i need to ask your permission (herrman-barnes family)

Je suis excitée comme une puce. Je sors tout juste des bureaux de la plus grande réalisatrice à succès de télé réalité ; Gabrielle. C'est la nouvelle partenaire professionnel de Lise. Elles se sont alliées pour la prochaine télé réalité Netflix qu'elles vont toutes les deux produire conjointement. Un projet qui sans grande surprise m'a tapé dans l’œil. C'est exactement ce dont j'ai besoin pour propulser ma popularité au sommet. Et bingo, mon profil l'intéresse. Je sais pas si Lise est au courant de ce rendez-vous que j'ai eu avec elle aujourd'hui, mais de toute évidence si j'ai Madame Sanchez dans la poche, ça ne sera pas un problème pour le reste. D'ailleurs elle n'a pas perdu de temps pour vouloir me faire signer un contrat. Deux semaines de tournage au mois d'août, pour une émission de dating à l'aveugle, ou presque. Voilà en gros pour résumer le contexte. De toute façon ça aurait pu être n'importe quel concept que j'aurais dit oui tout de suite. Je suis prête à tout pour gagner en popularité, et on le sait tous la télé réalité prend une place importance dans la vie des nouveaux influenceurs. A mon tour maintenant. Seule ombre au tableau ; j'ai besoin d'une autorisation parentale à faire signer étant donné que je n'ai pas encore vingt-et-un ans. Ça, c'est moins drôle. J'ai un peu peur que mes parents ne voient pas ce projet sous le même angle que moi. Quelque chose me dit que ça sera le cas, mais bon quoi qu'il en soit je ne vais pas vraiment leur laisser le choix. Ils ne pourront pas dire non à leur fille chérie n'est-ce-pas ? C'est mon art de la manipulation qui ressort un peu, mais là, c'est trop important pour moi. Ce projet me tient vraiment à coeur. Et puis je suis pas toute seule dans cette aventure. Il y a Lise quand même. Ça devrait pouvoir pencher dans la balance. Je rentre toute excitée à la maison familiale, m’attelle directement à préparer le dîner. Ma mère est de sortie pour l'instant, et je prends l'initiative de leur envoyer un message à tous les deux pour les prévenir qu'on mange ensemble ce soir, que j'ai besoin de leur parler. Je sais que ce genre de message va les alarmer direct et qu'ils commenceront sans doute à s'inquiéter de tout et n'importe quoi. Un moyen pour moi de commencer à faire passer doucement la pilule. Pour leur montrer qu'il peut y avoir pire qu'une histoire de télé réalité sans importance. Je compte sur eux pour se faire toute une montagne de films à ce sujet. J'ai préparé un risotto en cuisine, et me suis arrangée pour mettre le couvert sur la terrasse de la maison. Je pense n'avoir rien oublié, même si ça n'arrive pas souvent que je mette les petits plats dans les grands comme ça. Est-ce que ça se voit tant que ça que j'ai besoin de leur demander quelque chose ? Bon ok, peut-être un peu. Beaucoup même. Mais il faut savoir ce qu'on veut dans la vie. Il ne manque plus qu'eux maintenant. Et ça tombe bien j'entends déjà une voiture arriver dans l'allée.

‘Il faut qu’on parle’. Quelle que soit la situation ou la personne qui prononce ces mots, tu es d’avis que ce n’est jamais bon signe. Alors quand tu reçois un texto de cette trempe de la part de Lexa, la panique te gagne forcément et tu penses au pire. Ça pourrait être mille et une nouvelles positives, mais tu joues les Debbie Downer et tu sens la catastrophe arriver. Elle est malade. Enceinte. Elle a rechuté sévèrement. Quelque chose lui est arrivé. Bref. Tu ne sais pas, et ça te ronge. Tu es distraite toute la journée, peinant à donner l’attention qu’ils méritent à ces pauvres parents que tu rencontres pour la première fois. T’excusant un instant, tu t’isoles dans le couloir pour écrire un sms à ton ex-mari. Je suis à l’hôpital, je conduis ce soir ! Dis-moi quand tu as terminé, je t’attendrai. C’est ridicule d’arriver à deux voitures, surtout sachant que Mark n’affectionne pas particulièrement l’exercice de la conduite après une longue journée. Et puis, si ça peut t’éviter de cogiter seule et de ruminer en silence, c’est toujours ça de pris. Une grande respiration plus tard, tu retournes dans la chambre de la petite à la scoliose carabinée décidée à te dédier totalement à elle.

Le trajet en voiture te semble interminable. Vous discutez machinalement, d’une manière plutôt détachée. Parfois, tu es bien contente de le connaître depuis si longtemps, tu n’as pas à trop réfléchir, à te poser de questions. Tout coule, tout est naturel, et tant mieux. Tu connais par cœur la route qui relie l’hôpital – c’est presque ton lieu de travail après tout – à pacific palisades et ta maison. Tu te gares dans l’allée, au même endroit que tous les jours, entre l’auto de ta fille et la place qui était celle de Mark pendant des années et qui est aujourd’hui vide la majeure partie du temps. En pénétrant dans l’entrée, tu jettes un coup d’œil à travers le couloir et remarque la table dressée sur la terrasse. Ton cœur manque un battement. Ca ressemble plus à un repas de fête qu’à une catastrophe. Aussitôt, tu te retournes vers ton ex-mari. « Tu y es pour quelque chose ? » Tu te fais probablement une fausse joie, te remémorant des anniversaires de mariage aux allures similaires. Gommant rapidement le sourire sur tes lèvres, te remémorant tout de même que ce n’est pas une option que tu es supposée attendre ou espérer. Les papiers sont signés, les bagues rangées.

Arrivant dans la cuisine, tu déposes un baiser à l’arrière de la tête de Lexa et voles un morceau de légume dans la poêle, te brûlant le bout des doigts au passage. Tu t’abstiens de lui dire que vous devriez faire ça plus souvent si ça veut dire qu’elle doit cuisiner, préférant attendre que le couperet tombe pour réévaluer la situation. « Je vais avoir besoin d’un verre de vin, ou ça devrait aller ? » En langage Meg, ça veut dire : prépare un peu le terrain Lex, maman est à cran.

"Je suis à l’hôpital, je conduis ce soir ! Dis-moi quand tu as terminé, je t’attendrai." Il avait vu ce texto en arrivant à son casier pour se changer. Premièrement il avait cru à une erreur, s’imaginant que Meg avait envoyé ce message comme un vieux réflexe, puis il avait ouvert le second texto qu’il avait reçu durant sa longue journée de travail et avait compris. Son estomac c’était noué en voyant ces quelques mots et il c’était félicité de ne pas avoir lu ses messages plus tôt, sans quoi la journée aurait été vraiment difficile. Le temps de boutonner sa chemise blanche et d’enfilé sa veste de costume que déjà son cerveau bouillonnait. Est-ce que sa fille était enceinte ? allait se marier ? comptait leur présenter quelqu’un ? il s’imaginait tous les scénarios possibles alors qu’il quittait l’hôpital, rejoignant la voiture de Meg sur le parking, montant à bord silencieusement avant de, machinalement faire la conversation, comme si son cerveau lui criait de faire diversion pour ne pas imploser. Une fois la voiture garée dans l’allée de la maison, Mark suivit machinalement Meg, tentant de penser à autre chose qu’à ce qui l’attendait à l’intérieur. Mais une fois entré son regard se posait bien vite sur la table de la terrasse, un peu trop bien mise à son goût. Lexa avait visiblement préparé le terrain ce qui laissait entendre qu’elle avait bel un bien quelques choses d’important, voir déplaisant à annoncé à ses parents. « Tu y es pour quelque chose ? » lançait Meg, sortant Mark de ses pensés et le laissant encore plus troublé. « hein ? » Il avait du mal à suivre le fil des pensés de la blonde et c’est les sourcils légèrement froncés par la confusion qu’il lui emboutait le pas pour rejoindre la cuisine où Lexa s’afférait aux fourneaux. « Hm, ça sent bon. » commentait-il simplement, tentant encore d’apporter un peu de légèreté à la conversation.


HJ: sorry pour le petit poste et sorry pour l'attente

Ils sont là, tous les deux. Si certains de mes amis qui ont des parents divorcés trouveraient ça bizarre, pour moi, c'est normal. Plus rien ne me choque avec eux. Ils me rejoignent rapidement dans la cuisine et je commence un peu à stresser. J'ai peur qu'ils ne soient pas d'accord avec mon projet, et qu'ils foutent tout en l'air. Si je n'ai pas leur signature, je suis dans l'impasse. Et je me vois vraiment pas passer à côté de cette opportunité professionnelle. « Je vais avoir besoin d’un verre de vin, ou ça devrait aller ? » Je grimace un peu. « Je vais t'en servir un. » Ça peut être utile, sait-on jamais. « Hm, ça sent bon. » Je viens embrasser mon père, avant de les toiser tour à tour du regard. En espérant qu'ils soient dans un bon jour. Si ça peut faire pencher la balance de mon côté, ce n'est pas négligeable en soit. « Ça va ? Vous avez passé une bonne journée ? » Y'a que moi qui ai l'impression que les rôles sont inversés ? Ouais normalement c'est plutôt les parents qui demandent à leurs enfants s'ils ont passé une bonne journée. Mais j'ai le droit de me renseigner quand même non ? Bon ok, c'est peut-être pas tout à fait crédible. C'est aussi pour faire la conversation, détourner l'attention comme si de rien n'était. Enfin quoique... je ne devrais pas tourner autour du pot pendant quinze ans non plus. C'est pas mon genre de faire semblant. « Installez-vous sur la terrasse, je m'occupe de tout. » Je tente de la jouer le plus finement possible, même si mes intentions sont loin d'être dissimulées. Ils s’exécutent et je les rejoins en leur servant un verre de vin pour l'apéro. « J'ai besoin de vous parler de quelque chose. » Ça, je leur ai déjà dit dans mon texto. Mais maintenant il faut que j'aille au bout des choses. Je pose l'enveloppe de mon contrat non loin de moi sur la table pour l'avoir sous la main pour tout à l'heure. « Non, je ne suis pas enceinte si ça peut vous rassurer. » Je tente une petite blague pour détendre l'atmosphère mais je crois que ce n'est pas le moment de plaisanter. Ils se sont sans doute imaginé le pire, alors je ne vais pas les laisser attendre trop longtemps non plus avant de leur dire de quoi il s'agit. « Mais j'ai un nouveau projet professionnel en tête, et j'ai besoin de votre autorisation. » La joie de ne pas encore avoir vingt-et-un ans. En tout cas le fait que ça soit professionnel devrait les rassurer. Enfin un peu. Ce n'est pas en rapport avec ma santé et c'est déjà une bonne chose me concernant. Avec mes problèmes alimentaires ils ont déjà été confrontés à pas mal de choses... mais non, je n'ai pas rechuté. Pas encore. Même si je sais que mon choix de devenir influenceuse après le lycée ne leur a déjà pas trop plu. C'était la première pilule à leur faire avaler, mais maintenant c'est encore autre chose ; la télé réalité. Et la mauvaise réputation qui va avec.

« hein ? » Une enclume tombe au fond de ton estomac. La déception est double. Non seulement le dîner romantique qu’il t’avait suffi d’un quart de seconde pour imaginer de toutes pièces s’envole aussitôt que tu repères l’air confus sur le visage de Mark. Mais en plus, ça veut dire que ce n’était pas une excuse, que Lexa n’avait pas été entrainée par son père dans un plan secret, et qu’elle a donc bien quelque chose à vous dire. Ca n’annonce rien de positif, surtout quand elle confirme que tu auras besoin d’un verre pour faire passer la pilule. « Je vais t'en servir un. » Et son père qui semble flotter au-dessus de tout cela et qui trouve que ça sent bon. Est-il inconscient ? Ou est-ce plutôt toi le problème, à toujours tout exagérer ?

« Ça va ? Vous avez passé une bonne journée ? » Pour toute réponse tu lui adresses un regard exaspéré. Tu n’as aucune patience et refuses de faire comme si de rien n’était. Il faut croire que ta fille te connait bien puisqu’elle se rattrape aussitôt.« Installez-vous sur la terrasse, je m'occupe de tout. » Bien docile, tu obéis rapidement, pressée d’en découdre. Tu ne veux pas faire trainer les choses, préférant la méthode franche. Arrachez le pansement. Machinalement, tu prends place à ta place habituelle et frottes le manche de ton couteau du bout de l’index sans y prêter attention. Tu sens ton cœur battre la chamade contre ta cage thoracique, mais tu ne parviens pas à le calmer. Tu sais pourtant qu’il est inutile de t’inquiéter d’avance, que tu ne fais que souffrir deux fois, pour rien. Mais tu ne peux t’en empêcher, tu te laisses ronger par l’anxiété alors que tu toises Mark du regard. Le pauvre est innocent dans l’histoire, mais tu l’alpagues tout de même. « N’essaie pas de faire le papa cool. » Tu crains d’être encore la maman poule seule face l’univers, prête à tout pour protéger son bébé des agressions extérieures.

« J'ai besoin de vous parler de quelque chose. » Tu l’observes arriver et servir à boire, et pinces les lèvres. « Non, je ne suis pas enceinte si ça peut vous rassurer. » Tu manques de t’étouffer. « Ca ne me fait pas rire du tout. » Tes yeux s’arrêtent sur l’enveloppe qui trône dans un coin. Si ce n’est pas une échographie, de quoi peut-il bien s’agir ? Toutes les possibilités qui se bousculent dans ta tête ne parviennent pas à te rassurer. Des résultats d’analyses médicales ? Un projet de déménagement à l’autre bout du monde ? Non, rien qui ne saurait te faire plaisir. « Mais j'ai un nouveau projet professionnel en tête, et j'ai besoin de votre autorisation. » Bon… Ca pourrait être pire, n’est-ce pas ? En même temps tu ne vois pas en quoi tu es concernée. Vous avez toujours essayé de soutenir Lexa dans ses choix de carrière, même si vous ne comprenez et n’approuvez pas toujours. Et jusqu’à présent, elle s’est très bien débrouillée toute seule. Alors si vous devez vous impliquer, tu crains d’en savoir plus. « On t’écoute… » Tu restes extrêmement méfiante, mais essaies de garder un esprit ouvert. Ne te braque pas Meg.

Spoiler:

Un repas cuisiner par ses soins et voilà qu’elle lançait la conversation en commençant pas des banalités…. Tout ça ne présageait rien de bon, Mark le savait et Meg le savait aussi, ça se lisait d’ailleurs sur le visage de son ex-femme. Celle-ci qui avait déjà prévenu Mark : pas de papa cool pour cette conversation, il fallait qu’ils soient l’un comme l’autre le bad cop face à ce qui allait arriver, quoi que ce soit, ça ne pouvait visiblement rien être de bon.
Installé à table, Mark prenait une gorgée d’eau, regrettant presque cette habitude qu’il avait de ne boire que très rarement d’alcool. Et si ce repas était le bon moment pour se faire un verre de vin ? « J'ai besoin de vous parler de quelque chose. » Oh god, oui, c’était le moment, et sans vraiment réfléchir il terminait son eau pour attraper la bouteille de vin qui se trouvait sur la table et en mettre quelques goute au fond de son verre à pied. « Non, je ne suis pas enceinte si ça peut vous rassurer. » Il échappait malgré lui un petit soupir de soulagement, déjà il ne pensait pas sa fille prête a être mère mais en plus de ça il ne se sentait pas vraiment près a être grand-père, donc c’était une bonne nouvelle. Il prenait une gorgée de vin, grimaçant un peu, ayant depuis longtemps perdu l’habitude de ce gout. « Ca ne me fait pas rire du tout. » « Détend toi chérie. » Soufflait-il a Meg avant de se raviser en la réentendant lui dire de ne pas faire le papa cool. « Ce n’est pas la blague du siècle, mais ça nous rassure, oui. » déclarait-il, plus sérieusement, reposant son verre près de son assiette. « Mais j'ai un nouveau projet professionnel en tête, et j'ai besoin de votre autorisation. » En entendant ça, sans vraiment savoir pourquoi, il se sentait totalement soulagé et rassuré. Lui qui avait si peur que ce soit une terrible nouvelle concernant sa santé ou sa vie privé, il semblait à présent totalement serein à l’idée que l’annonce de Lexa ne concernant que sa vie professionnelle. Elle était déjà influenceuse, ce qui selon Mark était un bien drôle de métier, donc il en était persuadé : elle pouvait difficilement le choqué avec un nouveau projet, quel qu’il soit. « Si tu as besoin d’investisseur pour lancer ta propre marque, ou ce genre de chose, tu sais qu’on est déjà d’accord, pas besoin de faire ce genre de réunion de famille.  » lâchait-elle, déjà convaincu que ce que Lexa avait à leur annoncer ne valait pas un tel repas et un tel stresse.

Spoiler:

Le visage de ma mère est crispé comme jamais, j'ai l'impression qu'elle n'aime pas trop mon semblant d'humour. J'aurais au moins essayé de détendre un peu l'atmosphère. « Ça ne me fait pas rire du tout. » Ah oui, effectivement. Bon ok, arrêtons les conneries. « Détend toi chérie. » Je me réfugie dans le regard de mon père que je sens beaucoup plus réceptif sur ce coup-là. « Ce n’est pas la blague du siècle, mais ça nous rassure, oui. » Voilà, positive attitude. « On t’écoute… » Inutile de tourner plus longtemps autour du pot, je veux bien mettre les petits plats dans les grands mais au bout d'un moment il faut aller droit au but. « Si tu as besoin d’investisseur pour lancer ta propre marque, ou ce genre de chose, tu sais qu’on est déjà d’accord, pas besoin de faire ce genre de réunion de famille.  » Ça aurait pu être ça, mais effectivement je sais que de ce côté là ils me soutiendront coûte que coûte. Ils ne sont pas toujours d'accord avec mon mode de vie, mes valeurs, mais ils ont toujours été là pour moi. Ce qui me rassure un peu pour la suite de mon annonce. Si c'est difficile pour eux d'avaler la pilule, ce n'est pas non plus une situation dramatique en soit. Il y a pire dans la vie. « Je vais faire une émission de téléréalité. » La bombe est lâchée. C'est déjà une affirmation, parce que je ne leur pose pas réellement la question en soit. C'est acté dans ma tête depuis le moment même où Gabrielle m'a parlé de son projet. Tout ce dont j'ai besoin maintenant c'est de leur signature en bas de ce contrat. Simplement. Ce n'est rien de compliqué en soit, et pourtant je redoute un peu leur réaction. Normal non ? « Un projet avec Lise, pour Netflix. » C'est mieux pour moi de mettre en avant ma collaboration avec Lise. Parce que c'est sans doute plus sécurisant pour eux. Ouais, je tourne un peu la situation en ma faveur. Je suis douée pour faire ça. A voir leur tête, je ne suis même pas sûre qu'ils sachent vraiment ce que représente les émissions de téléréalité. Bon ok, le fossé est bien présent là. Mais avec mes habitudes d'influence, j'ai un peu l'habitude. « Rien d'exceptionnel en soit mais j'ai besoin de vos deux signatures. » Je sors le contrat de la fameuse enveloppe, essayant d'éviter au maximum leurs futures questions. Pas spécialement envie que ça tourne au drame. Allez, c'est rien du tout. Juste ma tête sur le petit écran, et ma réputation qui va avec. Mais c'est un détail n'est-ce-pas ?

Spoiler:

« Détend toi chérie. » Tes émotions font le yoyo ce soir. D’un côté il y a ta fille qui joue avec tes nerfs, qu’elle le veuille ou non, et de l’autre il y a Mark qui te déconcentre beaucoup trop. S’il réussit beaucoup mieux à garder la face, tu le soupçonnes d’être aussi inquiet et perturbé que toi, à en juger par le surnom qu’il t’attribue machinalement. « Ce n’est pas la blague du siècle, mais ça nous rassure, oui. » Très bien, tu lui laisses le rôle du parent apte ce soir, tu seras celle qui as du mal à rester à la surface. « Si tu as besoin d’investisseur pour lancer ta propre marque, ou ce genre de chose, tu sais qu’on est déjà d’accord, pas besoin de faire ce genre de réunion de famille. » Tu te retiens de le contredire, dans un élan de constructivisme. Vous êtes tous les deux en phase environ 99% du temps, mais les différences dans vos éducations se fait ressentir parfois. Ta famille n’était pas pauvre, mais vous étiez bien loin de la fortune des Herrman, et tu ne t’en serais pas sortie à l’Université sans ta bourse. Tu as donc un peu plus de réserves quant à la mise à disposition illimitée de vos ressources pour les projets de votre fille. Sans y être totalement opposée, tu attendrais d’elle qu’elle vous prouve le sérieux de son projet.

« Je vais faire une émission de téléréalité. » Tes doigts se referment autour du pied du verre de vin. Ca ne te plait pas du tout. Pas du tout, du tout. Tu as peut-être une vision très stéréotypée de la téléréalité, mais tu as du mal à imaginer un scénario où elle garderait un minimum de respectabilité et de dignité. « Un projet avec Lise, pour Netflix. » Tes yeux s’écarquillent. « Pardon ? » Oh Lise… Tu vas la tuer. Passé l’infâme sentiment de trahison, tu oses espérer que ta meilleure amie sait ce qu’elle fait et qu’elle ne lâcherait pas Lexa dans la gueule du loup, qu’elle l’aurait déjà découragée de s’inscrire à ce programme si elle pensait que c’était une mauvaise idée. Ca te rassure un tout petit peu, mais tout de même, elle ne paie rien pour attendre. « Rien d'exceptionnel en soit mais j'ai besoin de vos deux signatures. » Donc voilà à quoi tout cela rime. Elle n’a pas 21 ans, et doit répondre de votre autorité parentale pour quelques mois encore. « C’est quoi le concept ? » Ta voix est relativement posée. Tu te surprends toi-même. Ce calme est inespéré, tu espères qu’elle remarquera tes efforts. Ca risque de ne pas durer.

« Je vais faire une émission de téléréalité. » le goût presque amère de sa gorgée de vin lui restait en travers de la gorge. Il toussotait presque alors que sa fille poursuivait : « Un projet avec Lise, pour Netflix. » ce à quoi Meg ne pu retenir un : « Pardon ? » choquée. Lise était dans le coup. Pour Mark c’était plutôt une bonne nouvelle. Si Meg elle semblait le prendre comme une trahison, le père de famille, lui, voyait ça d’un bon œil. Lise était pleine de bonne attention, et bien qu’elle n’ait pas d’enfant, elle savait ce qui était acceptable ou non pour une jeune fille de l’âge de Lexa. Elle connaissait aussi très bien les parents de cette dernière et savait donc ce qui serait accepter sous leur toit. Donc oui, Mark en était quasiment sûr : Lexa était entre de bonnes mains. Il voyait déjà ça comme une sorte de colonie de vacance, une expérience sympathique durant laquelle sa fille pourrait rencontrer des jeunes de son âges, se faire des contacts et s’amuser. « Rien d'exceptionnel en soit mais j'ai besoin de vos deux signatures. » Il esquissait un sourire, déjà près à hocher la tête et sortir un stylo pour signer où il le fallait, alors que Meg, elle restait sur la défensive.  « C’est quoi le concept ? » Bonne question, il n’avait pas pensé à ce détail, il avait déjà imaginé une villa dans un lieu paradisiaque et des activités fun, mais ça s’arrêtait là. « Je pense que, quelques soit le concept, ça sera une aventure unique en son genre, ce serait idiot de passer à côté d’une telle opportunité. » notait-il tout de même. Peut-être trop optimiste.

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Inutile de tourner autour du pot plus longtemps. Je lâche finalement la bombe, essayant de dédramatiser la situation en incluant la présence de Lise dans ce projet. Même si en réalité il n'y a pas qu'elle, mais ça, c'est un détail. Je n'ai pas envie de rentrer dans les détails. Moins je leur en dis, mieux ça sera. Et puis de toute façon, ça changerait quoi ? Je ne suis même pas sûre qu'ils savent exactement ce que la téléréalité implique. Enfin quoique, peut-être un peu quand même. « C’est quoi le concept ? » J'espérais secrètement passer à côté de ce genre de questions, mais c'est raté. Ma mère a de toute évidence besoin de savoir de quoi il s'agit. En tout cas elle n'a pas dit non instantanément, et ça, c'est déjà une bonne chose. Ouais c'est encourageant. « Je pense que, quelques soit le concept, ça sera une aventure unique en son genre, ce serait idiot de passer à côté d’une telle opportunité. » Un sourire se dessine au coin de mes lèvres. « C'est exactement ça. » Je n'aurais pas dit mieux. C'est une occasion unique qui ne se représentera peut-être pas une deuxième fois dans ma vie. Clairement, je ne peux pas passer à côté. Mais ma mère soutient mon regard, et je sens que l'optimiste de mon père ne suffira pas sur ce coup-là. Dommage. « C'est une émission de dating. » Ajoutais-je dans un haussement d'épaules comme si ça n'avait pas d'importance. Je ne mentionnerais pas la deuxième partie de l'émission, et ces histoires de demande en mariage. Non, ça ne sera pas nécessaire. On va se contenter du début. « "Love is blind", c'est comme ça que ça s'appellera. » Je sens leur regard un peu perplexe et je me permets d'ajouter. « En gros, ça sera sous forme de speed-dating à l'aveugle. On sera une trentaine de candidats à faire connaissance et à apprendre à se connaitre sans se voir. » Dans ce qu'ils appellent des "capsules", passant des unes aux autres en changeant à chaque fois de partenaire. C'est une expérience de dating qui privilégie l'humain à l'apparence physique, et ça, c'est un bon point non ? Ouais autant essayer de mettre en avant les points positifs pour les faire céder. En soit, le concept aurait pu être bien pire quand même.

« Je pense que, quelques soit le concept, ça sera une aventure unique en son genre, ce serait idiot de passer à côté d’une telle opportunité. » Tu vas le tuer. Des mois que tu regrettes à demi-mot ce divorce, mais là, à cet instant précis, c’est tout le contraire. Tu n’arrives pas à savoir quel jeu il joue. Cherche-t-il à se faire pardonner ses années d’absence, alors que l’hôpital prenait toute la place dans sa vie ? A jouer au papa cool face à une mère poule hystérique, pour avoir le bon rôle ? Est-il tout simplement inconscient, et regrette-t-il une vingtaine trop sage ? Tu n’en sais rien, et tu n’envisages même pas qu’il puisse être sincère et qu’il soit réellement enthousiaste face au projet de votre fille. « C'est exactement ça. » Évidemment, elle saute sur l’occasion. Elle aurait tort de s’en priver. Pour qui tu vas passer maintenant ? La rabat-joie de service, comme d’habitude.

Malgré tout, tu demandes à Lexa de te présenter le concept de l’émission, en tentant de maitriser ta voix. « C'est une émission de dating. » La mâchoire t’en tombe. Au moins ce n’est pas dangereux ? Ou risqué ? Ou à l’autre bout du monde ? Tu cherches à te rassurer comme tu peux. « "Love is blind", c'est comme ça que ça s'appellera. » Ce que tu en devines laisse entrevoir de belles valeurs, l’amour qui transcende les apparences, sur le papier c’est une jolie promesse. Mais tu n’es pas naïve, tu sais que ce sont des paillettes. « En gros, ça sera sous forme de speed-dating à l'aveugle. On sera une trentaine de candidats à faire connaissance et à apprendre à se connaitre sans se voir. » Ton regard se voile d’un masque triste. Vingt ans et déjà désespérée ? La culpabilité te frappe de plein fouet. « Mais… Mon amour… Tu n’as pas besoin de tout ça. Tu vas trouver quelqu’un, tu n’as pas besoin de tous ces artifices. » Tu regardes Mark, pour lui demander du soutien. Vous n’avez pas été le meilleur modèle pour elle, il serait temps que ça change. « Pourquoi tu veux te lancer là-dedans ? Pour de vrai ? »