Une voile sous le soleil [Nina]

Une voile sous le soleil

nina & renee

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La routine qui n’en est pas une. Chaque divorce se ressemble. La séparation de deux êtres qui se sont dit des “je t’aime” jour et nuit, avec l’idée cela durerait. Chaque divorce est différent. Il y a toujours un petit truc qui fait qu’il n’est pas possible de faire un copié-collé du dossier précédent pour le glisser dans la chemise qui porte le nom du client suivant. Cela tient à de gros éléments, les enfants, la maison, le yacht, la maltraitance, l’alcool... Et parfois à des petits détails qui prennent tellement d’ampleur que cela peut devenir risible à la personne qui observe de l’extérieur. Renee se retrouve dans cette position d’observateur quand un couple se dispute le tee-shirt acheté au concert de machin à la grande période de l’amour parfait. Un putain de tee-shirt déformé par les lavages et l’embonpoint qui a transformé les amoureux en ennemis rancuniers. D’autant qu’un seul tee-shirt, réellement ? Lennon et elle se sont rencontrées lors d’un festival et le lendemain, elles ont acheté deux tee-shirts, un pour chacune, alors... Alors un message, une invitation d’une amie a du bon à ce moment-là. Une ballade sur la plage, sur le port, sous le soleil, sous un ciel sans nuage, comment refuser ! Surtout quand elle est signée Nina : « D’accord, mais on commence par une glace. » Renee arbore un sourire quand elle tape le texte de la réponse. Il ne passera pas par les ondes, mais tant pis, elle, cela lui fait du bien.

A l’heure dite, au lieu défini, elle arrive avec quelques minutes de retard. Elle avait les yeux rivés sur sa montre l’instant d’avant qu’elle ne repère Nina. Elle approche avec le même sourire que celui du message, mais cette fois, son amie peut en profiter pleinement.

« Désolée. J’espère que tu n’as pas commandé les glaces à l’avance.»

Renee a envie de légèreté, d'insouciance. Elle est prête à plaisanter sur tout et sur rien. Et taquiner un peu Nina ?

« Si j'ai bien compris aujourd'hui on profite du soleil et on profite de la journée pour ne rien faire ? Tu sais tout de même que j'ai un boulot, que j'ai des horaires à respecter et une présence indispensable à des rendez-vous ? »

Soleil, évidemment pour l'occasion elle a sorti les lunettes indispensables. Oisiveté, la tenue décontractée qu'elle a troqué contre son tailleur et jupe serrée qui font office d'uniforme pour l'avocate.

« Mais on ne peut rien te refuser... »

Nina est une trop agréable bulle d'oxygène dans ce monde qui vit à mille à l'heure.

« Comment vas-tu, ma belle ? Dis-moi tout. »

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Kyra n’est plus. Tu t’es faite à l’idée. Cela t’a demandé du temps et quelques passages chez ton psy. Aujourd’hui, tu te sens prête à définitivement faire le deuil de cette fille. Tu es décidée à refouler de nouveau le sable de plage. Tu ne l’as pas fait depuis un mois. La douleur ressentie en te remémorant la silhouette de la blonde, debout devant l’océan, tout sourire, en train d’emprisonner le paysage dans son appareil photo, était trop forte. Le point final de ce chapitre se trouve là-bas. Tu dois aller le clôturer. Puis la mélodie de l’océan te manque de trop. Tu ne peux rester enfermée dans ton passé. Kyra n’était pas l’amour de ta vie. Armée de détermination, tu crains que ça ne soit pas suffisant. Une rechute est possible. Un soutien est le bienvenu. Même si c’est le jour de fermeture de la fleuristerie, tu ne te vois embêter ta mère. Elle a besoin de repos. Ton choix se porte sur ta meilleure et unique amie. Tu lui envoies un sms et lui propose une balade. Sa réponse te fait sourire. Sa condition est plus qu’acceptable. Tu enfiles ta plus belle robe pour l’occasion. Ta longue robe blanche sans manche à fines bretelles. Ta paire de sandale complète ta tenue.

Tes pas pressés te guident jusqu’à la plage. Tu n’es pas en avance. Tu es même presque en retard. T’allonger sur ton lit après le déjeuner n’était pas une bonne idée. La sieste digestive a failli t’être fatale. Tu arrives pile à l’heure. Tu ne remarques pas la brune dans les environs. Tu ne t’inquiètes pas pour autant. Renée n’est pas Kyra, elle ne t’abandonnera jamais. La ponctualité n’a jamais été sa qualité première. L’avocate te rejoint après quelques minutes d’attente. Tes lèvres montent jusqu’à tes oreilles tant elle est radieuse. « J’en ai déjà mangé trois. », lui affirmes-tu en lui offrant une bise amicale. Un peu d’humour ne fait pas de mal. Puis qui aime bien, châtie bien. Et tu apprécies énormément cette femme. Tu te contentes de hocher la tête à ses paroles. Tu aurais pu lui répliquer que toi aussi tu as un boulot mais tu as préféré le garder pour toi. « Tu as aussi besoin de prendre soin de toi. » Renée est une bourreau de travail. Sans ta présence, elle passerait ses jours derrière le bureau de son cabinet ou de son domicile. « Je ne suis plus amoureuse. », lui dis-tu sans détour d’un ton neutre. Tu ne vas pas tourner autour du pot. « Mais je ne veux pas en parler. » Tu l’as assez fait avec ton thérapeute. Tu as donné l’info à Renée pour te libérer d’un poids. La page est désormais tournée.Tu saisis son bras. Tu l’entraînes vers le marchand de glace ambulant installé à proximité. « Tu prends quoi ? Je te l’offre. » Tu lui laisses indiquer au choix au vendeur puis tu annonces le tien : vanille-fraise. En attendant leurs préparations, tu sors ton porte-monnaie de ton sac à main. Une fois prêtes, tu demandes à Renée de tenir vos gourmandises le temps que tu règles. Tu récupères ta douceur sucrée. Tu t’empresses de lécher le mont rosé qui commence à fondre. La fraîcheur gèle tes papilles et te donne la chair de poule. « Tu veux qu’on s’assoit le temps de manger notre glace ou on la mange en marchant ? », lui demandes-tu en découvrant un banc de libre à une dizaine de mètres de votre position.

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Une voile sous le soleil

nina & renee

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Si l’entrée en matière de la rencontre est des plus sympathique avec cette surenchère de glaces dévorées et la nécessité de s’oxygéner, la suite met de l’amertume dans le sucré. Nina est directe : elle n’est plus amoureuse. Un ton neutre qui n’enlève pas la tristesse que Renee ressent par rapport à cette relation qu’elle a vu naitre. Elle repense à ce rendez-vous qu’elle lui avez demandé, cette après-midi ensemble à discuter des sentiments de la jeune fleuriste et des possibilités de relation avec l’élue de son coeur. C’est fini et elle ne veut pas en parler. Renee n’insistera pas sur le sujet ne voulant pas la blesser par ce sujet. Et puis la journée est centrée sur la joie de vivre et le plaisir de prendre du bon temps, alors pas question de ressasser. D’autant que c’est Nina qui offre la première tournée de glaces.

« Citron vert, ce sera parfait pour se rafraichir et merci de me l’offrir. »

L’avocate surveille les gestes du professionnel qui prépare des petites merveilles à déguster. Elles se savourent avant même d’être dans la bouche, les yeux s’en rafraichissent les premiers. Ceux de Renee sans aucun doute. Abandonnant la vitrine réfrigérée, elles s’éloignent pour une courte promenade. A la demande de Nina, Renee répond en tendant la main.

« Il y a un banc là-bas. On peut s’y installer. Cela m’évitera de faire comme les gamins qui font tomber leur précieux bien et se rendent compte à quoi ressemble la fin du monde en regardant leur glace exploser sur le sol. »

Un banc étonnamment déserté alors qu’il offre une vue sur la plage à sa gauche et le port de l’autre côté. Un banc pour éviter un vision d’horreur. Il y a des souvenirs d’enfance qui marquent à vie ! Ce spectacle particulièrement douloureux n’avait pourtant pas été dû à une maladresse de Renee mais à un coup de coude intentionnel de son frère. De quoi alimenter une haine durant plusieurs semaines !
Renee s’installe “côté plage”, tant qu’à faire une occasion de mater du coin de l’oeil quelques corps dénudés, sans pour autant délaisser son amie.

« Alors, quoi de nouveau dans ta vie ? »

Puisqu’on évite de parler du passé Kyra.

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Renée à tendance à poser de nombreuses questions. Probablement que s’est dû à une déformation professionnelle. Tu as anticipé la chose. Si tu tenais à l’informer de la fin de ta relation,  tu ne tenais pas à devoir te lancer dans les explications du pourquoi du comment. Surtout que tu ne les as pas. Tu ignores pourquoi Kyra a arrêté de venir sur la plage du jour au lendemain. Puis tu n’as pas envie de ressasser le passé. Tu n’as pas convoqué ton amie pour pleurnicher dans ses jupes. Le temps des larmes est résolu. Bien sûr, rien ne te dit que d’autres ne couleront pas sur tes joues dans des moments de nostalgie. L’heure n’en est pas là. L’heure est à la dégustation de glace. Sinon, c’est elle qui va couler et va tâcher tes doigts et ta robe. D’ailleurs, la pulpe de ton index commence à se faire attaquer par la fraise. Heureusement, tu as le réflexe de lécher le cône avant que les dégâts ne s’amplifient. Tu suis Renée jusqu’au banc désigné. Tu dégustes ta douceur sucrée en silence. Plutôt, tu savoures la mélodie jouée par les va-et-vient des vagues. Cette symphonie t’avait manqué. Ton acolyte coupe la mélodie océane d’un son qui t’avait également manqué : sa voix. « Il y a un nouvel habitant à la maison. », lui annonces-tu toute souriante. Tu lis son sur son visage son incompréhension. De ta main de libre, tu te contorsionnes pour sortir ton téléphone. A force de te tortiller, l’accident finit par arriver. Ton cornet s’échappe de tes fins doigts et chute au sol. Loin d’en faire un drame, tu relativises. « Il restait presque plus rien. » Tes deux mains désormais à disposition, tu récupères ton smartphone. Tu ouvres ton dossier photo et affiche un cliché. « Je te présente Réglisse. », lui dis-tu en lui montrant ton écran. Elle peut y apercevoir un chat tout noir. Oui, tu ne t’es pas foulée pour lui trouver un prénom. « Il est passé un jour fois devant la fleuristerie à miauler sa faim. Je lui ai donné à manger et de l’eau. Puis il est revenu le lendemain et ça a duré quelques jours. Comme il avait ni de collier ni de tatouage, on en a déduit que c’était un chat errant. Alors je l’ai adopté. » Tu ne pouvais laisser livrer à lui-même un enfant de la nature. Si la flore à tes faveurs, tu n’en oublies pas la faune. De toute façon, il t’était impossible de résister face à la beauté de ses billes jaunâtres. « Il faut que tu viennes le voir en vrai. » L’invitation est lancée. Renée sait qu’elle est toujours la bienvenue chez toi. Elle n’y passe que trop rarement, la faute à son emploi du temps surchargé. « Et toi ? Quoi de neuf en ce moment ? » En attendant qu’elle se lance, tu ramasses le cadavre de ta glace à l’aide de ta serviette et le jette dans la poubelle présente à tes côtés.

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Curiosité, rester informer des aléas de la vie, sociabilité, être à l’écoute pour aider si besoin, la question de Renee est un peu tout cela. Rien de malsain ou d’intrusif, elle a lancé la question pour que Nina s’exprime quelque soit le sujet. Du sympa au perturbant. Elle la veut libre en sa compagnie. La nouvelle tombe et la surprend. La mère de la jeune femme aurait-elle un nouveau compagnon qui s’est installé chez elles ? Cela interpelle aussi la fibre professionnelle, sachant que tout n’a pas été rose dans leur vie. Vigilance, donc.

Elle a proposé le banc pensant aux gamins qui faisaient tomber leur glace parce que trop actifs pour les maintenir en équilibre dans n’importe quelle situation. Elle constate que Nina à la même attitude. Renee est prête à proposer d’aller lui en chercher une autre, mais son amie considère que la perte est négligeable. L’avocate reste donc en attente de découvrir à qui fait allusion la jeune femme. Le portable apparait entre les mains de la fleuriste et l’instant d’après l’image de Réglisse la fait sourire et balaye les craintes qui avaient pointé leur nez. Un chat noir ! Elle se penche vers l’écran pour mieux apprécier le minois de l’animal. Noir c’est noir ! Heureusement quelques reflets et les yeux perçants lui donnent une bonne idée du félin. L’histoire suit. Elle n’a pas besoin de plus pour comprendre comment Nina a pu craquer pour cette bête à l’abandon. Renee ne s’en étonne ni de Nina, ni de l’animal. Les chats savent parfaitement aller au devant des personnes capables de leur offrir un foyer. Ils ont cet instinct qui les guide vers la maison dont la porte s’ouvrira.

« Il a l’air adorable et j’accepte l’invitation avec plaisir. »

Tout naturellement, la question fait ricoché. Quoi de neuf dans la vie de Renee ?

« Oh, rien qui ne sort de l’ordinaire. Hormis peut-être que j’ai promis à Lennon d’aller voir ses combats. »

Elle prend une inspiration. Doit-elle développer ? Elle se voit mal parler boxe et autres sports de combat violents qui se déroule sur un ring. Rien à voir avec ce qui se passe sur un tatami ou sur un plateau d’escrime. Là, on combat pour  faire mal et mettre l’autre hors d’état de bouger. Elle hausse les épaules.

« Cela me semblait une bonne idée de m’intéresser à ce qu’elle fait. J’angoisse un peu de la voir prendre des coups. »

Elle sait les frissons qui l’ont parcourue à chaque fois qu’elle l’a vue avec des ecchymoses, alors assister au combat, la voir mettre genou à terre, voir couler son sang, la font douter tout de même de cette idée.

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Ton sourire s’élargit davantage à l’acceptation de ton invitation. Savoir que tu vas passer un nouveau moment en compagnie de Renée te rend heureuse d’avance. « Que dirais-tu de venir après notre balade ? Tu pourrais même rester dîner, maman serait ravie. » Tu sais son emploi du temps surchargé. Pour une fois que tu as réussi à lui faire sortir le nez de ses dossiers, tu tentes d’en profiter au maximum. En plus, ta mère serait aussi contente de la revoir. Si elle n’a pas tissé un lien aussi fort avec l’avocate, elle ne lui en est pas moins reconnaissante pour tout ce qu’elle a fait. Sans sa précieuse aide, elle se serait embourbée dans l’usine à gaz juridique. Peut-être qu’elle n’aurait pas eu le courage d’entreprendre toutes les démarches nécessaire pour faire condamner ton père et qu’il serait toujours en liberté, potentiellement à violenter une nouvelle victime. L’idée te glace le sang. Tu n’oses imaginer ce tyran dehors. Il t’arrive parfois de penser au jour de sa libération. Et s’il vous cherchait et vous retrouvait ? Dans ces instants-là, l’angoisse s’empare de toi. Tu t’enfermes dans ta bulle et essayes de t’évader. Pour le moment, il est derrière les barreaux à San Francisco. Loin de toi. Loin de vous. Il ignore que vous êtes à Los Angeles. Renée est proche par contre. Sa simple présence te rassure. Elle a le don de te sécuriser. Tu aimerais pouvoir lui rendre la pareille. Malheureusement, tu n’as pas son habilité pour les relations humaines. Surtout lorsqu’elle t’évoque  l’activité de sa petite amie. Tu ne peux concevoir ce choix. Si la boxe est un sport réglementé, le simple fait de prendre des coups te rappelle trop l’attitude de ton paternel. Tu ne peux que visualiser les hématomes sur le corps de ta mère et son sourire ornant son visage pour te faire que tout allait bien. Sans le vouloir, ton amie t’as mise mal à l’aise. Tes muscles se sont contractés. « Pourquoi elle fait ça ? Je ne pourrai pas être à ta place. » Vu ton passé, la raison est évidente. La violence te rebute. Le simple fait de voir une mère gifler son enfant faisant un caprice en magasin te pétrifie. Tu n’arrives pas à comprendre le principe de prendre des coups volontairement. Encore moins d’en donner. Peut-être que Lennon se plait à souffrir pour voir Renée se muer en infirmière après ses combats. Si c’est le cas, c’est très vicieux. « Faut éliminer ce sucre, on va marcher un peu. » Ce n'est qu'un prétexte pour bouger. Tu as surtout besoin de penser à autre chose et de chasser les images de ta tête. Tu te lèves. Tu saisis la main de ton amie pour l’inciter à se bouger. Une fois debout, tu l’entraînes vers l’étendue sablée. A la frontière formée par le bitume et le sable, tu t’arrêtes. Tu retires tes sandales. « Pieds nus sur le sable, c’est la règle. », annonces-tu à Renée l’air sérieuse. Il n’y a rien d’officiel dans tes propos. Aucune loi n’impose d’ôter ses chaussures sur la plage. Tu te l’imposes pour ressentir la chaleur délicate des grains chatouiller ta plante des pieds. Et aussi pour être en contact direct avec la nature.

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Une voile sous le soleil

nina & renee

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Nina ne perd pas une seconde pour inviter l’avocate à venir voir de près le nouveau pensionnaire au nom savoureux de Réglisse. Réfléchir à trouver une excuse pour se défiler n’est pas son attitude en face de Nina. Comment refuser à ces doux yeux, à cette gentillesse, à ces moments de douceur que sa compagnie dégage ? Comment refuser de rencontrer cette boule de poils tout noir qui donne du bonheur à la jeune femme par sa présence ? Dire non à Nina ne lui semble pas possible, même si le matou, elle le trouve parfait en photo et s’en serait contenté. En vrai elle devra forcer un peu plus le sourire. Renee n’aime pas énormément la cohabitation avec les animaux. Pourquoi, diable, ses clients s’imaginent qu’elle peut prendre en pension la bestiole qu’ils adorent pour la soustraire de l’ex qui la veut absolument ? Heureusement,   elle trouve moyen pour un rejet dans la presque tout les cas. Heureusement, il y aura la compensation de diner avec la mère de Nina qu’elle apprécie.

« C’est d’accord pour ce soir, si vraiment ma présence n’est pas abusive. »

Après tout, Nina invite, mais peut-être sa mère a-t-elle déjà prévu quelque chose.

Renee a parlé de Lennon, de ses combats, de ces sports qu’elle apprécie et dont elle a fait son métier. Autant des sports tel que le judo, l’aïkido, et quelque autres, n’ont pas pour but de prendre des coups mais de les éviter ou au moins les limiter, autant ce qu’affectionne sa compagne est d’un tout autre registre. Elle hausse les épaules aux remarques de Nina. Les choix de chacun lui appartiennent. On pourrait disserter sur le fait que tous les goûts sont dans la nature et qu’il vaut mieux se défouler de cette manière sur un ring que dans le salon d’un appartement, mais ni l’une ni l’autre n’ont ce désir. Nina change rapidement de sujet. Renee accepte de suivre sans trop se faire prier pour se retrouver sur la plage. L’ordre donnée par sa jeune amie n’a rien de brutal, elle le prend pour un conseil avisé. Pieds nus dans le sable, c’est le plus évident. A sont tour de se retrouver ses rangers en main.

La promenade a des airs de vacances. Renee ne se souvient plus quand elle en a pris de bien réelles. Des séjours à la va-vite pour quelques jours chez ses parents, des week-ends dans le spontané du départ et l’urgence d’un retour avec Lennon, parce que la salle de boxe la rappelle. Renee profite de l’air marin. Son regard balaye l’étendue, se pose de-ci de-là sur les gens qui se baignent, qui bronzent, qui jouent au ballon, qui construisent un château de sable.

« Oh regarde, le voilier là-bas ! J’ignorais qu’on pouvait s’amarrer de ce côté-ci. »

Un homme semble faire des navettes entre la plage et le bateau grâce à une minuscule embarcation gonflable, alors qu’un autre, mains sur les hanches,  pieds plantés dans le sable humide, semble attendre qu’il achève son manège.

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Parmi tous les adjectifs pouvant qualifiés la présence de Renée, abusive ne viendrait pas à ton esprit. Rare, rassurante, réconforte, indispensable sont des mots plus justes. L’affection que tu portes à l’avocate est immense. Elle n’a pas uniquement permis à ta mère de sortir définitivement des griffes de ton père, elle vous a permis de vous reconstruire. Elle sera toujours la bienvenue chez vous. Peu importe la raison, le moment, si elle toque à la porte de votre appartement, vous l’accueillerez les bras ouverts. « Elle ne l’est jamais. » Au contraire, elle est trop modérée. Tu es obligée de l’inviter chez toi. D’un côté, son attitude te sert. Tu n’as pas d’autre choix que de sortir de ta bulle avec Renée. Après, votre amitié est si forte que vous pouvez rester des jours, parfois des semaines, sans vous parler sans pour autant la remettre en cause. En bonne amie, Renée évite le chemin tortueux concernant l’activité de sa petite amie. Elle connait la relation entre la violence et toi. Tu la remercies d’un timide sourire. Tu l’as entraîné sur ton terrain sablonneux. Après avoir donné ta consigne et qu’elle l’exécute, vous débutez votre balade. Tu as pris la direction du port de plaisance. Tu t’y rends régulièrement. La première raison est due à l’absence de foule. Là-bas, debout sur le ponton, tu entends plus distinctement la mélodie de l’océan. Malheureusement, tu ne peux y tremper tes pieds. La seconde provient de sa fonction. Tu te plais à observer les bateaux. Tu te focalises sur les voiliers, t’imaginant dessus, navigant sur l’étendue bleutée en solitaire. Ce rêve te hante depuis si longtemps. Il est le seul qui te fait donner de l’importance à l’argent. Tu économies tous les mois un peu dans l’espoir de pouvoir te payer une embarcation un jour. Tu en ignores le prix. Si tu le savais, tu saurais que tu en as pour des années. Ce n’est pas grave. Tu es encore jeune. Tu as de nombreuses années devant toi. Tu dictes le rythme. Ta marche est lente et témoigne de ton désir de profiter de cet instant. Tes paupières closes, tu songes éveillée. L’entente du mot magique te sort de ta bulle. Tu découvres le voilier. Il ressemble comme deux gouttes d’eau à celui de ton dernier rêve. Tu n’en crois pas tes yeux. Tu es bouchée bée, figée, comme un enfant devant un sapin de Noël ou une groupie face à son idole. Ce que tu vois ne peut être réel. Tu avances dans l’océan jusqu’à avoir de l’eau à hauteur de tes genoux. Une main en visière, tu détailles au mieux l’engin flottant. Tu reviens sur la plage, aux côtés de Renée. « On va aller le voir de plus près. » Ce on est une illusion. Tu doutes de l’envie de l’avocate. Il est un je déguisé égoïste. Tant pis. Tu ne lui laisses pas le choix. Tu saisis sa main. Tes pas se veulent maintenant pressés. Tu es à la limite de courir. Au bout de quelques minutes, vous arrivez à destination. L’effort n’a pas d’effet sur ton corps. Tu ne ressens aucun essoufflement. Captivée par la vision, tes billes s’arrondissent. Le voilier est en train d’amarrer. Il n’est qu’à quelques mètres de toi. Encore un peu et tu vas pouvoir le toucher. Et déterminer s’il est belle et bien réel ou l’objet de ton imagination.

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[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] & renee goddard

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Sa remarque, aussi banale soit-elle, après tout, l’océan étant là, il est normal qu’une quantité conséquente d’embarcations évolue à sa surface, entraine un intérêt tout aussi conséquent chez sa jeune amie. Renee retient un rire quand l’idée de voir Nina partir à l’assaut des vagues pour rejoindre le voilier lui traverse l’esprit. Après tout, elle a déjà de l’eau jusqu’aux genoux, le plus gros est fait, après... Non, elle est quand même assez vêtue et possède une dose de bon sang qui l’éloigne du gamin qui fonce tête baissée vers une lumière hypnotique. Fort heureusement, elle revient sur la plage rejoindre Renee. Plus de galop sur l’écume océanique mais une demande claire. L’avocate hoche de la tête.

« Pourquoi pas. »

Réponse dont elle n’est pas certaine de l’utilité. Nina entrelace ses doigts avec les siens. Son énergie, sa jeunesse, sa détermination poussent, tirent l’avocate vers la destination. De toute façon, elle n’a pas envie de freiner cet élan. Voir Nina avec un tel entrain la réjouit complètement. Une fois rejoint le voilier et les deux hommes qui achèvent leur va-et-vient pour probablement quitter la plage, Renee s’arrête laissant Nina finir d’approcher. Le spectacle du voilier qui se balance au gré des flots à toute l’attention de la jeune fille. L’ainée se focalise davantage sur les hommes. Elle hésite une seconde, mais voyant que le regard de Nina ne décroche pas du bateau, elle ose aborder son propriétaire supposé.

« Bonjour. Vous avez là un magnifique voilier. Est-ce que j’ai le droit de m’étonner de le voir amarré là ? Vous ne craignez pas pour lui quand la marée va descendre ? »

Les ports de plaisance sont aménagés pour éviter le désagrément de voir la quille toucher le font et que l’embarcation ne se trouve couché sur le flanc lors de la basse mer. Pour une barque ou un bateau à moteur, ce n’est pas une catastrophe, pour un voilier, elle n’en mettrait pas sa main au feu. L’un des plaisanciers se met à rire et approche.

« Merci. Il est en effet magnifique et file sur l’eau d’une manière exceptionnelle. Je ne compte pas rester trop longtemps. Le temps que le chauffeur de mon passager arrive et que nous chargions ses affaires. »

Renee jette un coup d’oeil vers l’autre personne qui a tourné le dos à l’océan et scrute le côté urbain. Sans le révéler, elle s’étonne cependant que l’arrêt se fasse ici, après tout le port n’est pas très loin, à vol d’oiseau tout au moins. Peut-être une urgence qu’elle ne parvient pas à imaginer.

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Le voilier est à portée de tes doigts. Encore un peu et tu vas pouvoir effleurer sa coque. Il est si proche et pourtant encore si loin. Les secondes qui te séparent de lui te semblent être une éternité. Ton ami aquatique joue avec tes nerfs en plus. Au gré de ses vagues, il s’amuse à l’éloigner quand tes pulpes s’apprêtent à toucher ta cible. Au final, il finit par arrêter de te torturer et le laisse s’amarrer. Tes fins doigts se posent sur l’enveloppe métallique. Malgré sa rugosité, une décharge doucereuse se crée dans ton être. Il est bien réel. Encore pure et innocente, tu ressens ce que tu nommes un orgasme. Ton corps se met à trembler de bonheur. Ton cœur s’accélère. Tes yeux écarquillés ne peuvent quitter ton partenaire naval. En l’instant, plus rien n’existe hormis cette embarcation. Tu t’es enfermée dans ta bulle en sa compagnie. Les seuls sons qui y pénètrent sont ceux offerts par l’océan. Tu ne distingues en rien l’échange entre Renée et un plaisancier. Pour dire la vérité, tu en as même oublié être avec l’avocate. Tu n’es plus vraiment toi. Si ton corps est présent à ses côtés, ton esprit l’a quitté et se balade sur le pont. Un large sourire orne tes lèvres. Un sourire de bonheur. Tu n’as pas le souvenir d’en avoir affiché un aussi large. Du bout de tes doigts, tu passes à ta paume. Une nouvelle jouissance s’empare de toi. Tu te balances au rythme de sa danse. Ta main collée n’a pas envie de rompre le contact. Cela va être compliqué lors de ton départ. Tu risques d’être déchirée, tel un enfant dont la mère abandonne la main le premier jour de l’école. A ton âge, tu penses ne pas pleurer. Après, ce n’est pas certain, il est douloureux  de voir son rêve s’éloigner. Hypnotisée, tu ne remarques pas que l’interlocuteur de la brune te fixe. Il parait comprendre ton émerveillement. D’un côté, il est facile à déceler. Tu es telle une groupie qui ferait face à son idole. Tes mirettes n’ont jamais autant brillées. Sauf peut-être devant Kyra mais ceci est une histoire ancienne. Il se déplace jusqu’à venir te faire face. Sa silhouette projette une ombre sur ton visage. Tu lèves ta tête et le fusille du regard pour t’avoir sorti de ton songe. « Il a l’air de te plaire ce voilier petite. Tu veux monter à bord ? » Ton cerveau bouillonne à son annonce. Ton palpitant pulsant à fond hurle un oui. Mais ta crainte des hommes t’empêche de formuler ce mot. Tu détournes tes pupilles vers Renée. En meilleure amie qu’elle est, elle va comprendre ce qu’elles lui disent. Elles l’appellent à l’aide.

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Une voile sous le soleil

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] & renee goddard

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Le déserteur accapare, un moment, l’attention de l’avocate. Ce besoin de savoir pourquoi ! Comprendre les rouages qui ont amené à cette situation insolite. Creuser l’apparence pour révéler un acte malsain ou illégal. Il part. Elle pense “il fuit”. Elle tente de se raisonner, pourquoi voir le mal partout ? La journée est belle et elle est en compagnie de Nina. D’ailleurs Nina... Sa jeune amie a sa propre préoccupation. Le voilier. Comme tout à l’heure, il est le seul sujet qu’elle regarde. Renee n’est pas la seule à avoir remarqué cette quasi obsession. Le propriétaire du bateau s’approche d’ailleurs pour s’en enquérir et ajouter une proposition inattendue. Il s’adresse à la jeune femme, mais celle-ci ne répond pas. Son regard appelle à l’aide. Renee sourit. Elle connait bien ce moment où sa présence prend un sens de bouée salvatrice. Si ce sourire pouvait suffire à lui faire desserrer les dents, lui faire prendre confiance pour exprimer son désir profond, ce serait parfait. Renee n’est pas certaine que cette instant arrive, tout au moins dans un laps de temps qui ne lasse pas l’homme.

« Je crois qu’elle est trop intimidée pour répondre. »

Elle a un petit rire, non pour se moquer, mais pour dédramatiser la situation. A elle donc de donner la réponse qui conviendra à Nina.

« Je ne pense pas me tromper pour dire que la réponse est positive. »

La politesse lui fait ajouter une précision.

« J’espère que cela ne vous dérange pas. Nous ne voudrions pas abuser de votre temps. »

Il secoue la tête.

« Si je propose, c’est que cela me fait plaisir. J’aime partager ma passion. »

Une chance que ce voilier se soit ancré là pour débarquer son passager. Les méandres des événements qui conduisent les gens là où ils se trouvent l’étonnera toujours. Une simple ballade peut se transformer en aventure. Elle se tourne vers son amie.

« On ne refuse pas une telle offre, n’est-ce pas ? »

Un petit clin d’oeil pour marquer leur complicité.

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Dans ces moments-là, tu comprends l’importance de possèder un.e meilleur.e ami.e. Tu aurais été ici en solitaire, tu aurais répondu ce même silence à cet homme. Il l’aurait probablement interprété comme un refus de sa proposition. Et tu aurais raté une occasion de concrétiser une partie de ton rêve. Jamais tu n’es montée sur un voilier. Au mieux, tu n’as fait qu’effleurer une coque de tes fins doigts. C’est à se demander comment t’es venue cette obsession. Personne n’a le pied marin dans ta famille. Cela doit provenir de l’illusion que te procure ce bateau. Au loin, navigant sur les flots, tu as l’impression qu’il vole. Ce sentiment de liberté te plait. Il t’anime. Il est celui capable de te libérer de ta prison interne. Enfin, sous réserve que tu te débarrasses de tes démons auparavant. Tu as besoin de liberté pour cela. Drôle de cercle vicieux. Mais tu n’es pas ici pour improviser une séance avec ton psy. Renée a enttendu ton appel muet. Tu vas pouvoir vivre la meilleure thérapie du monde. Tes lèvres grimpent jusqu’à tes oreilles. La bouche fermée, aucun mot ne vient confirmer ses paroles. Nul doute que l’avocate captera tes remerciements. Elle te connait bien depuis le temps. Elle ne formalise pas sur ton comportement. Elle sait qu’il ne provient pas d’un manque d’éducation. Tu connais et maîtrise les règles de politesse. Tu te contentes d’hocher la tête de haut en bas et de lui rendre son clin d’œil. Vous n’avez pas besoin de plus. La simplicité est une des caractéristiques de votre relation. Ta main abandonne le métal de l’enveloppe. Tu la poses dans la main tendue par le propriétaire du joyau. Il t’aide à te hisser sur le ponton. Une fois dessus, tu ne profites pas encore des lieux. Tu te tournes vers la brune. Tu te refuses de la laisser en bas. A son tour, elle monte. Désormais, tu admires le trésor. La valse océanique vous fait légèrement tanguer. Tu avances vers le mât. Tu caresses la toile qui le fait avancer. Sans elle, il est immobile. Une rafale souffle. Tes cheveux virevoltent et la voile se gonfle comme s’il voulait s’évader. Vrai qu’il est doit être malheureux amarré. Si tu savais le faire, tu le libérerais. Tu le laisserais voguer au gré des choix de la nature.

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Une voile sous le soleil

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L’offre est acceptée et Renee n’a pas besoin d’effusions de gratitudes, cris de joie ou embrassades pour savoir qu’elle a fait la réponse parfaite. Le clin d’oeil en réponse au sien, les sourires et surtout le regard de Nina qui dévore le voilier accompagné de gestes pondérés qui vont tous dans sa direction. Le plaisancier tend la main à la jeune fille pour la mener jusqu’à destination. Puis c’est au tour de Renee qui a une second d’hésitation. Nina n’a jamais mis le pied sur un navire, mais l’avocate non plus. Ponctuellement sur des embarcations dans les marais calmes de la Louisiane, mais l’océan, jamais. Elle appréhende le mal de mer. Elle n’envisage pas d’abandonner Nina avec l’homme, alors, elle prend une grande respiration et se lance dans l’aventure.

« Est-ce qu’il est déplacé de demander un gilet de sauvetage ? »

Elle se contente de cette question, même si ajouter une demande d’information sur les problèmes de tangage lui titille l’esprit. Non qu’elle veuille faire abstraction de son inquiétude par orgueil, mais dans le désir de ne pas troubler le bonheur de son amie. L’homme sourit. Il hoche de la tête.

« Ne vous inquiétez pas, cela n’a rien de stupide, c’est même une règle de sécurité basique. »

Il joint le geste à la parole. Elle n’attend pas plus pour l’enfiler même si esthétiquement, on est loin du chic mondain. Pas grave, elle ne donne pas vraiment dans cela. Les contraintes vestimentaires qu’elle se fixe sont liées à son travail. Les clients s’attendent à voir un avocat propre comme un sou neuf, certainement pas débraillé.

« Et si vous avez besoin de quoique ce soit d’autre, n'hésitez pas, je suis là pour cela. »

Elle apprécie le professionnalisme qu’il déploie. Il rejoint le sien en tant qu’avocate et cela lui plait. Il les abandonne pour mettre en fonction le voilier, pour larguer les amarres, pour s’installer à la barre. Les premiers mètres se font moteur allumé pour prendre de la distance avec la côte. Il a senti l’intérêt que Nina porte à l’événement, il lui explique moult détails sur la navigation. Peut-être un peu trop. Renee soupçonne Nina d’être plus sensible aux sensations qu’à la technique.

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Renée est la tête pensante de vôtre duo. Ce n’est pas toi qui aurais pensé au gilet de sauvetage. Tu ne vois pas de danger à être sur ce voilier, entourée de cette étendue bleutée. Tu chéris tant Dame Nature que tu ne peux l’imaginer te faire du mal. Par contre, tu ne peux en dire autant du plaisancier. Malgré son offre amicale, il n’en reste pas moins un être humain. Un homme qui plus est. Rien ne te dit qu’il n’a pas dans l’optique de vous abandonner en pleine mer. Tu as vraiment des pensées étranges. Il te faut arrêter d’être aussi méfiante. En tous cas, tu saisis la protection tendue et l’attache fermement. Tu vérifies plusieurs fois la solidité des liens. Tu es peut-être un peu trop serrée dedans mais au moins tu es en sécurité. Pour t’en assurer, les mains de ta main droite s’enroulent autour de l’imposant mât. Tu regardes ton amie. Un léger rire s’échappe de tes lèvres en observant son accoutrement. Il est bien loin de la classe de sa robe professionnelle ou encore de ses tenues civiles. « Tu devrais aller plaider ainsi vêtue. » Tu la taquines gentiment. Renée est la seule personne avec qui tu te permets l’humour. Elle est la seule personne, exception faite de ta mère, avec qui tu te sens vivante. En sa compagnie, tu n’as pas peur. Tu es toi-même. Une Nina heureuse teintée de drôlerie. Une face cachée aux yeux des autres. D’ailleurs, ton visage lumineux se referme une fois le retour du propriétaire dans tes environs. Après un départ sur les flots, il a trouvé utile de venir te parler. Malgré sa bonne volonté, tu ne peux pas dire que sa présence t’enchante. Sa proximité te met mal à l’aise. Sa voix perturbe ton écoute de l’océan. Tu hoches la tête temps en temps, feintant apprécier ses paroles. En réalité, tu n’as qu’une envie : qu’il s’arrête de parler et s’en aille. Bloquée par ton introversion, tu n’oses pas le formuler. Par chance, il finit par t’abandonner et filer en cabine. Tu en profites pour savourer l’instant. Tu clos tes yeux. La douce brise caresse tes joues. Tu as l’impression de voler. Pas uniquement avec ton esprit cette fois-ci. Ton corps flotte presque dans l’air. Tu en es harmonie avec la nature. Jamais tu ne t’es sentie aussi libre. Les minutes défilent. Un sourire orne ta bouille. Tu rouvres tes paupières. Tu admires la danse des vagues venue saluer l’embarcation. D’un pivotement de cou, tu aperçois la brune. Elle ne semble pas partager ton engouement pour cette balade navale. Tu quittes ta position. Doucement tu te rapproches d’elle. Telle une mère avec son enfant, tu attrapes sa main. « Comment tu te sens ? T’es-tu déjà sentie aussi libre ? »

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Une voile sous le soleil

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Sécurité avant tout. Il n'est pas question pour Renee de tenter le diable. Comment pourrait-elle annoncer à la mère de la jeune femme un accident tragique parce que l'avocate se serait montrée laxiste. Impensable. Aussi se réjouit-elle de voir Nina enfiler un gilet de sauvetage. Certes, c'est penser au pire, mais il vaut mieux un accoutrement qui en prémunisse. Son amie ne manque pas de plaisanter à ce sujet. Elle rit de bon coeur à l'image de la tenue aquatique au milieu d'un tribunal. 


« Oh, je ferais fureur, crois-moi. Parce qu'en pensant à certains de mes confrères, il m'arrive de les comparait à des pingouins ou autres bestioles. C'est une technique pour mieux affronter leur arrogance et leur dossier plus épais que le mien. Alors les déstabiliser en arrivant avec un gilet de sauvetage sur les épaules, me plairait bien. »

Le juge apprécierait beaucoup moins, elle en est sûre. Elle risquerait un outrage à magistrat. Même si tous les coups sont permis pour atteindre la réussite et un jugement favorable, ils restent parfaitement cadrés par la loi. Tout abus est inacceptable. Dans le cadre d'une tentative de meurtre par noyade dans l'océan lors d'une traversée, une démonstration de gilet pourrait être envisagé, mais Renee ne plaide pas pour ce type de dossier. Dans les cas de divorce, elle n'a pas eu ce genre de situation. Mais qui sait ! 

Compliqué de dire au plaisancier que sa présence proche de Nina peut la déranger. Il leur offre cette balade, c'est une aubaine incroyable. Renee retient un soupire, mais ne lâche pas l'homme du regard une seconde. Toujours à l'affût d'un égard, elle ne peut s'empêcher d'imaginer qu'il pourrait demander une contrepartie à ce petit voyage, ou pire, se l'octroyer directement. Il n'a aucun geste déplacé ou prêtant à confusion jusqu'à présent. Si par hasard cela devait se profiler, elle se mettrait entre les deux sans hésitation. 
Il s'éclipse et laisse Nina profiter du vent, de l'océan, de l'immensité.

À son tour, Renee cherche la ligne d'horizon. Et les goélands criards ! Non, ça va. Dans la logique, ils suivent plutôt les bateaux de pêche volant un poisson au passage. Ils ne sont pas au point des pigeons qui approchent dès que quelqu'un s'assoit sur un banc dans un parc, ou des canards quand quelqu'un s'immobilise devant un étang. Assis sous un arbre dans un jardin public, arbre peuplé de moineaux, de corbeaux, de pies qui se disputent le centimètre carré de branche. Et bien sûr, la crotte du piaf sur la personne tranquille en train de mordre dans son sandwich. Les mouettes, elle les imagine pareilles, posées en haut du mât et se délestant. La main de Nina dans la sienne la sort de cette angoisse qui remonte à sa petite enfance.


« Ça va ! Regarde, je n'ai pas vomi mes tripes et mes boyaux sur le pont.
 »

Elle plaisante pour faire sourire Nina et la rassurer en même temps sur son état. 


« Libre, je ne suis pas certaine que j'utiliserais ce mot. Liberté relative, impossible de descendre si on en a envie, il faut attendre arrêt complet dans un port. Comme beaucoup de moyens de transport.
 »

Non, on ne descend pas d'un train en marche ni d'un avion en vol. Enfin sans le prévoir à l'avance. 


« Et toi ? Tu profites de l'instant ? »

 
Cela se voit, mais elle a envie de l'entendre de la bouche de son amie. 

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