full of secrets and lies // dylake #14

Eliot. Ce prénom qui résonne en moi comme l'effet d'une bombe. Cet adolescent de quatorze ans qui est venu il y a quelques semaines frapper à la porte de mon appartement. Comme un choc, le passé qui me revient brusquement en pleine face. Mon enfant. Ce bébé que j'ai lâchement abandonné après sa naissance. J'ai volontairement occulté cet épisode de ma vie jusqu'au point de faire comme s'il n'avait jamais existé. De réussir à m'en persuader même. Comme si je n'étais jamais tombée enceinte à dix-sept ans lors de ma première fois. Ce garçon qui avait réussi à me mettre dans son lit avant de me jeter comme une vulgaire chaussette. A cette époque là, je n'avais pas eu le courage d'avorter. Et pourtant, je n'étais pas encore prête à devenir mère. Comment une gamine comme moi de dix-sept ans pouvait-elle gérer un enfant ? Non, ce n'était pas possible. Avec le recul et encore maintenant, je pense que l'adoption était le meilleur choix possible. Mais c'est forcément un évènement marquant de mon histoire qui a été difficile à vivre. Cet abandon a laissé en moi un vide immense. Et je ne m'attendais pas à être confronté directement à lui, quatorze ans après. C'est un traumatisme que je n'étais pas prête à encaisser. L'élément déclencheur qui a ravivé de nombreuses cicatrices du passé. En réalité je ne sais même pas comment réagir. Eliot a fait de nombreuses recherches pour me retrouver, il avait besoin de savoir. Mais est-ce qu'il sera un jour capable de me pardonner pour ce que j'ai fait ? Après notre rencontre, je lui ai plus ou moins laissé le choix. C'est à lui de décider s'il a envie d'apprendre à me connaitre, de passer du temps avec moi ou s'il préfère tirer un trait définitif sur moi. De mon côté, je suis complètement perdue. Je ne sais même pas ce que je veux, et le pire dans tout ça, c'est ce que je commence à me renfermer sur moi-même. Avec Dylan, nous allions bien pourtant. Nous commencions vraiment à trouver notre équilibre. Mais depuis le retour d'Eliot dans ma vie, je suis devenue plus que l'ombre de moi-même. Je refuse de la voir, prétextant des excuses toutes aussi débiles les unes que les autres, et je suis inconsciemment plus distante. Je n'arrive pas à lui parler de lui, comme si je faisais une sorte de blocage. J'ai peur de sa réaction aussi. De son jugement, comme de ceux des autres. En réalité je n'ai parlé de cette histoire à personne. Hormis ma famille, peu de personnes de mon entourage sont au courant. Et je pensais jusqu'à maintenant que c'était mieux comme ça. Qu'en est-il à présent ? Je reçois un énième message de Dylan proposant qu'on fasse quelque chose ensemble, mais je n'ai pas le cœur à faire semblant. Je refuse, prétextant devoir travailler sur un gros dossier à boucler avant demain. Mais au lieu de rester cloîtrée chez moi, je décide d'aller prendre un peu l'air. Et une chose en entrainant une autre, je me retrouve finalement accoudée à ce bar, un verre à la main. Puis un autre et encore un autre. Il y a cette fille qui vient me voir, pour discuter, et pendant l'espace d'un instant, je ne pense plus à rien. Elle m'invite à danser et nous passons un moment agréable. Jusqu'à ce que je croise le regard au loin de ma petite-amie qui vient de faire son apparition. Et merde. Qu'est-ce qu'elle fait là ?

Les choses se sont arrangées avec Blake, suite à notre discussion. Une fois tout remis à plat nous sommes reparties sur de bonnes bases. Je le pensais en tout cas, le chemin semblait dégagé, pas d’obstacles en vu et puis… Et bien je ne sais même pas ce qu’il en est vraiment, mais ces derniers temps nous nous voyons beaucoup moins. La faute du boulot, un peu. Sauf que jusqu’ici on s’organisait très bien. A vrai dire le manque de disponibilité ne vient pas de moi mais de Blake. Je lui laisse le temps et l’espace qu’il lui faut, parce que j’ai confiance en elle et je ne veux pas l’étouffer. On se redonne une chance et j’ai envie que ça marche. Je suis à l’écoute, présente, si elle le veut et un peu plus en retrait si besoin. Néanmoins, je ne compte pas m’oublier en route et j’ai envie de passer du temps avec elle. Si jusqu’à présent elle était seulement indisponible pour que l’on se voit, désormais elle se fait un peu plus distante. Ses messages sont plus concis, neutres. Je la connais, ce n’est pas son genre. Forcément je me pose des questions. Est-ce que le vent à finalement tourné ? Ma chance est peut-être passée après tout, et elle ne sait juste pas comment me dire qu’il lui sera impossible de me pardonner. C’est le scénario que je redoute, mais il y a sans doute d’autres explications possibles à cette distance mise entre nous par Blake. Ce qu’elle me dit est probablement la stricte vérité, elle bosse, beaucoup… Trop à mon goût en ce moment, mais si ça compte pour elle c’est ok pour moi. Du moins jusqu’à un certain point. J’admets que l’on se rapproche de la limite de mon seuil se tolérance. Elle me manque. Ça ne fait pas de moi un monstre d’égoïsme que de vouloir voir la femme que j’aime.
Début de soirée, je tente ma chance auprès de Blake, lui proposant par message de commandé quelque chose et qu’elle vienne manger chez moi. Trop occupée, un dossier à bouclé avant le lendemain. Je m’en doutais. J’en suis là, à pressentir ses excuses. Ça pue un peu ça, non ? Je devrais peut-être me pointer chez elle avec la dite commande ? Ouais, je vais faire ça. Je sais qu’elle n’aime pas être prise au dépourvu, mais c’est un cas de force majeure ! Alors je vais chercher à manger chez ce petit traiteur qu’elle aime bien et je file directement chez elle. Je frappe une première fois. Rien. Une seconde, toujours rien. J’écoute à la porte, ne perçois pas de bruit. Dernière tentative, toujours infructueuse. Bon, c’est que Blake est partie bosser sur le terrain, mais à cette heure-ci c’est inhabituel. Je suis déçue. Inutile de le nier, la situation commence à devenir pesante. Je m’inquiète pour elle, au delà du manque que provoque son absence. Blasée, je donne nos repas à un sdf, ça lui fait ça soirée, au moins un pour qui elle sera bonne. La mienne je ne sais pas encore comment elle sera, mais j’ai envie d’un verre. J’entre dans un bar sympa où je suis venue une ou deux fois. Je sors beaucoup moins depuis quelques temps, parce que je n’en ressens plus le besoin. L’ambiance est déjà bien présente, pourtant il n’est pas si tard. Je me dirige vers le comptoir et en regardant vers la zone où quelques personnes dansent, j’ai d’abord l’impression d’avoir une hallucination. Blake ?! Je cligne des yeux, fronce les sourcils. Non, ma vue ne me fait pas défaut et mon cerveau ne me joue pas des tours, c’est bien elle en train de danser… avec une autre femme. Mon cœur se serre, comme ma gorge, j’aurais préféré halluciner. Nos regards se croisent, je lis l’étonnement dans le sien et je pense qu’elle doit percevoir clairement beaucoup de chose dans le mien. Je m’avance dans sa direction « Tu bosses sur la déco du bar ? » demandé-je en arquant un sourcil puis je regarde celle avec qui elle semblait passer un bon moment « Ou alors c’est ça ton gros dossier ? » je secoue la tête et plonge à nouveau mon regard dans celui de Blake. J’ai mal. « Tu voulais boucler la boucle ? » se venger, même si je pensais que nous avions dépassé cela.

Je suis en train de faire n'importe quoi, d'agir n'importe comment et le pire, c'est que je ne m'en rends même pas compte. En réalité, je crois que j'ai besoin d'être un peu seule. Alors je prends mes distances, je m'isole dans mon coin et me renferme encore un peu plus sur moi-même. Que ce soit avec Dylan ou n'importe qui d'autre d'ailleurs. Mais Dylan est sans aucun doute la première personne à en faire les frais. Je suis consciente que ce n'est certainement pas la meilleure façon de gérer cette histoire, et pourtant c'est plus fort que moi. Comme si je ne pouvais pas m'en empêcher et que mon inconscient prenait le dessus. Et à cet instant même, l'alcool joue également les trouble-fête. Ce n'est définitivement pas un bon mélange. Mais sur le moment, j'ai l'impression que c'est la seule chose qui puisse me faire du bien. Tout oublier le temps d'une soirée et faire comme si tout allait bien. Même si je risque de le regretter dès le lendemain matin, une fois les effets dissipés et la raison retrouvée. C'est un cercle vicieux. Et on le sait tous, le retour à la réalité fait encore plus de mal au réveil. Si l'euphorie du moment arrive à tenir jusque là... En croisant le regard de Dylan, je comprends très vite que ce ne sera pas le cas. Je suis grillée. Mon mensonge de tout à l'heure me revient en pleine gueule, et je ne sais pas comment je vais pouvoir me sortir de cette impasse. Elle me fusille du regard, cherchant sans doute une explication à ma présence ici. Merde, merde, merde. Qu'est-ce que je vais bien pouvoir dire pour ma défense ? Il n'y aucune raison valable qui pourrait justifier ce que je fais dans ce bar. Et Dylan le sait mieux que personne. « Tu bosses sur la déco du bar ? » Son regard dérive rapidement sur la jeune femme à mes côtés. « Ou alors c’est ça ton gros dossier ? » Sa colère est légitime, même si j'ai du mal à supporter toute la déception que je peux lire dans le regard de ma petite amie. « Tu voulais boucler la boucle ? » Il n'a jamais été question de ça. « Dylan... » Je fuis honteusement son regard. « Ce n'est pas ce que tu crois. » Ah bon ? Et pourquoi donc ? Je lui ai ouvertement menti, prétextant travailler sur un gros dossier alors que je suis là, dans ce bar, à danser avec une autre. Si, c'est exactement ce qu'elle croit en fait. Enfin non, pas totalement. Il n'y a rien du tout avec cette fille qu'on soit bien d'accord. « Je crois que je ferais mieux de vous laisser. » Ma partenaire de soirée sent le vent tourner et s'éclipse aussitôt. Les effets de l'alcool sur moi ne se sont pas dissipés pour autant, et j'ai un peu de mal à garder contenance. Pourtant je lui dois une explication. « On dansait juste un peu ensemble, on ne faisait rien de mal. » Que j'ajoute en haussant un peu les épaules comme si ça n'avait pas réellement d'importance. Mais, sur ce coup-là, j'aurais mieux faire de me taire. A croire que je suis plus douée pour remuer le couteau dans la plaie que pour me sortir de l'embarras. « Qu'est-ce que tu fais là ? » Ok, stop. Tais-toi Blake. Je ne suis certainement pas la mieux placée pour lui demander ça. Et je crois que malgré tout ce que je peux essayer de faire, il ne sera pas possible pour moi d'échapper à cette discussion. Dylan ne lâchera pas le morceau aussi facilement.

Ce n’est pas ce que je crois. Mais Blake sait-elle au moins ce que je crois ? Ce que je vois en tout cas, c’est la femme que j’aime laquelle ayant une nouvelle fois décliner une invitation de ma part prétextant avoir trop de boulot, danser avec une autre. Je mets même un peu de bonne volonté en lui trouvant comme excuse qu’elle est peut-être justement en train de bosser et que cette nana est le dossier en question. Le dit dossier s’éclipse, elle fait bien, comme quoi certaines personnes ont toujours un peu d’instinct de survie. L’attitude de Blake m’indique qu’elle a bu, je la connais trop pour me laisser duper.  A vrai dire elle n’a même pas l’air de chercher à donner le change, me vendant une pauvre excuse. Elles dansaient seulement. Ok, soit. Admettons, mais elle m’a menti et m’évite, je suis bien placée pour savoir que ce genre d’attitude pue. « Rien de mal... Ouais. » dis-je, amère en secouant la tête. Je suis déçue. Blake vaut mieux que ça, mieux que moi alors pourquoi tombe-t-elle aussi bas ? Pourquoi je ne la reconnais plus depuis quelques temps ? Je ne sais même pas quoi dire tant je suis blessée de l’avoir trouvée là. Et elle, inhibée par l’alcool me demande les plus naturellement du monde ce que je fais ici. « Le hasard. Il fait définitivement bien les choses, hein ? » je soupire « Je me suis pointée chez toi avec le dîner, y’avait personne. Alors je suis repartie, j’ai tout donné à un sans abri. » le résumé d’une super soirée, n’est-il pas ? « J’ai besoin d’un verre ! » conclue-je en me détournant. Je me fraie un chemin jusqu’au bar et commande un whisky. C’est le minimum pour essayer d’atténuer l’amertume par quelques vapeurs d’alcool qui me brûleront le gosier. Je ne cherche même pas à savoir si Blake m’a suivit ou non, si elle va enfin consentir à me donner des explications. Va-t-elle seulement essayer d’entamer la discussion ? Parce que ces derniers temps ça me semble impossible tant elle est fuyante. Ça m’inquiète tout autant que ça me blesse.

Je me suis foutue dans un sacré pétrin. Et le pire, c'est que c'est tout ce que je mérite. J'aurais dû le savoir pourtant, je n'ai jamais été une bonne menteuse. A croire que c'est une histoire de karma. Mes mensonges finissent toujours pas me revenir en pleine figure... ça m'apprendra tiens. Mais maintenant qu'on en est là, je ne sais même pas quoi faire pour me justifier. Je ne faisais rien de mal. Enfin pas totalement. Mais pas sûr que Dylan soit de cet avis. « Rien de mal... Ouais. » Il va falloir que je trouve mieux à dire. Au lieu de ça, je lui demande ce qu'elle fait là. Comme si c'était à elle de se justifier. Pitoyable. « Le hasard. Il fait définitivement bien les choses, hein ? » Sa pointe d'ironie n'est pas rassurante. En même temps, à sa place, j'aurais très certainement réagi de la même façon. Encore pire d'ailleurs. « Je me suis pointée chez toi avec le dîner, y’avait personne. Alors je suis repartie, j’ai tout donné à un sans abri. » Merde. Comment se sentir encore plus coupable qu'on ne l'est déjà. Je grimace un peu avalant difficilement ma salive. Je n'ai pas les idées claires, l'alcool jouant un malin plaisir à me contrôler le cerveau. C'est pas joli d'être moi à cet instant. « J’ai besoin d’un verre ! » Dylan fait volte-face pour se diriger vers le comptoir. Il me faut quelques minutes pour encaisser, comprendre ce qui est vraiment en train de se passer. J'ai merdé, et pas qu'un peu. Ça fait des semaines que je ne suis plus vraiment moi-même. Et voilà où on en est aujoud'hui. Je ne peux pas rester là sans rien faire. Je me décide alors à la rejoindre m'asseyant à ses côtés près du comptoir. « Je suis désolée... » Autant commencer par le début ; des excuses. Même si ce ne sera surement pas suffisant. Je tente d'approcher ma main sur sa cuisse au risque de me faire rejeter avant d'ajouter. « Je... » Elle ne me regarde pas. « Je t'ai menti, je sais, mais je ne voulais pas te faire de mal. » Ça ne sert d'inventer d'autres conneries pour enfoncer le couteau dans la plaie. Je n'avais pas de dossier pour le travail à terminer ce soir et elle l'a très bien compris. « Je n'étais pas bien, j'avais besoin d'être un peu seule. » C'est sans doute une drôle de façon d'être seule, puisque je n'étais pas seule dans ce bar. Mais pourtant, c'est la vérité. Je voulais être un peu seule pour me vider la tête. Ce n'était pas contre elle, ça n'a jamais été le cas. C'est juste... moi. Je ne suis pas bien depuis qu'Eliot a fait irruption dans ma vie. Mais ça, je ne sais pas vraiment comment lui dire. Pourtant je sais qu'il va falloir que je lui en parle. Mes justifications foireuses ne seront sans doute pas suffisantes.

Ça fait mal putain ! Si le but de Blake c’est de me faire comprendre à quel point j’ai pu la blesser par le passé, c’est réussi. Mais je sais qu’il ne s’agit pas de ça, elle ne s’y abaisserait pas, ce n’est pas son genre. Et c’est peut-être pire, parce que du coup j’ai peur que ça soit plus grave encore qu’une basse histoire de vengeance. Je ne la reconnais plus depuis quelques temps, c’est inquiétant. Elle est fuyante, distante et très taciturne. Chaque fois que je lui ai demandé si ça allait, elle a fuit la question, alors je lui ai laissé de l’espace… Mais voilà où nous en sommes. Moi qui m’accroche, elle qui ment et forcément je souffre. Elle aussi, je crois, sauf qu’après tout ces pas fait en sa direction je me sens totalement à bout de solution. Je suis dans une impasse, face à ce mur qu’elle semble avoir dressé entre nous et je n’y verrai pas plus clair après, mais j’ai besoin d’un verre. Un truc fort, de quoi cautériser la plaie pendant quelques secondes. Je n’ai même pas cherché à savoir si Blake me suivait où non, mais à peine suis je assise sur un tabouret face au comptoir, qu’elle me rejoint. Elle est désolée. Ouais, je me doute, mais encore ? « Pas autant que moi. » soufflé-je, les yeux perdus sur le liquide dans lequel flotte deux glaçons. Certains crieraient à l’hérésie, je m’en fous, je bois le whisky comme ça me chante ! C’est pas le moment de me faire chier. Sa main se pose sur ma cuisse, je ne réagis même pas, ni pour l’esquiver, ni pour la regarder. Elle m’a menti, sans vouloir me blesser. Et bien c’est raté. « Pourquoi ? » demandé-je, complètement paumée par son attitude.
Blake avait besoin d’être seule. Je m’esclaffe brièvement dans un rire, jaune. Nous n’avons pas le même concept de la solitude apparemment. « Non, pas seule. Sans moi, je crois que c’est toute la nuance. » répliqué-je avec amertume avant de boire un peu d’alcool. « T’avais juste à le dire Blake, si t’as besoin d’espace. Je peux le comprendre, mais je ne peux pas le deviner. Et puis c’est blessant à force, de se sentir repoussée. » cette fois je la regarde dans les yeux, je la sens sincère, y’a un truc qui ne va pas mais je lui en veux de me mettre de côté sans explication. « Donc c’est ça, tu veux être seule ? » je hausse les épaules  « Message reçu. » soupiré-je « Je ne vais pas te demander pourquoi. Tu vas encore me laisser sans réponse, n’est-ce pas ? » et je n’ai plus la force de lutter, pas ce soir. Ce qu’il me reste de force je la garde pour ne pas flancher, parce que clairement j’ai la gorge nouée et cette envie qu’elle a d’être seule ne me laisse rien présager de bon.

Après ça, je lui dois une explication. Je ne veux pas qu'elle s'imagine n'importe quoi non plus. Parce que je me fous complètement de cette fille avec qui je dansais. D'elle ou de n'importe qui d'autre d'ailleurs. Ce n'est pas de ça qu'il s'agit. Et pourtant, les apparences ne sont pas en ma faveur. Il va falloir que je trouve les bons mots. Et ça, c'est pas une mince affaire. C'est justement mon plus gros problème. « Non, pas seule. Sans moi, je crois que c’est toute la nuance. » Je grimace à sa remarque. C'est vrai que ce n'était pas la meilleure des choses à dire pour ma défense. Si elle m'avait retrouvé comme une loque chez moi, peut-être, mais pas dans un bar comme ça. « T’avais juste à le dire Blake, si t’as besoin d’espace. Je peux le comprendre, mais je ne peux pas le deviner. Et puis c’est blessant à force, de se sentir repoussée. » Je me rends compte de tout ce que j'ai pu lui faire subir ces dernières semaines... à sa place, je n'aurais même pas été capable de tenir trois jours sans péter un boulon. Dylan a été patiente, et moi, je n'ai pas su comment lui parler. « Donc c’est ça, tu veux être seule ? Message reçu. » C'était stupide de ma part de m'éloigner d'elle comme ça. « Ce n'est pas exactement ça... » Je traverse une mauvaise passe, mais ça ne veut pas dire que je ne veux plus être avec elle ou que je remets en question notre relation. Non, ce n'est pas ça. « C'est pas de ta faute, c'est moi. » Le fameux classique "c'est pas toi, c'est moi". Mais en même temps, c'est la vérité. En ce moment, j'ai du mal à gérer mes émotions. Le passé qui refait surface et qui bouleverse tout sur son passage. « Je ne vais pas te demander pourquoi. Tu vas encore me laisser sans réponse, n’est-ce pas ? » Je la sens résignée et ça me fait du mal. Parce que c'est entièrement de ma faute si nous en sommes là. « Je ne suis pas certaine que ce soit le meilleur endroit pour discuter... » Je suis consciente qu'il va falloir que je trouve un moyen de lui dire pour Eliot. Il faut que je prenne mon courage à deux mains, une bonne fois pour toute. Parce que Dylan ne mérite pas mon silence. Elle fait beaucoup d'efforts depuis que nous avons décidé de redonner une chance à notre couple. Et moi, voilà comment je la remercie. C'est un peu égoïste de ma part de la laisser à distance. « Tu voudrais pas qu'on aille marcher un peu ? » Je peux lui laisser le temps de finir son verre ou de prendre aussi du temps pour elle si elle n'en a pas envie. « Je comprendrais si tu refuses, c'est pas grave. » Je ne veux surtout pas qu'elle se sente obligée ou quoi que ce soit d'autre. C'est elle qui a les cartes en main maintenant.

Besoin d’être seule… Blake avait besoin d’être seule. Ok. Seule au milieu d’une foule, en train de danser avec une autre femme. Je fais rapidement la traduction, ça veut dire être loin de moi, non ? J’aurais préféré l’entendre me dire qu’elle n’avait pas envie que l’on se voit, ce n’est pas plaisant, mais ça l’est toujours plus que de découvrir son mensonge. Je lui ai toujours laissé de l’espace, du temps, je suis patiente et j’essaie vraiment de faire au mieux pour ne pas tomber dans de vieux travers. Je combats mes démons, je ne veux pas refaire d’erreurs et qu’elle se sente à nouveau trahie. Cette fois je n’aurais pas d’autre chance, et je ne veux rien regretter, profiter à fond de celle qui m’est donnée. Je pensais que l’on s’en sortait plutôt bien, à croire que je me suis trompée. Je lui fais savoir que le message est passé. Ça fait mal, c’est clair, mais je suis impuissante face à tout cela. Je n’ose même pas lui demander des explications, Blake est tellement fuyante depuis quelques temps, j’ai l’impression que ça ne fera que l’éloigner encore plus. J’ai un putain de mauvais pressentiment, je suis en train de la perdre. C’est con, j’y croyais. Mais après tout on est jamais sûre de rien, n’est-ce pas ? Je n’ai même pas l’énergie pour me battre. Résignée je laisse l’alcool m’offrir un maigre réconfort. Tu parles, c’est totalement inutile, mais j’essaie au moins de me donner l’illusion d’atténuer la douleur.
Là où je m’attends à du silence, Blake m’indique simplement que l’endroit est mal choisit pour parler. Je ne vais pas lui donner tort. Elle propose de sortir marcher, me laissant l’opportunité de décliner son offre. J’avale la fin de mon verre d’une traite et me lève « Allons y. » si elle est disposée à des explications je ne vais pas laisser le vent tourner. J’ai besoin d’entendre ce qu’elle a à dire, peu importe l’issue. Je ne la sens pas très en ma faveur, mais c’est le risque quand on vit une histoire, tout peut s’arrêter. Nous quittons le bar, et marchons quelques mètres, d’abord dans le silence. J’imagine qu’elle cherche ses mots, la façon de me dire les choses. « Si tu veux tout arrêter Blake, je préfèrerais que tu me le dise comme on arrache un pansement, de façon claire et nette. » dis-je pour l’encourager à ne pas me ménager, je suis prête, j’ai déjà mal donc inutile de faire trainer les choses.

C'est pas l'endroit idéal pour avoir une discussion. Et pourtant, je sens bien qu'il est temps d'en avoir une. Je ne peux pas laisser Dylan dans le silence plus longtemps... je lui propose donc d'aller prendre l'air, pour marcher un peu. S'éloigner du bar et de sa musique, essayer de se retrouver dans un endroit un peu plus confortable et plus intimiste aussi. Mais après m'avoir surprise ici, Dylan n'a peut-être pas envie de m'écouter. Je lui laisse le choix, espérant tout de même avoir une chance de pouvoir lui expliquer. C'est peut-être con de s'en rendre compte un peu tard, mais je n'ai pas envie de la perdre pour des conneries. « Allons y. » Elle vient de terminer son verre, prête à me suivre. Nous quittons le bar, marchant quelques instants dans le silence. « Si tu veux tout arrêter Blake, je préfèrerais que tu me le dise comme on arrache un pansement, de façon claire et nette. » Dylan veut que je sois directe. Elle a raison, ça ne sert à rien de continuer à tourner autour du pot. Je hoche un peu la tête avant de m'installer sur un banc, me tournant pour être face à elle. Je veux d'abord la rassurer. « Je n'ai pas envie de tout arrêter... Je t'aime Dylan, mes sentiments pour toi n'ont pas changés. » Je sais que c'est difficile à croire après ce qu'elle vient de voir. Mais c'est pourtant la vérité. « Il y a quelque chose que tu ne sais pas sur moi... » En dehors de ma famille, c'est elle qui me connait sans doute le mieux. Et pourtant il y a un détail sur mon passé dont elle n'a jamais été au courant. Ce secret que j'ai enfoui en moi depuis l'adolescence et qui refait surface maintenant, quatorze ans après. « Je t'ai déjà dit que ma première fois n'était pas vraiment un bon souvenir pour moi. » C'est un sujet qui avait forcément été mis sur la table au début de notre relation, mais à ce moment-là, Dylan n'avait pas eu tous les détails. « En réalité, j'avais à peine dix-sept ans quand c'est arrivé... C'était une erreur, le mec n'en avait rien à foutre. La seule chose qu'il voulait, c'était coucher avec moi. » A cet âge là, j'étais naïve. Je pensais que ses belles paroles étaient réelles, que c'était le bon avec qui sauter le pas. J'étais amoureuse de lui. Mais je me doutais pas un seul instant que pour lui, c'était juste un défi qu'ils avaient avec ses potes. Mais bref, ça, elle le sait déjà. « Sauf que je suis tombée enceinte de lui... » J'en viens finalement aux faits. Ma voix s'enraille un peu alors que je sens mon coeur se serrer dans ma poitrine. J'ai du mal à le dire à haute voix. « J'ai eu un enfant, Dylan. » La bombe est lâchée. Je m'arrête sur ces quelques mots, restant volontairement silencieuse. Le reste viendra dans un second temps.

J’invite Blake à être la plus franche et directe possible, si elle veut tout arrêter, qu’elle le dise une fois pour toute sans tourner autour du pot. J’ai les mains moites, je déteste ça, tout comme son silence qui me semble durer une éternité alors que seulement quelques secondes s’écoulent, juste le temps de nous asseoir sur un banc. Ça c’est sans doute au cas où l’annonce de la rupture me fait flancher, elle pense au moins encore un peu à moi… La sentence tombe : elle m’aime et ne veut pas me quitter. Quoi ? Ok, ça me soulage, me rassure, mais je suis encore plus dans l’incompréhension… Moi aussi je l’aime et ça me donne envie de passer du temps en sa compagnie, pas de la fuir. Le deuxième effet kiss cool arrive. Un secret, quelque chose que j’ignore sur elle et vu son air grave, j’appréhende un peu. Blake sait ménager ses effets, je suis pendue à ses lèvres. Pas de la manière dont j’aimerai, mais c’est un fait, je suis à l’affût de ces prochains mots. Sa première fois, oui, elle m’en a parlé comme étant un mauvais moment. En même temps avec un mec à quoi pouvait-elle s’attendre ? Tout le monde fait des erreurs, mais où est le secret ? De cette première fois ratée, a découlé une grossesse. Blake a été enceinte à dix sept ans et elle a eu un enfant. La révélation me fait un petit choc, néanmoins je ne comprends pas pourquoi elle m’a éviter tout ce temps pour un événement survenu il y a presque quinze ans. « C’était il y a longtemps… Pourquoi est-ce que c’est un problème aujourd’hui. Qu’est-ce que ça a à voir avec nous ? » demandé-je en glissant ma main sur la sienne. Que se passe t’il vraiment ? J’ai un peu peur de comprendre et surtout je m’inquiète de l’état dans lequel toute cette histoire la met. « Je suis là Blake. » lui ai-je donné l’impression de ne pas vouloir être présente pour la soutenir ? Non, je ne dois pas raisonner comme ça, elle a peur c’est tout. Peur comme moi j’avais peur avant notre mariage, ce qui m’a poussé moi aussi à faire des conneries. Au final je suis la mieux placée pour comprendre sa façon de s’être éloignée de moi, d’avoir voulu s’enfermer dans une bulle dans laquelle on ne trouve finalement jamais de réponses. « Ça ne change rien à mes sentiments pour toi que tu ai eu un enfant. » je veux la rassurer, c’est important qu’elle le sache, même si bien sûr je vais devoir digérer l’information. « Est-ce que tu avais peur que je te rejette ? » demandé-je, soucieuse d’avoir pu lui donner ce sentiment qu’elle ne se sente pas réellement comprise.

C'est difficile pour moi de lui en parler. Parce que le retour d'Eliot dans ma vie a fait ressortir en moi de douloureux souvenirs. Ça n'a pas été facile de le faire adopter à l'époque. Même si je savais au plus profond de moi-même que c'était la meilleure solution pour lui. Pour son bien être, et sa vie future. Mais maintenant, les choses sont bien différentes. Mais je ne peux plus avoir de secret pour elle. Si nous voulons se donner une nouvelle chance, il faut mettre toutes les chances de notre côté. Tout ne sera sans doute pas facile, mais j'ai bon espoir que cette fois-ci notre histoire puisse fonctionner. Une fois la bombe lâchée, j'ai un peu peur de sa réaction. A sa place, je ne sais même pas trop comment je pourrais réagir. Avoir eu un enfant, ce n'est pas rien quand même. Et son regard ne me rassure pas instantanément. Enfin je suppose que c'est normal que ça lui fasse un choc. « C’était il y a longtemps… Pourquoi est-ce que c’est un problème aujourd’hui. Qu’est-ce que ça a à voir avec nous ? » C'était il y a longtemps, c'est vrai. Mais c'est aussi maintenant que le passé a décidé de ressurgir sans prévenir. « Je suis là Blake. » Sa main vient alors chercher la mienne, et son réconfort me fait du bien. Je me rends compte, sans doute un peu tard, que j'avais besoin d'elle pour vivre cette épreuve. J'aurais certainement dû lui en parler depuis le début. Mais au lieu de ça, j'ai préféré me renfermer sur moi-même, prendre mes distances et ruminer de mon côté. « Ça ne change rien à mes sentiments pour toi que tu ai eu un enfant. » Je suis rassurée de sa réaction, comme soulagée d'un poids. « Est-ce que tu avais peur que je te rejette ? » Elle est là pour moi, et je lui en suis reconnaissante. « Je sais pas, je crois que j'avais peur que ça puisse changer quelque chose pour toi. » C'est peut-être con de ma part d'avoir pensé ça, c'est vrai. « Je sais que c'était il y a longtemps... en réalité j'avais tout fait pour enfouir cette partie de ma vie de ma mémoire. Je pensais jamais avoir à repenser à cette histoire... » Voilà pourquoi je ne lui en ai jamais parlé. Ni à elle ni à personne d'autre d'ailleurs. « Mais il est venu frapper à ma porte. » Il a tout fait pour retrouver ma trace. « Il s'appelle Eliot, il a quatorze ans. » Ou comment lui dire sans le dire vraiment que mon fils biologique a fait irruption dans ma vie. Voilà pourquoi une histoire du passé s'est transformée du jour au lendemain en histoire du présent. C'est devenu un problème d'aujourd'hui, pour reprendre exactement ses mots.

Un enfant. Blake a eu un enfant alors qu’elle était encore une adolescente. L’annonce est un choc, bien sûr, mais c’était il y a presque quinze ans… Et si elle n’en a jamais parlé auparavant, c’est qu’elle voulait que cette histoire soit définitivement derrière elle. Je ne peux pas lui en vouloir pour ça, d’ailleurs ce n’est pas le cas, je suis juste un peu secouée par la nouvelle. Pour autant je veux être là pour elle, la soutenir dans l’épreuve que ça lui fait traverser. Le passé qui ressurgit, presque un vieux démon ? Je ne sais pas trop, j’ai du mal à faire le lien avec aujourd’hui, notre histoire et pourquoi elle a souhaité affronter ça seule. Est-ce que je lui ai donné l’impression de ne pas pouvoir endosser ce rôle de soutien ? Je dois mettre mon égo de côté, c’est de Blake dont il s’agit, pas de moi. Même si ces dernières semaines m’ont fait mal et que ce soir était un peu le coup de grâce. Mais je suis dingue d’elle et ça surpasse tout le reste, je veux qu’elle le sache. Ses craintes étaient légitimes et si son passé la fait à nouveau souffrir, c’est que son fils est venu frappé à sa porte. Eliot, quatorze ans… Merde. Tout s’éclaire, il ne s’agit pas que de souvenirs, c’est concret, son passé ressurgit en chair et en os. « Ok… » soufflé-je, encore un petit peu plus secouée par la tournure prise par notre conversation. Je pensais me faire larguée, le point positif c’est que ce n’est pas à l’ordre du jour, mais Blake est la mère d’un ado venu la retrouver. Sacrée soirée ! « Comment tu te sens ? » demandé-je, plongeant mon regard dans le sien, ce qui je lis dans celui-ci m’incite à la prendre dans mes bras et la serrer contre moi « Je suis là, ça change rien. » pas pour mes sentiments, mais j’imagine que ça va forcément chambouler sa vie, elle l’a vu, lui a parlé et il n’y a pas de retour en arrière possible pour ça. Je recule doucement, caresse son visage et le dégage de quelques mèches de ses cheveux « Et… Qu’est-ce qu’il veut ? » j’ai hésité à poser cette question, mais elle me semble être particulièrement importante, non ? Je continue de la regarder, et je ne la vois pas différemment, c’est Blake toujours aussi belle malgré les difficultés qu’elle traverse. Je ne parviens pas à l’imaginer étant mère, c’est assez fou d’avoir occultée cette partie d’elle, de son histoire pendant toutes ces années. Et même lorsque nous étions sur le point de nous marier, jamais personne de sa famille proche n’a laissé fuiter ce secret. « Je peux faire quelque chose ? » n’importe quoi, de la commande de glace au soutien indéfectible, je veux juste être avec elle. C’est tout ce qui compte pour moi, même si je sais qu’il y aura des moments difficiles.

C'était sans doute con de ma part de la mettre de côté dans cette histoire. Ce n'est pas un problème de confiance ni quoi que ce soit d'autre... je ne remets absolument pas en cause notre relation et ce que nous vivons. Notre histoire est sincère, et même si nous marchons encore un peu sur des oeufs depuis que je lui ai redonné une chance, je crois sincèrement en nous. En elle. Mais le problème là, c'est moi. Eliot est un souvenir douloureux du passé. Probablement l'épreuve la plus difficile que j'ai eu à vivre dans toute ma vie. Ça, et l'abandon de Dylan devant l'autel. Deux évènements tragiques différents, et pourtant aussi douloureux l'un que l'autre. Cette fois, c'est bon. Dylan connait l'intégralité de l'histoire. Elle sait à présent qu'Eliot est à conjuguer au présent. « Ok… » Je pense qu'elle ne s'attendait pas à ce genre de nouvelle. En réalité, je n'y étais pas préparée non plus lorsque j'ai ouvert la porte à mon fils. Le choc. « Comment tu te sens ? » Une grimace vient inconsciemment déformer les traits de mon visage. « Mal. » C'est le premier mot auquel je pense sur le moment. « Je me sens tellement coupable... » Je sais au plus profond de moi-même que c'était la meilleure chose à faire. Autant pour moi que pour lui d'ailleurs. Surtout pour lui même. A cette époque, je n'étais qu'une adolescente incapable de m'occuper d'un enfant. S'il est heureux aujourd'hui avec sa famille adoptive, c'est le principal. C'est exactement ce que je voulais pour lui. Mais ça ne m'empêche pas pour autant de ressentir cet immense sentiment de culpabilité qui me ronge de l'intérieur depuis quelques semaines. « Je suis là, ça change rien. » Elle me prend dans ses bras, et son étreinte me fait du bien. J'ai été tellement conne de m'en priver pendant tout ce temps. « Et… Qu’est-ce qu’il veut ? Je peux faire quelque chose ? » Je secoue un peu la tête. Il n'y a malheureusement pas grand chose à faire. Qu'elle soit là pour moi, c'est tout ce dont j'ai besoin. « Je crois qu'il avait surtout besoin de réponses. » Et je ne peux pas lui en vouloir pour ça, c'est normal pour lui d'avoir envie de savoir. « Après je sais pas s'il aura envie de me revoir... Peut-être qu'il n'arrivera jamais à me pardonner. » Maintenant qu'il sait qui je suis, je ne peux pas le forcer à passer du temps avec moi pour continuer d'apprendre à me connaitre. Et en réalité je ne sais moi-même pas ce qui est le mieux pour moi. D'un côté, je meurs d'envie de découvrir mon fils. Mais j'ai aussi peur de me faire plus de mal qu'autre chose. « Je lui ai laissé le choix. » Je lui ai donné mon numéro, s'il a envie, il peut m'appeler. Je viens loger ma main dans la sienne tout en plongeant mon regard dans le sien. « Je suis vraiment désolée de ne pas t'en avoir parlé avant... » Je me sens conne de l'avoir mise involontairement à l'écart. « Est-ce que je peux me faire pardonner ? » Je lui sors le regard du chat potté. « Tu as encore faim ? Je peux te cuisiner un petit quelque chose à l'appart si tu veux. » Pour me faire pardonner aussi pour le diner qu'elle avait prévu à la base en passant chez moi. J'ai envie de rentrer avec elle, de passer la nuit dans ses bras. Elle me manque...

Mal. Oui, j’aurais pu le deviner Blake se sent mal. Elle ne m’a pas évité pour rien, et tout ça n’avait rien à voir avec moi. Ce mélange de soulagement et de choc de sa révélation est assez étrange. Ce qui compte à cet instant c’est ce qu’elle ressent elle. De la culpabilité, je ne peux qu’imaginer, même pas lui dire que je comprends car se serait faux. Tout ce qu’il m’est possible de faire c’est la soutenir, ce que je fais dans une étreinte dont je tire autant bénéfice qu’elle. Elle m’a manqué. J’aimerais pouvoir faire plus, mais quoi ? Je le lui demande, après l’avoir interroger sur les attentes de son fils. Mon dieu que c’est difficile de me faire à l’idée ! Je hoche la tête, compréhensive mais impuissante. Je ressers ma main sur la sienne en guise de réconfort « Te pardonner ou non ça lui appartiendra. La seule chose que tu puisse faire, c’est d’être honnête. » le reste ne sera plus de son ressort. Comme quand je lui ai exprimé mes regrets, ensuite le choix était le sien. « Mais s’il a la même capacité de pardon que toi… » je hausse les épaules « Il le fera probablement. » je lui souris « Tu as bien réussi à me donner une seconde chance. ». Seul le temps dira de quoi l’avenir, le leur, sera fait.
Blake s’excuse à nouveau pour m’avoir tenue à l’écart, elle veut se faire pardonner. « Tu avais tes raisons. » répondis-je « Bonnes ou mauvaises, là n’est pas la question. C’est fait. Et… Je ne t’en veux pas. En fait, j’ai eu tellement peur que tu veuilles tout arrêter, que là je suis juste soulagée. ». Néanmoins, ayant bazardé notre dîner et le stress étant retombé, j’ai effectivement une petite faim. « Ça serait un bon début. » dis-je en m’approchant pour l’embrasser. Je note qu’elle propose que nous allions chez elle, ça termine de me rassurer quant à ce qu’il en est de nous.
Le chemin du retour n’est pas bien long et nous arrivons assez rapidement chez Blake. Cette fois pas de porte close, plus de mensonges, juste la perspective de la retrouver et de passer enfin du temps ensemble. Comme proposé la jolie brune s’affaire en cuisine, je lui offre mon aide… ou plutôt, je la distrais un peu. Mes mains caressent ses hanches, je dépose quelques baisers dans son cou « Tu m’as manqué. Ne me refais plus un truc de ce genre, ok ? La prochaine fois parle moi. On peut tout se dire, non ? » sans nos cœurs pleinement ouverts nous prenons le risque de refaire, si ce n’est les mêmes que dans le passé, des erreurs qui pourraient nous coûter cher.

Elle a raison, qu'il me pardonne ou non, c'est un choix qui lui appartient. Je ne peux de toute évidence pas le forcer à vouloir passer du temps avec moi ou apprendre à me connaitre après toutes ces années. Je ne suis pas sa mère aux yeux de la loi. Juste sa génitrice, la personne qui l'a lâchement abandonné à sa naissance - même si j'avais mes raisons. Il faut que j'arrive à lâcher prise, penser à autre chose, laisser le temps faire son travail. Comme il a déjà pu le faire avec Dylan effectivement. J'ai réussi à lui pardonner mais il m'a fallu du temps pour ça. C'est sans doute ce dont a besoin Eliot de son côté aussi. Je suis soulagée que Dylan soit au courant. Avec le recul, c'était stupide de ma part de ne pas être totalement honnête avec elle. L'important, c'est qu'elle ne m'en tienne pas rigueur et qu'on arrive, malgré tout, à continuer d'avancer ensemble dans la même direction. Je ne veux pas la perdre, pas une deuxième fois. Et même si notre relation connaitra sans doute des hauts et des bas, je reste convaincue que nous sommes faites pour être ensemble. Je l'ai su dès le premier regard, la toute première fois où nous nous sommes rencontrées. Après toutes ces émotions, je lui propose de cuisiner un petit quelque chose pour elle chez moi. La soirée a peut-être mal commencé mais il est encore temps de se rattraper. J'ai besoin d'être avec elle et de ne penser à rien d'autre qu'à nous. Une fois rentrées, je me mets rapidement à exécution dans la cuisine pour tenir ma promesse et lui préparer à manger. Mais Dylan vient me distraire alors que je sens ses mains venir se poser sur mes hanches. « Tu m’as manqué. Ne me refais plus un truc de ce genre, ok ? La prochaine fois parle moi. On peut tout se dire, non ? » Je tourne légèrement la tête pour croiser son regard. « Promis, fini les silences et les non-dits. » Nous avons déjà traversé beaucoup d'obstacles toutes les deux, et elle a raison, nous pouvons à présent être capables de tout nous dire sans avoir peur des conséquences. Je sais que c'est en tout cas de cette manière que notre relation pourra réellement fonctionner. Ça serait dommage de refaire les mêmes erreurs que nous avons pu faire par le passé. Une fois le repas prêt, nous nous installons à table pour profiter pleinement de cette fin de soirée. « Je pense à un truc. On en a jamais vraiment parlé ensemble mais... » Je ne sais pas pourquoi je pense à ça maintenant, peut-être à cause d'Eliot et de toute cette histoire. Je sais qu'on en est pas encore là, loin de là, mais c'est une question qui me traverse l'esprit depuis tout à l'heure. Et justement, si on peut tout se dire, on peut également tout se demander sans craintes aussi. « Est-ce que tu as envie d'avoir des enfants ? » A l'époque où nous étions ensemble, nous étions jeunes et nous avions toute la vie devant nous. Maintenant, les choses sont différentes. Les années défilent un peu vite et le cycle de la vie aussi. C'est un sujet tout de même important à aborder pour le futur.