan, je t’assure. Ne te mets pas dans des états pareils. » Je ris légèrement et la regarde se lever après avoir jeté un oeil à sa montre. « Je vais régler la note et puis je te ramène ? » Hochant la tête, je la laisse repartir sans un mot et me lève à mon tour, je sens que ça tangue un peu, il faut que je m’habitue une seconde à la position debout. C’est mal barré. Je garde une main sur le haut de la banquette en attendant le retour de Rayan. « Alors tu as confiance en mes capacités de pilote ? » Je ris un peu avant de répondre du tac au tac. « Pour être honnête, j’aurai plus confiance en n’importe qui qu’en moi-même à cet instant précis. » Sans lui demander son avis, je me saisis de son bras, y entourant le mien pour me soutenir un minimum et faire genre que j’arrive à marcher droit. « C’est super fourbe ton bar à cocktails là. » Je laisse échapper un nouveau rire et nous marchons jusqu’à ma voiture, doucement mais sûrement. A mi chemin, je souffle un peu et m’arrête pour retirer mes talons. « Pourquoi t’as voulu me faire boire au fait ? Tu avais quelque chose à me demander ? » Je tourne la tête pour la regarder et lui sourire. J’ai l’impression qu’elle n’a jamais été plus belle que ce soir, c’est dingue. Un verre de plus et je crois que je n’aurai pas réfléchi avant de fondre sur ses lèvres. Là, il me reste un petit morceau de barrière morale.

C’est probablement un peu tard mais je me suis enfin décidée à mettre fin aux spéculations d’Eden quant à l’issue de ce jeu de séduction qu’elle a instigué. Je profite de sa question bien plus directe pour lui faire savoir que je ne suis tout simplement pas intéressée par les femmes. Le message passe, il a l’air bien reçu mais je surenchéris, pas si convaincue moi-même de ce que j’avance. C’est peut-être une erreur d’ailleurs, si j’en crois la réponse de la quadragénaire. De quel état elle parle au juste ? Je vais bien, je suis tout à fait calme… je veux juste être claire. Elle rit, j’esquisse un rictus et trouve un échappatoire simple avec la note à régler. La soirée touche à sa fin, c’est plus sage, je ne suis pas certaine d’arrivée à continuer de faire semblant que tout ça soit sans effet. L’addition payée je rejoins Eden qui si elle s’est levée n’a pas quitté l’appuie de la banquette. Je lui demande si elle est toujours prête à me confier la mission de la raccompagner et sa réponse me fait sourire « Je crois que c’est judicieux. » répliqué-je en la laissant se saisir de mon bras. J’attends d’être à l’extérieur du bar pour faire un commentaire « Tu tangues un peu peut-être ? » ce à quoi elle rétorque que l’endroit est fourbe. Petit haussement d’épaules, mon rire se joint au sien « Un peu, je te l’accorde. » et elle n’est pas la première à en faire les frais. Le trajet jusqu’à sa voiture n’est pas très long mais visiblement trop pour qu’elle l’endure sur ses talons qu’elle retire à mi-chemin. Nous voici désormais au même niveau, ou presque « Eden Lewis descend d’un étage » dis-je malicieusement pour la taquiner un peu.
Evidemment la jolie blonde est en droit de se demander pourquoi je l’ai amené là et pourquoi j’ai fait le choix de ce cocktail en sachant combien il est traitre. Ai-je fait ça pour lui demander quelque chose ? Je secoue négativement la tête la tournant dans sa direction « Non. J’ai juste du sang irlandais et c’est une sorte de tradition. » je ris « Je n’avais pas l’intention de te faire boire mais tu m’as mise au défi de le faire en prétendant particulièrement bien tenir l’alcool. Nous savons désormais que c’était du bluff. » je hausse les épaules et reprends, mon regard s’arrêtant un instant dans le sien « Peut-être qu’inconsciemment je voulais te rendre moins… intimidante. » avoué-je. Nous arrivons à hauteur de sa voiture, je me plante devant elle et sourire aux lèvres tends la main dans sa direction attendant qu’elle me donne les clés « Je ne pense pas pouvoir réussir à la démarrer sans ça, les voitures de maintenant ont trop d’électronique. » me rendant compte que j’avoue à demi-mot être capable de démarrer une voiture sans les clés j’ajoute « C’est ce que j’ai entendu dire. » Eden a bu elle n’y verra que du feu. Je ne vais quand même pas lui raconter que mon père m’a appris ce genre de choses. Une fois les clés obtenues j’ouvre la portière côté passager pour inviter la propriétaire de la voiture à s’installer à bord « Tu noteras que je prends mon rôle de chauffeur à cœur. ». Une fois au volant je suis les indications de la productrice.

Nous quittons le bar et je lui fais part de ma réflexion en ce qui concerne son bar, que je trouve vraiment fourbe. « Tu tangues un peu peut-être ? » « Chut. »[/color] Je ris légèrement, je ne vais pas m’offusquer pour si peu, et puis c’est de bonne guerre, et surtout elle n’a pas tort. Je crois surtout qu’elle a beaucoup de chance parce que j’en aurai émasculé plus d’un pour bien moins que ça, en terme de réflexion. J’en viens à retirer mes talons, pensant sans doute marcher plus droit sans ces engins de torture. « Eden Lewis descend d’un étage » dit-elle visiblement amusée, ce qui me fait rire aussi. « Profites-en, tu n’auras pas la chance de me voir pieds nus si souvent. » Pas parce que je n’aime pas mes pieds, ils sont tout ce qu’il y a de plus normal, mais surtout parce que porter des talons hauts me procure cette sensation de hauteur nécessaire à me donner le courage dont j’ai besoin pour mon boulot. C’est idiot sans doute. Mais ce simple geste qui pourrait sembler anodin face à Rayan, est surtout la preuve que je ne ressens pas - ou plus - ce besoin de l’impressionner, ou que sais-je. Je suis simplement naturelle, comme je le suis avec très peu de personnes. Je lui demande tout de même si elle a voulu me demander quelque chose avec ces cocktails si traitres. « Non. J’ai juste du sang irlandais et c’est une sorte de tradition. Je n’avais pas l’intention de te faire boire mais tu m’as mise au défi de le faire en prétendant particulièrement bien tenir l’alcool. Nous savons désormais que c’était du bluff. » Je ris, amusée par sa remarque, et tourne la tête pour pouvoir la regarder, plongeant ainsi mon regard dans le sien, avec une intensité qui semble nouvelle. « Peut-être qu’inconsciemment je voulais te rendre moins… intimidante. » Si j’avais bu ne serait-ce qu’un demi verre de plus, je crois qu’à cet instant prévis, j’aurai déjà séparé les dizaines de centimètres qui nous séparent pour venir chercher ses lèvres que je rêve de goûter depuis bien trop longtemps. « J’imagine que je le suis moins, effectivement… » Même si je trouve ça flatteur qu’elle me trouve intimidante, je dois bien l’avouer. Nous arrivons finalement à hauteur de ma voiture et Rayan me fait face, me demandant les clés sans un mot, se contentant de tendre la main pour que j’y dépose mes clés, ce que je fais sans attendre. « Je ne pense pas pouvoir réussir à la démarrer sans ça, les voitures de maintenant ont trop d’électronique. C’est ce que j’ai entendu dire. » Je plisse un peu les yeux en la regardant. « Je crois que j’ai encore beaucoup de choses à découvrir sur toi… » Je lui souris déjà elle ouvre la portière passager pour me laisser montrer. « Tu noteras que je prends mon rôle de chauffeur à cœur. » « Et gentlewoman avec ça. Tu me caches des choses plus sombre que j’imagine. C’est pas normal que tu sois célibataire, je vais devoir mener l’enquête… » Je plisse à nouveau les yeux en la regardant, puis souris et monte dans la voiture. Ce qui n’est pas fréquent pour moi d’avoir la place du passager, premièrement parce que j’aime conduire, et deuxièmement parce que je ne fais pas confiance à grand monde en ce qui concerne la conduite d’une voiture, surtout celle-ci. Je la laisse démarrer la voiture et la prendre doucement en main, alors que j’allume la musique, une musique d’ambiance, relaxante et n’interdisant pas une discussion en parallèle. « Alors, quels sont les vices de Miss McHalway ? A part le goût pour la boisson, soit-disant à cause de tes origines irlandaises. D’ailleurs entre nous, ça aussi j’y crois moyen, je vais retrouver la carte de mon détective privé sans plus tarder… » Je plaisante évidemment, mais j’ai surtout envie d’en savoir plus sur elle, je ne suis jamais rassasiée il faut croire.

J’ai parfaitement conscience que ce qui m’est donné de voir est totalement inédit. La crainte et respectée Eden Lewis peinant à marcher droit après deux cocktails au rhum, peu de personne ont dû en être témoin. Je ne boude pas mon privilège, profitant pour taquiner gentiment la quadragénaire sur son équilibre un peu précaire. Elle va même jusqu’à retirer sa paire d’escarpin et à peine ma petite remarque faite me conseille d’en profiter parce que c’est une image rare. Je ne peux m’empêcher de me demander si elle est du genre à aller à la plage avec des talons, ça me fait rire intérieurement de penser à ça mais je me ravise rapidement. De un elle ne doit pas être franchement du style à aller à la plage… pourquoi je n’en sais rien mais c’est une intuition comme une autre, et de deux je n’aurai pas l’occasion de vérifier. Intriguée pas mes choix Eden m’interroge sur les intentions placées derrière cette soirée alcoolisée. Qu’elle le croit ou non je n’avais vraiment rien en tête en l’amenant dans ce bar et en commandant ces cocktails. Elle a voulu jouer, j’ai joué, elle a en quelque sorte perdu. Je mets en avant mes origines irlandaises, face l’alcool c’est toujours un bon prétexte. Si elle reste dubitative au moins elle rit, c’est plaisant. Pas qu’elle ai été difficile à dérider jusque là, mais ses rires sont plus naturels et authentiques depuis que l’alcool lui a un peu fait baisser ses barrières. J’admets alors qu’il y a peut-être une part de moi qui, inconsciemment, voulait la rendre moins intimidante. Elle n’a rien perdu de son charisme et de son aura, ils sont juste un peu floutés par le rhum. « Oui, je sais désormais que tu n’es pas une machine et que l’alcool a un effet sur toi. » nous parcourons les quelques mètres restant jusqu’à sa voiture dont je récupère les clés. Je parle un peu vite, laisse entendre avoir des compétences atypiques avant de lui ouvrir la portière en parfaite gentlewoman comme elle le souligne, et pour toute réponse à la remarque de la blonde je hausse les sourcils avec un air énigmatique.
Je démarre, me concentrant sur ma conduite afin de m’adapter à la voiture de la productrice. C’est plutôt chose aisée, je veux la même. Eden met de la musique en fond sonore, j’ai vraiment l’impression d’être son chauffeur et ça me fait sourire d’amusement. La curiosité de la jolie blonde ne semble pas endormie par l’atmosphère calme qui règne dans l’habitacle, elle parait décidée à pousser son investigation sur ma personne. Je lâche un rire franc « Va dire ça à mon père que je n’ai pas d’origines irlandaises... il va te démontrer, arbre généalogique à l’appui, qu’en dépit d’être la copie de ma méditerranéenne de mère j’ai bel et bien du sang irlandais. Tu ne serais pas déçue. » et des noms imprononçables elle en verrait un bon paquet. « Donc ce sont mes vices qui t’intéressent ? » je marque une courte réflexion et enchaine « Outre le fait d’être une alcoolique notoire, merci de l’avoir souligné, j’adore prendre un petit rail de coke de temps à autre. Pour casser la routine. » je laisse planer le doute et éclate de rire « Je plaisante évidemment. » elle s’en doute mais je préfère préciser. Je hausse les épaules « J’aime le chocolat, mais seulement le chocolat noir, faire du sport, la science, le théâtre, la bonne bouffe, le vin… J’aurai voulu voyager plus mais ne m’en suis jamais vraiment laissé la possibilité. Rien de bien original ou de palpitant. » un petit sourire en coin étire mes lèvres « Peut-être que je sais, en théorie, démarrer une voiture sans clé. A condition qu’elle soit assez ancienne. » je glisse un regard rapide vers Eden « J’évite de mettre ça sur mon CV. ». Nous arrivons dans le quartier de Beverly Hills, signe que nous sommes presque arrivées à destination « J’imagine que si je te retourne la question tu vas habilement t’arranger pour ne pas y répondre. » dis-je en m’arrêtant à un carrefour, regardant Eden afin qu’elle m’indique la direction à prendre.

Je plaisante avec elle, j’ai des doutes quant à ses supposées origines irlandaises, faut dire qu’elle est loin d’avoir le physique typique des habitants du pays. C’est cliché, c’est vrai, mais ça m’amuse de continuer ce petit jeu de taquineries que nous avons instauré depuis quelques temps. Elle me rétorque que son père serait vexé d’entendre mes paroles et je ris bien volontiers. « Donc ce sont mes vices qui t’intéressent ? » Je hoche la tête en souriant. « Tu viens de voir un côté de moi pas franchement glorieux, à moi d’apprendre quels sont tes moins bons côtés ! » Je la regarde en souriant, alors qu’elle s’apprête à répondre. « Outre le fait d’être une alcoolique notoire, merci de l’avoir souligné, j’adore prendre un petit rail de coke de temps à autre. Pour casser la routine. » J’éclate de rire sans ménagement. Elle ne se drogue pas, je ne suis pas dupe. Elle précise qu’elle plaisantait et je hoche simplement la tête. Je sais bien qu’elle plaisantait. Je veux une vraie réponse. « J’aime le chocolat, mais seulement le chocolat noir, faire du sport, la science, le théâtre, la bonne bouffe, le vin… J’aurai voulu voyager plus mais ne m’en suis jamais vraiment laissé la possibilité. Rien de bien original ou de palpitant. » Cette fois je lève les yeux au ciel. « Ce ne sont pas de vrais vices ça… Tu vas me faire croire que tu es une fille comme les autres, sans aucun défauts ? J’y crois pas… Trouve quelque chose. » J’arque un sourcil en la regardant, attendant qu’elle avoue quelque chose de plus croustillant. « Peut-être que je sais, en théorie, démarrer une voiture sans clé. A condition qu’elle soit assez ancienne. J’évite de mettre ça sur mon CV. » Je hoche la tête en souriant, taquine je réponds alors : « Une délinquante de bas étages alors. Et ben c’est du joli… Je te félicite pas… » Rayan s’arrête à un carrefour alors que nous arrivons dans mon quartier. « J’imagine que si je te retourne la question tu vas habilement t’arranger pour ne pas y répondre. » J’élude totalement sa question et montre la direction du doigt. « C’est par là. Et ensuite la prochaine à droite, puis gauche, et c’est le portail en fer forgé blanc. » Nous arrivons à destination sans plus tarder et je sors mes clés pour ouvrir le portail, qu’elle puisse rentrer la voiture. « Tu peux la garer sur le gravier là. » Je ne vais pas la faire entrer le 4x4 dans le garage, ça sert à rien. Une fois le moteur coupé je la regarde en souriant. « Si tu veux la réponse à ta question, tu vas devoir accepter de venir boire un dernier verre… » Je penche la tête sur le côté, toujours ce petit sourire au coin de mes lèvres. « La trottinette de Maé est à l’intérieur. Si tu veux l’emprunter, tu devrais entrer. » Toujours ce ton taquin, et je quitte l’habitacle de la voiture, la laissant faire de même. Je marche à reculons alors que je la sens indécise quant au fait d’entrer ou pas. « Alors, tu viens ? » Je vais me casser la gueule si je continue sur cette lancée…

Y’a pire comme côté pas franchement glorieux… on ne peut pas dire qu’Eden se ridiculise, elle a juste un peu bu. J’ai vu pire, bien pire, mais j’imagine que pour elle c’est déjà trop de se montrer sous ce jour là à la quasi inconnue que je suis. La quadra estime donc que je lui dois bien un petit aperçu de mes vices en guise de compensation, après un trait d’humour efficace je me perds dans des banalités, espérant sans doute qu’elle se contente du petit portrait banal que je lui fais de moi. Je ne crois plus au Père Noël depuis longtemps pourtant. Evidemment qu’elle capte la supercherie, il faut que je trouve mieux, un truc qui la contente. Je l’ai sous-entendus plus tôt mais le confirme, techniquement je sais comment voler une voiture. Pas le genre de truc dont je me vante, ce n’est pas exactement une compétence que l’on met en avant sauf pour intégrer un gang, je suppose. Je prends un air faussement offusqué par sa réponse « De bas étages ? Tss. ». Proche de notre destination je m’arrête à un carrefour en attendant qu’Eden me donne la direction à prendre, je tente également de la questionner sur ses propres vices, en étant sûre qu’elle va passer outre cette question. Dans le mile. Elle me guide en ignorant savamment ma remarque, il faut dire que j’ai tendu le bâton. Je m’arrête devant le fameux portail en fer forgé blanc et attend que celui-ci s’ouvre. J’entre dans la propriété de la productrice, gare la voiture à l’endroit indiqué et coupe le contact. La jolie blonde se décide alors enfin à me répondre, enfin en quelque sorte, parce qu’il ne s’agit pas réellement d’une réponse mais plutôt d’une carotte tendue. Je n’ai aucune certitude qu’elle se dévoile d’avantage si j’accepte ce dernier verre proposé. La mine joueuse elle ajoute que la trottinette de sa fille étant à l’intérieur c’est presque un passage obligé. Je ris, elle quitte la voiture sans me laisser l’opportunité de répondre quoi que ce soit. Je sors à mon tour, Eden me regarde avec toujours autant de malice dans le regard et marchant à reculons, on a vu meilleure idée étant donné son état, réitère son invitation.
Accepter me semble être une erreur, elle joue à nouveau je le sais, mais comme un papillon sachant pourtant qu’il risque de se cramer les ailes dans la lumière je suis malgré moi attirée, tentée de répondre positivement. Elle va finir par tomber en plus de ça avec ses conneries. Je soupire et me mets en marche pour la rejoindre « Ok ça va j’arrive. Remets la marche avant, j’ai pas envie d’avoir à te conduire aux urgences. » comme une gamine ayant obtenue ce qu’elle voulait Eden marche de nouveau normalement, du moins autant qu’il est possible avec son taux d’alcoolémie. Tu fais une connerie Rayan… me répété-je alors que la productrice ouvre la porte. Elle m’invite à entrer, ce que je fais avec un soupçon de retenue. Outre la persistance de l’idée que je commets une erreur en étant là, je suis également légèrement intimidée d’entrer un peu plus dans la sphère privée de la quadra. Je retrouve chez elle la même atmosphère que dans son bureau, tout est ordonné, propre, net, épuré et pourtant l’endroit n’est pas froid. « C’est plutôt pas mal chez toi. Un peu petit peut-être. » plaisanté-je en parcourant la pièce du regard, la seule pièce à vivre fait sans doute la taille de mon appartement entier… Eden nous sert ce fameux dernier verre pour lequel j’ai pris le risque de venir ici, elle me le tend et je la remercie avant d’enchainer « C’est le moment où je vois si tu n’as qu’une parole ou pas… » dis-je avec le sourire « Tu me dois une réponse. » j’échappe un petit rire « Et une trottinette. ». Je bois une gorgée « Je sais que dans le métier les promesses ne sont pas souvent tenues, la manipulation est reine. Mais j’ai envie de croire que tu te démarques de tout ça. » elle peut bien me penser naïve, je ne le suis pas, j’ai conscience d’avoir mis le pied dans un piège, si je l’ai fait c’est qu’une partie de moi l’a bien voulu et c’est là le véritable nœud du problème… je ne sais pas quoi en faire, comment la faire taire.

J’ai envie qu’elle entre, il n’y a pas besoin de me connaître sur le bout des doigts pour ça, au contraire même. Malgré tout, je tente au mieux d’être persuasive, alors que je ne marche toujours pas vraiment droit, et encore moins à reculons. « Ok ça va j’arrive. Remets la marche avant, j’ai pas envie d’avoir à te conduire aux urgences. » Un rire cristallin, presque enfantin s’échappe entre mes lèvres et je reprends alors ma route, à l’endroit cette fois. Je me rends compte que je ne suis pas totalement ronde quand j’arrive à entrer la clé dans la serrure du premier coup. Petite victoire. Je pousse la porte, désactive l’alarme, et referme derrière Rayan. « C’est plutôt pas mal chez toi. Un peu petit peut-être. » Je souris largement, retire ma veste et mes talons pour me mettre plus à l’aise. « J’envisage de faire agrandir un peu. J’ai l’impression de pas pouvoir mettre un pied devant l’autre. » Je plaisante, évidemment. Il y a la place pour vivre à quinze dans cette maison, mais c’est Cora qui a choisi. Je ne vais pas m’en plaindre, j’adore cet endroit. Je file droit dans la cuisine, simplement séparée par le bar, j’ai donc tout le loisir de laisser flâner mes yeux sur Rayan. « Installe-toi, mets-toi à l’aise, j’arrive. » Je sors deux petits vers et le limoncello, c’est la seule chose que je suis capable d’avaler si je veux être sûre de ne pas être malade à cause d’un vilain mélange. Je reviens donc dans le salon, Rayan est encore debout et je l’incite d’un geste du menton, à s’asseoir sur le sofa. « C’est le moment où je vois si tu n’as qu’une parole ou pas…Tu me dois une réponse.  » dit-elle, son verre en main. Je me laisse choir contre le dossier du canapé en la regardant, toujours souriante. « Et une trottinette. » Cette fois je ris un peu en hochant la tête « Tu trouveras quoi dire à ma fille si elle est en retard à ton cours demain. » Je ne me rends pas compte mais mon regard se charge d’une électricité plus intense lorsque je la regarde, j’ignore si c’est l’alcool ou simplement le fait que j’apprenne à la connaître et à l’apprécier. Elle m’a toujours plu, mais c’est de pire en pire on dirait. « Je sais que dans le métier les promesses ne sont pas souvent tenues, la manipulation est reine. Mais j’ai envie de croire que tu te démarques de tout ça. » Je la regarde en souriant, un peu mystérieuse, et me redresse pour poser mes avant-bras sur mes cuisses, pendant que je fais tourner la liqueur dans ce petit verre. « Je pense que ça dépend des gens. La manipulation ne passe pas forcément par les promesses non tenues. » Je lui offre un sourire mutin et poursuit « C’est d’ailleurs pour cette raison que je ne promets jamais rien. »[/color] Je ris avant avaler le contenu de mon verre, une gorgée, d’un coup sec, avant de grimacer. « Le vin, est un de mes vices. J’adore le bon vin, blanc de préférence, français c’est encore mieux. Le travail aussi en est un, je suis une acharnée du boulot, ça m’a éloignée de ma fille plusieurs années d’ailleurs… » Je laisse divaguer mon regard au fond de mon verre une seconde, pensive, avant de relever le regard vers elle. « Et les femmes aussi… » Je vois ses pommettes s’empourprer très légèrement. « Ne fais pas cette tête… tu as bien dû sentir que tu me plaisais, depuis le temps… » Je la déstabilise, et j’adore ça. J’ai juste envie de fondre sur elle, mais je me retiens encore un peu, juste un peu. Je me mords la lèvre inférieure en la regardant.

Je ris de la réponse offerte par Eden quant à ma remarque sur la taille de chez elle. De prime abord ce n’est pas évident mais elle a de l’humour et j’apprécie ce petit côté “pince sans rire“ qu’elle affiche volontiers. Elle a une personnalité imposante, son charisme, sa présence, ses talents de séductrice, impossible de rester indifférent face à elle. Certains doivent la détester, d’autres la craignent simplement et pour le reste sans doute qu’une bonne partie l’envie ou la désire. Moi ? Je ne sais pas bien où je me situe, je ne veux d’ailleurs peut-être pas le décider. J’ai l’impression d’être dans une situation ou l’entre deux est le maitre mot. J’oscille d’un sentiment à l’autre au gré de nos rencontres, de ces moments de complicités dont je mesure la rareté. Je me sens privilégiée là où j’aurai sans doute voulu me fondre dans la masse. Quoi que si je veux être tout à fait honnête avec moi-même, ce n’est pas totalement vrai. La productrice m’invite à me mettre à l’aise, est-ce vraiment possible ? C’est comme si tout était fait pour que je reste sur la retenue. J’ai toujours en tête que c’est une erreur et pourtant dans un même temps une force me pousse à aller plus loin dans ce jeu dangereux. Eden revient avec nos boissons, je n’ai plus le choix que de m’asseoir sur le canapé tout en prenant le verre qu’elle me donne. Je ne perds pas de vue ce pourquoi j’ai accepté d’entrer, je veux une réponse à ma question. Une sorte de test pour jauger de la valeur de sa parole. Une fois encore elle choisit ce à quoi elle répond, préférant me parler de la trottinette qu’entrer dans le vif du sujet. C’est une femme intelligente et ce ne sont pas deux verres de trop qui changent quoi que ce soit à cela. Elle sait parfaitement comment me déstabiliser, son regard est sa meilleure arme et  elle en use sans retenue. J’enchaine, parle du milieu dans lequel elle évolue, ce que j’en sais, surtout les aspects peu reluisant avec un manque d’honnêteté qui n’est pas un secret. J’ouvre une brèche dans laquelle elle peut choisir de se glisser, me prouver qu’elle est différente et en quelque sorte que je peux avoir confiance. C’est déjà un peu le cas, mais je suis difficile à amadouer, mon père, encore lui, m’a toujours dit de me méfier des gens et ma confiance est sans doute ce qu’il y a le plus compliqué à obtenir de ma part.
Eden me donne son point de vue sur le sujet, nuançant mon propos. Et j’acquiesce d’un hochement de tête, elle a raison la manipulation peut avoir des formes multiples. Mais c’est pour ne pas tomber dans ce genre d’accusation qu’elle ne promet jamais rien, je souris « Evidemment. ». Elle engloutit son verre d’une traite, le mien est toujours intact, et enchaine avec un aveu concernant ces vices. Le vin et son boulot. J’esquisse un sourire malicieux et reprends avec le même ton qu’elle a employé à mon égard un peu plus tôt « Est-ce vraiment des vices ? Trouve autre chose… ». Je dis cela pour le plaisir de faire un trait d’esprit, faire mine de la prendre à son propre piège, cependant la blonde prend ça au pied de la lettre, son regard de glace se braquant à nouveau sur moi au moment même de ce second aveu. Les femmes. Bien sûr, je m’en doutais mais étrangement je crois que j’avais besoin de l’entendre. J’ai eu assez de preuves qu’elle tentait de me séduire, mais c’est comme si ça ne suffisait pas, qu’encore une fois je devais l’entendre pour me laisser convaincre du trouble bien réel dont elle est à l’origine. Je ne maitrise pas cette subite vague de chaleur qui remonte jusqu’à mon visage, depuis quand je rougis au juste ? J’esquisse un rictus gêné, Eden en rajoute, comme si j’avais besoin de ça. Elle aime me déstabiliser, elle n’a cessé de le faire tout au long de la soirée mais bien avant également. Elle ne peut pas savoir qu’à cause de ça je mène un véritable combat intérieur avec lequel je pensais avoir terminé il y a plus d’une décennie. Remettre au goût du jour ce trouble du passé c’est me mettre face à ce que je pense être une boite de Pandore… L’ouvrir pourrait être une catastrophe. Le problème de l’être humain n’est-il pas sa tendance à l’autodestruction ? Je me rends compte que je fixe silencieusement cette lèvre inférieure qu’elle mord par envie ou provocation. « J’ai essayé de ne pas le voir. » soufflé-je portant le verre à mes lèvres pour le boire d’une traite. La fraicheur citronné de la boisson devrait m’éclaircir les idées mais je ressens l’effet inverse, je connais cette sensation, ce fourmillement dans le bout de mes doigts, la tension qui irradie dans tout mon être, c’est celle de l’adrénaline. J’ai les deux mains au dessus de cette putain de boite, mes doigts frôlent le couvercle à mesure que je me rapproche d’Eden mes iris sombres ancrées dans les siennes. Je sens son souffle contre mes lèvres. Céder, lutter… je ne sais pas, je ne sais plus. J’ai seize ans, dix sept ans, vingt ans... je la sens cette envie interdite, une passade c’est ainsi que je la qualifiais, comme ça que je l’ai rangé dans cette boite et enfermée à double tour. Coup de tenaille sur le cadenas rouillé, mes lèvres se plaquent contre celles de la productrice, l’envie s’échappe de sa prison, m’envahie et j’ai l’impression de ne plus rien maitriser. Je le savais que c’était un piège de venir ici.

Rayan semble vouloir tester ma bonne foi, ma réactivité à ses demandes même si ce n’est qu’une question de vices. J’ai dit que je lui en dirai plus si elle entrait, elle est entrée. Je ne suis pas du genre à ne pas tenir mes promesses, c’est pour cette raison que j’en fais très peu, pour être sûre de réaliser celles que je fais. Pour celle-ci, ça n’était pas grand chose, même si en règle générale je n’aime pas parler de moi. Pour elle, je peux faire un effort. Je me livre même sur mon erreur d’avoir fait passer mon boulot avant ma fille, ce n’est pas glorieux, il faut bien que je sois un peu saoule pour me livrer de cette manière. Et puis, je me sens en confiance avec elle, j’ai le sentiment qu’elle n’est pas quelqu’un qui pourrait me trahir, du moins, tant que je ne lui mets pas de bâtons dans les roues. Et puis, je peux lui apporter quelque chose, elle n’aurait aucun intérêt à aller balancer les bribes de ma vie privée. « Est-ce vraiment des vices ? Trouve autre chose… » Je lève les yeux au ciel en souriant. Elle veut autre chose, et bien soit. Je ne passe pas par quatre chemins, je ne suis pas réputée pour ça. Les femmes, c’est sans doute mon vice numéro un. J’aime toujours les hommes, d’une certaine manière, mais je dois bien avouer que depuis quelques années ils ont été bien plus rares à venir froisser mes draps. Je lui fais comprendre alors de manière bien plus appuyée que oui, elle me plait, je ne passe plus pas des sous-entendus, je suis claire cette fois. Elle est déstabilisée et je peux le comprendre, je n’y vais pas de main morte, mais j’en ai marre de tourner autour du pot. Soit elle se décide à répondre à mes avances, soit elle me met un veto clair et net, et j’arrêterai de lui tourner autour. Mais si je le fais, c’est surtout parce que je sens une brèche, et que son petit manège de tout à l’heure, soit disant elle n’a jamais été intéressée, je n’y crois pas. Elle est beaucoup trop réceptive à mes regards de braise, et une femme qui ne serait pas un minimum intéressée m’aurait filé entre les doigts comme un poisson en sortant de l’eau. Mais pas elle. Alors je dois tenter le tout pour le tout. « J’ai essayé de ne pas le voir. » lâche-t-elle dans un souffle avant d’avaler le contenu de son verre d’une traite. Voilà qui est intéressant. Je ne réponds rien à cela, me contente simplement de garder mon regard sur elle, attendant qu’il se passe quelque chose, avant que je ne prenne les devants. Elle s’approche, nos regards ancrés. Voilà qui est intéressant. Je la laisse faire ce pas qui semblait pourtant difficile, qui semblait la tirailler plus que de raison. Et enfin, enfin je peux sentir la douceur de ses lèvres contre les miennes. J’en lâche un léger soupir de soulagement alors que mon coeur s’emballe dans ma poitrine. Toi ma cocotte, tu vas pas regretter d’avoir fait partie du voyage. Je m’approche davantage, glisse une main dans sa nuque délicatement, il n’est pas question de la brusquer ni même de lui faire peur, au contraire, l’idée c’est simplement de lui donner envie d’aventure. Je reste douce dans mes gestes alors que je meurs d’envie de la faire mienne, là, sur ce canapé. Ma main libre se pose sur sa cuisse, simplement, et je décide d’intensifier un peu le baiser, glissant à peine ma langue contre ses lèvres délicatement. Je n’espère plus qu’une chose : qu’elle ne s’échappe pas.

Dès notre première rencontre j’ai été troublé par Eden. Son charisme, son aura, sa classe naturelle… elle s’est imposée dans l’espace, mon espace, et cela bien malgré moi. J’ai tenté d’ignorer ce trouble, de mettre de côté ces bribes d’émotions qu’elle faisaient résonner en moi à la seule force de sa présence. Nous sommes devenues plus complices, j’ai essayé de me convaincre que son jeu de séduction n’était justement qu’un jeu, ou juste une idée que je me faisais. Mais tout ça était bien réel, chaque phrase déstabilisante, chaque geste perturbant, les regards chargés d’électricités, comme une toile tissée pour mieux me piéger. Je me pensais plus forte, au dessus des questions et des doutes qui m’envahissaient un peu plus après chacune de nos rencontres. J’ai même senti qu’entrer chez elle était un piège, mais j’y ai foncé tête baissée. Et je me retrouve là sur son canapé… L’atmosphère se charge d’une tension nouvelle quand nos regards s’accrochent l’un à l’autre, une fois de plus. Ma lutte prend fin, mes dernières barrières cèdent, j’ouvre cette boite pourtant cadenassée depuis une décennie et libère cette envie latente de goûter aux lèvres féminines. Je sens la douce caresse du soupir de la blonde effleurer mes lèvres alors que je découvre tout juste les siennes. Je la sens s’approcher, sa main se glisse sur ma nuque provoquant un discret frisson le long de mon échine. Tout mon être fourmille sous l’effet de mon initiative, un peu à la manière d’un premier saut en parachute. Les battements de mon cœur se sont accélérés, comme pour faire face à un danger ou simplement endurer le flot de sensations qui m’assaille. La seconde main de la quadra rencontre le dessus de ma cuisse, elle se pose là sans volonté de possession ou de se montrer trop audacieuse. Les lippes jusqu’ici patientes, Eden initie d’approfondir l’échange. Sa douceur et la curiosité font leur œuvre, je ne suis pas difficile à convaincre, mes lèvres s’entrouvrent et la découverte se poursuit.
Je la sens, cette chaleur qui irradie dans mon être prenant sa source dans mes entrailles, les tordants légèrement. Si la blonde est la glace, pouvant être aussi froide que brûlante, je suis d’avantage comme la terre, calme et patiente mais également puissante et dévastatrice lorsque je tremble. Ma main se pose sur sa taille, mes doigts glissent sur le tissus, elle est fine, dessinée, là où j’ai toujours connu la silhouette plus carrée des hommes. Mais Eden est une femme, une productrice influente qui pourrait m’aider professionnellement et qui plus est la mère d’une de mes élèves. Qu’est-ce que tu fous Rayan ? Mon cœur s’accélère à nouveau, cette fois c’est bien à des fins de fuite. Je retire ma main comme si je m’étais soudainement brûlée, rouvre les yeux et recule, mettant fin à ce baiser pourtant si agréable. Je ressens comme une sensation de vide, mais la panique est plus intense encore, elle prend le pas sur tout le reste. Plaquant une main sur ma bouche je me lève comme un diable sortant de sa boite. Merde, qu’est-ce que j’ai fait ? Je regarde Eden, je suis confuse, perdue, honteuse « Dé…désolée… j’aurais pas dû. » j’ai de plus en plus de mal à respirer, comme si ma poitrine était soudainement dans un étau « Excuse moi. Faut que j’y aille… je… » je ne sais même plus pourquoi je suis là, comment je vais rentrer. Il me faut de l’air, c’est tout ce qui compte. Je me rue vers la porte d’entrée et sors rapidement, inspirant une grande bouffée d’air une fois à l’extérieur.

C’était inespéré, j’ai pensé à ça toute la soirée, et pas seulement cette soirée d’ailleurs. Je n’aurai jamais pu imaginer que ça arrive ce soir, là, sur mon canapé. J’ignore où est Cora, je prends des risques et je pourrai le payer très cher. Mais c’est plus fort que moi, je flirte avec le danger, j’en ai envie, je n’ai aucune idée de si l’occasion se représentera ou non, alors je fonce, tête baissée, droit dans le mur. Enfin, c’est ce à quoi je m’attendais, mais au lieu de ça Rayan répond cette fois à mes avances, c’est même elle qui s’avance vers moi pour quérir mes lèvres. J’ai vraiment du mal à y croire. Pourtant je n’en rate pas une miette, cherchant même un contact plus poussé, lui adressant quelques gestes tendres, d’une étrange simplicité. J’aurai pu lâcher les chiens, laisser s’échapper le dragon qui sommeille en moi, je le sens qui gronde, qui grignote mes entrailles pour que je le laisse sortir et la dévorer toute crue. Mais je tiens bon, je ne veux pas l’effrayer ni la faire s’enfuir. Surtout pas. Ma langue vient caresser ses lèvres pour en demander l’entrée, et elle me laisse faire. Mon coeur s’emballe alors que je peux caresser sa langue de la mienne, toujours en douceur, lentement, pour lui laisser le temps d’assimiler ses gestes, ses pensées, ses ressentis. Je sens sa main sur le creux de ma taille et je souris légèrement, pour moi-même, heureuse de voir qu’elle a envie de prendre quelques initiatives. Elle s’en tire vraiment bien pour une débutante. J’ai hâte de connaître la suite. Ma prise sur sa nuque se fait légèrement plus intense, j’ai envie de plus. Mais je n’aurai pas dû être si impatiente, voilà qu’elle s’éloigne d’un seul coup, me laissant sur ma faim. Je la regarde faire comme si tout ça avait été une erreur, et les mots qui suivent me le confirment. « Dé…désolée… j’aurais pas dû. Excuse moi. Faut que j’y aille… je… » Elle est complètement paumée. Pauvre gamine. « Rayan attends… » Je la regarde sortir, refermer la porte derrière elle à la hâte. Je soupire longuement, passe mes mains sur mon visage pour m’aider à prendre une décision. Je devrais sûrement la laisser filer, ou peut-être pas. Merde. Je me lève, prends une seconde pour stabiliser mon équilibre et rejoins la cour extérieur, cherchant la silhouette de Rayan du regard. Je sors de ma poche mon téléphone et commande immédiatement un chauffeur pour elle. « Rayan… » Je la trouve en train de faire les cent pas derrière ma voiture et je m’approche, l’immobilisant de mes mains sur mes bras. « Hey ! » Je viens redresser son visage d’une légère pression sous son menton et plonge mon regard dans le sien. « C’est rien, ne te mets pas dans des états pareils. C’est rien d’accord. On en parle plus si tu veux, on fait comme s’il s’était rien passé. D’ailleurs il s’est rien passé. » Tu parles…

Je prends la fuite face à ce que je considère comme une erreur de ma part, mais ce que j’aurais dû faire c’est surtout ne pas mettre les pieds ici, arrêter de jouer quand il était encore temps. Mais rien n’est si facile, pas avec ce passé que j’ai toujours caché, tenu secret, me voilant la face en me convainquant que je fabulais cette attirance pour d’autres femmes. Eden vient de mettre à mal des années de lutte, me faisant ouvrir la boite de Pandore en laissant le doute me submerger. Tout ça serait parfaitement anodin si je ne m’étais jamais posé de question, si je vivais cela seulement comme de la curiosité… mais c’est bien plus, c’est tout une partie de mes fondements qui sont ébranlés. J’ai besoin d’air, j’en trouve à l’extérieur, et je marche, complètement déboussolée. Je me fustige intérieurement tout en sachant que ça ne sert à rien, alimentant ainsi ma panique, mon agacement. Il faut que je me calme. Le pire c’est que je suis partagée et ça me dévore. J’entends la porte, perçois une lueur de ce que je devine être l’écran du portable d’Ede, elle se rapproche, m’interpelle et le rythme de mes pas se ré-accélère. Finalement elle me stoppe, posant ses mains sur mes bras, je pourrai me dégager facilement mais je m’arrête le regard obstinément baisser pour ne surtout pas croiser le sien. Par honte un peu, mais surtout par crainte de flancher à nouveau. L’envie est toujours là, au creux de moi, me grignotant comme un parasite. Les doigts de la productrice se glissent sous mon menton, je le relève sans résistance, je commence peut-être à détester ce pouvoir qu’elle a sur moi. Suffit de voir où ça m’a mené. Son regard est une torture, douce et enivrante, mais une torture quand même.
J’entends ses mots, je ne suis pas certaine de vraiment les écouter. Elle m’a perdu dès les deux premiers, je secoue la tête « Rien… pour toi, sans doute. » lâché-je avec un semblant de fatalité.Si elle savait combien j’aimerais ne pas me mettre dans un tel état. « On peut ne pas en parler, faire comme s’il ne s’était rien passé…. Mais il ne s’est pas rien passé. Même si c’était rien ou presque rien… c’est… » je soupire ferme les yeux un bref instant pour garder mon calme, reculant d’un pas pour rompre tout contact « … c’est l’alcool et… ouais… on va faire ça, faire comme si. Tu as raison c’est la meilleure solution. » c’est impossible, j’en suis incapable et je le sais mais c’est probablement le mieux, alors je me résigne. « Désolée encore… enfin non, j’ai pas raison de l’être, du coup. » j’esquisse un rictus un peu forcé « Merci pour le verre, et puis… tiens moi au courant pour le casting. » j’ai failli lui dire ou pas, mais dans le fond j’ai l’espoir que rien ne change trop, même si c’est une belle illusion dont j’essaye de me bercer. « Bonne nuit et pense au paracétamol pour demain… » elle ne serai probablement pas la seule à avoir mal à la tête, mais les raisons seront différentes.