we were meant to rescue each other (lumaya)

Le cours de ce soir s’était un peu étiré en longueur comparé à d’habitude, principalement parce que quelqu’un avait fait fuiter l’information que c’était le dernier cours auquel elle participerait. Aussi étrange que cela puisse paraître, elle avait réussi à se lier avec des personnes, elle n’irait pas jusqu’à les appeler amis mais disons qu’elles ne l’insupportaient pas donc c’était malgré tout du changement, elle qui trouvait toujours tout le monde insupportable. Alors forcément, le temps de dire au revoir tout ça… le temps avait vite défilé et largement dépassé l’heure habituelle. Sauf que Maya, elle n’habitait pas ici dans le centre, elle devait faire du chemin pour rentrer chez elle et ça allait être vraiment galère à une heure pareille. Forcément que ça la faisait râler plus que de raison. Elle était fatiguée en plus donc pas forcément aussi alerte que d’habitude, c’est pour ça qu’elle n’a pas su voir venir le danger et s’en échapper à temps. Elle avait senti cette présence derrière elle mais ne s’était pas vraiment posé de question. Après tout, n’importe qui avait le droit de se balader, même à une heure pareille. Elle ne se disait pas tout de suite que ça pouvait être une personne mal intentionnée à son égard, pas du tout même et pourtant… Elle s’est mise à le comprendre quand son corps a rencontre le béton du mur. Même pas elle avait capté qu’on l’avait attiré dans une ruelle sombre. A croire qu’elle avait bu quinze verres alors qu’elle n’en avait pas un seul dans l’estomac. La fatigue, c’était vraiment une chienne. Ne voyant même pas la tête de son agresseur vu la faible luminosité, elle ne pouvait qu’essayer de se débattre comme elle voulait mais elle le sentait bien qu’il était plus fort qu’elle et qu’elle ne pourrait avoir le dessus pour lui. Elle n’était pas idiote et elle devinait parfaitement bien les idées qu’avait son agresseur, elle n’avait aucun doute sur son destin funeste. Pourquoi elle ? Pourquoi toujours elle ? Pourquoi est-ce que le destin s’acharnait toujours sur elle ? Pourquoi ne la laissait-il pas un peu tranquille pour une fois après tout ce qu’elle avait vécu depuis sa naissance ? C’était donc ça le but de sa vie ? Se faire violer et tuer dans une ruelle poisseuse de Los Angeles ? Parce que oui, dans sa tête c’était fini et elle ne se débattait même plus, à quoi bon ? Elle acceptait son destin, n’ayant pas d’autre choix. Sauf que quelque chose avait vrillé d’un coup. Elle ne ressentait plus la pression qu’exerçait auparavant son agresseur, ses habits étaient intacts, à part peut-être un bout de son haut un peu déchiré pendant qu’elle luttait. Elle ne ressentait plus rien alors son dos glissait le long du mur jusqu’au sol où elle s’écrasait, les larmes défilant sur sa joue et ses yeux fixant un point vide dans l’obscurité. Elle ne savait pas ce qui était en train de se passer, uniquement qu’elle avait été brisée encore un peu plus qu’avant.

Elle savait qui était son sauveur en entendant sa voix, elle savait que c’était Lucifer mais elle était bien trop loin pour réagir d’une quelque façon qui soit, comme enfermée dans son propre esprit, dans un coma qui lui rendrait impossible tout mouvement. Et puis elle tilait : Lucifer. Son corps se réveillait alors doucement, refusant de passer pour une fille vulnérable, non pas qu’elle craigne qu’il puisse abuser de la situation mais Maya détestait voir de la pitié dans les yeux des gens, cette pitié dont elle n’avait que trop l’habitude depuis sa naissance. Elle voulait qu’on la voit comme une femme forte et indépendante, même malgré cette situation-là. Pour autant, aussi forte que soit sa volonté, elle savait que son corps ne suivrait pas et qu’elle ne serait pas capable de rentrer seule. Elle avait presque l’envie de passer la nuit ici ou peut-être même l’éternité mais elle connaissait Lucifer et savait combien lui aussi pouvait être borné. Là tout de suite, elle avait envie de chaleur et d’attention, pas qu’on l’abandonne une nouvelle fois. Elle avait besoin de ce qu’elle se refusait en temps normal : ressentir quelque chose. Alors quand il lui proposait son dos, elle ne grommelait pas et elle se hissait dessus, son corps n’étant pas capable de beaucoup plus. Elle espérait ne pas être trop lourde et devenir un danger pour la santé physique du garçon. Elle avait l’impression d’être un poids mort et donc peser au moins le double de son poids normal. Les bras enroulés autour de son cou, elle essayait de ne pas serrer trop fort et ainsi l’étouffer. Ca serait un comble de tuer son sauveur, n’est-ce pas ? Reposant sa tête lourde entre son bras et la tête de Lucifer, elle s’autorisait à fermer les yeux, s’échapper un peu de ce doux cauchemar, doux uniquement par la présence du garçon à ses côtés. Garçon qui ne cessait clairement de la surprendre, lui qu’elle ne voyait alors que comme un queutard prêt à tout pour coucher ainsi loin de l’image du sauveur qu’il avait pu être ce soir, dans cette allée sombre. L’habit ne fait pas le moine paraîtrait-il, ainsi Lucifer n’était pas aussi diabolique que son prénom pourrait l’indiquer, à moins qu’il ait des idées qu’elle ne soupçonnerait pas et qu’elle ne ferait qu’aller se jeter dans la gueule du loup ? Elle n’avait pas la force de continuer vers cette pensée-là, elle voulait juste se reposer un peu, peu importe ce qui lui arriverait pour le restant de la nuit maintenant. Il pouvait bien abuser d’elle qu’elle ne s’en rendrait probablement même pas compte, triste vie. Il sentait bon, son nez semblait percevoir une douce odeur parfumée, elle ignorait où il l’emmenait mais une partie d’elle choisissait de lui accorder toute sa confiance, au moins pour quelques heures. Elle qui a toujours fini déçue… elle se plaisait à espérer un changement dans son destin, un doux miracle. Ca ne durerait pas, une fois qu’elle aurait repris conscience, c’était évident qu’elle rejetterait tout ça en bloc et qu’elle reviendrait à son bon vieux elle-même, avec son épaisse carapace de métal.

Maya se sentait franchement idiote… Oui, un homme avait essayé de s’en prendre à elle mais Lucifer était finalement arrivé assez rapidement et ainsi, aucun mal ne lui avait été fait, plus de peur que de mal finalement. Son état était malheureusement le résultat d’un surplus de malchance. A force de trop, son vase avait fini par déborder… Est-ce que la malchance pouvait torturer une personne autant qu’elle l’avait fait avec Maya ? D’abord les abandons successifs puis le fait qu’elle avait dû vendre son corps pour s’offrir quelques belles choses tout en vivant dans un appartement pourri dans le pire quartier de la ville. Bien sûr, elle n’était pas la seule à pouvoir se plaindre, elle qui pouvait au moins se loger, même si c’était dans un taudis… Ce n’était clairement pas la vie rêvée d’une petite fille tout ça pourtant. Elle qui ne s’était jamais permise de rêver parce que les rêves étaient comme les gens : décevants et rarement à la hauteur des espérances. Mais quelles espérances pouvait-elle bien avoir ? Elle finirait sûrement comme ces prostituées violées et tuées sauvagement qu’on peut voir à la télévision et vu que personne ne respectait les prostituées, ça ne restait que des faits divers, comme si au fond elles avaient mérité tout ça. Triste société. Entre ceux qui s’en fichaient et ceux qui faisaient semblant de s’y intéresser pour qu’on ait une bonne image d’eux… que de bons humains. Parfois, elle se questionnait sur l’intérêt de la vie mais elle finissait par comprendre qu’elle était bien trop lâche pour y mettre fin elle-même de toute façon alors elle s’occupait du mieux qu’elle pouvait. Ses pensées la menaient loin et surtout faisait passer le temps bien trop vite. Elle était finalement arrivée chez ce qu’elle comprenait comme étant le logement de son sauveur mais elle serait incapable de dire où c’était précisément vu qu’elle avait zoné pendant tout le trajet. Clairement, il n’était pas dans son quartier et ils n’avaient pas les mêmes moyens tous les deux. A croire que prof de danse ça payait franchement bien. Elle se perdrait facilement dans un endroit pareil… il paraissait tellement grand comparé à chez elle. Comment pourrait-elle faire comme chez elle ? Non, c’était vraiment impossible de se sentir chez elle dans un endroit aussi luxueux, un peu comme si elle ne le méritait pas et que cette chance pouvait lui être enlevée d’une seconde à l’autre. Ou juste qu’elle allait se réveiller d’un rêve ? Après tout, se faire sauver par un beau garçon qui l’emmènerait dans son château, ça faisait tout sauf vie réelle. Son regard balayait sans cesse la pièce, ses paupières s’ouvrant et se fermant. « Ok. » Sa gorge lui faisait un peu mal, elle se souvenait alors que son agresseur l’avait saisie à la gorge justement et ça avait sûrement entravé quelques fonctions de celle-ci, ça et le fait qu’elle ressentait une grande soif l’envahir. Elle n’avait pas franchement faim, pour ne pas dire pas du tout… mais s’endormir l’estomac vide n’était pas bon, elle savait combien son estomac détestait ça et elle n’avait pas forcément envie de souffrir toute la nuit alors elle pouvait bien manger un peu, pas toute son assiette mais un peu. Elle le rejoignait ainsi sur la table et restait là, sans vraiment savoir quoi faire, c’était vraiment gênant comme situation, se sentir aussi vulnérable après tous ses efforts pour passer pour une femme forte et indépendante aux yeux du jeune homme. Elle ne faisait décidément rien comme elle voulait. « Désolée… Tu avais sûrement beaucoup mieux à faire ce soir. »

Maya aurait vraiment préféré que son sauveur ne soit pas Lucifer, elle n’avait pas envie de se sentir vulnérable avec lui ou d’ailleurs avec n’importe qui qu’elle ne connaissait pas bien. Elle avait dû faire pas mal d’efforts pour se construire son image de femme forte qu’aucun vent de pourrait ébranler et cette image, elle prenait un sale coup ce soir. Il allait évidemment la voir comme une victime maintenant et ça la faisait vraiment rager de savoir ça. Les vieilles habitudes revenaient pourtant au galop. Malgré son état second, elle arrivait encore à trouver certaines choses risibles et même à les exprimer. C’était agréable, comme une bonne bouffée d’air frais qui la tirait de sa bulle imposée et pleine de noirceur. « Toi passer une soirée seul ? Tu es malade ? » En même temps, Lucifer il était comme elle, à profiter de chaque soirée pour sortir et se trouver une personne avec qui s’amuser alors forcément, elle avait du mal à croire qu’il comptait passer la soirée seul chez lui. Après, elle se basait évidemment sur ce qu’elle savait de lui donc pas forcément grand-chose. Ce qu’elle savait de lui était finalement assez superficiel quand on y pensait bien. Il n’était probablement pas uniquement le coureur qu’elle voyait, là c’était juste l’extérieur qui montrait ça mais tous les deux ne se connaissaient pas assez pour se confier donc forcément qu’elle ne connaissait au vrai Lucifer, celui qu’il était réellement au fond de lui. Et elle avait un peu peur de le découvrir au final parce que connaître bien les gens c’était aussi s’exposer un peu trop pour elle. Le mieux était les relations neutres, ainsi moins de chance d’être déçu ou blessé, ou les deux. Elle n’avait pas envie de parler de son agression, c’était du passé maintenant et elle voulait aller de l’avant. Bien sûr, elle ne se voyait pas continuer son quotidien de grosse fêtarde pour le moment et encore moins partager le lit d’un homme avant un bon moment, ça prendrait du temps pour qu’elle guérisse mais elle voulait que son esprit soit occupé par autre chose que ça avant tout. Elle mangeait ce qu’elle pouvait, sans se forcer et donc forcément qu’elle en laissait dans son assiette, notamment le riz mais c’était très consistant et elle avait vraiment atteint sa limite là. « J’ai vraiment pas envie de parler de ça. Je veux juste oublier. » A quoi bon en parler ? Il était là, il avait tout vu donc fin de l’histoire. Elle n’avait aucune envie de ressasser ce qui avait pu se passer et ce n’était pas bon pour elle. Le mieux, c’était d’oublier, tout simplement. Elle le laissait vaquer à ses occupations, ne sachant pas trop ce qu’il faisait mais au final, ça ne la regardait pas et c’était bien. Elle ne dérangeait ainsi pas trop. Elle avait profité de son absence pour faire un peu de vaisselle afin que ça soit propre. Elle levait malgré elle les yeux au ciel quand il lui demandait si ça allait aller en lui tapotant le dos.« Lucifer, je ne suis pas un bébé… »

C’était à se demander, vraiment… Elle ne l’avait jamais vu ainsi donc forcément, ça la faisait se poser quelques questions. Soudainement, l’image qu’elle avait pu avoir de lui devenait légèrement floue. Elle qui disait toujours qu’il ne fallait pas se fier aux apparences l’avait pourtant fait avec lui, refusant de le voir autrement que comme un vil coureur de jupons. Pourtant, ce soir, c’est un visage complètement autre qu’elle pouvait apercevoir. Posant sans ménagement sa main sur le front de son hôte, elle réfléchit quelques instants.« En effet, tu n’as pas l’air d’avoir de la fièvre. Etrange. » Il avait beau l’avoir sauvée, ce n’était pas pour autant qu’elle avait envie de se confier à lui. Et puis se confier sur quoi ? Elle avait assisté à la scène donc il n’y avait rien de plus à dire. Mais ce n’était pas contre lui, elle ne se confiait à personne, c’était plus facile pour paraître forte et fière alors que si elle commençait à se confier… nul doute qu’elle finirait par tout déballer sur sa vie merdique et passer le reste de la nuit à pleurer comme une madeleine. Si elle avait le droit de se plaindre, elle ne s’autorisait pas à le faire. A quoi bon ? Voir de la pitié dans les yeux des autres ? Ça serait encore bien pire… Elle n’avait pas besoin de la pitié des autres. Depuis toute petite, elle ne voyait que ça dans les yeux des autres et ça l’avait assez traumatisé pour toute une vie. Elle savait bien qu’il ne pensait pas à mal mais elle n’aimait pas quand on la traitait comme une enfant et c’était exactement ce qu’il avait fait, peut être sans s’en rendre compte. Elle n’avait pas les jambes brisées, elle était capable de marcher tout seule et de se débrouiller comme elle l’avait toujours fait depuis toute petite. Elle hochait la tête pour seule réponse et se dirigeait vers ce qui semblait être sa chambre pour la nuit. Elle s’asseyait sur le lit et soupirait. Elle ressentait un réel moment de solitude là et pour une fois, elle n’avait pas envie de le ressentir. Elle se levait alors et son regard accrochait celui d’un Lucifer visiblement pensif. « Viens dormir avec moi. » Elle n’avait pas la moindre intention de lui donner quoi que ce soit, encore moins son corps mais elle n’avait pas envie d’être seule, elle voulait d’une présence et ainsi, elle se sentirait moins coupable de le laisser dormir sur un canapé. Les canapés n’étaient pas confortables et elle en savait quelque chose… A de nombreuses reprises elle avait dû dormir dans un canapé plutôt qu’un lit donc… Ce n’était probablement ni intelligent ni sage mais ce soir, elle avait envie de se sentir différente : appréciée et choyée, même si ça ne durait qu’une nuit. Au moins, elle aurait ressenti ça une fois dans sa vie et elle ne demandait rien de mieux que cela. Retournant jusqu’au lit, elle ne lui laissait pas le temps de répondre et ainsi, pas l’occasion de lui dire non. Il devrait savoir maintenant qu’elle n’acceptait pas un tel mot.

Maya savait parfaitement bien ce qu’elle venait de dire et ce dont elle avait besoin. Si l’expérience qu’elle avait vécue était loin d’être agréable, elle se savait en confiance avec Lucifer. Si ça n’avait pas été le cas, jamais elle n’aurait accepté de rester chez lui de toute façon. Ce soir, elle ne voulait pas dormir seule, elle voulait se sentir protégée et seule une proximité assez grande pourrait lui offrir la paix à laquelle elle aspirait. En plus de ça, il avait vu ce qu’elle avait subi donc elle savait qu’il n’oserait pas des gestes trop déplacés envers elle. Et si en temps normal, elle en aurait profité pour le chauffer, elle ne le ferait pas cette fois-ci. Tout ne pouvait pas être résolu par le sexe, et encore moins une agression. Être dans un lit et ne rien faire serait nouveau pour eux mais Maya ne serait pas capable de davantage ce soir et bien qu’elle ne le forçait pas à accepter, elle serait déçue qu’il refuse. N’attendant pas sa réponse – qu’elle saurait contradictoire avec ce qu’elle voulait vu le regard qu’il lui avait lancé – elle retournait jusqu’au lit. Elle attendait alors de voir s’il allait venir ou non. Et finalement, elle le vit arriver. Elle pouvait ainsi souffler, tout se passait comme elle le souhaitait pour une fois et elle ne pourrait pas demander mieux. Ainsi, elle grimpait sur le lit et se glissait sous les draps. Un silence s’installait alors, le genre de silence gênant et elle n’aimait pas ça mais en même temps… c’était une première pour eux d’être dans le même lit et ne rien faire donc forcément… « Oui, merci. » Très utile, en effet, puisque Maya était de ceux à qui il arrivait assez régulièrement d’avoir une soif nocturne. Lucifer étant là, elle n’aurait probablement pas osé bouger ou allumer la lumière. Là, elle savait qu’elle n’avait qu’à tendre le bras donc c’était parfait. Elle appréciait son geste de vouloir l’héberger quelques jours mais Maya refusait d’être un poids pour quiconque. Ce soir-là, elle n’avait pas eu la force de dire non mais le lendemain, elle savait que l’histoire serait toute autre. « Je ne compte pas rester aussi longtemps. J’abuse bien assez de ton hospitalité ce soir, il n’est pas question que je devienne un boulet. Je partirais demain. » Bien sûr qu’elle était bien ici. Elle était avec lui dans un environnement clairement idéal. Elle qui vivait dans un appartement miteux… là c’était de niveau suite nuptiale à ses yeux mais elle devait garder en tête qu’il avait sa vie et qu’il n’était pas question qu’elle vienne tout bouleverser. Il avait pitié, voilà pourquoi il lui proposait ça, et rien d’autre. Elle se tournait, dos à lui et fermait simplement les yeux. La journée avait été forte en émotion, c’était peu dire… alors il ne lui fallut pas longtemps avant de partir dans les bras de morphée.

[Le lendemain matin]

Un petit quelque chose lui picotait les yeux, chose qu’elle comprit quelques instants plus tard étant la lumière du soleil. Battant des paupières à de nombreuses reprises, elle se trouvait tout simplement perdue. Où était-elle donc ? Cet environnement lui était inconnu jusqu’à ce que ses neurones entrent enfin en contact et qu’elle se souvienne alors de la veille. Pour une fois qu’elle se réveillait sans la gueule de bois… ça aussi c’était une première pour elle. Tournant la tête, elle remarquait la présence de Lucifer à ses côtés et se permettait de l’observer quelques minutes. Il était si calme comme ça. Elle n’avait pas envie de le quitter mais… elle ne voulait pas s’imposer non plus. Le voyant battre des paupières, elle tournait vigoureusement la tête, comme si de rien n’était.

Maya levait les yeux au ciel, bien sûr que si elle était un boulet. Il ne voudrait évidemment jamais l’avouer devant elle mais c’était pourtant bel et bien ce qu’elle était et elle en avait parfaitement conscience. Il n’y avait pas de honte à avoir sur le sujet, elle était ainsi depuis toujours. Mais elle faisait malgré tout en sorte de l’être le moins possible et ça passait aussi par des décisions nettes, comme par exemple quitter la demeure de Lucifer dès le lendemain matin. Pour cette nuit-là, elle n’avait pas eu la force de faire autrement et elle s’était voulue égoïste pour une fois mais il fallait revenir à la réalité à un moment donné et plus tôt elle le ferait, mieux ça serait pour elle. « Ça ne change pas le fait que je sois un boulet. Tu n’oses juste pas le dire. » C’était touchant de savoir qu’il tenait à elle et elle aimerait sincèrement être capable d’y croire mais ça lui était impossible. Plusieurs fois on lui avait dit tenir à elle puis des comportements avaient prouvé le contraire alors depuis, elle ne croyait pas tout ce qu’on pouvait lui dire. Elle n’avait rien contre Lucifer, il était probablement un gars super mais l’expérience de la jeune femme jouait contre elle, et contre lui aussi sans qu’il ne le mérite vraiment. C’est ainsi qu’elle s’endort, paisiblement pour une fois. Le sommeil et Maya, ça faisait deux, il y avait toujours quelque chose pour la tenir éveillée, tous les sens en alerte. Cette fois-ci non, comme si son subconscient savait qu’elle pouvait lui accorder toute sa confiance. Sa conscience, elle, n’en était pour le moment pas capable. Alors qu’elle l’observait tandis qu’il dormait toujours, elle s’était laissée prendre au jeu et avait tenté de cacher son trouble en détournant le regard, espérant qu’il n’avait rien vu. Manque de bol si, sinon il ne lui aurait pas parlé. Le fait qu’il l’ait fait prouvait qu’il savait qu’elle était réveillée et il ne pouvait le savoir que s’il l’avait vue l’observer dormir. « Oui. Et toi ? » Le voyant se tourner vers elle, elle se redressait d’un coup, droite comme un I. Un lendemain matin n’avait jamais été aussi troublant, surtout en sachant qu’il n’y avait eu aucune folie la veille, ça aussi c’était une première pour elle. Sentant alors sa main sur la sienne, elle sentit un courant électrique lui parcourir le corps en même temps qu’une douce chaleur. Comment réagir à une telle demande ? Tout son être avait envie de rester mais elle ne voulait pas imposer sa présence plus qu’elle ne l’avait déjà fait. « J’ai assez bouleversé ton quotidien comme ça. » Peut-être lui demandait-il de rester par simple pitié, après tout ? Parfois, les gens lui disaient quelque chose tout en espérant secrètement qu’elle refuserait, ils faisaient ça pour avoir la conscience tranquille uniquement. Ayant croisé le chemin d’innombrables personnes mauvaises, elle n’arrivait plus à reconnaître les bonnes personnes et si elle érigeait un mur entre elle et les autres, c’était avant tout pour se protéger.

Choc ! Il venait de lui faire une pichenette sur le front ! Personne ne lui avait jamais fait ça, c’était tout nouveau pour elle et légèrement douloureux. Bon, pas si douloureux que cela non plus parce qu’il n’y avait pas mis toute sa force, loin de là même mais quand même… Bien qu’elle se trouvait actuellement sans idée pour se venger de ce geste effronté, elle le gardait dans un petit coin de son esprit, ça servirait pour plus tard ! « Les invités ont le droit de faire leur boudin s’ils veulent ! » Lucifer était… unique en son genre. Elle avait parfois un peu de mal à le cerner tellement il agissait de manière opposée à ce qu’elle avait l’habitude de voir de là. Pourtant, elle trouvait assez facile de cerner les gens en temps normal mais là, elle était complètement perdue. Pourtant, elle se refusait d’attendre quoi que ce soit de lui. Elle l’avait fait dans le passé avec d’autres et n’avait été que déçue alors elle ne voulait pas que ça recommence. Si elle n’attendait rien de lui alors elle ne serait pas aussi déçue, n’est-ce pas ? Il était parti comme ça, comme pour clore la discussion et ainsi ne pas lui laisser le choix. Elle ne savait que faire actuellement. Rester ou bien partir ? Il lui avait clairement dit qu’elle était la bienvenue et elle n’avait pas spécialement envie de partir mais… c’était toujours compliqué pour Maya. Elle finissait alors par le suivre jusqu’à la cuisine et s’installait à la table. Que risquait-elle à prendre un petit-déjeuner ? Rien, n’est-ce pas ? « Je n’irais pas fouiller dans tes placards ou ton frigo… » Et puis quoi encore ? Elle n’était pas chez elle ici donc hors de question pour elle d’agir aussi peu respectueusement. Il avait beau lui donner l’accord, ce n’était pas le genre de Maya de le faire pour autant. « Je n’ai rien de prévu. Je suis en vacances, en quelques sortes… » Elle n’avait pas encore commencé son job de danseuse et celui de serveuse avait pris fin donc pour le moment, elle se retrouvait sans rien bien que ça ne durerait que quelques jours. Lucifer lui rendait la tâche vraiment très difficile. Pouvait-il un instant redevenir le coureur qu’il avait été plutôt que cette version adorable et pleine d’espoir ? Maya était faible devant ce genre de choses et la faiblesse menait à la souffrance pour elle. « Je ne sais pas, ça serait bizarre de faire ça avec toi. » Elle n’avait rien contre Lucifer, bien au contraire, mais leur relation elle ne comportait pas ce genre de moments que certains pourraient appeler romantiques. Entre eux, c’était du sexe pur et dur, rien d’autre et elle n’était pas certaine d’être prête à davantage, pas après ce qui lui était arrivé la veille. « Si tu fais tout ça pour me remettre dans ton lit, ça ne fonctionnera pas, tu en as conscience n’est-ce pas ? »