let's be gay ! | dash #2

La gay pride qui se déroulait ce jour là allait être énorme. C’était avec évidence que Ash avait pensé à Dani. Depuis la dernière fois où elle avait le moral dans les chaussettes, la polonaise voulait lui insuffler un peu de gaieté. Et puis ça se trouvait son épouse était revenue ! Alors Ash voulait savoir où elle en était. Surtout si elle allait bien. Parce que ça l’avait quand même meurtri de la voir triste comme elle était l’autre soir. Alors quoi de mieux de l’entraîner à la gay pride pour se changer les idées. De s’amuser un peu et de s’évader encore un peu de ses tourments ! Ash trouvait que c’était une bonne idée et elle savait que ça allait être énorme. Elle ne les ratait jamais. Chaque année elle était présente pour ces week-ends de folie. Et puis il fallait dire qu’elle rencontrait aussi pas mal de femmes avec qui elle passait de bons moments épisodiquement durant les journées de la gay pride. Une heure après les messages qu’elle lui avait envoyé pour lui dire qu’elle allait rappliquer chez elle était passée. Elle gara sa moto juste devant chez elle et lui envoya un sms lui disant que sa carrosse était arrivée. Bien vite, Dani sortit de la baraque et la rejoignit, montant derrière elle après que Ash lui avait enfilé son casque. Elle démarra et prit la direction de Santa Monica Boulevard à Westwood.

Il y avait déjà beaucoup de monde, du coup Ash décida de se garer dans un parking non loin des festivités. Elle n’avait pas envie de tourner trop longtemps ni de se garer trop loin. C’était plus pratique d’être dans un parking. Elles sortirent de la bâtisse et machinalement Ash prit la main de Dani, s’engouffrant dans la foule qui regardait la parade de la gay pride. Elles étaient encore assez loin pour voir quelque chose mais la blonde ne lâchait pas, essayant tout de même de se frayer un chemin vers le boulevard. Après quelques minutes à se rapprocher de plus en plus de la parade, elles arrivèrent enfin à destination. Devant elles apparaissant des couleurs vives des drapeaux LGBT, des danseurs sur leur char. Des Queers magnifiquement maquillés et vêtus toujours en couleur. « Wah c’est énorme ! » lâcha-t-elle en se tournant vers Dani. Elle lui sourit, elle était vraiment contente de passer du temps avec elle. C'était toujours agréable en fait.

Depuis le message de Ash, j’étais comme une pile électrique. À la fois anxieuse et impatiente de pouvoir participer à la gay pride de Santa Monica. C’était un peu un rituel pour moi, une vieille habitude de mes jeunes années. Et j’avais mis un point d’honneur à n’en rater aucune depuis ma toute première alors que je n’étais encore qu’adolescente. Je me souviens que c’était cette barista, celle avec qui j’avais découvert ma féminité, celle vers qui j’avais couru dès que j’avais appris pour ma grossesse – c’était elle qui m’y avait emmenée. Depuis, c’est toujours une période que j’affectionne chaque année. Mais depuis ma séparation d’avec Nieves, je n’avais plus goût à rien et il m’était difficile de sortir de la maison en dehors de mon service au Planet ou de mes réunions avec les maisons d’édition. Alors savoir que Ash m’emmenait à la gay pride arrivait à me remonter le moral, à me redonner le sourire. J’ai pris une douche chaude, histoire d’enlever les traces de peinture sur ma peau puis je me suis plantée devant mon armoire à essayer de voir ce que je pouvais me mettre sur le dos. J’ai opté pour un débardeur large noir qui laissait entrevoir mes côtes sur les côtés. C’était l’un de mes hauts préférés à porter à la gay pride : il arborait un arc-en-ciel surmonté d’une licorne et dans le dos s’inscrivaient les lettres « COULDN’T BE GAYER » de toutes les couleurs. Pour le bas, un short en jean un peu usé ferait l’affaire. Quand je reçois un nouveau message de la blonde m’indiquant que mon « carrosse » est arrivé, je ris légèrement et enfile mes baskets avant de sortir de la maison en claquant la porte. « Ne m’attends pas ! je hurle à mon père dont je n’entends pas la réponse. »

Ash m’aide à mettre le casque puis je monte derrière elle sur son engin, m’accrochant de toutes mes forces à sa taille quand je sens la moto vrombir sous mes cuisses. Je n’ai jamais été très rassurée sur ces deux roues mais j’avais assez confiance en la blonde pour savoir qu’elle ne prendrait pas de risque avec moi à ses côtés. Quand on arrive à Santa Monica Boulevard, la foule semble déjà compacte. La musique me vrille les tympans et fait tambouriner mon cœur contre mes côtes. La sensation est grisante. C’est comme si le poids sur mes épaules s’allégeait soudainement. Mon ex-petite-amie serre ma main dans la sienne et on traverse la foule jusqu’à se rapprocher des chars. Les couleurs, les paillettes, la musique, la danse. Les sourires. La joie. Tout ça était superbe, pour les yeux et pour l’âme aussi. « Je te verrais bien te trémousser sur l’un de ces chars ! je lance à Ash en hurlant pour couvrir le bruit de la musique. » Lâchant un rire, j’entraîne la blonde avec moi dans quelques pas de danse sur place, au son d’un rythme cubain. C’était toujours si facile de se laisser entraîner par la musique, de simplement laisser parler le corps quand les mots ne veulent plus rien dire. Toujours sa main dans la mienne, je me laisse simplement imprégner par la sensation d’avoir mon amie près de moi et d’être comme apaisée pour cette fois.

Elle était toujours au rendez-vous la Ash pour ce genre d’évènement. C’était quelque chose qu’elle aimait faire. La fête, surtout lorsque le monde LGBT était mis en avant. Il n’y avait pas de problèmes, il y avait juste des gens qui voulaient s’amuser. Peu importait les orientations de chaque personne, c’était sans prise de tête et c’était toujours un plaisir d’être ici parmi cette foule qui ne cherchait juste qu’à s’offrir du bon temps. Cette année, la polonaise avait invité Dani. Elle avait envie qu’elle aussi s’amuse un peu. Qu’elle sorte de cette maison qui semblait vide pour elle sans la présence de sa femme malgré que son père et sa sœur habitaient avec elle. Elle n’aimait pas la voir broyer du noir et elle n’avait même pas réfléchi plus que ça, Dani devait y aller avec elle. C’était un bon moyen de décompresser un peu et de lui rendre un peu plus son sourire qu’elle adorait tant voir sur son visage. La blonde rit à lorsque son ex lui dit qu’elle la voyait bien se déhancher sur le char. « Ouais mais bon je risquerais de faire capoter toute leur choré ! » certes, elle était douée pour le combat mais alors lorsqu’il s’agissait de se trémousser, c’était totalement autre chose. Sentant Dani l’entraîner dans une danse au rythme cubain, elle essaya tant bien que mal de suivre ses pas. C’était de la salsa, enfin c’était ce qu’elle en déduisait. Alors un pas en avant puis un pas en arrière tout ça en essayant d’être coordonnée avec Dani. Son regard était rivé sur les pieds de cette dernière. « J’suis vraiment pas douée à ça. » lui lança-t-elle en riant. Alors du coup, elle l’attira vers elle, la collant contre son corps. « Du collé-serré, ça, ça me va mieux ! » lui dit-elle, toutes ses dents sorties dehors.

Ça faisait du bien de sortir un peu de chez moi, de voir du monde et de sentir que la vie ne s’arrêtait pas. C’était également un peu douloureux, malgré tout, parce que je crois que j’aurais voulu que la vie s’arrête un peu, juste le temps de retrouver mon épouse et de rafistoler les morceaux épars de notre couple. De notre famille. Mais la compagnie, la proximité de Ash aidait à me faire sentir un peu mieux, à oublier les tracas du quotidien le temps de quelques heures. C’était comme une parenthèse. Et je sais que les parenthèses sont faites pour être refermées mais je ne voulais pas y penser pour le moment. Je voulais juste profiter du moment présent. De cet instant qui s’écoule entre mes doigts comme du sable fin. Je ne peux peut-être pas le retenir indéfiniment mais je peux néanmoins en profiter tant qu’il est encore là. Je me laisse aller à rire aux éclats quand la blonde admet ne pas être la meilleure danseuse qui soit et imagine sans peine ses drôles de mouvements maladroits. Ash était attendrissante, sans même le savoir. Sans même s’en rendre compte. « Mais non, tu serais l’atout charme ! j’affirme avec un hochement de tête et un sourire éblouissant. »

Machinalement, j’ai entraîné mon ex-petite-amie dans une danse qu’elle tente tant bien que mal de suivre. Je m’en fiche un peu qu’elle ne sache pas le pas de la salsa, qu’elle ne soit pas en rythme ou même qu’elle ait l’air d’un pantin désarticulé. Ash est toujours comme ça : au naturel. Et c’était ce qui m’avait plu dès le départ chez elle. Alors quand elle m’attire à elle, je me laisse faire dans un rire d’enfant. C’était presque un peu étrange de sentir à nouveau ses formes contre les miennes. Je ne les avais pas oubliées et pourtant, c’était toujours d’autres qui me venaient à l’esprit. Parce que le temps avait passé. Parce que j’avais rencontré la femme de ma vie. Parce que Ash et moi, c’était finalement du passé malgré notre proximité encore aujourd’hui. « Tu as toujours été très tactile, je rétorque avec un regard amusé tandis que je laisse son corps guider le mien comme avant. » Il n’y avait pas de mot pour lui dire toute ma gratitude. Elle qui restait là malgré tout – malgré ma tristesse, mes pensées noires. Malgré ma coquille. « On ira se chercher quelque chose à boire ? proposé-je à son oreille. » Jamais elle ne me jugeait. J’avais beau être une piètre épouse, une piètre mère, la blonde restait là. Elle restait mon amie. Je ne savais pas comment ou pourquoi elle faisait ça, mais elle restait. Avec moi.

Elle s’imaginait danser sur ce char et en fait l’image qu’elle avait en tête n’était pas très fameuse. Elle n’aurait jamais mis ce genre de fringues d’abord. Se trémousser en maillot de bain comme ça, non, jamais. Mais, là elle aimait regarder le spectacle. Alors lorsque Dani lui sortit qu’elle serait l’atout charme, elle éclata de rire. Comment pouvait-elle être charmante en se pavanant comme ça et en se trémoussant tel un robot dont les articulations n’avaient pas été huilées depuis fort longtemps. Mais bon, ça lui faisait plaisir au fond que Dani lui dise ce genre de chose. Elle voyait toujours les choses qu’elle-même ne voyait pas. Et c’était ça qui lui plaisait. Du coup, elle se laissa entraîner par la belle blonde dans une salsa endiablée mais elle, elle écartait trop ses bras et ses jambes peinaient à suivre le rythme des siennes. C’était sans le moindre doute qu’elle fit remarquer à Dani qu’elle n’était vraiment pas douée pour ce genre de chose. Alors la polonaise l’attira contre elle, étant plus à l’aise dans du collé-serré. Ça ne la dérangeait pas de l’avoir comme ça, à même le corps. Cette proximité là était naturelle. Elle la connaissait par cœur la Dani même si elle était toute habillée. Cependant, il n’y avait rien d’ambiguë dans ses gestes, c’était tendre. Leur histoire passée était là, certes mais maintenant leur amitié particulière avait pris beaucoup de place dans son cœur. Et Ash la respectait trop pour gâcher ça. Une de ses mains se posèrent sur le creux des reins de la blonde tandis que l’autre vint prendre en otage une des siennes, la posant sur sa poitrail. « Oui, tu sais bien que j’adore toucher les gens. » rétorqua-t-elle en souriant. « Mais je le suis pas avec n’importe qui non plus. » oui, ce genre de comportement qu’elle avait, elle ne le montrait pas à tout le monde. Dani se laissa guider par la danse et Ash parfois la faisait tourner avant de la reprendre tout contre elle. La polonaise adorait entendre son rire. C’était mieux que la nuit de la dernière fois. Le souffle de Dani parvint à ses oreilles. Aller chercher à boire, très bonne idée ! « T'as raison ! Une bonne bière après une danse caliente – dit-elle en la collant contre elle, d’un air blagueur – ça donne toujours soif ! » Elle se détacha d’elle mais ne perdit pas sa main qui était toujours emprisonnée dans la sienne et alla se frayer un chemin vers les stands à boissons situés un partout dans le boulevard. Dans sa traversée, elles arrivèrent bien vite devant l’un d’entre eux mais il y avait tout de même un peu d’attente. « Alors Danette, tu es contente d’être ici ? En plus en présence de moi, c’est le luxe total ! » sortit-elle, plaisantant. Quoi que parfois elle pouvait paraître un peu prétentieuse la Ash. Mais c’était toujours sur le ton de l’humour.

Ash avait toujours eu le don de m’apaiser, de me détendre. Je me sentais différente à ses côtés. J’oubliais tout. Mes oreilles bourdonnaient de la musique ; mon corps se laissait emporter par le rythme que lui imposait mon amie. Est-ce que je me sentais gênée de l’avoir si près ? Non, pas vraiment. Sa proximité me paraissait naturelle. Comme si elle avait toujours été là. Et je crois que la solitude me rendait alors encore plus sensible à tout ça. Parce que se sentir seul était douloureux mais se sentir seul au milieu d’une foule de gens était d’autant plus terrible. Et c’était un peu ainsi que je me sentais par moments. Seule. Seule au milieu des gens. Nieves avait apaisé ce sentiment pendant toutes ces années. À me comprendre mieux que je ne me comprenais parfois moi-même, j’étais finalement parvenue à ne pas me sentir comme en dehors du monde ou des êtres humains. Nieves était la personne qui me reliait à la terre. Mais maintenant qu’elle était partie, j’étais un peu comme ces ballons gonflés à l’hélium – en train de m’envoler, d’errer dans une immensité inconnue dont je n’avais pas le contrôle. « Heureusement, je ne suis pas n’importe qui ! je m’exclame avec un faux air outragé. » Alors je me raccrochais autant que je le pouvais à Ash, histoire de ne pas dériver complètement.

Je ris une dernière fois quand elle me fait tournoyer comme une enfant de cinq ans puis sa main garde la mienne cependant qu’elle me tire à travers la foule jusqu’à un stand de boissons fraîches. C’était parfois un peu lourd à gérer, tout ce monde autour de moi. Je n’étais pas claustrophobe, loin de là, mais je n’étais jamais arrivée à m’habituer aux foules compactes. Et la Marche des Fiertés rassemblait toujours beaucoup de monde, chaque année. « Bien sûr que je suis contente, j’acquiesce en souriant avec malice, tandis que nous nous insérons dans la file d’attente. Merci de m’avoir sortie de chez moi, ça fait du bien. » Je ne sais pas si j’aurais eu la force de venir à la manifestation si Ash n’était pas directement venue me chercher à la porte de la maison. Je crois que je serais juste restée chez moi, à dessiner devant un film à la télévision. Je m’en serais voulu après coup, je me serais sentie coupable d’avoir raté ce jour mais je n’aurais pas trouvé le courage de sortir de ces quatre murs qui abritaient mes peines et mes larmes. Qui abritaient ma solitude. « C’était quand, ta première Marche à toi ? je demande tout à trac, observant alentour les couleurs, les styles, les personnalités toutes si différentes mais pourtant unies en un tel jour aux yeux de tous. » C’était le genre de vision qui réchauffait le cœur. Qui donnait foi en l’avenir. Bien sûr, demain, certains retourneraient à leur vie misérable brisée par l’homophobie, la transphobie – et toute autre phobie qui les transformaient en cible vivante. Mais pour aujourd’hui, ils s’accordent la journée. Ils s’accordent une parenthèse pendant laquelle ils peuvent rêver qu’un jour le monde les aura acceptés.

Bien sûr que Dani n’était pas n’importe quelle personne. Elle était bien une des seules personnes qui connaissait par cœur Ash presque dans le moindre détail. Son côté colérique. Son passé tumultueux. Sa fragilité ensevelie par cette carapace de dur à cuire qu’elle montrait aux yeux du monde.  Évidemment qu’elle n’était pas une personne comme les autres. Ash l’emmena bien vite à un premier stand de boissons après avoir dansé comme jamais et s’être faufilée parmi la foule. En gardant la main de Dani dans la sienne. En faisant bien attention que personnes puissent la bousculer parce que la polonaise voulait la protéger de tout en vérité. C’était naturel comme attitude. Elle ne pouvait pas faire autrement. « Bien sûr que je suis contente. Merci de m’avoir sortie de chez moi, ça fait du bien. » Ash passa une main derrière sa tête en affichant un grand sourire. « Bah de rien Danette, qu’est-ce que je ne ferais pas pour toi de toute façon ? » et puis il fallait le dire elle était mieux là avec elle que dans sa maison où elle broyait du noir. En tout cas, Ash en était convaincue. « C’était quand, ta première Marche à toi ? » la file avança tout doucement. « Alors laisse moi réfléchir... » commença-t-elle à dire, prenant un air réfléchi. « Ma première marche c’était quand j’avais vingt et un ans. Après que j’ai su que les femmes étaient faites pour moi. » elle rit légèrement. C’était vrai qu’après Ben, elle s’était tournée vers la gente féminine. Leurs mains posées sur elle n’étaient que douceurs et sensualités. Rien à voir avec les marques que Ben lui laissait sur son corps. « D’ailleurs dommage que ça m’a pris autant de temps à le comprendre. » oui si elle avait su, elle n’aurait peut-être pas subi toutes ces violences conjugales. Enfin quoi qu’à cette époque là, sa combativité s’était révélée encore plus ardente qu’elle ne le pensait. Ses prunelles se posèrent sur la blondinette. « Et toi ? Ça doit faire autant de temps que moi non ? » elle sourit, depuis qu’elle connaissait Dani, elle savait que les femmes étaient les seules qui avaient de l’importance à ses yeux.

J’admirais beaucoup Ash et sa combativité naturelle. Nous étions toutes les très différentes et nous avions pourtant réussi à vivre une belle histoire malgré tout. Sans doute parce que la blonde était en réalité un puits de douceur inimaginable et qu’elle cachait à tous une face de sa personnalité que j’avais cependant eu la chance d’apercevoir et de côtoyer. Mais je supposais que la violence presque destructrice qui sommeillait en elle avait eu raison de mes espoirs. À force de la retrouver le corps fracassé et le nez en sang, j’avais fini par comprendre que ça me tuerait à petit feu. Je ne m’étais jamais demandé ce qu’il serait advenu de moi, de nous si je n’avais pas eu trop peur pour continuer. Je ne me suis jamais posé la question pour la simple et bonne raison qu’il y avait eu Nieves par la suite et que j’avais trouvé en mon épouse la femme qui me correspondait réellement. Et aussi attachée que j’aie pu l’être envers Ash, Nieves était véritablement la femme de ma vie. Alors je m’étais toujours dit que le destin en avait décidé ainsi, que ça devait être écrit quelque part. Même si je resterai toujours inquiète pour Ash, toujours inquiète qu’elle puisse être blessée plus qu’il ne le faudrait, je crois que notre relation n’était pas faite pour durer. « Et tu te souviens de ce que tu as ressenti ce jour-là, lors de ta première Marche des Fiertés ? » Mais la blonde aura toujours une place toute particulière dans mon cœur, à jamais. Je ne pouvais pas oublier ce que nous avions vécu, ce que nous avions traversé. Toutes les deux.

« J’étais un peu plus jeune que toi, je ris doucement. J’avais dix-neuf ans, dans ces eaux-là. Je te rappelle qu’à vingt-et-un, j’étais déjà maman. » Je la regarde en coin, d’un air un peu malicieux. Parfois, on avait tendance à oublier que j’étais devenue mère très jeune. Ce n’était pas une décision que je regrettais, bien au contraire. Jane était ma plus grande fierté, même si la situation n’était pas des plus aisée entre nous ces derniers temps. Toujours est-il qu’elle est la prunelle de mes yeux et, si je revenais en arrière, je ne changerais rien pour tout l’or du monde. « Je ne savais même pas que les filles m’intéressaient, à cette époque-là. C’est une amie qui m’y a entraînée et m’a fait découvrir tout ça. » Mon inconnue du bar. Celle qui avait tout chamboulé. Celle par qui je me suis révélée. Celle qui inspirait toutes ces nouvelles érotiques que je publiais sous un pseudonyme pour ne pas être reconnue dans la rue. Elle avait eu un grand impact dans ma vie. Peut-être que, sans elle, j’aurais fini par épouser le père de Jane en pensant que ma fille méritait une famille unie. Mais une chose était certaine : j’aurais été malheureuse avec lui. Et, surtout, je n’aurais pas connu la femme de ma vie. « Depuis, j’y vais tous les ans. C’est devenu une habitude pour moi. » Les souvenirs étaient doux, en des jours comme celui-ci. Et je me rappelais alors de tout ce qui avait pu changer dans ma vie – pour le meilleur et pour le pire. « Deux bières, s’il vous plaît, je commande lorsque c’est notre tour. » Résonnent au loin la musique endiablée, les cris de joie. C’était un moment vivant. Un moment où rien d’autre ne comptait – ni même la peur, ni même les jugements. « Tu sais, je crois que chaque chose arrive au moment où elle est censée arriver, je continue, d’un air pensif. Et parfois, on met un peu plus de temps à se connaître soi-même. L’important est que tu sois heureuse et en paix avec toi-même aujourd’hui. » Peut-être que je n’avais juste pas eu de chance en tombant amoureuse du mauvais garçon ; peut-être étais-je simplement destinée à Nieves sans le savoir et qu’il était trop tôt à l’époque pour moi. Le plus important était que nous nous soyons trouvées, elle et moi.

Ce premier jour où pour la première fois de sa vie elle assumait pleinement ce qu’elle était. Qu’elle avait accepté la personne qui elle voulait être. L’être empli de dureté par un passé frappant mais qui avait décidé de le balayer d’un coup de poing. L’être qui ne faisait pas confiance au premier abord parce qu’il était sûr que cette personne allait partir un moment donné. L’être combatif qui ne voulait plus jamais avoir les genoux à terre. Et pourtant sous tout ses maux, il y avait cet être aimant qui ne demandait qu’à donner. Elle avait juste choisi de faire apparaître l’autre côté du miroir. « Ouais, je m’en souviens comme si c’était hier ! J’étais tellement fière d’être là. » elle afficha un air condescendant un peu exagéré par son humour. Dani, elle, côtoyait ce côté là tapi au fond d’elle. Cet être lumineux ayant le sourire facile. Ash n’avait montré ce côté là à personne à part Dani. Ça ne s’expliquait pas, c’était comme ça. Il y avait des personnes comme ça où on cherchait forcément à ne pas dissimuler la noirceur qu’il y avait dans son cœur. Dani, elle, avait tout vu de Ash. Ses mauvais côtés comme les bons. Cependant, avec elle, la polonaise ne trouvait aucuns intérêts à la provoquer ou à la brusquer. Non, elle voulait juste que Dani soit bien dans tout les moments de sa vie. Elle pouvait se dire que c’était sa première véritable amie en somme même si elle avait été son ex. Ah oui c’était vrai qu’elle avait eu Jane jeune, Ash ne l’oubliait pas mais parfois cette information là lui échappait. « Ouais merci pour le rappel ! Mais bon tu vois à dix neuf ans tu savais déjà ! A moins que tu sois venue faire la marche parce que tu trouvais que ça avait du sens pour les personnes venant du monde LGBT ? » elle l’avait compris un peu tard ce genre de chose. Lorsqu’elle était jeune, elle faisait partie plutôt des racailles qui n’arrêtaient pas de bousculer ceux qui semblaient différents des autres. C’était le milieu où elle venait qui voulait ça et son trop plein de colère de ne pas se sentir accepter par sa ‘famille’ et de ne pas comprendre surtout pourquoi elle menait une vie comme ça. Ce n’était pas une excuse ou quoi, non, elle savait qu’elle avait déconné parfois mais maintenant cette partie là de sa vie était loin derrière elle. Les cicatrices de ce passé brûlaient toujours son cœur mais au moins elle décidait ce qu’elle voulait faire le lendemain. C’était déjà ça. « Cette amie a été ta première fille ? Elle a eu raison de t’entraîner ici ! Tu rends comptes si t’étais restée avec ton ex gars, on ne se serait jamais croisées ! » elle rit. Bon bien sûr, Dani n’aurait pas non plus connu sa femme mais Ash se complaisait dans l’idée d’avoir été la première à l’avoir. Cette foutue possessivité qui la caractérisait sonnait dans ses phrases parfois. Mais elle était ainsi. « Ouais enfin je ne sais pas si on arrivera à se connaître totalement. Et d’ailleurs je ne sais pas non plus si la paix en nous arrivera un jour ou l’autre. » elle haussa les épaules puis regarda la femme qui leur servait leur bière en pression, lui faisant un sourire. Cette dernière d’ailleurs s’empourpra légèrement. « Enfin moi je sais que là à cet instant précis, je suis contente d’être là. » souffla-t-elle sans pour autant dévier son regard de la jeune femme qui était presque rouge pivoine maintenant. Mais oui, elle était en paix avec Dani là maintenant. Même si son discours n’était pas non plus un message très optimiste et serein mais là, elle était contente. Et ça faisait du bien d’avoir un peu de répit. Un peu de lumière qui dégageait l'obscurité qu'il y avait dans son cœur. C'était chaleureux et apaisant. Oui, parfois ça faisait du bien de mettre pause à sa haine et de se laisser juste vivre.

Les premières fois avaient beaucoup d’importance dans une vie. Le premier soda, la première bière, la première cigarette. Le premier joint. La première relation amoureuse, le premier baiser, la première relation sexuelle. La première Marche des Fiertés. Il existait beaucoup de première fois au cours d’une existence. Et si mon côté introverti ne m’avait pas permis de profiter de toutes les premières fois possibles, la première Marche restait un beau souvenir. « J’y suis allée surtout parce qu’on ne m’a pas laissée le choix, je ris doucement, nostalgique. Un peu comme toi aujourd’hui, c’était : habille-toi, je viens te chercher. » Et je n’avais pas regretté d’avoir suivi mon Inconnue ce jour-là. Tout comme je ne regrettais pas d’être là avec Ash, aujourd’hui. Il fallait bien des efforts pour me sortir de ma coquille mais il n’y avait jamais aucun regret par la suite. « En quelque sorte, oui, j’admets, l’esprit plongé dans tous ces souvenirs à peine oubliés. Elle a été mon premier baiser avec une fille mais on n’a jamais été plus loin. Elle est partie après que je lui ai annoncé que j’étais enceinte. » Je grimace un peu, comme honteuse. Je n’avais jamais su si c’était la nouvelle qui l’avait faite fuir ou bien si c’était seulement parce qu’elle s’était enfin décidée à poursuivre son rêve de parcourir le monde à la découverte de ses propres racines. C’était peut-être un peu des deux, je supposais. Toujours est-il que ça avait été douloureux de découvrir une autre serveuse qu’elle derrière le bar quand j’y étais retournée. Je n’avais certainement pas voulu la faire fuir.

« Il faut avouer que ça aurait été bête de ne pas se rencontrer, je rétorque avec malice. » J’avais parfois l’impression d’avoir vécu plusieurs vies en une, d’avoir été plusieurs personnes tout en étant restée la même Dani Hawkins depuis le début. Et je me retrouvais là, aujourd’hui, séparée de celle qui était la femme de ma vie, éloignée de ma fille unique, en compagnie de mon ex-petite-amie qui rendrait jalouse et envieuse n’importe qui. Il n’y avait qu’à observer la demoiselle derrière nos verres de bière. Et je suis tellement amusée par le petit jeu de Ash que je n’écoute pas vraiment ce qu’elle dit. « Quand tu auras fini de faire du charme à la demoiselle, nous pourrons peut-être y aller ? je lâche en riant malicieusement avant de me tourner vers la serveuse. Si vous lui payez un verre plus tard, elle vous donnera sûrement son numéro. » Je lui adresse un clin d’œil entendu avant d’attraper mon amie par le bras pour l’entraîner à l’écart du stand. « T’es impossible, je soupire sans me départir de mon sourire. Toujours à vouloir séduire le monde. » Mais c’était un côté de sa personnalité que j’enviais – un peu. J’aurais voulu être assez confiante pour me laisser aller à draguer, à séduire. Si j’avais eu ce cran-là, je me serais mise en tête de séduire à nouveau Nieves. Je savais bien que les sentiments, l’attraction n’étaient pas le problème dans notre couple. Mais savoir que je continuais de lui plaire malgré notre séparation était une sensation agréable malgré tout. « Bon, elle était mignonne cela dit. » Je m’accorde une longue gorgée de bière fraîche, appréciant l’amertume dans le fond de ma gorge. « Elle te plaisait vraiment ? »

Ash rit lorsque Dani lui disait qu’elle n’avait pas eu le choix d’aller à sa première Marche. Tant mieux, cette inconnue lui avait permis de sortir un peu de cette réserve dont son ex faisait preuve. « Et bah tu sais quoi je la remercie d’avoir fait comme moi ! » c’était vraiment une bonne action qu’elle avait fait ça même si apparemment elle était partie après que la blonde lui avait dit qu’elle était enceinte. Ash ne put que comprendre ce qu’elle avait pu ressentir. Ce n’était pas quelque chose qui faisait du bien, ça avait tendance à serrer là à gauche de la poitrine, ce genre de chose. « Heureusement que tu n’es pas allée loin avec elle, ça aurait peut-être été plus douloureux de ne plus la voir ! » elle l’avait dit sans vraiment prendre les gants. C’était ce qu’elle pensait et avec Dani elle ne se retenait pas de dire les choses. D’ailleurs, Ash ne se retenait pour personne. Mais ce n’était pas non plus un message négatif. Elle pensait avant tout à Dani et peut-être qu’effectivement si leur histoire avait connu un tournant plus sérieux, elle l’aurait mal vécu. Sûrement même. Rien que de la voir broyer du noir à cause de l’absence de sa femme la dernière fois, c’était sûr. Et cette vision là attristait la polonaise. Mais bon heureusement quand même que cette inconnue l’ait emmené là. Sinon elles ne se seraient jamais rencontrées. Ash lui offrit un sourire éclatant. Elle aurait vraiment regretter de ne pas avoir croisé son chemin, vraiment. Dani était sa bouffée d’air pur. Ça faisait du bien quand même de faire confiance à une personne sans douter la moindre seconde que celle-ci disparaisse un jour ou l’autre. C’était ce qu’elle ressentait totalement pour Dani. Une confiance aveugle et elle était bien là à ses côtés. Elle regardait la serveuse qui rougissait parce qu’elle lui souriait, la charmant avec son iris qui la fixait intensément. Dani ne put s’empêcher de faire la remarque. Un rire sortit de ses lèvres en la regardant parler cash à la serveuse à sa place. « Merci cupidon! » la serveuse rit avec elles et cette dernière n’avait même pas eu le temps d’ajouter quoi que ce soit que Dani prit Ash par le bras, s’écartant du stand. Ash, elle, mimait avec ses mains en direction de la serveuse, qu’elle reviendrait plus tard pour ce verre tout en se laissant entraîner par Dani un peu plus loin. D’une main elle prit sa bière, souriante. « Bah écoute je ne peux pas m’empêcher de flirter avec les belles filles ! » elle but une gorgée de sa bière puis répondit à sa question, haussant les épaules. en regardant sa bière dans son verre « Oui, elle me plaît. Enfin pour une nuit. Rien de bien sérieux. » Ash n’était pas non plus connue pour sa stabilité dans ses relations, il n’y avait eu que Dani. Et depuis, c’était plutôt un va et vient constant. Une habitude qui lui collait à la peau et la rendait au fond très solitaire.

J’avais toujours connu Ash ainsi : sûre d’elle, extravertie, fonçeuse. Dragueuse. Et à la voir flirter ainsi avec une inconnue me fait demander si elle ne s’ennuyait pas avec moi, à l’époque. J’étais loin d’être une femme expansive et c’était sûrement encore pire à l’époque. Ash était tout mon contraire. Et pourtant, d’une certaine façon, notre relation avait fonctionné. Elle avait marché un temps, jusqu’à ce que la peur de la perdre à cause de ses frasques ne prenne le dessus sur tout le reste. Sur tout l’amour que j’avais pu lui porter. Jamais je ne m’étais posé la question de si elle avait eu envie d’aller voir ailleurs, si elle n’avait pas pensé à draguer la première fille venue juste parce qu’elle le pouvait. Aveugle comme j’étais de nature, je n’y aurais vu que du feu. Elle aurait pu me tromper que je n’aurais rien su. J’avais confiance en Ash – je lui fais toujours confiance aujourd’hui. Alors, à l’époque et sûrement même encore aujourd’hui, la question ne s’était jamais posée. La question ne se posait pas, je crois. Qu’est-ce que ça changerait ? Est-ce que ça m’aiderait à être une meilleure épouse pour Nieves ? Est-ce que ça ferait de moi une meilleure personne ? Je n’en étais pas sûre. Peut-être bien. Un peu mal à l’aide face à mes pensées, j’avale une longue gorgée de bière avant de grimacer. Le goût amer n’a jamais été mon favori même si je continuais de boire un peu de bière de temps à autre. « Pourquoi rien de sérieux ? »

Je ne me souvenais pas d’avoir vu Ash en couple après notre séparation. Peut-être ne me l’avait-elle jamais confié mais nous étions restées très proches après que je l’ai quittée alors j’ose espérer que je me serais rendue compte de quelque chose ou bien qu’elle m’en aurait parlé. Quand j’y pensais, je me sentais un peu triste pour Ash parce qu’elle méritait clairement de trouver une personne qui la rendrait véritablement heureuse – plus que je n’ai jamais pu le faire. « Tu n’as pas envie de construire une relation stable ? je demande, avec curiosité. Je comprends que notre histoire t’ait traumatisée mais bon. » Je ris légèrement à ma propre blague même si j’étais sérieuse dans le fond de ma pensée. J’avais envie de la voir heureuse, de la voir épanouie. Je voyais bien que le célibat ne la dérangeait pas plus que ça et qu’être seule ne la rendait pas triste mais j’étais d’avis qu’il y avait bien plus que ça dans une vie. Qu’elle méritait bien plus que de simplement s’évader dans les bras de filles de passage. « Tu sais, je me demandais : tu ne t’ennuyais pas trop avec moi ? Tu n’as jamais eu envie d’aller voir ailleurs ? » Je ne pensais pas qu’il était une réelle bonne idée de revenir sur le passé ainsi. Ça n’aidait jamais personne et puis on ne pouvait pas changer ce qui était fait. Et ce n’était pas une question d’ennui ou de non-compatibilité qui avait fait que Nieves était partie de la maison. Partie (à moitié) de ma vie. « Je ne suis pas la personne la plus amusante du monde alors, tu t’es peut-être ennuyée avec moi, quelquefois, j’ajoute en haussant les épaules. Je comprendrais, hein ? » Je ne savais pas exactement ce que j’attendais de cette conversation ni même si j’allais pouvoir être capable de la mener jusqu’à son terme mais je supposais qu’elle m’était désormais nécessaire. Ou peut-être que non. Je ne savais plus vraiment où j’en étais, en réalité.

Oui rien de sérieux. Elle la draguait parce qu’elle ne pouvait pas s’en empêcher. C’était comme un automatisme à force. En fait, elle ne savait même pas si elle lui plaisait réellement cette serveuse. Elle était jolie, certes, mais comme un robot dont le programme tournait en boucle à chaque cible repérée, elle fonçait sans vraiment réfléchir et sans vraiment en ressentir l’envie à vrai dire. C’était juste une habitude. Elle haussa les épaules en buvant une autre gorgée de sa bière avant de répondre. « Tu me connais. Je ne suis pas du genre à avoir des relations sérieuses. Ce n’est pas mon truc. Il n’y a eu que toi comme sérieux. Et après les filles m’ont paru fades. » elle la regarda, grand sourire affiché sur ses lèvres. C’était vrai en plus. Après Dani, plus personnes ne l’intéressaient réellement. Bon, il y avait Shane… mais c’était compliqué. Et puis, elle n’avait pas envie d’être dépendante de quelqu’un. Parce qu’en fait, une rupture avec quelqu’un de sérieux, ça faisait mal quand même. Même si Dani et elle étaient restées en bon terme et que Ash comprenait pourquoi elle l’avait quitté. Ça l’avait quand même affecté. Elle rit à sa blague mais en même temps Dani avait raison. Elle ne ressentait plus aucune saveur avec les filles qui froissaient ses draps et lorsqu’elle la ressentait, elle faisait tout pour que cette personne ne puisse pas grignoter son cœur un peu plus, Shane en était l’exemple type. « Bah je préfère rester libre comme l’air, c’est une prise de tête les relations sérieuses. » rien que de voir sa relation avec sa femme, ça ne lui donnait pas envie. Bon, elle ne le disait pas ça parce que ce n’était peut-être pas la chose à dire maintenant. Elle n’avait pas non plus envie de lui faire rappeler combien sa situation avec la femme de sa vie était merdique. Elle haussa les sourcils en écoutant sa question. Si elle s’était ennuyée avec elle ? Qu’est-ce que c’était cette question ? Ça la fit rire d’ailleurs. « Tu sais je t’ai toujours trouvé fun ! Il n’y a que toi qui me fait danser la salsa alors que je n’ai pas de coordinations pour la danse ! Non, je ne t’ai jamais trompé Danette. Je ne pouvais pas, t’’étais parfaite pour moi. » rétorqua-t-elle, gardant son sourire radieux. « Comment je pouvais aller voir ailleurs ? C’était impossible. Si c’était une autre fille, peut-être mais toi non. » et puis elle l’avait vraiment aimé Dani, ce n’était pas une blague.

Je crois que je n’avais jamais véritablement compris ce que Ash avait pu me trouver. Ce qui avait pu l’attirer chez moi. Ce qui avait fait qu’elle avait craqué pour moi. Nous étions si différentes, elle et moi ; nous étions si peu semblables. Et pourtant, ça avait fonctionné. Notre relation avait fonctionné – et plutôt bien. Notre couple avait fonctionné, pendant un temps. Elle avait fonctionné jusqu’à ce que je prenne conscience de toute ce qui nous séparait. De tout ce qui nous éloignait. Ash avait cette façon d’être, cette façon de vivre qui était bien trop différente de la mienne. Et ça aurait pu n’avoir aucune incidence sur ce que nous vivions si l’inquiétude n’avait pas commencé à me ronger de l’intérieur. Je n’avais plus supporté de m’en faire pour Ash, de me poser toutes ces questions. Je n’avais plus supporté de la récupérer le visage tuméfié et le corps couvert de marques de coups. Je savais pourtant que c’était une passion pour elle et je ne m’étais pas senti le droit de lui demander d’arrêter pour moi alors j’avais juste mis fin à tout ça. J’étais partie. J’étais partie plus pour me préserver moi que parce que je n’aimais plus Ash. « Pourtant, c’est plutôt moi qui suis fade, je fais remarquer à mon amie, un sourire un peu amusé aux lèvres. Comparée à toi, je suis carrément transparente. » Et pourtant, la blonde ne m’avait jamais laissé penser que c’était le cas.

J’étais heureuse en mariage. Tout du moins, je l’avais été pleinement jusqu’à ce que les problèmes commencent à se créer entre Nieves et moi. J’étais la responsable de notre séparation mais ça n’enlevait rien au fait que notre mariage avait été parfait à mes yeux. Ma relation avec Ash aussi avait été parfaite. Jusqu’à ce que je gâche tout. J’étais peut-être douée pour ça : tout gâcher entre les femmes que j’aime et moi. Peut-être que c’était finalement moi le problème de toutes mes relations. Il n’y avait qu’à regarder la relation qui m’avait liée au père de ma fille : je n’avais pas été à la hauteur. Je n’avais pas été la petite-amie qu’il lui fallait. Qu’il désirait. Toutes ces pensées me rendent un peu morose. Elles font dégringoler ma bonne humeur et je me sens soudainement oppressée par la foule qui m’entoure. Comme si j’avais du mal à respirer. « Je suis désolée de t’avoir abandonnée, finis-je par lâcher. Tu aurais dû m’en vouloir d’être partie sans raison. Tu aurais dû m’en vouloir de ne pas avoir été là pour toi. » Et pourtant Ash était toujours là. Hier, aujourd’hui. Demain. Elle était là, à me consoler alors que mon mariage battait de l’aile ; elle était là, à écouter mes petits malheurs quand nous avions vécu quelque chose de fort toutes les deux il y a des années. « Je ne comprends pas comment tu ne m’as pas détestée après tout ça. » Nieves devait me détester. Ou peut-être qu’elle était seulement blessée que je ne lui accorde pas ce qu’elle désire tant – ce qui était compréhensible. Je m’entends soupirer, ou bien peut-être est-ce simplement mon cœur qui se languit. Se languit de ma femme, de notre vie à deux.

Ash arqua les sourcils lorsque Dani lui disait que c’était plus elle qui était fade et qu’elle était transparente. La polonaise secoua légèrement la tête, posant une de ses mains sur le dessus de la tête de Dani « Arrête de dire n’importe quoi Dani. » dit-elle d’un ton plus solennel. Son front rencontra le sien. « Franchement qui ne pourrait pas te remarquer ? Il faudrait être aveugle pour ne pas te voir. » elle recula son visage quelque peu puis la montra de tout son ensemble. « Je te jure, regarde toi bien ! C’est fou comme t’es resplendissante, je t’assure. » elle sourit à nouveau. Elle pensait vraiment ce qu’elle disait. Ce n’était pas tout les jours qu’elle complimentait les personnes. Et puis, ce n’était pas non plus son genre de dire des choses pareilles. Ash était plutôt quelqu’un de franc et les mots qui sortaient de sa bouche étaient plus venimeux qu’autre chose. Des crachats sans limites et elle s’en foutait de brusquer. Peut-être qu’elle n’était pas objective face à Dani mais ça aussi, elle s’en foutait royalement. C’était ce qu’elle pensait. Fallait qu’elle arrête de se dénigrer comme ça. Et Dani continuait à être désolée. De se rejeter la faute. Elle voulait qu’elle la déteste ? Mais c’était vraiment n’importe quoi ce qu’elle disait. Elle prit son bras, l’emmenant un peu plus dans un coin où il y avait moins de monde, sentant la bonne humeur de Dani s’évaporer dans l’air. Son iris s’ancra dans le sien. « C’est des conneries. » rétorqua la combattante, son sourire avait disparu et un air plus sérieux prit place sur son visage. « Arrête d’être désolée. Tu ne m’as pas abandonné. On n’était juste pas faites pour être ensemble. C’est tout. » ouais elle l’avait accepté depuis longtemps la raison pour laquelle Dani l’avait quitté. « Tu dis vraiment n’importe quoi, franchement. C’est qui qui m’ouvre la porte à trois heures du matin et qui m’accueille quand même malgré mon état ? C’est qui qui me soigne quand j’ai la gueule en vrac après un combat ? C’est qui qui m’accepte tel que je suis sans me juger ? » non franchement, fallait qu’elle arrête. « Sérieux, tu m’énerves quand tu dis des choses comme ça. Avec moi ça sert à rien de dire des conneries pareilles. Tu veux quoi ? Que je te laisse ? Tu crois que tu vas aller mieux après c’est ça ? » elle soupira puis but cul sec son verre. « Dani, ça servirait à quoi que je te déteste ? Tu veux qu’on te punisse ou quoi ? C’est n’importe quoi ! » bon elle était peut-être allée franco mais en même temps, ça l'énervait que Dani puisse lui dire de telles choses alors que Ash tenait à elle tellement fort. Elle ne pourrait pas se passer d'elle de toute manière alors ça servait à rien ce qu'elle venait de lui dire.