and you are ? (rayden)

La conversation prend une tournure inattendue lorsque la quadra montre un intérêt à venir me voir jouer sur scène. Sa curiosité n’est pas sans arrière pensée et elle m’en fait part tout naturellement, me laissant un peu abasourdie. Une sorte d’audition officieuse ? C’est vraiment ce qu’elle sous-entend ? A moins que ça ne soit une plaisanterie et qu’elle ne compte pas réellement venir assister à un de mes cours ou à cette représentation prévue dans trois semaines. Oh j’ai bien fait de dire ça… je ne vais pas du tout avoir la pression. Heureusement que mon passé de sportive de haut niveau me permette de bien gérer le stress. Je décèle dans l’attitude de mon interlocutrice que son intérêt est réel. De toute façon pourquoi jouerait-elle à me faire croire ce genre de chose sans y penser un minimum ? Ce n’est ni de son âge, ni de son statut. C’est une femme avec un boulot sérieux et sûrement pas du genre à laisser le dit boulot une fois passer ses heures de travail. C’est du plein temps, du vrai, un métier passion probablement. Je l’espère pour elle en tout cas, il n’y a rien de pire que de laisser sa vie entre parenthèse pour une chose que l’on aime pas vraiment. Difficile de me dire que ce dîner imprévu pour parler ado tourne presque au casting informel. J’admets être un peu dépassée et la jolie blonde s’excuse pour la soudaineté de ses propos. Elle m’assure que ce n’est pas une plaisanterie, pas plus qu’une promesse d’ailleurs. Je me mets à rire « Oh ne vous en fait pas je suis plutôt pragmatique. » pas du genre à faire des plans sur la comète… ma blessure et l’arrêt de ma carrière sportive, entre autres, c’est bien chargée de me faire prendre conscience qu’il est important d’avoir les pieds sur terre et que rien n’est jamais acquis. J’apprécie le sourire qu’elle m’adresse, plus franc, plus vrai. Je me surprends à avoir un léger coup de chaud soudain, je bois une gorgée d’eau pour faire passer tout ça.
Nos plats sont servis, c’est aussi beau que ça a l’air bon. Alors que nous commençons à manger la quadra poursuit la conversation, curieuse d’en savoir plus sur moi. Sous couvert d’une certaine égalité sur ce que nous savons l’une de l’autre, elle me questionne sur des aspects plus personnels de ma vie. Je secoue la tête à la négative « Je n’ai personne actuellement. » et je ne vais pas m’étendre en disant que le dernier en date m’a fait perdre un peu foi dans la vie à deux, nous n’en sommes pas là des confidences. « Pas d’enfants non plus. » je ne me suis jamais posée la question de savoir si je veux en avoir ou non, persuadée que l’envie se manifestera lorsque j’aurais rencontré quelqu’un avec qui l’idée de fonder une famille sera évidente, tout simplement. « Vous et le père de Maé êtes séparés depuis longtemps ? » demandé-je en surfant sur la vague de ce sujet. Sans doute a t’elle refait sa vie, elle semble épanouie. Pas que je pense qu’il faille être obligatoirement avec quelqu’un pour l’être, mais avoir une personne avec qui partager certaines choses de son quotidien est une plus value. « Il y a autre chose sur laquelle nous ne sommes pas a égalité. Je ne connais pas votre prénom. » je ne sais pas pourquoi je viens de dire ça si spontanément, après tout c’est une information qui n’est pas obligatoire d’avoir. J’esquisse un léger sourire et poursuit la dégustation de mon plat, qui je dois le dire, est un bonheur absolu.

Je sens que je l’ai laissée dubitative et plus encore, elle ne semble pas très sûre de ma sincérité. Je m’excuse pour lui montrer que je ne suis pas là pour lui donner de faux espoirs, loin de moi cette idée. Je préfère néanmoins la prévenir que je ne peux rien lui promettre en ce qui concerne un éventuel début de carrière. Je peux être en mesure de le faire, mais pour ça il faudrait qu’elle soit douée, c’est la condition sin equa non. « Oh ne vous en fait pas je suis plutôt pragmatique. » Tant mieux alors. Je hoche la tête en lui adressant un sourire entendu. Mais je ne compte pas m’arrêter là pour ce qui est de découvrir cette ravissante jeune femme. Je suis de nature curieuse, et nous sommes en train de partager un repas, je crois que nous avons encore du temps devant nous, autant l’utiliser à bon escient. Je lui demande sans hésitation si elle a quelqu’un dans sa vie, ou même des enfants. Pourquoi pas après tout. « Je n’ai personne actuellement. Pas d’enfants non plus. » Elle ne s’étale pas, je ne lui demande pas de le faire, j’ai les réponses à mes questions. Je n’ai pas besoin de répondre d’ailleurs, je me contente d’un hochement de tête simplement pour lui signifier que j’ai entendu. « Vous et le père de Maé êtes séparés depuis longtemps ? » me demande-t-elle toujours dans la même vague de soif de curiosité, j’imagine. Je ne peux m’empêcher de sourire, parce qu’elle a tout de même l’aplomb de poser ce genre de question, ce n’est pas donné à tout le monde, d’autant que je ne suis pas le genre à donner confiance, au contraire même. On m’a souvent dit que je pouvais être impressionnante voir même faire fuir les gens. Ça m’amuse plus qu’autre chose. « Maé avait quatre ans lorsque je me suis séparée de son père. Ca va faire douze ans donc. C’était y’a un moment oui. » Je ne m’étale pas davantage, elle n’a pas besoin d’en savoir plus après tout. Pas encore, pas tant qu’elle n’a pas posé plus de questions. « Il y a autre chose sur laquelle nous ne sommes pas a égalité. Je ne connais pas votre prénom. » me dit-elle avec presque un poil d’innocence, ce qui ne peut que me faire sourire. « Eden. » Nos regards se croisent chargés d’une sorte d’électricité impalpable. J’aime ce que peut provoquer mon prénom chez certaines personnes. Le déjeuner se passe tout naturellement, j’imagine qu’il est impossible pour les personnes autour de nous d’imaginer que nous venons de nous rencontrer. Plusieurs sourires, des discussions orientées sur le cinéma, l’éducation, l’enseignement. Tout semble naturel et c’est très agréable. Le déjeuner touche à sa fin et je propose à la jeune femme de la ramener chez elle, à quelques rues d’ici. J’immobilise la voiture devant chez elle et lui promets de passer la voir jouer à un de ses cours, ou au plus tard à sa représentation. En attendant, je lui donne ma carte et la laisse repartir, non sans me délecter de sa silhouette tout à fait agréable, avant de repartir travailler.