One day, everything is falling down [Austay]

Elle m’en demande beaucoup. Je sais qu’elle a besoin de réponses mais je ne suis pas en mesure de lui apporter ces réponses là pour le moment. Ça mettra peut-être un peu de temps, je n’ai pas envie de me mettre la pression j’ai déjà beaucoup de choses à gérer. Mais je comprends qu’elle ait besoin de savoir où se positionner. Tout est encore si flou. J’essaie de lui dire ce que je ressens, même si c’est un peu brouillon. « Jusqu’à ce que tu changes d’avis… » ponctue-t-elle avec un peu d’amertume dans ma voix. Je serre les mâchoires, parce que je m’en veux de lui faire vivre ça, et en même temps, je ne sais pas comment me comporter, quoi dire, quoi faire, je suis juste totalement perdue. Mon corps comprend que j’ai besoin d’une pause et d’un moment à l’autre, il déconnecte. Mon cerveau se met en off un instant, déconnectant toutes les connexions, pendant que mon corps s’étend sur le sol. J’ignore combien de temps j’ai été inconsciente, mais quand j’arrive à nouveau à réouvrir les yeux, je suis toujours à la maison, Austin à mes côtés. « Ma puce, ça va ? Tu veux que j’appelle un médecin ? » Je tente de me redresser, juste un peu, passant ma main sur mon front avant de secouer la tête. « Non, je crois pas. Je suis juste fatiguée. » Je plonge mon regard dans celui de la brune, cherchant sans doute à lui demander sans un mot si on peut reprendre cette conversation à un autre moment. Je suis épuisée, j’ai besoin de dormir.
Elle m’aide à regagner le lit et je sombre très vite dans les bras de Morphée, épuisée par ce trop plein d’émotions. Pendant la nuit, j’entends Lou pleurer, et je laisse Austin s’en occuper, puisqu’elle le propose. J’en profite. Si bien que quand j’ouvre les yeux, il est déjà huit heures passées. Ça ne m’est pas arrivé depuis si longtemps, j’ai presque du mal à y croire. Austin n’est plus auprès de moi, et je n’entends aucun bruit. Je me lève et rejoins la chambre de ma fille où je trouve Austin endormie dans le fauteuil à bascule, Lou dormant paisiblement dans ses bras. Un sourire tendre étire mes lèvres et je reste là à les regarder un instant, avant de me rapprocher. Une main tendre glisse sur la joue d’Austin, et elle se réveille. « Profite qu’elle dort pour revenir te coucher. » Je prends la petite fille, dépose un baiser sur son front et la repose dans son berceau avant de tendre la main à la brunette, entrelaçant mes doigts avec les siens. Je l’attire avec moi jusque dans la chambre, je ne sais pas si elle est fatiguée, mais j’ai juste envie de me lover dans ses bras, sans penser à rien.

Ça n’est clairement pas le moment de lui demander ce genre de choses, je le sais. Mais j’ai besoin d’être fixée, je ne supporte plus de ne pas dormir, de chercher mon sommeil, d’être tiraillée par ces questions qui me bouffent le ventre et l’esprit. Mais Shay n’est pas en mesure de me donner ce que je veux, à savoir, des réponses. Le reste, je n’en sais strictement rien. Elle est assez secrète au final et rien ne se lit vraiment dans son comportement, pourtant très ambigüe. Alors je tente en attendant de faire au mieux, pour la petite, pour nous, pour tout ça. Sans grand succès je crois. En tout cas pas comme je le voudrais et ça me pose un souci de conscience tout ça.
Elle s’effondre. Epuisée de fatigue et du choc, sans doute. J’ai beaucoup de sang-froid, il m’en faut dans mon métier, mais ça ne m’empêche pas de m’inquiéter et d’accuser le coup d’une grosse montée d’adrénaline. « Non, je crois pas. Je suis juste fatiguée. » Je l’encourage à aller se coucher, et la suis. Je ne parviens pas à trouver le sommeil, je tourne en rond, sans parvenir à ferme l’œil, ça ne me surprend pas vraiment au final. Alors ce qui se passe, comme souvent, c’est que je prends les devants pour la petite. Lou pleure faiblement, mais ça suffit à réveiller sa mère. Surtout vu son instinct… Alors j’anticipe sur sa crise et me lève quand je commence à l’entendre s’agiter. Merci le babyphone. « Alors ma chérie, qu’est-ce que tu as ? » Une couche sale, ça n’est pas bien grave. Je la change avant de la reposer, et là… impossible. Elle refuse que je ne la lâche. « Toi aussi tu as des tas de choses en tête ? » Je lui parle beaucoup. Je la prends d’ailleurs sur moi, dans la chaise près de son lit, et fini par la bercer pour qu’elle trouve le sommeil. Finalement, nous finissons par le trouver ensemble…

C’est Shay qui me réveille au petit matin, une main tendre sur ma joue. Et la petite qui dort à poings fermés sur moi, entre mes bras. « Profite qu’elle dort pour revenir te coucher. » Je ne rechigne pas. Shay couche sa fille, qui cette fois-ci ne se réveille pas. Et m’entraine dans la chambre. Je suis dans un demi-sommeil, mais je ne tarde pas à en sortir totalement. Elle se recouche, sans doute pour que j’en fasse autant. Elle, a bien dormi. Et elle en avait grandement besoin. Je m’allonge, et elle vient d’elle-même s’installer entre mes bras. Est-ce une façon de me dire qu’elle me veut aussi à cette place ? Ou bien qu’elle ne sait toujours pas ? Ou encore qu’elle aimerait que je prenne moi aussi des décisions. Je n’ai aucune idée de tout ça. Je glisse une main dans ses cheveux blonds, tandis que sa tête repose sur ma poitrine. Elle sait que je ne trouverais plus le sommeil, c’est fini. En même temps je n’ai jamais eu besoin de beaucoup en avoir. C’est pratique quand on a des planques… « Il va falloir que je retrouve du boulot… » Pas que ça m’angoisse, pas que ça me pose problème, mais il faut vraiment que je me remette à gagner ma vie. Et bouger, sortir, faire quelque-chose, me rendre utile. Je ne crois pas que la vie de mère au foyer soit faite pour moi. J’ai trop besoin de bouger, d’action, de problèmes à résoudre. Toute ma vie n’a été qu’un problème insoluble, alors le calme…

J’adore les regarder toutes les deux, je sais qu’elles s’adorent, ça se voit, ça se sent. C’est une évidence, et je ne pouvais pas rêver mieux en contrepartie pour la perte de mon époux, du père de ma fille. Je ne vois pas Austin comme un ‘lot de consolation’, ça n’a jamais été le cas. Mais j’ai quand même besoin de temps, même si je sais que mes sentiments sont bel et bien là, et ils sont vrais. Je dois juste arriver à gérer ma culpabilité. Et c’est difficile. Une fois Lou recouchée, je prends la main d’Austin pour aller nous aussi nous remettre au lit, et je me love dans ses bras. Cette nuit m’a fait du bien même si elle était agitée, je sais que je vais devoir faire plus attention à mon sommeil si je ne veux pas refaire un malaise comme hier soir. Prendre soin de moi. Et j’ai besoin d’elle aussi, pour ça. Ses caresses dans mes cheveux me bercent, et je dessine des formes aléatoires du bout de mon doigt, sur son épaule dénudée par le débardeur qu’elle porte. Je remonte parfois un peu dans son cou et redescends. « Il va falloir que je retrouve du boulot… » J’arrête mon manège un instant, j’ai bien compris qu’elle ne dormirait pas, mais j’avais envie d’être juste au calme avec elle. Pour son boulot, je ne connais pas la police sur le bout des doigts, mais elle m’a expliqué qu’elle ne pouvait pas comme ça faire une demande de mutation pour revenir ici, ce n’est pas si facile. « Moi j’te verrai bien détective privé. » Je me redresse un peu pour la regarder, très sérieusement. « C’est pas des conneries !! Y’a de l’action, des enquêtes, pas le temps de t’ennuyer, puis il parait que ça gagne bien. J’ai un ami d’enfance qui fait ça. Faudrait que je te le présente. » Pourquoi pas après tout. C’est une des branches qui peut ressembler le plus à ce qu’elle faisait avant. « Et puis ça te permettrait de bosser avec la police, en tant que consultante ? J’en sais rien, j’y connais rien. J’ai pas lu assez de polars. » Je me mets à rire un peu, sentant un poids se libérer de ma poitrine. Elle va rester ici, avec moi. C’est ce que je veux. « Il faudrait qu’on aille chercher le reste de tes affaires à Chicago. Je dois faire le tri des vêtements de Ian dans les placards, je pense tout donner à une association. » Mes pensées se bouscules, je ne sais pas si c’est une bonne chose de penser à ça maintenant, mais en même temps, je ne peux pas m’interdire de penser à lui. Je replonge mon regard dans celui de la brune, avec intensité. « Tu es sûre que tu veux rester ? J’veux dire, pour toi. Sans parler de moi. Est-ce que tu as envie de rester ? » De ma main, je caresse doucement sa joue, tendrement même. J’ai envie de vivre quelque chose avec elle, pleinement. Il me faut juste un peu de temps.

Le repos de l’esprit, je ne le connais pas vraiment. Tout a toujours tourné dans ma tête, mais le truc, c’est que j’ai fini par m’en accommoder. C’est devenu ma façon de fonctionner. Le soir, si je ne tombe pas comme une masse, je ne sais pas me coucher. Il faut que je tombe d’épuisement. Et si ça inquiétait Shay au départ, elle a fini par se rendre compte que de toute façon, j’étais torturée. Mais je tente de le cacher assez longtemps pour qu’elle ne s’inquiète pas. Je ne dirais pas qu’elle a l’esprit totalement tranquille, en revanche, elle est on ne peut compréhensive sur certaines choses. Il m’arrivait d’être complètement absorbée par un dossier quand la petite dormait, et jamais, elle ne m’a reproché quelconque concentration. Elle me sait passionnée, en même temps, elle a vécu et s’est mariée avec un flic… elle connait le principe. Ce genre de trucs qui peut nous bouffer la tête, la vie, nos nuits, nous jours et tous nos moments de libres.
Perdue dans mes pensées, mais Shay tout près de moi, et partageant une intimité dont j’ai finalement foutrement besoin, elle crie Euréka. « Moi j’te verrai bien détective privé. » Je lève un sourcil, incrédule. Qu’est-ce qu’elle est encore en train de m’inventer. « C’est pas des conneries !! Y’a de l’action, des enquêtes, pas le temps de t’ennuyer, puis il parait que ça gagne bien. J’ai un ami d’enfance qui fait ça. Faudrait que je te le présente. » « Me mettre dans le privé voudrait dire renoncer à toute vie en dehors. Je sais pas si tu te rends compte de ce que ça demande, en terme de temps, et de disponibilité… Tu serais prête à accepter ça ? » Parce que ça voudrait clairement dire que je passerais mon temps dehors, dans une bagnole à planquer, que je serais totalement indisponible. Par contre, j’ai peut-être une autre idée. « Et puis ça te permettrait de bosser avec la police, en tant que consultante ? J’en sais rien, j’y connais rien. J’ai pas lu assez de polars. » « Non ma chérie, ça c’est dans les films. Les flics et les privés… Ils s’évitent. Je les aime pas trop, et en échange, ils ne nous aiment pas trop non plus. » Lui souriant tendrement. Il y a toujours un rapport de forces entre tout ça. Parce que les infos, les flics doivent y tomber dessus à l’aide d’un protocole assez stricte. Tandis que les privés… peuvent se permettre certaines largesses, et ma direction m’a plusieurs fois fait remarquer que j’étais du côté des flics, pas des voyous ! « Je sais pas si je fais bien de t’en parler. Mais j’avais l’habitude dans le quartier, quand j’étais gamine, d’organiser des recherches, pour les gamins qui disparaissaient, parfois des prostituées, même une fois le père d’une de mes copines. J’étais plutôt douée pour ça. » C’est une idée dans l’indépendance du métier…
Je lui vole un baiser pour capturer son rire entre mes lèvres. « Il faudrait qu’on aille chercher le reste de tes affaires à Chicago. Je dois faire le tri des vêtements de Ian dans les placards, je pense tout donner à une association. » « Je vais m’occuper de ça toute seule ma puce, je veux pas que tu te rajoutes un stress de plus. Quant aux affaires de Ian, je peux le faire pour toi si tu veux ? » Je ne dis pas que ça va être facile et elle peut le voir à mon regard. J’ai aussi perdu mon meilleur ami, mon partenaire, et ça, c’est presque insurmontable. Quand on a un partenaire, on lui confie sa vie. Il a donné la sienne, bêtement, même pas en service… C’est le plus injuste dans tout ça. « Tu es sûre que tu veux rester ? J’veux dire, pour toi. Sans parler de moi. Est-ce que tu as envie de rester ? » J’aime la tendresse que j’entends dans sa voix, que je lis dans son regard, dans ses geste. Ça me fait du bien, elle me fait du bien. Je glisse mes mains le long de ses hanches. « Je veux vivre avec toi Shay. Avec Lou et toi. Et si c’est ici que tu te sens bien, alors ce sera ici. » Et puis si je peux m’éloigner de mes origines… Chicago, au final, c’était juste un retour en enfer. Je ne lui ai jamais vraiment parlé de ce que ça a pu me faire d’y retourner. C’était difficile, douloureux, mais j’excellais, parce que ces petits cons du quartier, et tous les travers qui y sont rattachés, je les connais par cœur. On ne quitte jamais vraiment ses racines.

Cette discussion est venue naturellement, alors que je suis lovée dans ses bras. Je l’imagine détective privé, mais j’avais pas pensé au fait qu’elle serait moins disponible. Immédiatement je grimace. Non, dans ce cas là autant la laisser repartir à Chicago, ce n’est pas le but. Visiblement, j’ai pas tout compris comment travaillent les détectives privé, mais tant que ça la fait rire… « Je sais pas si je fais bien de t’en parler. Mais j’avais l’habitude dans le quartier, quand j’étais gamine, d’organiser des recherches, pour les gamins qui disparaissaient, parfois des prostituées, même une fois le père d’une de mes copines. J’étais plutôt douée pour ça. » Cette fois, c’est moi qui arque un sourcil. « Tu vois… je suis sûre que tu vas trouver ta voie. » Même si je sais que sa voie, c’était la police, et ça me serre le coeur d’imaginer qu’elle doit abandonner pour moi. Mais bon, je sais que si elle devait choisir son métier par choix, elle l’aurait fait. Je ne dois pas culpabiliser. J’essaie. « Je vais m’occuper de ça toute seule ma puce, je veux pas que tu te rajoutes un stress de plus. Quant aux affaires de Ian, je peux le faire pour toi si tu veux ? » Je soupire un peu, parce que rien que l’idée de devoir remettre le nez dans ses affaires, j’en ai la gorge nouée. « On le fera ensemble, si tu veux bien. » Parce que j’ai besoin qu’elle m’apporte la force de laquelle je manque cruellement ces derniers temps. Ou en tout cas, c’est la sensation que j’en ai. Après un court silence, je lui demande si elle veut vraiment rester. Pas rester pour moi, rester pour elle. J’ai besoin de savoir. « Je veux vivre avec toi Shay. Avec Lou et toi. Et si c’est ici que tu te sens bien, alors ce sera ici. » Je ne sais pas si je veux rester pour toujours dans cette maison, peut-être pas, mais pour le moment je suis incapable de la quitter. Et c’est pareil pour Los Angeles, j’ai construit ma vie ici, mes patients sont ici… Même si je pourrait tout à fait tout redémarrer ailleurs, je n’en ressens pas l’envie. « Je suis contente, que tu veuilles rester. Je sais pas comment j’aurai fait sans toi… » J’enfouis tendrement mon visage dans son cou, caressant sa peau du bout de mon nez. Mon bras entourant son corps, je viens même remonter ma jambe sur elle, pour être au plus près d’elle. « J’ai envie de changer les meubles de place. Faire un peu de rangement, bouger un peu les choses… » Je crois que c’est bon signe. « Peut-être même faire de la peinture, je sais pas… » Je ris un peu, je crois que le fait qu’elle ait accepté de rester m’aide à me projeter, à assumer davantage ce qu’elle est pour moi, ce que j’ai envie qu’elle devienne. « J’ai besoin d’un peu de temps, mais je suis sûre d’une chose. C’est que j’ai envie de t’avoir près de moi. » Je la regarde avec intensité, prête à l’embrasser, mais le baby phone se fait entendre. Comme sauvée par le gong.

Nous voilà là, à refaire le monde, enlacée comme si cette intimité partagée était une habitude de plusieurs années. En fait, je crois que je sais pourquoi ça vient si naturellement, parce que j’ai le sentiment d’avoir trouvé ma place. Auprès d’elle, d’elles, même. Lou aussi, ça devient naturel de m’en occuper, parce que je l’aime profondément, parce que j’y suis attentive et que je sais même écouter ses pleurs comme il le faut. Comme le fait parfois Shay. Je sais quand elle a faim, quand elle a mal, quand elle a besoin de quelque-chose ou juste d’un câlin. Ça se fait doucement, mais ça s’acquiert tout ça.
« On le fera ensemble, si tu veux bien. » J’embrasse sa tête, tendrement, et glisse une main dans son cou, pour dégager quelques mèches et me faciliter le travail pour y déposer un baiser à mon tour. J’aime la proximité qui nous lie, et clairement, je n’en n’aurais pas imaginé d’autre. Maintenant que les choses ont explosées, elles peuvent se poser et prendre leur place. Comme quoi… Parfois Shay me reproche d’être un peu cash. Pas avec elle, mais dans ma façon d’être, tout simplement. Je dis qu’un bon choc permet de mieux repartir. « Je suis contente, que tu veuilles rester. Je sais pas comment j’aurai fait sans toi… » « Et je ne veux plus que tu gardes ça pour toi, quand tu as besoin de quelque-chose, tu dois me parler, d’accord ? C’est important, sinon, comment tu veux qu’on avance ? » Je l’embrasse des plus tendrement, j’aime la position qu’elle adopte, comme si ça avait débloqué tout un tas de trucs chez elle et qu’elle osait enfin vivre, enfin apprécier ma présence en tant que tel, sans trop culpabiliser. Ça n’était pas une mince affaire, mais nous y sommes parvenus. Comme quoi… « J’ai envie de changer les meubles de place. Faire un peu de rangement, bouger un peu les choses… Peut-être même faire de la peinture, je sais pas… » J’éclate de rire, d’un rire franc et sincère. « OK, tu veux jouer les bricoles girls quoi."
« J’ai besoin d’un peu de temps, mais je suis sûre d’une chose. C’est que j’ai envie de t’avoir près de moi. » Et littéralement je fond, comment voulez-vous qu’il en soit autrement ? Elle vient juste de poser les mots sur une situation qui me pèse depuis des semaines, presque des mois. Et c’est enfin fait. Comme ça, le plus naturellement du monde. Alors je saisi son visage et… Bébé se réveille. C’était presque le bon timing dis-donc ! Je lui vole tout de même un baiser plein de tendresse. « On arrive ! » Je gueule un peu fort, je reconnais. A côté de la douceur de Shay, ça fait contraste. « Je me permets ? » Je me permets un autre baiser, encore plus tendre, et remonte ma main le long de son dos, sous son t-shirt, en espérant que bébé patiente un peu ? C’est mal la connaître, mais qui ne tente rien n’a rien ? Il arrive parfois qu’elle se rendorme…

Je lui avoue enfin ce que je trainais lourd sur mon coeur. Je sais que j’ai mis du temps, mais j’avais besoin d’être sûre de moi, pour ne surtout pas la faire espérer quoi que ce soit. J’ai bien conscience que c’est ce que j’ai fait, mais contre ma volonté. J’ai essayé d’être la plus diplomate possible, mais l’idée qu’elle puisse retourner à Chigago, qu’elle s’en aille et nous laisse Lou et moi m’est apparue comme insurmontable. Ce revirement de situation m’a permis de prendre conscience de ce que je voulais vraiment. Elle. Même si c’est dur, même si je culpabilise encore, et que je suis certaine de ne pas être prête d’assumer ça au grand jour pour le moment. Je sais au moins qu’à la maison, ici, chez moi, je veux que ça devienne chez nous. « Et je ne veux plus que tu gardes ça pour toi, quand tu as besoin de quelque-chose, tu dois me parler, d’accord ? C’est important, sinon, comment tu veux qu’on avance ? » J’acquiesce très légèrement, à la manière d’un enfant qu’on réprimande. Mais je sais qu’elle le fait avec beaucoup de bienveillance et c’est ce que j’aime en elle.
Et puis sans crier gare, mon esprit s’envole, mes envies se font une nouvelle place, elles poussent les murs de mon cerveau pour y apposer leur marque, alors qu’elles avaient longtemps été rejetée au rang d’inutiles, ou de superflues. Austin me voit soudainement comme une ‘bricole girl’, mais elle ignore à quel point je peux être douée quand je suis motivée. Même quand il s’agit de bricolage. Un dernier aveu romantique, et j’approche de son visage en vue de me saisir de ses lèvres. Mais c’est sans compter la petite Lou qui a définitivement bien choisi son moment. Austin crie qu’on arrive, et ça me fait plus rire qu’autre chose - une fois le sursaut dissipé. « Je me permets ? » demande-t-elle en approchant. Je lui offre un doux sourire en guise de permission et la laisse quérir mes lèvres dans un baiser plus doux, plus appuyé. Ses gestes se précisent et je peux ressentir toute l’envie qui l’anime. Mais ce n’est vraiment pas le moment, ma fille a besoin de nous. « Elle a pas l’air de vouloir se rendormir… » On a déjà eu pas mal de répit, il ne faut pas trop en demander. Et je suis de ce genre de mère qui estime qu’une seule seconde passée loin de son bébé est aussi un moment passé à ne pas le voir grandir. Lou est un bébé miracle, et je sais qu’elle sera une petite fille et plus tard une femme forte. Je ferai en sorte qu’elle le soit.