was it all a dream? (eleanor)

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was it all a dream? (eleanor)
Mar 22 Mai - 22:30
J’ai mis longtemps à me préparer ce matin. J’avais pourtant tout préparé hier soir, avant d’aller dormir – ma tenue, mon sac à mains, mon déjeuner. Tout. Mais ce matin, en me levant, je n’avais plus envie de la salade de fèves et haricots verts ; je trouvais la chemise bleue trop transparente et mettre une nouvelle paire d’escarpins n’était pas une bonne idée pour une première journée de travail. Je suis restée longtemps dans la salle de bains, sous le jet d’eau chaude à me demander si c’était une bonne idée. Ce n’était qu’un nouveau travail et j’étais habituée à l’inconnu – ça ne me faisait pas peur. Pourtant, j’étais effrayée. J’étais effrayée à l’idée d’aller travailler. J’étais effrayée à l’idée de croiser le regard des gens. Effrayée à l’idée qu’ils me reconnaissent et ne commencent à me juger, à me poser des questions auxquelles je ne veux pas répondre. Auxquelles je suis encore incapable de répondre. Je n’ai pas pris de petit-déjeuner ; je me suis simplement habillée, dans des gestes tremblants avant d’être prête pour cette nouvelle vie qui commençait. Je me suis rendue compte que j’étais presque en retard alors ça m’a rendue un peu plus nerveuse encore. Et quand je me suis retrouvée devant cette entreprise, le bâtiment m’a paru tout simplement immense. Un géant de béton au milieu de la ville, prêt à m’avaler toute crue comme si je n’étais qu’un vulgaire insecte voletant sous son nez. La distance jusqu’à l’accueil dans le hall m’a paru gigantesque, comme si je courrais soudainement un marathon sans même apercevoir la ligne d’arrivée. La voix tremblante, je me suis présentée à la femme derrière son ordinateur, récitant mon prénom, mon poste et le nom de celle dont je devenais l’assistante aujourd’hui comme si j’avais appris ce discours par cœur. J’ai dû faire pitié à cette inconnue parce qu’elle a arrêté de pianoter sur son clavier pour me regarder d’un air compatissant avant de me dire qu’elle s’occupait de m’accompagner.

Pendant un instant, je me fais la réflexion qu’elle a peut-être fait ça parce que la dame pour qui je vais désormais travailler est un vrai tyran et que je vais en baver. Avalant difficilement ma salive au détour d’un énième couloir, je prends conscience que ma gorge est sèche et trop serrée. Et si je n’arrivais même pas à parler ? « Voilà, vous allez au fond du couloir et ce sera la porte sur votre gauche. » Je tente de la remercier mais ne parvient qu’à émettre un pauvre son guttural et la jeune femme tourne finalement les talons. Quelque part, une petite voix me dit qu’il n’est pas trop tard et que je peux encore m’enfuir en courant. Je ne sais pas exactement ce que je fais là, je n’ai jamais été qu’une actrice et une serveuse à Starbucks. La porte du bureau est fermée et j’ai un instant peur de déranger. Et si j’arrivais au mauvais moment ? Peut-être est-elle au téléphone, engagée dans une conversation très importante ? Timidement, je frappe du poing et attends nerveusement le « entrez » qui m’autorisera à tourner la poignée. J’ai alors un battement qui loupe dans ma poitrine lorsque je tombe sur ce visage devenu si familier et que je pensais ne jamais revoir depuis qu’elle avait quitté la France. « Ella ? je murmure, droite comme un piquet, plantée sur le seuil de la pièce. » Un surnom, si doux sur la langue et les lèvres ; des souvenirs, chauds comme un soleil. « C’est… c’est ton entreprise ? » J’étais partagée entre la joie de revoir cette tendre amie qui avait été un véritable réconfort lors de mes années à Paris et l’envie de me cacher six pieds sous terre. Je ne m’étais pas attendue à la revoir, si soudainement. Ella n’était censée rester qu’un parfum sucré d’interdit et d’attendrissement, d’envies latentes qui jamais ne prendraient forme. Et voilà qu’aujourd’hui, je travaillais pour elle. J’étais son assistante. La vie avait décidément un sacré sens de l’humour.
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was it all a dream? (eleanor)
Dim 17 Juin - 14:03

Was it all a dream ?


« On fait une réunion d’avancement la semaine prochaine avec les équipes qui bossent sur le soft et l’hardware. Mercredi, neuf heures. » conclut Kala, laissant la proposition ouverte.
Le regard d’Eleanor quitta le visage de l’une de ses ingénieures en chef pour se river sur son propre agenda. Elle battit les pages avec dextérité, parcourant sans réellement les voir les annotations concernant ses divers rendez-vous, les réunions avec ses équipes-projet, les événements auxquels elle se devait d’assister (et de participer). Elle fronça légèrement les sourcils en avisant la journée dont il était question, insatisfaite par le timing relativement court entre les deux rencontres qu’elle prévoyait –d’expérience, il s’avérait bien moins compliqué de commencer à l’heure que de finir ce genre de meeting dans le respect du programme.
Evaluant la nécessité de sa présence, elle  prit quelques secondes pour y réfléchir posément. Elle voyait un client important qui se déplaçait jusque dans leurs bureaux à dix heures trente –et elle comptait l’inviter à déjeuner pour poursuivre leur discussion dans un cadre un peu plus détendu, étant donné qu’ils entendaient également parler du programme de recherche qu’il aurait aimé financer en partenariat avec UCLA. Mais cela faisait plus d’un mois qu’elle n’avait pas consulté les divers acteurs du projet que menait de front la femme qui se tenait assise en face d’elle. Un esprit brillant qu’elle avait promu à ce poste important quelques mois auparavant, lorsqu’ils avaient noué un partenariat avec un service dépendant du gouvernement. Il y avait eu les points réguliers entre ces murs, chaque semaine, à huit heure précise (elles appréciaient toutes deux la ponctualité, c’était quelque chose qu’Eleanor estimait beaucoup chez les siens). Et il lui tenait à cœur d’ouvrir le dialogue quant aux difficultés et percées qu’ils rencontraient, de discuter des objectifs établis, de l’avancement, des solutions qu’ils envisageaient de mettre en place.
Le stylo s’agita entre ses doigts, bloquant sa matinée.
Tant pis pour la paperasse qui l’attendait, elle y consacrerait juste un peu plus de temps une fois rentrée.
« C’est noté. A la semaine prochaine. Passez le bonjour aux équipes. » acheva-t-elle l’entrevue avec un sourire mesuré mais sincère, se redressant pour passer devant son bureau et serrer la main d’une directrice de projet visiblement satisfaite de la tournure que prenaient les choses.

Cela faisait bientôt deux ans et demi qu’elles travaillaient ensemble –Kala avait fait partie de la troisième vague d’embauches qui avait suivi l’installation de l’entreprise dans cette haute tour de verre d’un quartier des affaires de la côte ouest. En dépit de la différence de hiérarchie qui les séparait –et qui aurait pu s’apparenter à un gouffre dans l’esprit de certains-, Eleanor n’avait jamais ressenti chez elle cette réserve timide et ce respect parfois presque craintif qu’éprouvaient certains face à elle. Cela en faisait un manager redoutable d’efficacité lorsque s’organisaient ce genre de réunions où elle était conviée. Parfois, sa présence intimidait un peu trop en dépit de ses efforts pour n’être qu’une personne participant simplement à la discussion, et la communication s’en ressentait chez les équipes, filtrant, édulcorant les considérations techniques qu’ils n’osaient parfois pas aborder ou les  problèmes auxquels ils faisaient face. Ils la connaissaient tous, mais ils n’étaient, dans la masse de salariés toujours en expansion, plus très nombreux à savoir qu’elle n’était pas une personne à se complaire dans son autorité ou encore qu’elle avait assez de background techniques pour suivre leurs discussions jusqu’à un certains points. De plus, c’était le but même de ce genre de rencontres où tous pouvaient parler librement de leur travail –la moindre censure aurait porté attente à ce principe pourtant fondamental.
Kala saurait pousser la discussion pour qu’elle soit la plus enrichissante possible pour tous. Et c’était (aussi) quelque chose qu’Eleanor appréciait grandement chez elle.

Après l’avoir poliment raccompagnée à la porte, la blonde s’empara du café noir qui patientait dans sa prison de carton estampillée du logo du Starbucks du coin pour le porter à ses lèvres, avant de réajuster légèrement ses lunettes tandis qu’elle entamait la lecture d’un énième contrat. Le jargon légal qui défilait sous ses prunelles attentives n’avait rien de passionnant mais  ce n’était pas dans ce but que les avocats rédigeaient ce genre de papiers –et elle avait définitivement besoin de toute son attention pour pouvoir saisir ce qui se cachait parfois sournoisement entre les lignes. C’était une dernière vérification avant signature ; les professionnels qu’elle avait engagés l’avaient déjà décortiqué en tous sens pour y mettre à nu tous les tenants et aboutissants.
Parfois, elle se disait que faire du droit devait être exaltant, que dans une autre vie peut-être, cela aurait pu lui plaire.
Des coups timides égratignèrent sa porte, stoppant net sa lecture. Il lui arrivait de regretter l’open space de ses débuts, quand ils n’étaient qu’une dizaine autour de la table et pouvaient échanger si librement (cela lui semblait si loin, les prémices de l’entreprise), quand il n’y avait pas ces murs et cette porte pour l’isoler. Le silence relatif qui régnait avait quelque chose de reposant et solitaire à la fois, et elle ne savait que trop bien ce que cela pouvait faire parfois, d’avoir à franchir ce palier. Ce mélange d’angoisse et de résolution qui étreignait l’estomac
« Entrez. » invita-t-elle aussitôt d’une voix distincte.
Elle ne se souvenait pas attendre quelqu’un dans la matinée. Alors c’était peut-être autre chose ; ou bien était-ce l’assistance qui, d’après Amir en RH, devait arriver… aujourd’hui.
Elle n’eut pas le temps de s’appesantir sur cette pensée fulgurante ou de s’en vouloir de cet oubli. Pas quand ses yeux effleurèrent un visage connu, familier, qu’elle se remémorait bien moins tendu et plus chaleureux. Pas quand ils redessinèrent trop rapidement la silhouette entravée dans des vêtements sobres et classieux, les mèches de soleil emprisonnées dans un chignon presque sévère, comme pour essayer d’absorber la réalité brutale et soudaine de cette présence à quelques mètres à peine. Pas quand ils se noyèrent dans les iris arrachés au clair du ciel, submergés de la même surprise qui la saisissait aux tripes.
Pas quand elle sentit son cœur s’enhardir, faire une embardée soudaine, se rappelant à des sentiments qu’elle avait espéré enterrés sous des tonnes de bonnes résolutions, de distance, de silence.
Elle réalisait bien trop tard que même si elle s’était résignée à ne jamais la revoir, elle l’avait sans doute bien plus espéré qu’elle ne l’aurait voulu.
Poppy.

S’efforçant à reprendre contenance, elle s’autorisa un sourire sûrement un peu maladroit, négligeant la pointe de douleur qui se faufilait dans sa poitrine aux mots de son interlocutrice. Sûrement ne se souvenait-elle pas des inscriptions sur la carte de visite qu’elle lui avait remise avant de reprendre l’avion pour New-York. Ou bien peut-être n’avait-elle pas conservé ce bout de papier insignifiant, fermant définitivement la parenthèse de leurs moments ensemble. Quelle importance ?
Eleanor aurait désiré se convaincre qu’il n’y en avait pas, qu’elle n’aurait pas dû y prêter trop d’attention. Elle n’avait pas non plus fait d’efforts pour retrouver Poppy, pour s’assurer de garder un contact, se réfugiant dans l’idée que l’initiative ne serait pas sienne –et ne s’était finalement jamais concrétisée.
Mais c’était peine perdue.

« Oui,
confirma-t-elle d’un hochement de tête un peu raide en se redressant pour passer devant son bureau. Bienvenue. »

S’approcher, c’était un peu comme se retrouver là-bas, quelques années auparavant. Quand il n’y avait rien d’autre qu’une table de café ordinaire pour les séparer. Rien d’autre que le temps qui s’échappait pour les éloigner. Mais il n’y avait pas le parfum chaleureux du café pour enchanter leurs sens ; juste la sensation de fraicheur de la climatisation poussée à plein régime. Il n’y avait pas les rumeurs des gens assis non loin, profitant d’une boisson chaude ou d’une sucrerie, discutant, vivant ; juste ce silence un peu trop pesant qui s’étirait, cette main qu’elle tendait comme si Poppy n’était qu’une nouvelle employée qu’elle se devait d’accueillir. Il n’y avait plus cette douceur qui lui envahissait la poitrine quand elle devisait avec la plus jeune ; juste ce chaos innommable à l’intérieur alors qu’elle ne pouvait s’empêcher de la dévisager, d’essayer de craqueler la barrière du silence qui les avait si cruellement éloignées (mais n’était-ce pas ce qu’Eleanor avait voulu ; le silence, la distance, pour se protéger d’elle-même ?)
Le geste avait la retenue douloureuse des actes manqués et des mots tus.

« Tu as donc obtenu le poste d’assistante ? »
s’assura-t-elle après un court silence qui lui avait paru lacérer sa peau (son cœur) pendant des heures entières.

Elles allaient se voir chaque jour.
Ses prunelles s’adoucirent dangereusement contre les traits expressifs de sa cadette.
Elle ne revint pas derrière le bureau, ne réinstalla pas la distance professionnelle qui aurait dû être (qui finirait par être). Elle ne s’engagea pas dans un discours sur l’entreprise, les modalités du travail en ces lieux, les objectifs, responsabilités et missions qu’aurait Poppy une fois ses fonctions prises.
Même si elle savait, comme une certitude ancrée profondément dans ses entrailles, qu’elle cédait à un sentiment aussi tendre que brûlant, elle s’autorisa à prononcer les mots qui se pressaient contre ses lèvres.

« Cela fait longtemps que tu es rentrée aux Etats-Unis ? »
s’enquit-elle doucement, le ton désert du moindre reproche mais comme hanté par une certaine vulnérabilité.

Comment vas-tu ?
Que fais-tu là ?

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was it all a dream? (eleanor)
Sam 23 Juin - 10:11
Je me sentais tellement idiote. J’aurais dû connaître le nom de cette entreprise par cœur ; j’aurais dû faire le lien entre la petite annonce trouvée au hasard des ruelles de la ville et cette carte un peu cornée, religieusement conservée. J’avais tant de fois sorti le morceau de carton de mon portefeuille. Je l’avais tant de fois regardé, pendant de longues minutes, les doigts tremblants et mon téléphone portable juste à côté. Combien de fois avais-je composé le numéro ? Trop pour compter désormais. Je crois même que je le connaissais maintenant par cœur. Mais je m’étais toujours obligée à ne pas appuyer sur la touche du téléphone pour finaliser l’appel ; je m’étais toujours obligée à ranger la carte là où je la gardais précieusement. Je m’étais toujours obligée à oublier tout ça – oublier la France et Starbucks, oublier Ella et nos moments volés au temps. Ça ne valait pas la peine de m’accrocher à ces souvenirs. Ça ne valait pas la peine de vivre dans le passé. J’avais fait ça presque toute ma vie, à regretter ce qui n’était plus et à avoir peur de ce qui pourrait être. Et s’il y a encore certaines blessures qui ne veulent pas guérir, laisser Ella reposer dans un coin de mon esprit avait été facile. Honteusement facile. Je n’avais pas voulu tirer un trait sur ce qu’elle m’avait fait découvrir, sur ce que j’avais vécu auprès d’elle mais chaque fois que son visage m’apparaissait, aussitôt la honte fondait sur moi tel un oiseau de proie. Revenaient en ma mémoire les souvenirs de ma vie de petite starlette d’autrefois, revenaient les unes des magazines people où j’étais exposée impunément dans ma vie privée. Et alors je me sentais mourir d’embarras à l’intérieur. Je me sentais l’envie de me cacher dans un trou de souris pour y mourir définitivement. Pourtant, si j’avais finalement été plus attentive, si je n’avais pas été aussi tête en l’air, j’aurais alors pu me préparer mentalement à cette surprise. D’ailleurs, la surprise n’en aurait pas été une, au fond. Peut-être même aurais-je évité de passer un entretien pour le poste, si j’avais su qu’il s’agissait de celui d’assistante personnelle d’Eleanor Aušra. Cette pensée m’est terrible mais je sais que je n’aurais pas été assez courageuse pour ça. J’observe distraitement le sourire de Ella, intimidée et gauche que je suis. Je ne sais pas quoi faire de ma peau ni de mes mains alors je reste plantée cependant qu’elle contourne son bureau d’un pas lent et mesuré. « Merci, je réponds, ma voix tremblotant de nervosité avant de tendre une main pour serrer la sienne en réponse à son geste professionnel. » Est-ce qu’elle m’en veut de ne pas l’avoir appelée ? Est-ce qu’elle pense que je n’ai pas voulu la recontacter ? Très probablement. Je n’avais jamais donné de nouvelle. Je ne l’avais pas même prévenue de mon retour sur les terres américaines. « Oui… » J’avale ma salive. « Il faut croire que oui, lâché-je dans un petit rire idiot. » Tout avait pourtant paru si naturel, si aisé. Là-bas. En France.

Je me sens soudainement trop apprêtée, trop habillée. Ces vêtements ne sont pas confortables et je n’ai plus l’habitude des costumes de scène. À une époque, j’adorais pouvoir me glisser dans la peau d’une autre, de donner vie à un personnage qui n’était pas moi. Et quand la caméra tournait enfin, je n’existais plus. Penelope n’existait plus. Ne restait que cette autre fille qui s’éveillait comme si je prenais ma toute première inspiration de vie. Aujourd’hui, il ne reste finalement que Penelope Abbott, star déchue, tombée de bien trop haut pour s’en remettre. En France, il y a bien eu Poppy. Poppy, jeune fille au sourire étincelant et chaleureux, à la vie simple et modeste. Poppy était celle que j’avais toujours eu envie d’être ; Poppy était celle que j’avais été, l’espace de quelques années. Et me retrouver face à Ella ramenait cette sensation d’avoir été heureuse pendant quelques secondes, d’avoir été moi sans aucun artifice pour la toute première fois. Mais ici, à Los Angeles, je ne pouvais plus être Poppy. Je ne pouvais pas être Poppy. Ou bien e-était-ce juste moi qui me l’interdisait, de peur de retrouver le goût du bonheur sur ma langue ? « Quelques semaines, tout au plus. » Je pince les lèvres, gênée. Je ne voulais pas qu’elle pense que je l’avais oubliée. Comment aurais-je pu quand chaque journée parisienne était emplie de son souvenir à elle ? De cette odeur de café mélangée à celle des pâtisseries par-dessus laquelle dénotait un parfum capiteux, féminin et racé ? Détournant le regard un instant, je sens mes orteils gigoter dans mes chaussures neuves – je savais bien que j’aurais dû prendre des escarpins plus confortables. « J’ai voulu t’appeler, j’avoue dans un petit souffle. J’ai gardé ta carte, tout ce temps, et j’ai voulu t’appeler mais… » Mais la honte m’avait toujours retenue. Mais la situation faisait que je ne m’étais jamais sentie assez courageuse pour ça. « Je n’ai pas osé… J’avais trop honte et… » Ella avait toujours dégagé tant de prestance, tant de confiance. Quand elle entrait quelque part, il n’y avait qu’elle que l’on remarquait – ou peut-être était-ce moi parce que j’étais fascinée par cette femme et ses airs de dame du grand monde. « Je suis désolée. » Avalant ma salive, je cherche les bons mots pour lui expliquer que revenir dans ce pays où j’ai tout perdu n’avait rien eu de facile, d’aisé. Je cherche les bons mots pour lui expliquer que Poppy n’avait peut-être pas sa place sur cette terre et que j’étais trop effrayée à l’idée qu’elle déteste Penelope comme je la détestais. Je ne voulais pas qu’elle me déteste. Je ne voulais pas qu’elle découvre qui était Penelope Abbott. « J’aurais dû appeler, pardon. » Une grimace étire mes lèvres soudainement trop sèches. J’ai la gorge qui se serre. « Ça me fait plaisir de te revoir. » Tout se mélangeait un peu, tout devenait flou. Mes pensées étaient brouillon, à l’image de tous mes sentiments.
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was it all a dream? (eleanor)
Dim 24 Juin - 18:15

Was it all a dream ?


Le retour de Poppy dans sa vie, c’était quelque chose qu’Eleanor n’avait pas prémédité –et pourtant bien trop espéré, elle ne le réalisait que maintenant qu’elle se retrouvait le front aplati contre le mur en briques indestructibles de sa réalité, leur réalité. Une réalité où elle avait longtemps cru que ce qui se passait entre elles n’avait pas sa place –c’était pour ça que partir avait été à la fois douloureux et salvateur, déchirant et rassurant. Elle s’en était même persuadée, convaincue à force d’arguments trop rationnels face aux faiblesses du cœur. A coup de « ce n’était qu’une parenthèse, un égarement, rien de plus » et de « cela ne sert à rien de ressasser, nous ne nous reverrons plus » en passant par d’innombrables sermons qu’elle ne s’était que trop de fois répété à chaque fois que ses pensées et ses songes éveillés dérivaient vers le sourire aux teintes solaires et les mèches dorées comme l’été. Les souvenirs s’étaient enrobés d’une saveur aigre-douce, mélange de nostalgie et de regrets, de colère envers elle-même et de tendresse pour ces moments auxquels elle ne s’autorisait que trop peu à repenser avec un sourire léger aux lèvres, le cœur épris de douceur. Le temps, la distance, le silence, avaient fini par atténuer l’éclat des sentiments naissants qui avaient grignoté ses entrailles pendant ces quelques semaines passées en France, ou du moins l’avait-elle cru et voulu. Finalement, les pensées brodées de regrets s’étaient étiolées, s’effilochant dans le rythme effarant de sa vie menée à toute allure.
Même s’il lui arrivait de souhaiter parfois qu’elle eut fait plus que ça. De se dire que, si ces instants devaient rester dans le passé, étaient voués à ne plus être et ne plus jamais se perpétuer, peut-être aurait-elle dû un peu plus se laisser aller (quoi que cela signifie), au lieu de chaque jour se battre contre elle-même et ce qu’elle avait désiré.
Ce qu’elle désirait encore si fort, avec une intensité qui la saisissait aux tripes, et qui ne s’était pas même abimée dans les fracas assourdissants du silence qui les avait tant éloignées.
Ces envies qui s’étaient juste endormies, demeurées latentes et patientes dans les ombres de son esprit ; ces mêmes envies que ces prunelles si claires embrasaient d’un seul regard échappé en sa direction, d’une seule caresse, d’un unique contact.
Ella, reprends-toi.
Reprends-toi.
Parce qu’elles allaient travailler côte à côte à présent, pour les mois et peut-être les années qui viendraient si Poppy tenait le coup, si elle ne voulait pas quitter ce poste pour un autre. Parce que Poppy allait travailler pour elle présent.
Parce qu’il y avait plus qu’elles deux dans cette relation maintenant –il y avait le travail, les yeux des autres, cet environnement au sein duquel ce qu’elles avaient partagé était comme une note dissonante.
Qu’importe à quel point cela s’opposait à ce qu’elles désiraient. A celles qu’elles avaient été l’une pour l’autre.

Poppy lui paraissait si tendue, si crispée que cela en devenait presque douloureux à contempler –c’était loin, si loin de l’attitude si ouverte et chaleureuse qu’elle avait eue à son égard, l’embrassant de sa lumière comme si c’était la chose la plus naturelle au monde. Pourtant, Eleanor n’aurait su détourner le regard. Plus maintenant que la blonde se trouvait là, à quelques pas d’elle. Dans ce bureau si familier, entre ces murs marqués de sa propre personnalité, une présence à la fois acceptée et presque étrangère. Elle ne put s’empêcher de garder un peu plus longtemps les doigts de la plus jeune entre les siens, essayant de lui communiquer un peu de chaleur à travers ce geste au parfum si impersonnel, pour apaiser les soubresauts qui éraillaient un peu sa voix, le malaise qui pesait si lourd dans ce silence qui s’étirait, qui les engloutissait. Qui les étouffait.
Elle hocha calmement le menton à la réponse de son interlocutrice, le geste moins raide, plus spontané. Quelques semaines. Quelques semaines qu’elle était de retour au pays. Le sentiment qui lui écorcha la poitrine fut violent et brûlant, indéchiffrable, entremêlement de peine et d’attente, de joie et de peur. Des mots qui entrainaient une foule de questions dans leur sillage, encore plus nombreuses qu’auparavant. Mais l’embarras se lisait partout sur le visage de Poppy, dans le plissement de ses jolies lèvres, l’agitation de ses doigts contre le tissu des vêtements qui enveloppaient sa silhouette, la fuite de ses yeux qui la voyaient sans oser s’attarder (alors qu’Eleanor n’attendait que cela, de pouvoir les étreindre de nouveau). Les paroles se pressèrent contre les lèvres de la chef d’entreprise, l’invitation à s’asseoir, à prendre place, peut-être pour réinstaurer une certaine distance, non certaine qu’elle puisse voguer sur l’équilibre précaire qu’elles devraient trouver. Mais Poppy parla à nouveau, réduisant les sons qui se formaient sur ses lippes au silence. La surprise et l’incompréhension la fauchèrent en même temps qu’un espoir dévastateur qu’elle se sentit bien trop coupable de ressentir. Tous les muscles de son droit se raidirent, ses doigts se crispèrent sur le tissu pastel des manches de son chemiser.
Elle avait gardé sa carte.
Elle avait voulu garder contact.
Alors pourquoi ?
Pourquoi cette distance ? Pourquoi ce silence ?
La réponse à cette interrogation qui persistait entre elles comme un cri aux échos infinis lui fit l’effet d’une claque sèche contre sa joue, alors qu’un frisson glacé dégringolait le long de sa colonne vertébrale. Elle n’était pas certaine de comprendre ce que cela signifiait, alors que son esprit tournait à plein régime, tentant de remettre les pièces du puzzle dans un agencement qui faciliterait sa compréhension, se remémorant ces instants envolés, emportés par le temps écoulé.
Elle n’était pas sûre de vouloir comprendre.
De la honte ?
Elle en oublia presque ce qui les réunissait là.
Ses traits se tendirent en une expression mêlant peine et incompréhension, ses sourcils se froncèrent légèrement, avant qu’un sourire sincère n’apaise sa tourmente l’espace de quelques instants, la joie des retrouvailles synthétisée en quelques mots brûlants de sincérité.

« Le plaisir est plus que partagé. »
avoua-t-elle sans détour, dans une sincérité presque brutale.

Les mots sonnèrent si juste qu’elle ne parvint pas à les regretter, même si elle s’en sentit un peu déstabilisée. Presque vulnérable. Après tout, ils ne l’engageaient à rien, ils ne les enfermaient dans aucun schéma malsain.
Ce n’était qu’une première ligne esquissée sur le chapitre de leurs retrouvailles.

« Assieds-toi, je t’en prie. »
l’invita-t-elle, reprenant contenance en se calant plus confortablement contre son propre bureau, rechignant à réinstaurer de la distance entre elles.

Elles avaient encore trop à se dire.
Il fallait clôturer. Effacer les doutes, apaiser les regrets, enlacer les tourments qui persistaient une dernières fois avant de les laisser s’évanouir. Repartir.
Pour mieux établir des limites et des codes à la relation immanquablement changée qu’elles allaient entretenir.

« Tu n’as pas à t’excuser, ou te justifier. »
émit-elle d’un ton qui se voulait apaisant, mais ferme, en cherchant le regard arraché aux couleurs profondes d’un ciel d’été.

Bien sûr que c’était un peu douloureux de savoir que c’était la honte qui avait retenu les gestes de Poppy. Mais elle s’en sentait égoïstement aussi soulagée que peinée. Un maelstrom de sentiments incompréhensible. Parmi lesquels il n’y avait aucune place pour une quelconque rancœur.

« Mais pourquoi as-tu eu honte ? »
avança-t-elle après un court silence, ses doigts épousant les rebords du bureau en bois, alors que ses yeux ne quittaient pas le visage de la blonde.

Elle ne voulait que comprendre. Parce que de toutes les raisons qu’elle avait pu imaginer, jamais, jamais, elle n’avait envisagé cela.

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was it all a dream? (eleanor)
Lun 25 Juin - 14:04
Bien évidemment que j’étais contente de la retrouver. Ella portait avec elle une flopée de bons souvenirs qui m’étaient précieux. Très précieux. Elle portait avec elle un sentiment d’apaisement et d’abandon, de nouveauté. Partir pour la France avait été comme un renouveau. Une renaissance. Et Eleanor faisait partie de cette parenthèse de ma vie. Une parenthèse que j’avais refermée malgré moi. Malgré l’envie de la revoir, de la côtoyer en Amérique. J’avais souvent pensé à elle, avec ce petit nœud à l’estomac. Avec cette chaleur dans la poitrine. J’avais souvent pensé à elle sans avoir le courage de la recontacter, sans avoir le courage de l’appeler. Et maintenant que je me retrouvais face à la blonde, les souvenirs affluant tel un raz-de-marée, je me sentais idiote de ne pas avoir sauté le pas. De ne pas avoir pris mon téléphone pour entendre à nouveau sa voix. Bien évidemment que j’étais contente de la retrouver. J’étais même reconnaissante à la vie, au destin peut-être de m’avoir remise sur sa route. Est-ce que j’étais nerveuse à l’idée de travailler avec elle ? Non, parce que je la connaissais. Parce que je me sentais à l’aise à ses côtés. Est-ce que j’étais nerveuse à l’idée de travailler pour elle ? Définitivement oui, parce que je savais aussi qu’elle était intraitable dans les affaires. À l’observer, matin après matin, dans ce Starbucks parisien, j’avais réussi à toucher du bout des doigts quelques traits de sa personnalité. Et il ne m’avait fallu que quelques appels téléphoniques ou bien des regards jetés à son téléphone portable pour comprendre qu’elle menait sa barque d’une main de maître. Elle devait attendre le meilleur de ses employé.es et moi je ne connaissais rien à ce que faisait une assistante. Je ne connaissais rien à la cyber-sécurité. Je me demandais même encore comment j’avais pu être prise alors qu’il y aurait sûrement des centaines de personnes encore plus qualifiées. C’était peut-être juste un coup de chance. C’était peut-être un signe – le signe que Ella et moi étions censées nous retrouver. Le signe que j’aurais dû ne pas avoir peur de la recontacter ; le signe qu’elle avait peut-être attendu un mot de part, même alors que les mois avaient passé. C’est ce que me dit en tout cas sa voix qui devient soudainement plus chaleureuse alors que mes yeux viennent tomber dans la glace des siens sous la surprise de l’aveu. Elle aussi est heureuse de me retrouver. Elle ne m’avait ni oubliée ni détestée pour avoir déserté. Ella partageait mon plaisir de la recroiser. Je me sens alors sourire, un peu bêtement, un peu avec soulagement. Je me sens surtout sourire comme je n’avais pas souri depuis longtemps – depuis Paris, depuis la France. C’était finalement tout ce dont j’avais besoin pour me sentir à nouveau moi-même dans ces circonstances.

Docilement, je m’installe sur un des fauteuils du bureau lorsque la blonde m’y invite, et m’étonne presque du confort des sièges. J’avais pris l’habitude des chaises en bois des salles d’attente, des sols durs et froids, des murs qui bousillent le dos cependant que la nervosité grimpe le long des jambes. Je m’étais habituée à ces salles trop petites, surpeuplées de filles qui me ressemblaient. Qui effectuaient les mêmes gestes, répétaient les mêmes lignes que moi tandis que l’on attendait, chacun et chacune, notre tour à cette énième audition. Et Ella se trouvait là, dans toute sa prestance intimidante, comme tous ces directeurs de casting dont le regard suivait le moindre de nos mouvements. Je me sentais un peu intimidée. Mais en confiance. Je n’étais peut-être pas en train connu mais je la connaissais, elle. C’était déjà un bon point. C’était rassurant. Et le fait qu’elle reste proche, de mon côté du bureau plutôt que de retourner à sa place avait quelque chose d’avenant. Comme si elle essayait, par le biais de son langage corporel, de me mettre à l’aise dans cet environnement qui était le sien. Comme si elle m’invitait à pénétrer dans son monde. Malgré tout un peu chamboulée par le cours de mes pensées, je prends conscience qu’il m’a été impossible de la lâcher du regard depuis quelques minutes. En vérité, depuis qu’elle m’a avoué partager le plaisir de me retrouver. Je suppose que l’aveu avait été un peu comme retrouver ces instants volés au temps que l’on partageait à Paris. Je suppose que l’aveu avait été un peu comme retourner quelques mois en arrière, quand ma vie n’était plus la même et qu’elle me semblait bien plus simple qu’aujourd’hui. « Pourquoi j’ai eu honte ? je répète bêtement avant de grimacer légèrement, embarrassée. » Ella méritait de savoir la vérité. J’avais passé tant de temps à faire attention, à lui cacher qui était Penelope Abbott et pourquoi j’avais fui l’Amérique. J’avais éludé les questions personnelles ou bien répondu trop évasivement. Mais je supposais que Ella devait savoir pourquoi. Elle devait pouvoir comprendre mes choix. « Quand on était en France, toi et moi, tu m’as connue sous le nom de Poppy, commencé-je. En vérité ce n’est qu’un diminutif, mon vrai prénom c’est Penelope. Penelope Abbott. » Je crois que c’est la première fois depuis des années que je me présente sous ce patronyme. J’ai presque la sensation de parler d’une étrangère en le disant à haute voix. « Sauf que si je suis partie en France, si j’ai tout quitté en Amérique, c’était pour la fuir. Elle. Je voulais laisser Penelope ici, ne jamais la retrouver. » Je lâche un soupir tandis que je suis obligée de poser mes mains à plat sur mes cuisses pour leur éviter de gigoter et de trembler. « Tu pourras faire des recherches sur moi, tu comprendras qui elle est. Qui j’étais, je reprends après un silence. Quand j’étais plus jeune, j’étais actrice. J’étais la petite starlette, jeune étoile montante d’Hollywood. J’avais du succès. J’étais devenue une véritable coqueluche. » Je me rappelle des flashs et des paparazzis, je me rappelle des interviews et des caméras de télévision. « Sauf que je ne voulais plus de cette vie. Je n’en ai jamais voulu. J’ai eu la sensation de me retrouver prise au piège dans une mer infestée de requins. Alors j’ai dérapé. J’ai fait des conneries. J’ai fait des choses dont je ne suis pas fière aujourd’hui. » J’avais voulu laisser mourir Penelope. À Paris, j’avais eu le droit à une seconde chance, à une seconde existence. Et puis ma mère était tombée gravement malade et j’avais dû reprendre le chemin pour ce qui avait autrefois été ma maison. « Je ne voulais pas que tu puisses connaître cette fille-là… Je ne voulais pas que tu connaisses Penelope, j’admets, un trémolo dans la voix. Je voulais que tu gardes simplement le souvenir de Poppy. » Poppy, c’est comme cette meilleure version de moi. Poppy, elle est solaire et magnétique. Poppy, elle a le sourire angélique. Penelope n’est plus qu’une ombre morte. Penelope n’est plus qu’un corps sans vie.
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was it all a dream? (eleanor)
Dim 8 Juil - 21:46

Was it all a dream ?


Le sourire qui embrasa les lèvres délicatement maquillées de Poppy en écho à ses mots vibrant de sincérité se fit d’abord délicieusement timide, comme un peu hésitant, un peu soulagé, avant s’enflammer, de brûler d’une joie miroir à celle qui lui étreignait le cœur en dépit des doutes et de l’incompréhension, des craintes de la vulnérabilité qui était sienne. Un simple sourire qui la propulsa quelques années en arrière, assise dans ce café d’un des nombreux boulevards qui fendaient la  capitale française, au milieu d’anonymes levés aux aurores pour entamer une nouvelle journée, à écouter distraitement les conversations dans une langue dont elle n’appréhendait pas la complexité mais aimait les sonorités tout en profitant du goût amer du café. Ce seul sourire qui la noyait dans les souvenirs comme gardés innocemment sous scellés, ceux d’un visage qui rayonnait de bonté et de vie, de ces yeux bien trop bleus qui murmuraient autant de rires que de blessures, de cette voix à l’accent si familier qui dévoilait peu à peu une âme aux facettes multiples, à la complexité aussi charmante qu’intrigante. Ce sourire unique qui la rappela à de longues conversations qui n’avaient fait qu’éveiller chaque jour un peu plus son intérêt pour la blonde, qui écorchait la surface de sentiments incandescents demeurés latents, ceux qui n’avaient eu que trop d’aisance à éclore avant de peiner, dans la souffrance, à résister aux ravages des marées commandées par son esprit prisonnier de sa rationalité et de son pragmatisme, de ses peurs et  inquiétudes. Mais ils demeuraient.
Et elle restait profondément consciente -une certitude comme ancrée en elle- qu’un rien pouvait les incendier.
Les nourrir jusqu’à ce qu’ils craquèlent leurs chaines et se déploient en contradiction avec tout ce à quoi elle s’était promis de ne pas succomber après toutes ces années.
Il suffirait d’un rien.
Juste ces étoiles arrachées au ciel d’été dans ce regard qui enlaçait chaleureusement la glace du sien.
Juste ce sourire brodé d’un bonheur si vrai et si fragile sur ces jolies lèvres pleines.
Juste cette douce présence qui se faufilait dans les mailles abîmées de sa solitude pour venir se réfugier contre son cœur effrayé.

Le sourire qui embrassait ses propres lippes s’accentua sensiblement, s’embellissant d’une irrépressible tendresse tandis que les prunelles si limpides ne quittaient plus les siennes, avant qu’il ne soit rattrapé par les doutes qui l’assaillaient, la confusion qui l’avait percutée lorsque Poppy avait dévoilé les raisons de son silence. Qu’importe dans quel sens son esprit tournait et retournait la situation, elle ne parvenait pas à prêter plus de crédits à une théorie plutôt qu’à l’autre, et plus ses réflexions s’enfonçaient dans l’incompréhension, plus les hypothèses se paraient d’un manteau toujours sombre et douloureux. Elle s’était longuement persuadé que cette distance était pour le mieux -n’avait-elle pas, plus ou moins inconsciemment, laissé à Poppy le choix de leurs retrouvailles en manquant de se donner les moyens de la contacter, en oubliant de lui demander un numéro où la joindre, une adresse mail à laquelle lui écrire, pour se protéger, pour s’empêcher de céder elle-même aux sentiments timides qu’elle sentait éclore dans sa poitrine ? Les raisons pouvaient être si nombreuses pour expliquer qu’elles n’aient pas repris contact. Poppy aurait pu perdre sa carte. L’oublier dans le tourbillon de la vie –elle n’était qu’une cliente après tout, même si elle se plaisait à croire qu’elles avaient partagé bien plus, et Poppy ne serait pas la première à vouloir garder contact mais trop occupée par le quotidien, laisser ce souvenir périr dans l’oubli. Simplement ne pas vouloir qu’elles se revoient si elle rentrait un jour aux US (c’était un peu douloureux à envisager, mais pas dénué de sens).
Mais c’était la honte qui avait retenu ses gestes, alors que de son propre aveu, elle y avait songé. Elle avait pensé à briser la distance entre pianotant quelques nombres anodins sur un téléphone. Honte de quoi ? Les prunelles contemplant le visage de son interlocutrice qui s’assombrissait, se tordait sous l’assaut d’un mélange de peine et de culpabilité, d’embarras et de souffrance, Eleanor fit un signe d’assentiment pour confirmer ses propres paroles mais également encourager doucement la blonde à se dévoiler. Jamais Poppy ne lui avait parue si vulnérable qu’en cet instant catalyseur de blessures profondes, à vif, qui se révélaient à peine sous ses yeux attentifs et heurtés, bien plus nombreuses qu’elle ne l’avait entrevu quelques trop rares fois dans son regard devenu ciel grondant l’orage. Avait-elle eu honte d’elles ?
Avait-elle eu honte comme souvent Eleanor l’avait ressenti, étant plus jeune, lorsque ses regards et son cœur s’égarait trop dans ce qu’elle était persuadée être la mauvaise direction ?
La violence de cette pensée fulgurante lui glaça les veines, et elle s’obligea à reprendre pieds, à ne plus se perdre dans de telles craintes. Et la voix de Poppy –Penelope, c’était étrangement doux sur la langue- l’y aida, alors qu’elle l’écoutait avec attention lui révéler un pan douloureux de son histoire. Elle l’écouta énoncer son identité comme si elle parlait de quelqu’un d’autre –d’elle, et pourtant d’une autre-, un prénom et un nom associés qui ne lui évoquèrent personne d’autre que l’être de douceur qui se tenait devant elle et révélait les craquelures derrière la chaleur de son sourire. Elle l’écouta raconter ce passé qui semblait si lointain dans ses mots mais néanmoins si proche compte tenu de la fore dévastatrice avec laquelle il la blessait toujours, ses griffes féroces toujours profondément plantées dans sa chair, arrimées à son cœur. Elle dût réprimer l’envie brûlante d’enlacer ses mains des siennes pour la rassurer, pour lui intimer un peu de confiance, alors qu’elle ne pouvait que la contempler serrer ses doigts élancés sur ses genoux plaqués l’un contre l’autre, dans une tentative maladroite d’expier son mal-être, sa nervosité, mais surtout la souffrance qui l’agrippait aux tripes. Elle l’écouta raconter la célébrité et ses revers, ses travers, avec un sentiment de douleur amer et impuissant lui perforant la poitrine. Elle l’écouta évoquer les chaines et les prédateurs affamés, les dérapages incontrôlés, les appels à l’aide camouflés. La France lui avait peut-être permis de reprendre un souffle, de retrouver la surface plutôt que s’enfoncer un peu plus encore dans les eaux glacées qui la maintenaient prisonnière. Mais sa douleur demeurait si palpable, dans sa gestuelle renfermée, dans ses mots alourdis de sentiments déchirés par les remords et parfois la honte aussi, dans sa voix frémissant trop violement sous les vents furieux des émotions.
Sa douleur demeurait si vivante.
A portée de mains.

Ses lèvres se déchirèrent en un sourire à la fois triste et doux, laissant échapper un soupir léger. Son regard s’adoucit un peu plus contre les prunelles si agitées de la blonde. Les traits tendus, un peu trop expressifs, Eleanor chercha quelques instants ses mots, préférant les choisir avec une prudente délicatesse plutôt que laisser les cris de son cœur embraser sa langue d’une sincérité qui pourrait se révéler maladroite.

« Elle est ton passé, Poppy. Elle demeurera une part de toi, quoiqu’il advienne,
énonça-t-elle doucement, l’expression quelque peu durcie par la conviction qu’elle insufflait en ses mots, et toi, une part d’elle. La personne que tu étais ici il y a des années, la personne que tu étais en France, elles ont contribué à faire de toi celle que tu es aujourd’hui. Peut-être que ce retour aux US pourrait être aussi une occasion pour toi de réconcilier celles que tu vois comme deux parts distinctes de toi-même. »

Elle chercha le regard de Poppy, l’enlaçant avec une tendre fermeté, comme pour s’assurer que ses mots se paraient de sens pour elle. Qu’ils ne restaient pas de vaines ondes se contentant de perturber l’air et faire vibrer leurs tympans.

« Je ne vais pas te mentir, je ne connais pas ton passé d’actrice. Je ne sais pas ce que tu as fait pour tenter de t’arracher à ta carrière, ce dont tu sembles tant avoir honte aujourd’hui.  Mais je peux t’affirmer que cela ne change rien à mes yeux, et je n’ai aucun doute là-dessus,
affirma-t-elle d’une voix animée d’une confiance brute, limpide, espérant ainsi un peu apaiser les insécurités qui transparaissaient dans la voix de la blonde. Ça ne ternira pas les souvenirs que j’ai de toi, ni ce que nous partageons. »

Cela ne rongera pas, comme l’acide, les sentiments que j’éprouve pour toi.
Cette amitié et cette tendresse teintées de sentiments plus complexes sur lesquels elle ne désirait pas s’attarder, desquels elle ne s’était que trop cachée.

« Dans ce Starbucks, je n’ai peut-être rencontré que celle que tu voulais être, comme tu le dis, mais j’ai le sentiment d’avoir aussi un peu découvert celle que tu étais avant de partir pour la France,
avança-t-elle, le plis des lèvres plus marqué, les traits adoucis. Et si c’est aussi ce que tu désires, je serais ravie de faire plus ample connaissance, Penelope. »

Et elle lui tendit la main avec la même chaleur que celle qui l’avait étreinte le jour où elle avait osé ouvrir la discussion avec Poppy.
Comme si elles se rencontraient à nouveau. Ce qui était un peu le cas dans le fond.
Ce n’était plus que Poppy qui lui faisait face ; c’était également Penelope. Enlacées, comme indiscernables.

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was it all a dream? (eleanor)
Mar 10 Juil - 14:10
C’était terrible de me sentir double. C’était un sentiment terrible de sentir ces deux identités en moi qui semblaient s’affronter chaque jour. Penelope et Poppy. Poppy et Penelope. L’une, je voulais à tout prix la fuir ; l’autre, je rêvais de la reconquérir. Il me semblait loin le temps où je n’étais que Poppy, où il n’y avait que cette jeune femme souriante au passé brumeux dont on ne parlait jamais. Poppy, c’était un tout petit appartement au-dessus d’un café ; Poppy, c’était un travail à Starbucks pour payer les factures. Poppy, c’était le rêve français. À peine avais-je remis les pieds sur le sol américain que Penelope était réapparue, comme revenue d’entre les morts. Et je crois que j’avais espéré qu’elle reste définitivement morte – morte avec son enfant, morte avec son mariage brisé. Mais elle était de nouveau là avec tout ce que cela implique, avec tout le bagage lourd sur mes épaules : un passif, des souvenirs, des deuils aussi. Alors comment étais-je censée vivre maintenant ? Comment étais-je censée choisir entre ces deux femmes qui font partie de moi ? Comment étais-je censée me présenter devant Eleanor qui ne connaissait qu’une seule partie de moi ? Le sentiment de honte et d’angoisse était gluant au fond de ma poitrine. Parce que je ne voulais pas gâcher ce que nous avions pu construire, Ella et moi ; parce que je ne voulais pas gâcher les sourires, les confidences, les discussions à une toute petite table dans un coin du Starbucks. Alors c’est plutôt libérateur de mettre des mots sur ces vérités-là. C’est plutôt libérateur de pouvoir mettre en voix mes angoisses et mes peurs, mes erreurs. Bien sûr, je ne parviens pas à tout lui dire, il y a encore beaucoup de réalités du passé qui sont retenues prisonnières au fond de ma gorge mais je me sens plus forte aussi. Parce qu’elle a ce sourire sur les lèvres qui me dit que tout ira bien, qui me dit que je n’ai pas à m’en faire. Parce qu’elle a cette lumière dans les yeux qui me dit que ça ne changera rien. Et peut-être avait-elle raison, peut-être que rien ne changerait entre nous. Peut-être que je devais simplement apprendre à vivre avec ces deux parts de moi-même pour enfin me sentir entière. « Et si je n’arrivais jamais à les réconcilier ? j’ose demander, sourdement, sans même penser que Eleanor ne pouvait pas avoir la réponse à toutes les questions. »

Je me sentais néanmoins rassurée de savoir que Ella ne changerait pas d’opinion à mon propos. Elle ne semblait pas faire preuve de cette curiosité un peu malsaine à laquelle j’avais été confrontée pendant tant d’années. Elle acceptait seulement que je débarque dans sa vie avec mon bagage, avec toutes ces casseroles que je me traîne. Elle acceptait que je me fasse une petite place dans son quotidien et que j’y reste. Peu lui importait mon passé ; peu lui importait les erreurs commises. Eleanor était là et elle acceptait. Elle acceptait tout. Et c’était reposant. C’était apaisant. Je m’autorise un sourire, gigotant sur mon siège. Et quand elle me tend sa main, quand mon véritable prénom résonne doucement sur sa langue, il y a comme un frisson qui me parcourt. Un frisson chaud et doux qui descend le long de ma colonne vertébrale et frappe mes reins. C’était doux d’entendre Penelope dans sa bouche. C’était presque indescriptible. Je reste une seconde à observer les longs doigts fins et graciles avant de me lever un peu maladroitement et de prendre sa main dans la mienne pour la serrer. « J’espère qu’elle ne te décevra pas, je rétorque avec un demi-sourire. » Et sans doute qu’encore une fois ma main garde la sienne plus longtemps qu’il ne le faudrait, plus longtemps que la convenance ne le voudrait. Sans doute que mes doigts s’accrochent aux siens dans un geste trop intime. Mais je n’y pense pas. Je n’y réfléchis pas. Ça n’a pas d’importance. Ça n’a pas d’importance parce que, pendant un très court instant, je me retrouve à nouveau en France dans ce Starbucks de la capitale avec Ella assise à sa table. L’espace d’un échange de regard, je reviens à ces matins où je l’observais prendre son café, les yeux parcourant les pages d’un vieux journal ou d’un livre à peine abimé. Retrouver Ella ici était une chance. Un bonheur. « Peut-être que tu pourrais me faire visiter ton royaume ? je demande dans un rire légèrement amusé. Tu m’expliqueras en même temps ce que je vais devoir faire pour toi. » Et je n’ai pas même conscience que sa main est toujours dans la mienne, qu’on est physiquement trop proches pour que la situation paraisse un minimum professionnelle. Mais je suppose que, dans ma tête, Eleanor n’est pas encore ma patronne. Ella est juste cette femme qui a renversé un quotidien monotone et qui me rappelle que je sais encore comme respirer.
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was it all a dream? (eleanor)
Jeu 30 Aoû - 16:35

Was it all a dream ?


Peut-être qu’à la lumière des révélations distillées par Poppy –Penelope-, Eleanor aurait dû s’inquiéter.
En dépit de toute la compassion qu’elle ressentait envers la plus jeune, des sentiments qui se faisaient vents contraires dans le refuge de sa poitrine, une toute autre sorte d’inquiétude vibra sensiblement dans son esprit qui malgré tout restait en partie plongé dans le travail. Penelope avait connu la célébrité, fut un temps –lointain, certes, mais elle soupçonnait (d’expérience) les gens d’avoir excellente mémoire lorsqu’il s’agissait des scandales douloureux endurés par ceux dont l’image devenait l’affaire de tous, et dont la vie ne leur appartenait plus vraiment. Les média s’apparentaient à des rapaces, dictaient le meilleur et le pire pour ceux qu’ils prenaient pour cible. La blonde ne s’était jamais véritablement intéressée aux ragots dont fourmillait Hollywood, mais il existait certaines affaires auxquelles personne n’échappait, même pas ceux qui ne lisaient pas une ligne de la presse dite « people ». Elle reconnaissait dans l’industrie du cinéma (et autres arts télévisuels) certaines choses dont elle avait une connaissance intime et profonde, guidée par l’expérience ; la cruauté du milieu par exemple, surtout envers ceux qui ne se conformaient pas aux dites « normes » imposées par un imaginaire global et sans fondement. Il n’était pas certain que les journalistes reviennent fouiner dans la vie personnelle de Penelope avec le retour de cette dernière dans la Cité des Anges –après tout, cela faisait déjà quelques semaines qu’elle arpentait de nouveau le sol Américain. Mais l’incertitude demeurait. La présence de journalistes ou de paparazzis dans le coin était l’une des dernières choses qu’Eleanor pouvait risquer. L’entreprise cultivait le respect du secret et de la vie privée ; la sécurité était une affaire de discrétion. C’était sûrement injuste –Eleanor se devait de le reconnaître, même s’il s’agissait de sa propre entreprise- mais à cause de la couverture médiatique dont elle avait bénéficié et souffert, Penelope aurait pu se voir refuser cette position, en dépit de ses qualités et compétences ; c’était discriminatoire, mais réel.  
Néanmoins, la plus jeune n’avait pas obtenu ce poste par hasard. Eleanor avait pris part à la rédaction de la fiche de recrutement et elle avait longuement discuté du type de profil qu’elle désirait avec son responsable des ressources humaines et ses collaborateurs. Elle connaissait bien la procédure de recrutement de ses gens, sa complexité, son aspect très complet et fouillé ; mieux encore, elle savait la minutie et l’attention aux détails dont faisaient preuve ses recruteurs. Elle leur faisait confiance. Bien sûr, ils n’en devenaient pas infaillibles pour autant. Mais elle se doutait que le passé de la blonde n’avait pu demeurer un secret bien longtemps pour eux.
Et si, en dépit de cela, elle était là aujourd’hui, c’était parce que le rapport avantages/risques avaient largement penché en sa faveur.

Penelope ne lui avait certainement pas tout dit ; Eleanor se doutait qu’il demeurait bien des zones d’ombre, certaines qu’elle avait cru entrapercevoir lorsqu’elles se retrouvaient, en France. Mais elle ne pouvait s’empêcher de trouver l’aveu particulièrement courageux –et touchant. Elle n’avait jamais vu la blonde aussi exposée –aussi vulnérable- qu’en ces instants où elle mettait à nu des parts de son histoire qu’elle s’était pourtant employée si fort à laisser derrière elle (de son propre aveu), alors qu’elle dévoilait timidement certaines de ses insécurités. Et Eleanor ne pouvait nier le besoin qui lui tordait les tripes de rassurer la plus jeune, cette envie qu’elle laissa maladroitement s’exprimer de la seule manière qu’elle connaissait vraiment : sincère, incisive, confiante. Plus que lui affirmer que tout irait bien (ce dont elle ne pouvait être sûre dans le fond, même si elle désirait y croire), elle pouvait, sans l’ombre d’un doute pour venir assombrir ses mots, lui souffler que cela ne changerait rien à ce qu’elles partageaient. Qu’importe les épreuves qu’elle taisait. Qu’importe les souvenirs qu’elle n’osait confier au refuge de leur proximité. Parce que malgré tout, celle que Poppy décrivait comme Penelope, celle qu’elle disait avoir laissé sur le sol Américain, n’était pas une inconnue aux yeux et au cœur de la chef d’entreprise. Penelope était une part de Poppy ; et Poppy une part de Penelope. Pas deux facettes  distinctes d’une même personne ; pas un passé et un présent un peu lointain maintenant.
C’était ainsi qu’Eleanor le ressentait.

Et si je n’arrivais jamais à les réconcilier ?
L’interrogation la prit un peu au dépourvu, par sa candeur et sa gravité si étroitement emmêlées. Aiguisant sensiblement son regard, la blonde s’accorda le temps de la réflexion, consciente de l’enjeu bien trop réel pour Penelope derrière ces quelques mots, sensible aux insécurités que trahissaient sa voix, l’inquiétude imprégnée sur ses jolis traits.

« Sont-elles si différentes, dans le fond ? » émit-elle doucement, cherchant plutôt à montrer une autre perspective à Penelope.

Elle n’attendait pas réellement de réponses –elle voulait juste que l’autre femme se pose la question.
La distinction était-elle aussi arrêtée et brutale qu’elle semblait le croire ?

« N’y a-t-il pas, d’une certaine façon, un peu de l’une dans l’autre ?
proposa-t-elle avec délicatesse, les yeux vrillant les prunelles aux teintes célestes. Tu n’as pas à choisir d’être l’une ou l’autre. »

Tu peux juste être toi.
Penelope, sur ses lèvres, se gorgeait d’une saveur toute particulière. Eleanor aurait voulu ne pas y prêter tant d’attention, mais elle ne pouvait demeurer aveugle à cette brûlure timide, ce sentiment déroutant qui lui déchirait le cœur alors qu’elle observait Poppy se redresser avec une attendrissante maladresse (un peu surprise, peut-être ?) et lui serrer de nouveau la main. Avec chaleur.
Elle lui offrit un nouveau sourire, plus marqué, qui se voulait rassurant, pour apaiser les quelques doutes qui s’accrochaient encore aux lèvres de la blonde, venaient teinter ses mots d’un fantôme d’incertitude. Les doigts contre les siens lui paraissaient frêles et forts à la fois ; le geste si formel dont elle avait tant l’habitude complètement transfiguré, presque inconnu. Elle retrouvait un peu de celle qu’elle avait côtoyée en  France dans ce rire empreint de légèreté et de sincérité, dans ces mots qui n’appartenaient que trop à leur nouvelle réalité mais résonnaient d’un avant nostalgique et beau. Sentiment à la fois enivrant et terrifiant, parce qu’il lui donnait envie de plus –tellement plus. Alors même que les doigts de la blonde imprimaient leur délicieuse chaleur sur sa peau ; alors même qu’elles se trouvaient déjà bien plus proches que la bienséance ne l’aurait voulu. Plus que la chaleur de cette proximité timide qui lui embrasait agréablement les veines ; plus que ces phalanges qui s’attardaient trop contre les siennes, qu’elle aurait follement désiré ne pas lâcher, garder un peu plus longtemps contre les siennes.
Elle prit discrètement une inspiration un peu plus profonde, dessina un sourire avenant sur ses lèvres.
« Avec plaisir. »
Acquiesçant doucement, elle se redressa pour dépasser Penelope, laissant ses doigts lui échapper d’une façon qu’elle espérait naturelle, avant de l’inviter à la suivre à l’extérieur de son bureau. Passer la porte qu’elle avait tant de fois franchie à la suite de la plus jeune l’aida sensiblement à se replonger dans le travail, en dépit des yeux parcelles de ciel qui lui souriaient d’une façon qui faisait trop violement sursauter son cœur. Retrouvant instantanément ses marques dans cet espace qu’elle connaissait sur le bout des doigts, la familiarité de l’ambiance qui régnait entre les murs qui n’étaient pas ceux de son bureau comme isolé, elle entreprit de faire visiter son entreprise à Penelope, lui expliquer ce qu’ils y faisaient, quels services ils offraient.
C’était un sentiment étrange de la savoir si proche dans ce monde qui était sien, de se laisser aller à l’idée qu’elle allait en faire partie à présent.
Elles passèrent plutôt rapidement devant le bureau de son assistante, tout proche du sien –elles y reviendraient plus tard. L’open space était consacré à tout ce qui touchait à l’administration (finances, comptabilité…) et aux ressources humaines, spacieux mais accueillant une petite quinzaine de personnes. Elle la présenta aux divers responsables et employés, puis elles gagnèrent les étages inférieurs. Elle profita du trajet pour détailler ce qu’elle attendait d’elle. Concrètement, la plus grande part des tâches de Penelope se concentrait autour de l’organisation de l’emploi du temps d’Eleanor, l’accueil des clients et potentiels clients au téléphone. Elle allait également peu à peu constituer la pierre angulaire de sa communication avec les divers services de l’entreprise –apprendre à gérer les urgences et priorités qui nécessitaient qu’Eleanor donne de son temps, délester certains moments dans son agenda pour qu’elle puisse consulter ses équipes, servir de relai et d’écoute aux responsables et employés-, même si elles allaient plus travailler ensemble sur ces points-là, au moins jusqu’à ce que Penelope ait pris ses marques. A vrai dire, le plus compliqué pour Eleanor restait de garder un contact régulier avec ses équipes, car elle n’était pas toujours présente dans les locaux (et donc non joignable si elle était avec des clients), de gérer les priorités dans les réunions auxquelles elle était conviée en interne, tout cela en gérant les clients et futurs clients, et la paperasse qui lui incombait encore en attendant qu’ils puissent embaucher de nouveaux pour qu’elle puisse déléguer certaines tâches.
Elles parvinrent enfin au palier où se trouvaient ses équipes d’ingénieurs. Un immense open-space, très lumineux, avec quelques bureaux fermés, qui fourmillait d’agitation sous-jacente derrière les écrans. C’était définitivement l’endroit qu’elle préférait, et elle ne retint pas le sourire léger mais heureux qui s’esquissa sur ses lèvres.

« C’est ici que se trouve le cœur de l’entreprise. »

Elle prit le temps de la présenter à tous –elle connaissait chacun d’entre eux, et il était important à ses yeux de mettre à l’aise Penelope en compagnie de ces personnes avec lesquelles elle allait certainement beaucoup communiquer. Les équipes-projet entreprirent de présenter sommairement ce sur quoi elles travaillaient en essayant de ne pas trop noyer la blonde sous les termes trop techniques (sans grand succès, ce qui était à la fois amusant et touchant à voir). Après un tour global, elles remontèrent, passèrent dans les salles de break (dont celle faite pour les siestes) où elle lui expliqua qu’elle gérait ses pauses comme elle l’entendait tant qu’elle demeurait disponible. Puis Eleanor invita naturellement Penelope à prendre place à son bureau et se familiariser avec son espace de travail.

« Ana, que tu as vu tout à l’heure, gère tout ce qui est problème de réseau, PC et portable. Elle est pour l’instant seule dans l’
IT department mais le recrutement est en cours. Contrairement à ce qu’on pense souvent, aussi bons les ingénieurs soient-ils dans leur domaine d’expertise, dès que leur outil de travail les lâche, c’est la plupart du temps l’apocalypse, alors elle est pas mal demandée pour le moment mais il ne faut pas hésiter à aller la voir. »

Ouvrant le portable laissé à l’intention de Penelope, elle l’alluma, avant de faire de même avec le smartphone qui lui était fourni.

« Normalement, tous les logiciels dont tu auras besoin sont déjà installés, mais si ce n’est pas le cas ou que tu as des suggestions à soumettre à ce propos, tu pourras également en parler à Ana,
explqua-t-elle, la voix claire et basse. Ce smartphone est mis à ta disposition par l’entreprise pour gérer tous les appels professionnels, il doit être allumé et au minimum sous vibreur pendant que tu es présente ici. Je te conseille de le mettre en mode « ne pas déranger » à chaque fin de journée, parce qu’il arrive que certains clients, et surtout ceux qui ont des horaires différents, appellent à n’importe quelle heure. Ta messagerie est déjà programmée pour les renvoyer vers moi, au besoin. »

Elle lui tendit l’appareil, avant de se pencher vers le clavier du portable pour entrer dans la session, et finalement tourner l’écran vers Penelope.

« Il faudra que tu changes ce mot-de-passe avec l’un des tiens, si possible un que tu n’utilises nulle part ailleurs,
continua-t-elle en prenant place aux côtés de la blonde, après avoir tiré une chaise à elle. Tu vas vite t’en rendre compte, nous sommes très regardant sur la sécurité de nos appareils et sur la protection de nos données, et ce n’est pas seulement parce que c’est quelque chose que l’on vend, mais parce que c’est indispensable. Tout ce qui se passe ici est confidentiel, Penelope, et ne doit pas sortir de ces murs, émit-elle avec gravité. Ça ne s’arrête pas juste à la close de confidentialité que tu as signé en même temps que ton contrat de travail. Tu vas être mise en contact avec des dossiers sensibles. L’un de nos plus gros clients est le gouvernement, et ils plaisantent encore moins que les autres à ce sujet. Ne t’inquiète pas, rien qui ne rivalise avec ce qu’on nous montre au cinéma, concéda-t-elle un peu plus légèrement, avant que son expression ne se durcisse sensiblement. Mais tout le matériel qui t’est prêté par l’entreprise doit rester ici, sauf le téléphone bien entendu, et il faut éviter au maximum de discuter les dossiers au téléphone ou par messages. »

Ses traits se détendirent légèrement, et, attentive à ses questions, elle entreprit de lui montrer un peu les divers logiciels de gestion qu’elle allait utiliser, lui présenter le répertoire des clients et le système de communication interne de l’entreprise, son mail professionnel… Elle l’encouragea à suivre les divers tutoriels mis-en-place dès qu’elle le pourrait. Finalement, elle s’appuya un peu plus confortablement contre le dossier de son siège dans un geste élégant et contrôlé, et put arrêter son regard sur l’expression concentrée de la blonde.

« Est-ce que tu as des questions ? »

Cela faisait beaucoup –énormément- d’informations à emmagasiner d’un seul coup, Eleanor en était consciente.

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was it all a dream? (eleanor)
Dim 30 Déc - 11:27
Jamais je n’aurais imaginé que retrouver Eleanor serait si délicieux sur mon cœur. Jamais je n’aurais imaginé que ses mots pourraient être si tendres sur mon âme. J’essayais de me convaincre que la blonde pensait chacune de ses paroles et j’en étais presque sûre. Et ça faisait un bien fou. Je ne m’étais pas sentie aussi apaisée depuis très longtemps. Et c’est un peu comme si l’angoisse, les appréhensions de retrouver Ella, de travailler à ses côtés en tant que Penelope et non plus comme étant Poppy avaient désormais disparu. Parce qu’elle avait raison : je ne pouvais pas traîner ces deux parts de ma personnalité comme on porte sa propre croix. Je ne pouvais pas continuer à avoir peur d’être qui je suis. Mon retour en Amérique était une façon pour moi de pouvoir recommencer à zéro quelque part ; c’était ma chance de reprendre les choses là où elles s’étaient arrêtées et de rectifier les erreurs du passé. Je pouvais reprendre mon existence en mains, désormais. Et Eleanor me permettait de faire un premier pas dans cette direction. Ce travail était l’occasion pour moi de retrouver mes marques tout en restant éloignée de l’univers qui m’avait fait fuir le pays. La main de la blonde quitte la mienne avec douceur et je commence à la suivre, silencieuse mais surtout curieuse de tout découvrir de son univers. De son royaume. J’étais admirative qu’elle ait réussi à tout construire à la seule sueur de son front. Tout le courage et la force dont elle avait dû faire preuve pour aller contre les obstacles qui se dressaient sur le chemin de toutes ces femmes qui désiraient réussir dans un milieu d’hommes. Silencieusement, je la suis à travers les dédales des couloirs et des pièces ouvertes. L’entreprise me paraît géante. Tous ces visages encore inconnus que je salue, l’uns après les autres. Tous ces futurs collègues qui prennent le temps de me saluer en retour et de m’accueillir avec chaleur. J’ai l’impression de me sentir déjà comme chez moi. Comme si j’avais toujours travaillé pour la compagnie. Tant bien que mal, j’essaye de retenir les informations données, comme j’aurais retenu le texte d’une scène à jouer pour une audition. Je sens le manque d’entraînement et ma mémoire me semble rouillée mais je sens les mécanismes d’une vieille habitude se remettre en route.

Ce n’est que lorsque je suis installée à ce qui sera désormais mon espace de travail personnel que la réalité semble s’installer sur mes épaules. Du bout du doigt, je laisse glisser ma main sur le plat du bureau comme pour me familiariser avec tout ça. « Ana, de l’IT department, je répète doucement comme pour mémoriser. » J’observe l’ordinateur portable et le téléphone devant moi, objets de technologie dernier cri. Puis je me dépêche de sortir un petit calepin de mon sac à mains en plus d’un stylo afin de noter les informations plus importantes. Smartphone allumé et en vibreur minimum pendant les horaires de bureau. En mode ‘ne pas déranger’ une fois la journée terminée. Changer le mot-de-passe – unique. Confidentialité +++. N’emporter que le téléphone portable chez moi. Pas de conversations sur les dossiers. Consciencieuse, je relis mes notes pour être certaine de ne rien avoir oublié. Relevant les yeux vers Eleanor, je lui adresse un sourire avant de répondre : « Tout est très clair jusque-là. À quelle heure veux-tu que je commence mes journées ? Est-ce que je dois apporter le café, le matin ? Mon travail consistera en quoi, concrètement ? » Je suppose que je serais surtout là pour aider Eleanor, organiser ses journées et prendre ses rendez-vous. Lui rappeler les heures de réunions et avec qui. Je suppose qu’il faudrait également que je sache quand lui dire de faire une pause, lui rappeler qu’il doit être l’heure de déjeuner ou bien de rentrer enfin chez elle le soir. Mon poste était sûrement le genre où je devrais me caler sur la blonde et arranger mes journées en fonction de ses besoins. Au moins, je savais quelles étaient ses préférences en matière de boissons et choisir son café préféré me rappellerait à tous ces matins où elle avait passé la porte du Starbucks à Paris. « Je ne veux pas commettre d’impair alors je veux vraiment savoir quelles sont mes fonctions pour ne pas empiéter sur celles des autres. »
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was it all a dream? (eleanor)
Dim 19 Mai - 13:56

Was it all a dream ?


Chaque seconde passée en compagnie de Penelope au sein de ces murs marqués par le travail des vingt dernières années de sa vie appuyait un peu plus l’indéniable réalité qui serait très bientôt la leur. Pourtant, Eleanor ne pouvait nier cette part d’elle, de plus en plus fragile et petite au fur et à mesure que le temps leur filait entre les doigts, qui peinait encore pleinement à y croire. A embrasser la perspective aussi douce qu’effrayante que l’autre femme se tiendrait à ses côtés pendant sept à dix heures par jour, après des années de silence, après des milliers de kilomètres de distance. Le travail s’érigerait à la fois comme entremetteur de leurs retrouvailles et frontière inébranlable entre elles –facettes opposées, ambivalentes, avec lesquelles la femme d’affaires allait devoir composer. Intérieurement, elle se rappela de nouveau à l’ordre : cette frontière n’était certainement là que dans son propre esprit, parce qu’elle désirait déjà la rendre plus poreuse et fragile, et qu’importe les envies que les prunelles bleutées lui inspiraient, ces dernières n’avaient pas leur place entre elles, ne l’avaient plus depuis Paris. Et rien que quelques instants, dans les recoins sombres et inviolés de son cœur, Eleanor se surprit à imaginer qu’elles se soient retrouvées en d’autres circonstances. Au détour d’une rue bondée, dans l’alter-égo Américain qui les avait vues se rencontrer sur un grand boulevard parisien.  Son cœur se crispa sous l’assaut de ces pensées fugitives qu’elle condamna aussitôt, incapable de céder à la vérité qui se dessinait derrière les questions que cet égarement dangereux soulevait : qu’est-ce que cela aurait changé, dans le fond ? Qu’est-ce que cela aurait changé, qu’il n’y ait pas la barrière professionnelle pour les séparer ?
Rien.
Tout.

Jouant des doigts sur le clavier de l’ordinateur confié à Penelope –un modèle certainement plus performant que ce dont elle aurait besoin, mais qui fonctionnait sous un OS plus commun que ceux utilisés par la plupart des ingénieurs-, elle accéda au réseau interne de l’entreprise pour lui montrer comment cela fonctionnait, avant de lui montrer les informations et surtout l’emploi du temps qu’elles allaient partager, en quelques sortes. Rivant son regard sur le visage aux traits concentrés, Eleanor lui accorda un sourire discret mais sincère.
« La plupart du temps, ce seront des journées allant de neuf heures à dix-huit heures, mais il est possible que tu sois obligée d’arriver un peu plus tôt ou quitter plus tard selon les variations de mon propre emploi du temps, mais l’on s’arrangera ensemble pour équilibrer tes horaires, de sortes à ce que tu ne te retrouves pas à enchainer d’énormes journées, l’informa-t-elle d’une voix posée. Même si on rémunère les heures supplémentaires, ce n’est pas sain de se surmener. »
Eleanor arrivait souvent avant la plupart de ses employés et quittait bien plus tard –mais à leur différence, cette entreprise était le fruit de nombreuses années de travail et de sacrifices, et comme elle n’avait personne à qui revenir le soir, passer plus de temps dans les locaux pour venir à bout des nombreuses responsabilités et tâches qui lui incombaient ne la dérangeait pas, lui faisait même plaisir à vrai dire.
« Ce n’est pas dans tes attributions d’apporter le café le matin, Penelope, sourit-elle plus franchement, cédant à une nostalgie lancinante. A part si tu n’aimes vraiment pas le café des salles de repos. »
Elle ne voulait pas que Penelope se sente obligée d’un tel geste, qui à ses yeux, s’avérait plutôt exceptionnel. Et elle ne put qu’apprécier le professionnalisme de cette dernière, même si d’expérience, elle savait que les erreurs faisaient partie de l’apprentissage, que la plus jeune aurait besoin d’un peu de temps pour prendre ses marques et qu’elle commettrait peut-être de petites bévues, mais sa motivation était plaisante à entendre.
« C’est encore une petite entreprise, tu sais. Il arrive que les attributions de certains dépassent sur celles d’autres, c’est assez courant dans les petites structures où parfois des personnes assument plusieurs postes à la fois, reconnut-elle avec franchise. Plus concrètement, reprit-elle après un court silence, assurée, ton travail consistera surtout à organiser mon emploi du temps et servir d’intermédiaire entre nos collaborateurs, les clients et moi-même. On travaillera ensemble les premières semaines, pour que tu te familiarises avec nos clients et nos collègues, nos façons de faire, les priorités qu’il faut accorder à tel rendez-vous ou réunion, les moments qu’il faudra dégager dans mon emploi du temps pour que je puisse passer du temps ici pour travailler sur la paperasse entrepreneuriale ou pour assister aux réunions avec les équipes. Je ne te cache pas que c’est souvent un casse-tête à organiser, car même si je dois privilégier les rendez-vous clients, ma présence est aussi nécessaire ici et il m’est primordial que la communication se fasse correctement à tous les niveaux de la hiérarchie. Tu vas te retrouver au croisement entre pas mal de personnes aux responsabilités et milieux d’expertise très différents comme tu vas devenir leur premier interlocuteur à ma place, mais cela va vraiment aider à organiser le temps de façon optimale. »
Elle jeta un coup d’œil à l’heure qu’affichait le bureau de l’ordinateur pour constater que l’heure du déjeuner était déjà passée de quelques dizaines de minutes.
« On commencera à parler de tout cela après la pause, conclut-elle avec un sourire rassurant, en accrochant tendrement le regard de la plus jeune. Que dirais-tu d’aller déjeuner ? »
Elle était consciente d’avoir certainement assommé l’autre femme d’une tonne d’informations, et il était plus que temps qu’elles soufflent un peu toutes les deux avant de reprendre au maximum de leurs moyens. L’équilibre entre pauses et travail, éternelle préoccupation de la travailleuse assidue qu’Eleanor était –un trait qui avait tendance à déteindre sur ceux avec qui elle travaillait.



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