Always here, always brothers | Ft. Liang He

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] ~ Son sourire a complètement disparu. Cela fait quelque instants que la mère de Shinji et lui-même l'ont raccompagné chez lui. Tian n'en avait pas envie, mais il ne pouvait pas rester indéfiniment chez eux. Le chinois ne regarde ni sa mère, ni son frère dans les yeux, et s'enfuit rapidement dans sa chambre en grimpant les escaliers, suivit de près par Yuki sa Shiba. S'enfermant dans sa chambre, sans pour autant fermer à clé, le He reste silencieux, s'installe sur son lit et disparaît sous les couettes. Il entend quelques bribes de conversations, sans réellement comprendre. Enfin... Si. Il n'a pas besoin d'écouter pour comprendre ce qu'il peut se tramer. Sa fugue a énormément inquiété sa mère et son grand-frère. En même temps, un jeune garçon de dix-sept ans, traînant une maladie cardiaque depuis quelques années ainsi qu'un système faible... Il y a de quoi avoir peur. Mais ça, Tian s'en fiche pas mal. Il se sent bien trop mal pour aller s'excuser auprès d'eux. Il ne le fera pas. Du moins, pas tout de suite.

Les larmes aux yeux, il sent sa petite chienne s'installer sur le lit à ses côtés, couinant un peu pour vouloir l'attention du jeune He. Et ce petit couinement a le don de le faire réagir. Sortant simplement sa tête de sous les couvertures, le chinois glisse sa main sur la fourrure de Yuki. Cette dernière se colle à lui en se roulant en boule, et ne bouge plus. Un silence s'installe, long silence. Silence qui finit par être brisé par le bruit de sa porte qui s'ouvre. Tournant la tête vers ladite porte, il fronce les sourcils en voyant Liang entrer et s'approcher de lui. Tian tâte à côté de lui, attrape un coussin, et le balance sur son frère. « Laisse-moi tranquille ! J'ai rien à vous dire ! » crie-t-il sans ménagement avant de fondre en larmes, se cachant à nouveau sous les couvertures. Le plus jeune est fatigué. Fatigué de se battre. Fatigué de se disputer. Mais surtout fatigué qu'on lui interdise tout à cause de sa maladie et de son jeune âge. Si c'est comme ça, autant ne plus vivre et rester enfermer chez lui. Cela reviendrait au même pour lui. Reniflant un peu par moment et calmant doucement mais sûrement ses sanglots, Tian arrive à gérer ses larmes comme un grand pour une fois. Pleurer c'est pour les faibles. Il l'est peut-être physiquement.. Mais il se doit de se montrer fort psychologiquement. Shinji a réussit à lui redonner le sourire, l'a soigné durant son petit séjour chez lui. Le lycéen ne doit pas se laisser aller de nouveau. Surtout pas. Pas pour ça. Pas pour Liang.

C’était la goutte de trop, si on pouvait dire. Liang savait que Tian faisait des conneries depuis quelques temps. Dans quel but ? Là, par contre, les choses se compliquaient. Ils étaient frères, seulement séparé par cinq ans d’âge. Et pourtant, ils arrivaient à se voir comme des étrangers parfois. Frères oui. A la vie à la mort. Mais ce qu’il se passait les éloigner. Le fait que Tian soit amoureux d’un homme, Liang s’en fou pas mal. Ce qui le fait un peu plus tiquer, c’est de savoir que c’est chez ce fameux Shinji que Tian avait fugué. Ou en tout cas, c’est bien lui qui l’avait ramené. Mais une chose était sûre, cela n’allait pas passer comme de l’eau. Loin de là.

La mère des deux garçons se mit à parler fort, en chinois, dans les oreilles de Liang qui tentait d’aligner ses pensées. Entre le soulagement de le voir revenir à la maison et la colère de savoir qu’il en est partie. Franchement, parfois, il se demandait si son petit frère se rendait compte d’à quel point il pouvait être irresponsable. C’était bien joli de demander à tout le monde son indépendance. Mais Tian ne l’était pas. Sa maladie, leur situation, cette espèce d’attente interminable que leur père rentre un jour à la maison. Rien ne les aidait à passer outre. Et l’aîné de la famille savait que cela n’allait pas s’arranger avec le temps. Car, il ne fallait pas mentir. Leur père, il n’allait jamais rentrer. Mais c’était sans doute trop dur pour Tian de le comprendre.

Répliquant à sa mère qu’il allait arranger les choses, Liang monta les marches deux à deux pour rejoindre la chambre de son petit frère. Il sait qu’il doit sans doute se morfondre dans son lit, en train de rager contre la vie, leur famille, ses interdictions, et cette maladie. Mais Liang ne songe même pas un seul instant à être conciliant à son égard. Déjà, car Tian doit assumer ses conneries. Toutes. Même celles qui risquent d’arriver ou celles qu’il projette. Tian veut être adulte ? Hé bien, il le sera. En assumant tout ce qu’il fait. Et en arrêtant de se cacher en fuyant. Liang sera toujours prêt à lui laisser le champ du monde des grands ouverts. Mais, pour cela, il faut déjà qu’il lui montre qu’il a les épaules.

Sans même réfléchir plus, il entra dans la chambre du plus jeune. A peine rentrer, c’est un froncement de sourcil, des cris et un coussin qui l’accueille. Au moins, cela veut dire que Tian est en forme. Assez, en tout cas, pour pouvoir lui lancer un poids plume dessus. Il rattrapa alors le coussin, le revoyant sans ménagement sur la masse sous la couette. Frapper son frère, il ne pourra jamais. Mais lui faire comprendre qu’il était débile de l’attaquer ainsi alors qu’il n’a rien fait, ça, il sait très bien le faire. Car, la crise d’ado de Tian commence à lui courir sur le système.

« Au contraire, j’pense que t’as beaucoup de choses à me dire, p'tit frère, lâcha-t-il alors en refermant la porte derrière lui. Qu’est-ce que tu nous fais là ? Une crise d’adolescent qui veut être indépendant mais qui sait même pas faire des pâtes ? Tu t’es crus où là ? Chez les Télétubbies ? »

Liang sait que Tian pleurait juste avant qu’il ne rentre. Il sait aussi qu’il devait être particulièrement touché par tout ce qu’il se passait. Mais merde ! Il avait eu peur lui ! Son petit frère, seul, dans les rues de Crenshaw, atteins d’une maladie du cœur, dans un pays qui lui est étranger. Le scénario de panique par excellence, non ? Et le pire, fut lorsqu’il revint, la bouche en cœur, avec la mère de son petit copain. Mais il se croyait où ? Dans une maison de la joie ? Un hôtel rue Paradis sur Monopoly ?

Le plus vieux observa Yuki se rouler contre Tian. Encore une preuve de l’attention que l’on porte à son petit frère. Toujours tout tourner vers lui. S’il avait voulu faire ça pour avoir encore plus d’attention, il était bien idiot. Et sans plus de cérémonie, Liang tirant sur la couverture de Tian, pour la lui retirer. S’ils devaient discuter de frère à frère, ce sera sans barrière. Parce que Liang sait qu’il n’est pas non plus le plus amène à le sermonner. Mais en tant que grand frère, il le fera sans même hésiter.

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] ~ Il sent bien l'oreiller revenir sur lui, puis tomber sur le sol. Mais il ne bouge plus, écoutant simplement les paroles de son grand-frère. Chez les Télétubbies ? Sérieusement ? Soupirant faiblement, il ose enfin jeter un œil par dessus ses couvertures. Sans pour autant oser regarder Liang dans les yeux. « Je sais encore faire des pâtes déjà... » dit-il doucement. Bon okey, répondre ça ne fera pas avancer les choses. Le jeune He reste donc silencieux, observant sa petite chienne qui s'est plutôt installé au sol, éloignée du lit pour éviter de recevoir un autre oreiller. Ses doigts triturent un peu les couvertures, sans qu'il comprenne réellement pourquoi on lui cri dessus comme ça. Certes il a fugué et est resté plusieurs jours dehors, sous le risque de perdre la vie à cause de sa maladie cardiaque. Mais il est revenu sain et sauf. C'est tout ce qui devrait compter. Ou bien Tian est beaucoup trop idiot pour comprendre ce que peut ressentir les autres. Égoïste aussi en ne pensant qu'à sa propre personne. Mais ça, ils peuvent le lui dire clairement. « De toute façon, à ce rythme-là, je serais jamais indépendant. Surtout pas avec vous. » qu'il dit en riant nerveusement, finissant enfin par ne plus sentir les couvertures sur lui. Son regard se plante sur l'armoire en face de lui, et non sur le visage de Liang. Bien sûr que le plus jeune leur en veut encore, à lui et à sa mère. Après tout, on lui interdit bien trop de chose en ce moment. Et même si c'est parce que ça peut être dangereux pour sa santé, ça l'énerve. Tout simplement car il se dit qu'il ne pourra jamais ressembler aux autres adolescents de son lycée. Eux ont l'air bien plus libre que lui. Il faut le voir pour le croire. Mais ça, peu de personnes le font. Rare sont ceux qui arrivent à se mettre à la place de Tian.

« Vous n'avez qu'à m'enfermer ici, si ça vous fait plaisir. Comme ça je serais pas tenté de m'enfuir encore une fois. » lance-t-il sans aucune émotion dans sa voix, ses bras se croisant sur sa poitrine. D'une main de libre, il vient ensuite triturer son collier, essayant de ne pas trop se mettre en colère. Il est encore épuisé de toutes ces journées qui viennent de passer. Le silence est donc le roi dans la chambre. Tian attend. Il attend que Liang se fasse joie et plaisir à l'engueuler comme il se doit pour s'être comporter de la sorte. Après tout c'est vrai. D'un côté, il le mérite. Il a conscience du fait qu'il soit têtu, chiant et débile comme frère. Il l'assume complètement même. Mais il ne peut pas changer malheureusement. Du moins pas du jour au lendemain. Et au vu du temps qu'il lui reste, ça n'arrivera sûrement jamais. Encore plus si on le considère encore de la sorte. Un être fragile qu'on doit surveiller à chaque écart. Si on lui faisait assez confiance, là peut-être que oui, ça se passerait mieux. Mais ça n'a pas l'air d'être le cas.

Si seulement Tian savait toute la douleur qu’avait vécue Liang à l’époque. Lorsqu’ils étaient encore tous petits, l’un et l’autre, que cette maladie surprenante avait fait l’apparition dans l’organisme de son nouveau trésor à protéger. Il avait été terrifié de le perdre alors qu’il venait d’arriver dans sa vie. Si maintenant Liang faisait autant attention à Tian, c’était bien pour cette raison. La peur irréversible de le voir si soudainement au bord de la fin l’avait pétrifié face à l’inévitable : il pouvait le perdre à tout instant. Le voir grommeler dans sa barde inexistante sur le fait qu’il savait faire des pâtes n’allait pas l’aider à se calmer. S’il savait au moins en faire un peu plus, alors Liang sera beaucoup plus rassuré. Mais surtout que cette réaction est puérile et plutôt inappropriée. Il venait de faire une fugue pour aller se réfugier chez son petit-ami. Comme s’il n’était pas parti pour aller retrouver un toit directement après. Est-ce qu’il se rendait seulement compte de toutes les personnes qui tenaient à lui et qui étaient prêt à tout pour lui ? Il n’y avait qu’à voir ses deux meilleurs amis. Ou encore son grand-frère. Sa mère. Son petit-ami. Le meilleur ami de Liang. Sa petite-amie à lui. Sa chienne. Le maître nageur blond là. L’autre connard qui l’embarque dans des trucs chelous. Et Liang n’était même pas sûr de connaître tout le monde. Tian ne se rendait pas compte que certain tuerait pour avoir une seule petite parcelle d’attention.

« C’est sûr que c’est pas en allant te jeter au cou de ton chéri à chaque problème que tu seras indépendant. » assomma Liang.

En réalité, il savait très bien que cela avait été une sorte de coïncidence. Mais il ne pouvait pas passer à la trappe le fait que si Tian était toujours bien vivant, au chaud dans son lit, c’était bien parce que Shinji avait fait attention à le sortir de là. Même si le Ito semble aveuglé par son amour pour Tian, il devra un jour se rendre à l’évidence d’une chose, ce n’est pas aussi simple d’être avec quelqu’un. Même si, apparemment, il avait l’air d’en avoir eu un petit avant-goût avec l’apparition soudaine et surprenante de Tian dans sa vie. Tian n’était pas vraiment un garçon facile maintenant. Avant, il était adorable, à écrire ses chansons pour leur père à chaque fois qu’il revenait de mission, à sourire timidement pour un rien. Quoique son sourire n’est pas vraiment changé depuis l’enfance, il ne chantait plus pour la famille, et seul son envie d’indépendance le menait. Il voulait vivre comme les autres lycéens. Mais il devait bien se rendre compte qu’il ne le pourra jamais. Il avait des problèmes de cœur et seul le collier à son cou pouvait le sauver en cas de problème. Il ne pourra jamais faire comme tout le monde. Jamais. Et s’il ne s’en rendait pas compte, que cette spécificité qui lui était propre, qu’elle le rendait exceptionnel. Il n’avait pas besoin de porter les vestes de l’équipe de football américain pour se faire reconnaître. Mais pour cela, il fallait que Tian sorte de sa vision épaisse de lui-même.

Après la réponse franche et pleine de reproche de Tian, Liang resta silencieux. Il croyait que cet endroit était une tour d’ivoire. Or, à priori, personne ne l’avait jamais empêché de faire ce qu’il voulait. Oui, ils s’inquiétaient pour lui. Mais qui ne le sera pas en sachant qu’à tout moment son cœur pouvait s’arrêter ? Liang n’avait pas un travail très noble et il savait tout autant qu’il pouvait y passer du jour au lendemain. Pourtant, contrairement à son petit frère, Liang avait choisi de se foutre là-dedans. Alors, il n’en tiendra rigueur qu’à lui-même si quelque chose lui arrivait. Or, pour Tian, qui n’avait rien demandé, il ne fallait pas trouver de coupable à accabler. Même si le plus jeune allait sans doute en vouloir à la terre entière pour vivre ainsi, coincé dans son propre corps, il fallait qu’il apprenne à faire avec. Soupirant discrètement, Liang se frotta la nuque en réfléchissant. Il voulait calmer le jeu, que Tian se rende compte que ce n’était pas contre lui.

« Tu parles comme si tu étais en prison, lâcha le grand frère, plus calme que précédemment. Pourtant tu peux sortir comme bon te semble. »

Ce n’était que l’effroyable vérité. Tian pouvait vivre comme tout le monde. Sans être tout le monde. L’avait-on une seule fois interdit de voir son club ? De faire une soirée avec eux ? Non. Et s’il se faisait passer pour une victime, alors que c’était lui qui était en faute, il ne devrait pas se plaindre de se faire engueuler par ceux qui son vraiment inquiet pour lui. La preuve, il était finalement revenu. Alors qu’il aurait très bien pu rester dans le lit de son amoureux à faire on ne sait quoi. Il se rendait bien compte des choses. Pas aussi idiot que ça, le gosse. Et s’il voulait tellement sortir d’ici, Liang allait se faire un plaisir de l’emmener à l’extérieur. Pour qu’ils parlent, sans avoir à se crier dessus pour un oui ou un non. Sans que le plus jeune ne se sente emprisonné dans sa chambre. Attrapant la première veste qui lui passa sous la main, il la jeta son l’autre chinois. Ils allaient faire un tour en voiture. Hors de la ville. Le long de la côte. Pour profiter un peu de la musique et de l’air frais hors de la ville des anges. Même si Liang avait pour ordre de ne jamais trop s’éloigner, il allait tout de même faire une entorse aux règles. Après tout, il n’était plus à ça prêt.

« Vu que tu veux pas rester là, met-ça. On va faire un tour. »

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] ~ Tian roule des yeux lorsqu'il parle de son chéri, Shinji. « Je suis bien avec lui, c'est tout. » qu'il dit tout simplement, remontant la couverture autour de lui. Peut-être qu'il ne sera jamais indépendant au final, oui. Si on est constamment derrière son dos, c'est sûr que ça n'arrivera jamais. Et même si Liang lui répète sans cesse qu'on ne l'empêche pas d'aller voir ses meilleurs amis et de passer des soirées hors de la maison, il se sentira quand même en prison. Puisqu'il y a des choses qu'on lui interdit. Certes car il est malade, mais tout de même. Le plus jeune des He a envie de rien entendre. Que Liang, sa mère, son petite-ami et ses meilleurs amis soient inquiets pour lui, ça il le conçoit. Du moins un peu. Mais il est bien là le problème. On le voit toujours comme une personne fragile et malade. Au moins une fois par jour, on le ramène à sa maladie qui peut lui coûter la vie à tout instant. Tout ce que souhaite le chinois, c'est de ne plus en entendre parler. Passer des journées et des nuits dans sa seconde maison, l'hôpital, lui suffit déjà amplement. Surtout qu'en ce moment, le docteur Akio ne lui laisse pas de répit. Frottant doucement ses yeux encore légèrement humides, il fixe le mur d'en face, tout en triturant le bout de ses manches. Se rebeller est sûrement la seule manière qu'il a trouvé pour montrer à quel point il se sent mal au fond de lui. Pour montrer qu'il ne voit personne qui puisse se mettre une seule seconde à sa place et ressentir ce qu'un jeune garçon au  bord du gouffre puisse ressentir. L'un de ses amis au lycée lui a dit qu'il imaginait ce qu'il ressentait. Mais ça, Tian ne le croit pas. C'est quasi impossible d'imaginer ce qu'un malade peut ressentir. Du moins, pas tant qu'on ne l'a pas été ne serait-ce que quelques temps. Tout comme Tian qui en ce moment-même n'arrive pas à se mettre à la place de ses proches qui se font bouffer par l'inquiétude. C'est pour cela qu'il ne comprend rien à rien, et qu'il a décidé de n'en faire qu'à sa tête.

Lui qui pensait rester ici à ruminer seul dans son coin, il n'est pas au bout de ses surprises. En sentant une veste tomber sur lui, il ose bouger la tête et faire dépasser ses yeux de sous la couette. Enfin, il croise le regard de son grand-frère. Ce dernier veut l'emmener faire un tour, loin de la maison. Sérieusement ? Grommelant encore un peu dans sa barbe, il reste quelques longues secondes allongé sur son lit. Liang serait capable de le foutre dehors de force, alors bon. Vaut mieux que Tian se fasse petit et s'exécute. Dans tout les cas, le plus vieux ne le lâchera pas d'une semelle. Il en est persuadé. Alors tout en se relevant lentement, il attrape la veste et l'enfile, ne souriant pas et ne lui lançant aucun regard pour le moment. Puis, laissant la porte de sa chambre ouverte pour que Yuki puisse profiter pleinement de son lit, Tian passe devant Liang en faisant exprès de le bousculer par l'épaule. Direction la voiture du frérot. Le He entend bien sa mère qui les informe de ne pas rentrer trop tard, mais il ne dit rien. Tout ce qu'il fait, c'est de sortir de la maison et d'attendre devant la voiture. Son mutisme est toujours aussi présent. Après tout, il ne sait pas quoi dire. Et quoiqu'il dise, il aura tort de toute manière. C'est bien connu. Observant un peu son grand-frère qui s'installe en premier dans l'automobile, il fait de même en s'asseyant sur le siège passager. Et lorsqu'il démarre enfin, son regard vient rapidement se perdre sur le paysage qui défile sous ses yeux. Les nombreux bâtiments, arbres, personnes qui peuplent cette ville. Sa tête se calant mieux contre la portière, il soupire longuement comme un buffle. Où est-ce qu'il l'emmène encore ? Il n'en sait strictement rien. Mais Tian va vite le découvrir, certainement.

Tian ne semblait pas partant, mais ce n’était pas ce qui allait arrêter Liang dans son projet de l’emmener un peu plus loin. Attrapant sa propre veste avant de sortir, il jeta un regard à sa mère. Indiquant qu’il gérait la situation. Ou, en tout cas, il espérait qu’il la gérait pour le moment. Plus tard, on verra bien. Tian le déteste sans doute, lui comme tout le reste du monde. Mais n’était-ce pas l’âge pour cela ? Se dirigeant vers la voiture, il la déverrouilla de loin, observant Tian monter, avant de le rejoindre en prenant la place du conducteur. Avec habitude, il alluma la machine, faisant un peu tourné le moteur, avant de démarrer, s’engageant sur la route de la rue. Le soleil commençait à se coucher à peine. Peut-être que s’il se dépêchait un peu, ils pourraient avoir un beau spectacle finalement. Liang ne savait pas vraiment ce qu’il lui avait pris à vrai dire, d’intimer à son petit frère de sortir, de l’emmener comme ça sur un coup de tête. Mais il le faisait. En s’en foutant un peu du reste.

Sans rien dire, toujours, il roula jusqu’à sortir de la ville, longeant la côté californienne, le soleil du côté de l’océan qui se couchait, encore visible à la surface de l’eau. Un petit sourire apparut sur le visage de Liang alors qu’il ouvrit sa fenêtre, allant caler son coude sur le rebord en profitant de l’air chaud de la côte qui rentrait dans la voiture en bourrasque. Pas forcément besoin de musique. Mais la radio était prête pour Tian, s’il le voulait. Pas besoin de parler non plus. Mais si Tian le désirait, ils pourraient avoir la discussion qu’il voulait. Liang jouait les grands frères protecteurs oui. Mais il était aussi un grand frère gentil. Enfin… il essayait d’être agréable, même si tout était toujours sur la balance avec Tiannie. De temps à autres, il jetait un coup d’œil au bonhomme à côté de lui. Bien sûr, il voulait que son petit visage boudeur s’arrête. C’était un peu le but de tout cela.

Enfin, il s’arrêta au bout sur un bout de gazon, face à la mer, là où on pouvait observer la fin du couché de soleil tranquillement. Arrêtant la voiture, Liang se laissa aller contre son fauteuil, tandis que son regard ne quittait pas la ligne d’horizon devant lui. Puis, un léger sourire étira de nouveau ses lèvres. Il aimait beaucoup les couchers de soleil. C’était un moment magique. Un moment important aussi de la journée. Car c’était sa fin. C’était aussi le début de quelque chose d’autre. De quelque chose qui était bien différent du reste. Lâchant un petit soupire, il n’espérait pas réellement que Tian pense quelque chose en voyant cela après tout. En fait, il ne fallait rien penser face à ce spectacle. Juste pour profiter de ce moment de couleur magnifique. Son bras sortie par la fenêtre, alors que le vent, portant les embruns de l’océan pacifique vers eux. Tant de choses, tant de nature et eux, minuscules, avec un Tian révolté et un Liang apaisé. Les rôles étaient échangés. Bien avant, c’était Liang qui hurlait contre sa famille et Tian qui tentait de calmer les choses. Maintenant, cela avait basculé. N’est-ce pas justement un passage obligatoire ?

« Profite un peu, Tian. » chuchota Liang en fermant les yeux, les derniers rayons de soleil sur sa peau.

Il n’espérait pas forcément le calmer. Juste lui donner un petit moment d’autre chose. Autre que la ville qu’ils connaissaient un peu trop. C’était une prison, la ville. Une prison et, en même temps, quelque chose de merveilleux. Un accès au reste du monde et une connexion à l’humanité énorme. Un espace d’échange merveilleux. Et pourtant, il pouvait aussi s’agir de tous les affres du monde. Alors, ce petit moment hors du reste de l’univers qui allait beaucoup trop vite, était à chérir en quelque sorte. Même si ce n’était pas forcément ce dont avait réellement besoin Tian. C’était ce que lui offrait son grand frère. Ça et un repas après. Dans le restaurant qu’il voudra. Pour bien lui faire comprendre qu’ils sont dans le même camp, finalement. Et que Liang ne voulait que le bien de son petit frère.

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] ~ Toujours là. Toujours à faire la tronche. Faire la tronche pour rien peut-être, a ce qu'il paraît. Mais bon... Tian reste Tian. Impossible de le changer. Évidemment qu'il n'est pas en prison, sinon ça serait pire. Mais on ne peut pas nier le fait qu'on lui interdis certaines choses que d'autres peuvent faire sans soucis. Tout ça à cause de sa satané maladie. Une maladie qui le suivra encore et toujours. Une maladie qui l'a choisit, lui. Pourquoi moi? est une question qui revient souvent dans son esprit. Sur les milliards d'être humains que composent cette planète, il a fallut que ça tombe sur lui. À croire qu'il a eu la poisse dès la première seconde où il a emprunter l'air de cette Terre. Peut-être qu'il n'était pas le bienvenue. Peut-être qu'Il la puni pour quelque chose. Secouant un peu la tête lorsqu'il entend la voix de son frère lui dire de profiter de la vue, il se recroqueville plus sur lui-même, tout en enfilant sa capuche. Ainsi, il peut cacher son mal être plus facilement. Ses larmes qui menacent de rouler sur ses joues. Le jeune He passe ensuite une main sur son visage pour se reprendre un peu, jetant un simple coup d'œil sur le paysage qui s'offre à lui. La mer. La mer qui le fait rêver, en même temps de lui faire peur. Une mer dangereuse, mais pourtant si belle quand on la regarde. Quand le soleil scintille sur la surface fluide. Et surtout quand le soleil se couche à l'horizon. C'est donc en restant silencieux qu'il admire finalement cette vue. Une vue qui le rend toujours aussi nostalgique. Ils ont souvent assisté à des couchés de soleil lorsqu'ils étaient en famille. Avec papa. Lentement, Tian se mord la lèvre et évite de penser à ça. Sujet sensible. Que ce soit pour lui, mais aussi pour Liang. Il sait bien que ce dernier n'a pas été le chouchou. Qu'il n'a pas eu les même faveur que lui a eu. Après tout, Tian a été le petit dernier. Un petit dernier malade qui plus est. De quoi attirer l'attention de tout le monde. De quoi être le centre du monde. Et pourtant. Pourtant il ne peut que continuer d'aimer son paternel qui est quelque part dans ce vaste monde. Il ne pourrait pas choisir entre lui et Liang. Les deux sont important pour lui. Malheureusement, il n'a rien pu faire. Il n'a pas pu arranger les choses entre les deux. Il était trop tard, sûrement. Oui. Et il a été aveugle durant un temps. Assez pour que le déchirement de leur famille soit assez grande.

Doucement mais sûrement, Tian tourne la tête vers son aîné. Puis, dans un souffle, sans le lâcher du regard et sans baisser les yeux, il se lance. « Désolé. » Tout simple. Mais il reprend bien vite le fil de ce qu'il souhaite dire. « Désolé d'être moi. D'être chiant. D'être le petit chouchou. Je sais que tu as morflé depuis ma naissance... Jusqu'à maintenant. Et encore, tu n'en a pas fini je pense, avec moi. » Un petit rire nerveux s'échappe de sa gorge, et, tout en gardant un certain sang-froid, il inspire un coup. « Je.. J'ai pas envie d'être désagréable avec vous... C'est juste que.. J'ai besoin que tout sorte, parfois. Je sais que ce n'est pas une excuse, et que je suis assez grand pour éviter de faire des crises comme ça.. Mais.. J'étouffe de plus en plus. Et les mois, les années qui passent ne m'aident pas. Savoir que mes jours sont comptés non plus. » soupire-t-il enfin, juste avant de tourner le regard vers l'horizon. Il est bien là le problème. L'épée de Damoclès qui se trouve au dessus de sa tête. Une épée de Damoclès qui peut s'abattre à tout moment. Et qui s’abattra le moment venu. En sachant ça, évidemment que le jeune He se permet de faire des choses qu'on lui a interdit. Boire, fumer, sortir tard le soir, enfreindre des règles interdites. C'est excitant, et ça lui donne l'impression d'être plus vivant que jamais. Puis, qui n'a pas rêver une seule fois de défier les autorités ? Telles qu'elles soient ? Personne. Alors, si Tian en a l'occasion, il n'hésite pas. Il met de côté tout ce qu'il faut garder en tête. La morale, la prudence, l'intelligence. Vivre une vie comme les autres, entièrement comme les autres, c'est tout ce qu'il demande. Mais il le sait. Jamais ça n'arrivera. Ni aujourd'hui, ni demain. Et maintenant qu'il a balancé quelques bribes de ce qu'il ressent au plus profond de lui, il se terre à nouveau dans le silence. Ses bras croisés, il se blottit contre.. Contre son frère. Voilà. Tant pis si ça le dérange. Mais le chinois se cale contre lui, dans ses bras. Un petit peu de chaleur humaine ne fait pas de mal.

Il n’allait pas mentir, Liang aurait aimé ces quelques minutes de silence durent encore un peu. Mais lorsque Tian ouvrit la bouche pour se mettre à déverser tous ses sentiments. Le plus âgé des deux tourna la tête vers lui, l’écoutant comme il le devait. Tian n’était pas ce que l’on pouvait appeler un silencieux. Pourtant, la communication pouvait être rapidement difficile lorsqu’elle touchait aux choses importantes. Mais parfois, à certains moments, comme celui-ci, il osait parler et dire réellement ce qu’il avait sur le cœur. Même si Liang savait pertinemment, depuis longtemps, que Tian faisait des conneries, au nom de sa liberté et du peu de temps que lui donnait son cœur, il ne pouvait tout de même pas tout laisser passer. Comme cette fois où il avait entraîné Phet dans ses problèmes, conduire en état d’ivresse pour finir au poste. Soupirant doucement intérieur par pensée à cet évènement, Liang se laisse un peu plus aller dans son siège conducteur. S’il le pouvait, il offrirait à son frère la possibilité de ne pas être ainsi. De ne pas avoir ce cœur détruit par lui-même, de ne pas souffrir de sa propre vie. Il lui offrirait tout ce qu’il fallait pour lui permettre de poursuivre une existence simple et heureuse, sans soucis. Or, il ne le pouvait pas. Faire le travail qu’il faisait, subvenir au besoin de la famille, alors que la petite pension de l’armée arrivait à couvrir les dépenses de leur mère, lui donnait l’impression qu’il pouvait tout changer. Mais il ne le pouvait pas. Et plus il s’enfonçait, plus il crevait de ce qu’il faisait jour après jour.

Son regard se reporta sur la mer devant eux, et le coucher de soleil, alors que son petit frère venait se blottir contre lui. Peut-être que lui aussi devrait se confesser. Dire tout ce qu’il avait sur le cœur. Que ses sorties nocturnes ne sont pas pour s’amuser. Il aimerait aussi lui dire qu’Haoyu n’est pas forcément le bon mec pour avoir ses déboires de jeune homme en pleine crise d’hormones (parce que ça aussi, il l’avait grillé). Il devrait peut-être passer aux aveux aussi. Mais cela ne lui semble pas être le bon moment. Car il s’agit de Tian, de son petit frère, de celui sur lequel il gardait toujours un œil, qu’il protégeait autant que possible, quitte à faire entrer son meilleur ami et boss dans l’histoire. Liang tient un peu trop à Tian pour le laisser tranquille avec ses affaires. Mais d’un autre côté, il ne peut pas non plus lui en vouloir. Etre grand frère n’est pas facile, c’est une évidence. Et cela d’autant plus qu’il était un grand frère attentif dans un monde sauvage. Crenshaw n’est pas un bon endroit pour faire grandir des enfants. Les descentes de flics, les actes racistes, homophobes de la police ou des habitants, les gangs, la mafia. Il ne fallait pas grandir ici si l’on voulait avoir une vie agréable plus tard. Et leur père les avait abandonnés ici. Et Liang était tombé encore plus bas. Il s’était encore endurci après l’armée obligatoire. Il avait fait la rencontre qui avait changé sa vie. Mais rien ne pourra le détourner de son ultime but : protéger son petit-frère.

« Si je suis totalement honnête avec toi, je m’en fou que tu fasses des crises comme ça. Mais pour maman, je ne peux pas ne pas te le reprocher. (Passant un bras autour de son frère, il se recala contre lui aussi.) Si tu savais… Si tu savais tout ce que je ferais pour te laisser vivre ta vie comme tu l’entends. Tu mérites mieux que ça. »

Peut-être qu’il devrait aussi lui dire plein d’autres choses. Comme le fait qu’il espérait qu’il soit heureux avec Shinji. Qu’il l’aimait bien finalement, ce type. Qu’il était fier de lui, malgré le fait qu’il ne semble pas vouloir son appréciation. Qu’il ne le blâmerait pas pour tout ce qu’il avait fait. Parce qu’il avait fait les mêmes choses. Sortir tard le soir, rentrer à pas d’heure, puant l’odeur de la soirée. Oooh que oui, Liang avait été un vrai petit con au lycée. C’est pour cela qu’il avait fini à l’armée. Ces nuits tumultueuses avec des amies ou des inconnues. Parfois même des amis sans « e » (même s’il devait dire que ce n’était pas trop sa cam). Lui aussi avait finit au poste de police. Plus d’une fois. Alors Tian, lui qui avait commencé à travailler en tant que cassier pour pouvoir accumuler un peu d’argent de poche. Ils n’avaient pas eu la même vie. Et ils ne l’auront jamais. Quelque chose dont ils devaient bien se rendre compte. Les frères He se frôlent, mais ne seront jamais totalement dans le même univers.

« Tu es mon petit frère Tian. Pour rien au monde je te ne laisserais tomber. Fait toutes les conneries que tu veux, je te couvrirais. Mais n’inquiète plus maman. C’est tout ce que je te demande. »

Leur mère ne mérite pas toute la frayeur qu’elle accumule tous les jours. Elle se bat déjà au quotidien pour s’en sortir, surpasser la disparition de leur père, élever ses fils, les maintenir en vie. Elle avait des cheveux blancs de fatigue qu’elle teignait pour recouvrir le vice. Mais Liang n’était pas aveugle. Elle restait resplendissante tout en se décomposant. Une mère fatiguée par tout. Elle avait le luxe de la vie chinoise avant. La bénédiction d’un fils aîné qui apprenait bien à l’école, qui faisait honneur à la famille. Un mari militaire, fierté de l’état. Mais maintenant ? Que lui restait-il ? Une maison pleine de foutoir, avec deux fils, une chienne et des problèmes jusque par-dessus la tête. S’ils voulaient encore sauver les meubles, il fallait sauver la famille. Et pour cela, il fallait rester uni. Des frères, dans un secret devant la mer et le couché de soleil.

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] ~ Jouant un peu avec les boutons de la veste de son aîné, Tian l'écoute à son tour, préférant quand même avoir des conversations calmes avec lui. A force de se disputer, ça le fatigue de plus en plus. Il ne s'en rend compte que tard, encore une fois. Le sentir passer un bras autour de lui le rend tout faible, tout fluffy. Automatiquement, le jeune He vient enfouir sa tête contre le cou de son frère, de petits frissons le prenant alors. Évidemment que leur mère se fait du soucis. Encore plus depuis que leur paternel n'a plus laissé de trace dans ce monde. À cette pensée, le lycéen baisse les yeux, penaud. Avec ses conneries, bien qu'il se sente libre, il fait du mal à ceux qui les entourent. Pourtant rien que ça ne lui suffit pas pour se calmer. C'est ça, être en pleine crise d'ado ? Parce que si oui, Tian ne sait pas jusqu'où il pourrait aller. Jusqu'où son cœur pourra le mener, le supporter. Faire une pause ne fera sûrement pas de mal. Surtout que maintenant, il entre dans un nouveau monde. Le monde des grandes études. S'il peut au moins avoir ne serait-ce qu'une petite chance de toucher son rêve du bout des doigts, il le fera. Mais les paroles du plus vieux te fait froncer les sourcils. Lentement, tu reprends la parole, hésitant. « Hum.. Je doute que je le mérite.. Enfin... Si je suis né comme ça, c'est que ça devait l'être. Et pas autrement. » Haussant les épaules, il se cale un peu mieux contre lui et frotte son nez du revers de la main. Celui qui se trouve Là-haut ne l'aime peut-être pas assez pour le laisser vivre longtemps. Ou alors, il l'aime tellement qu'il souhaite le voir arriver au Paradis. Rien que penser à ça, Tian en rit un peu. Cependant il se reprend bien vite, relevant les yeux pour observer la mer, et les éléments qui l'entourent. Les rayons du soleil qui se couche caresse doucement son visage, lui laissant le temps de percuter un peu plus. De réfléchir à tout ça. S'il doit rendre heureuse sa mère, Tian se doit de se surpasser. De devenir un fils qui puisse apporter de la fierté à la famille.

Pour le moment, il n'apporte que des emmerdes et du malheur. Tout le contraire de ce qu'un garçon doit offrir à sa mère. Son aveuglement est sans pareil, tout comme son égocentrisme. Mais bon... D'un côté, il se dit que c'est normal, d'être égocentrique. Du moins, dans son cas. Il pense à lui, sachant que s'il ne fait rien, s'il reste statique, il finira par sombrer plus rapidement que prévu. Prendre exemple sur ses potes rebelles a été le seul moyen pour lui de se défouler. Tout en essayant de ne pas dépasser certaines limites. Certaines limites qu'il n'a pourtant pas eu mal à défier. « D'accord... Je n’inquiéterais plus maman. Ni toi. Tu ne mérites pas non plus de t'inquiéter, de t'en faire autant pour moi. » Relevant la tête vers lui, le jeune chinois lui sourit légèrement. « Pense aussi à toi, au lieu de me faire toujours passer en avant. Vit ta vie comme tu l'entends... Je saurais me débrouiller, tout en sachant que tu veilles sur moi de loin. » Après tout, Tian n'est pas aveugle non plus. Il a bien vu que Liang a rencontré quelqu'un. Depuis quelques semaines, il est différent. Ça se sent, quand on est uni entre frères. Mais passons. Une vibration dans sa poche le fait sortir de ce petit moment entre eux, et il vient alors regarder l'expéditeur du sms qu'il a reçu. Quand on parle du loup... C'est leur mère qui leur demande de rentrer et fissa. Un petit soupir s'échappe de sa bouche alors qu'il montre le téléphone à son frangin, le lui mettant dans sa main. Suite à ça, Tian sort de la voiture pour simplement étirer ses bras, ses jambes, la totalité de son corps en gémissant légèrement. Il prend aussi le temps de prendre plusieurs bouffées d'airs, les yeux fermés. Tant d'émotions en si peu de temps, ça fatigue de trop. D'un seul coup, cette grosse fatigue lui retombe en plein dessus, et il titube un peu en se sentant s'endormir. De petites claques sur ses joues, il revient s'installer sur le siège passager. « On peut y aller... »

Liang est un grand frère avant tout. Depuis la naissance de Tian, il ne s’est jamais vu autrement que comme l’ainé des deux, endossant nombre de choses, pardonnant et grandissant plus vite que prévu. Bien sûr, il avait fait des conneries, tout comme le cadet. Il avait commencé à fumer jeune, il avait connu beaucoup de relation sans lendemain alors qu’il était toujours au lycée. Puis il était rentré à l’armée, soit disant pour qu’il reprenne ses esprits. Et finalement, cela n’avait fait que provoquer l’inverse. Il avait finit dans un gang, dans une mafia qui le traitait mieux que son propre père. Il s’était trouvé un meilleur ami, peu loquasse, mais qu’il aimait bien dans le fond. Et il y avait Myung. S’il n’avait pas fait ce travail, il ne l’aurait jamais rencontrée. Elle et ses si jolies cheveux maquillés toujours de paillettes, ses lèvres couvertes de carmin, ses cheveux corbeaux qui dégringolaient sur ses épaules. Liang avait fait nombre de conneries dans sa vie. Après tout, il était tatoué, et une trace de balle traînait sur l’un de ses flancs. Mais pour trois personnes, il souhaitait être un homme bien. Pour sa mère, pour Tian, et pour Myung Hae. Il écouta alors son frère, se retrouvant comme lui devant l’insupportable vérité. « C’est comme ça. » Terrible dans les oreilles du He, qui trouvait injuste que Tian subisse tout cela, sans n’avoir rien fait de sa vie avant. Liang pouvait bien mourir sous un train, il l’aurait sans doute cherché. Mais Tian ne devait pas finir sa vie sur un lit d’hôpital. Sa main se resserra sur l’épaule du plus jeune, mais il ne dit rien. Pourtant, son cœur était aussi lourd que du plomb.

Sans chercher à répondre, il laissa le silence emplir la voiture, observant simplement le soleil qui se couchait devant eux. Au moins, le petit frère He semblait s’être calmé, au vu de son regard plus reposé. Ils allaient pouvoir rentrer, se poser, passer une soirée un peu plus calme. Si même le concept d’être dans un état simple était normal pour cette famille qui partait très clairement dans tous les sens. Inspirant doucement, pour prendre un peu d’air avant de se motiver à reprendre la route, la voix de Tian s’éleva de nouveau, le surprenant alors qu’il pensait qu’il avait fini de s’expliquer. Oui, il ne fallait pas grand-chose à Liang pour se satisfaire d’une discussion. (D’un autre côté, on ne pouvait pas dire qu’il tenait les dialogues sur la longueur alors son meilleur ami, ce qui était sans doute problématique pour ses relations sociales vu qu’il était la personne qu’il côtoyait le plus au quotidien.) Pourtant, il ne broncha pas, le laissant s’expliquer. Il était heureux que Tian fasse attention à sa propre personne. Avec une maladie qui le rendait aussi vulnérable, il fallait surtout qu’il s’apprécie un petit peu. Mais Liang fut prit de nouveau par surprise en l’entendant lui dire qu’il devait aussi prendre du temps pour lui. Un sourire se forma sur ses lèvres alors qu’il s’enfonçait un peu plus dans son siège conducteur. Penser à lui hein ? Etait-ce vraiment le rôle d’un grand frère ? Devait-il jouer l’adulte là ?

« Je suis content d’entendre cette résolution. En espérant que tu la tiennes. (Il le taquinait oui. Et son rôle changea alors, passant du frère à l’homme.) En parlant de vivre ma vie… Je pense quitter la maison bientôt. » avoua-t-il en continuant de fixer l’horizon.

Alors que la bombe était lâchée, le téléphone du chanteur sonna, les sortant de la transe confortablement dans laquelle ils étaient. Regardant alors l’écran, il ne put empêcher un petit rire de lui échapper alors que Tian se redressait pour s’asseoir plus confortablement dans son siège. De toute manière, le soleil avait disparu derrière la ligne d’eau. Ils pouvaient rentrer tranquillement, profitant des nuages qui tournaient violet dans le ciel. Et donc, Liang démarra, les entraînant tous les deux pour retrouver la ville. Los Angeles s’allumait déjà pour profiter de la nuit chaude qui s’annonçait, certaines zones plus ombragées que d’autres. Mais la ville des anges n’avait pas besoin de rayonner comme Las Vegas. C’était agréable de ne pas être coincé dans le trafic routier. Parce que oui, Los Angeles était aussi connue pour ses bouchons à ne plus savoir où ça se finit. Heureusement, Liang connaissait les rues comme sa poche maintenant, après les avoir arpentées et parcourues. Alors, ce ne fut pas si long que cela jusqu’à ce qu’ils arrivent à un feu rouge qui les séparait à deux quartiers de leur maison. Le plus âgé espérait qu’il n’aurait pas à ressortir, qu’il n’allait pas être appelé à la dernière minute pour devoir travailler toute la nuit. Sauf que contrairement à certains, il ne pouvait pas poser une journée pour se reposer. Les heures de sommeil, il le grappillait. D’ailleurs, parfois, il se demandait aussi si Hao dormait. Mais ça, c’est une autre histoire. Il ne fallait pas qu’il pense à cela, sinon ça allait lui attirer le mauvais œil et son téléphone allait sonner.

Et contre toute attente, alors qu’il s’arrêtait devant leur maison, coupant le moteur, il n’entendit pas le moindre son de sonnerie. La chance était peut-être de son côté finalement. Il allait peut-être pouvoir passer une soirée normale, avec un repas en famille et une vraie nuit. Son organe vital était à la fois lourd et à la fois léger. Lourd, car il savait que son petit frère souffrait de sa situation et que lui ne pouvait rien faire. Léger, parce qu’il savait que les choses s’étaient arrangées entre eux. Enfin… Jusqu’à la prochaine connerie.

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] ~ “ Quitter la maison ? “ Ces paroles te font frémir doucement et le regarder les yeux ronds. Tu sais bien qu’il a l’âge de faire son nid ailleurs, et de voir du monde. Mais pourtant ça te fiche un pincement au cœur. Le temps passe si vite, et tu ne sais pas si tu arriveras à vivre dans une maison sans ton grand-frère. Il laissera un vide énorme, c’est sûr. Mais tu ne peux pas le forcer à rester. Son choix reste son choix. Et de toute manière, ce sera à toi de faire comme lui dans quelques années. Vivre dans ton chez toi, avec Shinji. “ Tu me manqueras, tu sais… “ Tu te retiens fortement de pleurer, sentant une boule se former dans ta gorge. Foutu hormones dites donc. Tu te cales mieux dans le siège de la voiture et le laisse te conduire de nouveau vers la maison. Tu profites encore de ces derniers moments de calme avec ton frère. Tes yeux observent le paysage qui défile encore une fois devant toi. La nuit a assombri les rues de la ville et tu as du mal à reconnaître les environs. Tu fermes alors les yeux et pense un peu à autre chose, durant le reste du trajet. Trajet qui est bien court à ton goût. Tu te sors de tes pensées et détache ta ceinture, sortant de l’automobile avec quelques petites larmes aux yeux sans t’en rendre compte. Votre mère vous attend, derrière la porte d’entrée qu’elle vient d’ouvrir. Tu te mords la lèvre en voyant son visage, et sans attendre tu cours pour venir te blottir dans ses bras. T’es peut-être désagréable par moment, et désobéissant. Mais tu n’as pas envie d’être la cause d'une déchirure familiale. Ta mère et ton frère font tout pour toi, tu leur dois d’être un fils parfait. Enfin… Tu vas essayer.