Normal world [Thyles]

Rester ou partir ? Je choisis de rester, aidée par Thylo et son effort à me faire part de ce qui lui ferait plaisir. Juste ce que j’avais besoin d’entendre pour me dédouaner un peu d’avoir eu envie d’accepter son invitation sans contrepartie. C’est stupide, j’en ai conscience et je n’ai pas l’habitude de cogiter ainsi sur mes envies, mais tellement de choses sont atypiques avec la journaliste que je finis par me poser des questions. Un film fait bien partie des options envisagées par la propriétaire des lieux, je lui laisse le loisir de le choisir et sans surprise elle opte pour un truc policier, ça me va. Si j’ai la faculté de mettre mon cerveau en veille et simplement profitant du déroulement de l’intrigue, ce n’est pas le cas de Thylo. Spontanément venue cherchée à se rapprocher, entre mes bras j’ai tout le loisir de la sentir perdre le fil une fois les vingt premières minutes passées. Je fais abstraction du moins jusqu’à ce qu’elle finisse par s’agiter au point que ses gestes parasites me sortent un peu de ma concentration. Mais finalement ces petits gigotages ne sont pas grand chose en comparaison à ce qui arrive. Ce n’est pas un simple commentaire, la journaliste semble incapable de retenir ce qu’elle pense être le dénouement du film et me lâche ses déductions. Si ce n’était que ça, mais visiblement son impatience a un lien direct avec une autre de ces choses qu’elle avait en tête. Une fois encore elle arrive à me surprendre avec sa franchise, la formulation est moins abrupte que la première fois, mais une fois encore le doute sur ses intentions n’est pas permis. Je baisse le regard dans sa direction, trouvant le sien « Tu l’as déjà vu ce film ? » j’esquisse un sourire en coin « Parce que sinon tu peux te tromper… Si ce n’est qu’une déduction. » je hausse les épaules « Mais j’imagine que si tu m’as balancé ça c’est que tu es sûre de toi. ». Un regard vers l’écran puis à nouveau sur la blonde, je soupire avant de me mettre à rire « On me l’avait jamais faite celle là. » faire déraper le visionnage ça oui c’est un classique, mais me spoiler un film policier ça c’est une nouveauté. « J’aimerai quand même savoir qui a tué la femme de l’autoroute. » déclaré-je en poursuivant mon visionnage, c’est plus un jeu qu’autre chose, même si je sais bien que Thylo va sans doute ne pas comprendre que je suis en train de jouer avec elle, de la tester gentiment. Je pense que ma petite expérience ne va pas être bien longue, car si elle tente de respecter mon désir de terminer de regarder le film, le sien gronde, à moins qu’il ne soit que question d’ennui et que le sexe ne soit qu’une simple manière de s’occuper. Il y a sans doute un peu de ça, mais j’espère qu’il y a un peu plus que ça. Les minutes passent jusqu’au moment où arrive sa limite. La journaliste se redresse et au moment où elle cherche à se lever je la retiens « Tu sais il y avait plus subtil pour capter mon attention que de me dévoiler la fin du film. » je grimace légèrement et reprend « Ouais je sais la subtilité c’est pas ton truc … Disons que les gestes auraient pu déplacer mon attention vers toi. ». Maintenant elle l’a mon attention, pleinement et comme je gagne un temps précieux à être claire je joins le geste à la parole, venant chercher ses lèvres. Le résultat est là, elle a gagné.

« Tu l’as déjà vu ce film ? Parce que sinon tu peux te tromper… Si ce n’est qu’une déduction. Mais j’imagine que si tu m’as balancé ça c’est que tu es sûre de toi. » « Au tout début, la première scène, on ne voit pas son visage mais l’intérieur de la voiture, il y avait des gants, du gel hydroalcoolique et le même album de Chopin que celui qu’il écoute en salle d’opération. C’est lui. » Je ne suis pas flic, mais journaliste, la déduction c’est indispensable. Toujours est-il que même ayant besoin de preuves, je suis sûre de moi. Complètement sûre de moi et tant pis pour le reste. Regarder un film en ma compagnie est une épreuve, j’en suis consciente, mais c’en est une aussi pour moi qui ne comprends pas l’intérêt de la fiction, j’ai besoin d’apprendre, pas de me divertir. Alors si je peux en tirer quelques infos vraies à rajouter à ma connaissance, je suis pour, mais dans le cas contraire je me demande quel est le profond intérêt de tout ça. Même si je ne doute pas de l’efficacité du divertissement, puisque Jules semble apprécier.
« On me l’avait jamais faite celle là. » J’en suis profondément désolée, et je lui adresse un petit sourire contrit pour le lui prouver. « J’aimerai quand même savoir qui a tué la femme de l’autoroute. » OK, d’accord, je vais prendre sur moi pour un moment. Je tente de me concentrer sur les images, mais ne trouve pas où poser mon attention. Je tourne, me retourne, change de position, soupire. Et tout ça pendant de nombreuses minutes, qui me paraissent des heures, avant de finalement balancer : « Un simple accident, le réalisateur a simplement cherché à brouiller les pistes, et le tueur s’en sert de diversion pour balader les flics. » Je crois que là je viens d’achever tout intérêt pour le film, pardon. Je me lève pour aller chercher à boire et m’occuper les mains, alors que Jules me retient. « Tu sais il y avait plus subtil pour capter mon attention que de me dévoiler la fin du film. » Je lui adresse un levé de sourcil typique du fait que la subtilité est hors de ma portée. « Ouais je sais la subtilité c’est pas ton truc … Disons que les gestes auraient pu déplacer mon attention vers toi. » Je ne comprends pas au premier abord, pourtant je ne suis pas si bête que ça. Mais quand ça touche à l’échange humain, je suis complètement dépassée. Alors je la laisse faire, et me voit gratifiée d’un baiser que j’attendais depuis un moment. « Comme ça, sans les sommations d’usage alors. » Répondant à son baiser en lui offrant le même, quoi qu’un peu plus langoureux. Si elle m’avait expliqué ça d’entrée de jeu, je pense que j’aurais pu gagner du temps. Beaucoup de temps. « Et… ça marche à chaque fois ? » Descendant mes lèvres dans son cou, pour cette partie de la chose, elle n’a pas besoin de m’expliquer, je sais comment ça se passe. « Je crois que tu vas regarder beaucoup moins de films maintenant. » Prenant position sur elle, une jambe de chaque côté, pour obtenir toute son attention. Geste qu’elle ne semble pas refuser ni trouver intrusif au premier abord…

J’ai beau m’être un peu familiarisé avec sa manière d’être, Thylo continue de me surprendre. Ses envies et intentions sont claires, mais je m’étonne toujours de sa façon d’aborder les choses. Je m’assure qu’elle est bien sûre d’elle concernant le dénouement de l’histoire. Evidemment elle ne va pas me dire le contraire, même si pour ma part je trouve ces conclusions hâtives et un peu bancale. Sans doute ai-je trop d’attente de la part des scénaristes pour espérer que tout ça ne soit que des fausses pistes. Joueuse je fais mine de vouloir connaître la suite malgré tout, il reste encore la mort de la femme de l’autoroute à élucider. La journaliste prend son mal en patience, ou presque, elle s’agite un peu jusqu’à une nouvelle fois ne plus tenir en me révélant qu’il s’agit juste d’un accident et que c’est pour faire diversion. Bon crois que le message est on ne peut plus limpide, même si sur la manière elle a une bonne marge de progression. Ce que je n’hésite pas à lui dire, parlant de subtilité en oubliant un instant qu’elle en est quasiment dénuée. Mais quelques gestes auraient suffit à ce que je lui accorde de l’attention, l’idée n’a pas l’air de faire son chemin et je lui donne un exemple en venant l’embrasser. Sa réaction m’amuse, je ris légèrement c’est plus fort que moi, son absence de nuance est déroutant. Pas le temps de répliquer, Thylo revint à la charge, j’ai lancé la machine je crois. Je secoue un peu la tête à la négative « Pas toujours. » Présentement je me doutais que nous n’irions probablement pas au bout de la fiction, la journaliste l’avait laisser sous-entendre, ou pas, mais j’avais lu entre les lignes. « Parfois j’ai vraiment envie de regarder un film sans qu’on me raconte la fin et qu’on m’interromps. » répondis-je à ça remarque « Mais je ne me plains pas de cette nouvelle activité. », c’est pour cette raison que je lui laisse prendre place sur moi, profitant de ses lèvres dans mon cou qu’elle embrasse avec un mélange d’application et d’empressement. Je n’ai pas commenter lorsqu’elle l’a dit, mais son aveu sur le fait que je sois la seule femme avec qui elle ai couché me revient. La première fois avait été plutôt concluante, ses capacités d’apprentissage ne sont pas à prouver et elle est si observatrice qu’elle engrange une quantité ahurissante d’informations, d’indices. Je glisse mes mains dans son dos, remontant son haut jusqu’à le lui retirer, son vieux t-shirt de la fac que je porte ne tarde pas à subir le même traitement. « Est-ce que c’est juste une manière de passer le temps pour toi ? » demandé-je entre deux baisers. Ma question n’a rien d’un piège, j’ai juste envie de savoir ce que ça représente pour elle, ce genre de moments, étant donné qu’elle ne fait rien ou presque qui n’ai de logique ou d’utilité.

J’apprends vite, extrêmement vite, et c’est encore plus rapide quand il s’agit de Jules et de ce qu’elle me montre, présente, et tente de m’inculquer. Je fais tout ce que je peux pour être à la hauteur. En tout cas de ce qu’elle semble attendre. Et pourquoi, je n’en n’ai pas la moindre idée, j’imagine que ça se fait naturellement, elle me plaît, j’aime passer du temps avec elle et je n’ai pas l’impression d’être que tarée avec elle. Ça apaise, beaucoup. Et je dois reconnaitre que j’en avais besoin. Elle semblait même l’avoir deviné.
« Pas toujours. » « Encore une histoire de subtilité pas vrai ? » Et ça ne me plaît pas, c’est ce qui est compliqué dans les rapports humains. La subtilité. Non, honnêtement, ça fait trop à retenir et je suis encore en pleine phase d’apprentissage. « Parfois j’ai vraiment envie de regarder un film sans qu’on me raconte la fin et qu’on m’interromps. Mais je ne me plains pas de cette nouvelle activité. » « Alors pour la prochaine fois, il faudra que tu me le dises avant le film. » Si je dois deviner, on n’est pas sorties de l’auberge. Elle commence à comprendre que ce qui peut paraître machinal pour quelqu’un, ne l’est pas pour moi. Je n’ai pas les mêmes repères et encore moins les mêmes façons de penser, et d’agir.
Mais alors que je commence à prendre un peu plus d’assurance en lui ôtant toute envie de finir le film, grâce à mes attentions, elle pose une question que je dois gérer, car la réponse ne m’est pas évidente. « Est-ce que c’est juste une manière de passer le temps pour toi ? » Je m’arrête net. « Je… » Non, je ne crois pas, je ne sais pas en fait. Je m’assieds sur le canapé en passant une main dans mes cheveux, en petite tenue, pour le coup, elle vient de me poser une colle. « J’en ai juste… envie ? » Et est-ce-que c’est un mal ? Est-ce-que c’est un comportement que je ne dois pas adopter face à une femme qui me plaît ? Son genre n’est pas un problème, le problème c’est qu’elle est humaine et c’est ça que je peine à déchiffrer. « C’est une activité dépourvue de toute utilité… productive en tout cas. » D’un point de vue anthropométrique, une relation sexuelle a pour but de se reproduire, ce qui n’est pas notre cas, c’est juste… un divertissement. Je crois. Je ne sais pas exactement en fait. « Je ne sais pas quoi te répondre Jules. » Et ça me perturbe bien plus que tout le reste !

Si Thylo apprend à agir de manière un peu plus classique, moi aussi de mon côté j’apprends un nouveau mode de fonctionnement. Je m’adapte, tout simplement, pour que la communication se fasse. Je ne crois pas avoir fait autant d’efforts spontanés – au point de ne même pas vraiment m’en rendre compte – afin de communiquer facilement avec quelqu’un. Si la journaliste est toute en logique, pour moi il n’y en a aucune à agir comme je le fais avec elle. Mais c’est naturel je crois, et je cherche toujours à en savoir plus la concernant c’est pour ça que je pose cette question, sans détour parce que je sais qu’il est inutile d’en faire avec la blonde. Sa première réponse est spontanée bien que teintée d’une forme d’incertitude. Ok, on dirait que je viens d’enrayer la machine. J’aurais dû prévoir que ça la mettrait en mode réflexion, j’ai pas encore les bons réflexes. Après un bref cheminement de pensée prenant en compte le côté non productif de l’affaire, Thylo conclue qu’elle ne sait pas quoi me répondre. « C’est pas grave, je demandais ça comme ça. » c’est con d’ailleurs, maintenant que j’y repense, d’avoir posé cette question et surtout maintenant. « Et puis tu y as répondu. » je lui souris en me rapprochant « L’envie… C’est le plus important. » je reprends le fil de notre échange où nous l’avons laissé, non sans profiter de ce moment de flottement pour prendre les choses à mon compte. Je dépose quelques baiser dans son cou, descendant vers sa poitrine, mes mains parcourent son corps « Ça n’était pas une question piège. Arrêtes d’y penser. » j’imagine que c’est à moi de réparer ma connerie, de capter toute son attention pour la sentir à nouveau pleinement avec moi et je sais quoi faire pour y parvenir…

Je n’ai généralement aucun mal à gérer le multitâche, sauf que cette fois-ci, on commence à parler d’émotionnel, et ça, c’est un peu au-dessus de ce que je sais faire. Alors gérer ça plus le reste des événements… J’ai appris à me laisser aller au désir, mais à la réflexion durant, jamais. C’est bien trop compliqué, et Jules commence à comprendre que mes capacités à ce niveau-là, même si pour elle c’est totalement naturel, sont limitées.
Je marque une pause, j’ai besoin de réfléchir à la réponse à lui donner, même si elle m’apparaît évidente au premier abord, je me rends compte que rien de ce genre ne m’avait paru être évident. Et je sais que la réponse qu’elle attend est importante, pour elle, et pour ce qu’il adviendra de la soirée. Parce que les gens ont des attentes, autant qu’ils sont et c’est bien là que le bât blesse pour moi. « C’est pas grave, je demandais ça comme ça. Et puis tu y as répondu. » Je lui ai répondu sans réfléchir et ça n’est pas dans mes habitudes, je déteste répondre de façon erronée, pour moi, c’est tout simplement synonyme d’échec. « L’envie… C’est le plus important. » Si elle le dit, je le crois aussi, en tout cas c’est ce que j’ai entendu dire. Je reproduis bêtement ce que je vois et entend. Singer le comportement d’un autre me paraît bête mais pour le moment c’est moi qui ait l’air d’une abrutie en ne sachant pas comment m’y prendre quand il s’agit d’émotions.
D’un réflexe, je poursuis son échange, passant une main dans ses cheveux quand elle dépose ses baisers sur ma poitrine mais reste pour le moins pensive. « Ça n’était pas une question piège. Arrêtes d’y penser. » Je tente de l’écouter mais ça ne veut pas. Je suis le mouvement et m’allonge sur le canapé, dans la position qu’elle adoptait avant de poser sa question. « Si tu l’as posée c’est que tu attendais une réponse en particulier. Dis-moi. » Glissant une main sur son visage. Je sais que j’ai toute son attention. Et si tout à l’heure j’étais partie sur d’autres intentions, à présent il n’y a que celle-ci qui m’obsède.

Je suis sincère quand je dis que je n’attendais pas de réponse particulière, juste ce qu’il en est en fait. Pour une fois un truc m’a paru simple et finalement Thylo bloque sur la question. J’ai fait une erreur, j’essaie de la corriger, un en la rassurant, deux en tentant de capter à nouveau son attention. Echec visiblement. Ça pourrait presque être vexant. J’essaie de ne pas me formaliser, la blonde fonctionne différemment, ça n’a rien à voir avec moi si elle n’arrive pas à décrocher de cette foutue question. Ça la travaille tellement qu’elle m’interrompt pour que je lui offre à mon tour une réponse concrète. J fronce légèrement les sourcils « Non j’attendais pas de réponse en particulier. » et c’est vrai, je ne comprends pas pourquoi ça lui paraît si improbable ou que ça prend tant d’importance. Je soutiens son regard « Je t’assure. Je demandais ça comme ça, juste savoir si c’était simplement un passe temps, quelque chose de mécanique pour toi. Et que l’envie soit ton guide, ça me va… » je hausse les épaules « Si je suis là, c’est que ça me va. » mais avec mes conneries j’ai peut-être inversé la vapeur, en tout cas j’ai coupé un élan ça c’est certain. « Y’a pas de bonne ou de mauvaise réponse Thylo. » et je veux vraiment qu’elle en prenne conscience. Je me redresse légèrement « Bon du coup ton envie est peut-être passée… » je la regarde, attentive à sa volonté « Tu préfère que je partes ou tu veux que je reste ? » et avant que ça ne créé un nouveau bug je m’empresse de préciser « Si je reste ça n’oblige et n’engage à rien. » je soupire « J’essaie de m’adapter et de pas faire d’erreur. On fonctionne pas pareil toi et moi, c’est clair. C’est pas grave, j’aime passer du temps avec toi sinon je le ferais pas. » je cherche mes mots pour ne pas faire de nouvelle connerie « Mais j’ai besoin de quelques repères, tu comprends ? Savoir où je me situe dans ta logique, ton fonctionnement. » parce que de mon côté les émotions ne sont pas juste un truc flou et si je pouvais m’éviter de jongler avec pour me mettre en galère, ça m’arrangerait pas mal !

« Non j’attendais pas de réponse en particulier. » Etant enfant, la seule avance que j’avais sur les autres, était de taper juste à chaque question qu’on me posait, pour peu que ce soit une question qui me demande de puiser dans des connaissances concrètes. Et j’en énervais quelques-uns, mais j’étais meilleure que les autres. Sans doute le seul domaine, alors je m’y suis raccrochée, et j’ai pris cette habitude de me sentir différente, à côté de la plaque, sauf quand on me posait une question. Alors ne pas avoir de bonne réponse possible, ou de justesse à apporter, ça me perturbe. « Je t’assure. Je demandais ça comme ça, juste savoir si c’était simplement un passe temps, quelque chose de mécanique pour toi. Et que l’envie soit ton guide, ça me va… » « Oui, c’est un passe-temps. Dans le sens où… ça n’a pas de valeur productive. En tout cas tant qu’on n’est pas concrètement quelque-chose toi et moi, et qu’on décide de construire. Enfin les gens appellent ça comme ça quand ils font des projets ensembles. Alors c’est un passe-temps jusqu’à ce que ce soit autre chose de plus… important ? Mais tu es le seul que j’ai. Alors ça te rend unique, d’une certaine façon, non ? » Je ne vois pas le passe-temps comme quelque-chose de péjoratif, je n’en n’ai pas. Pour passer le temps je travaille.
« Y’a pas de bonne ou de mauvaise réponse Thylo. » « Et c’est ça que je ne peux pas comprendre. » 1 et 0, elle ne fait que le répéter, je suis binaire, c’est tout ou rien, mais pas de ying et de yang. Il me faut du concret. « Bon du coup ton envie est peut-être passée… Tu préfères que je parte ou tu veux que je reste ? » « Non, je veux que tu restes. » Attrapant sa main par réflexe. Moi qui ne suis pas trop pour le contact, le sien me rassure. « J’essaie de m’adapter et de pas faire d’erreur. On fonctionne pas pareil toi et moi, c’est clair. C’est pas grave, j’aime passer du temps avec toi sinon je le ferais pas. » Alors je me tourne vers elle, m’asseyant dans sa direction, elle a raison, elle a besoin de comprendre pour trouver sa place auprès de moi si jamais elle veut un jour la prendre. « Mais j’ai besoin de quelques repères, tu comprends ? Savoir où je me situe dans ta logique, ton fonctionnement. » « Ben justement, y a pas de logique, et c’est ça que je comprends pas. J’ai établi toute ma vie autour de la logique, de quelque-chose de carré, de rangé. Parce que c’est la seule façon pour moi de fonctionner sans paniquer, de trouver un moyen de garder une place, quelle qu’elle soit. De ne pas dérailler. Et quand on est ensemble, il n’y a rien qui s’inscrive dans une quelconque logique. » Je la regarde, je crois que mes explications ne suffisent pas. Je développe. « Quand on est ensemble, je suis juste… apaisée. Bien. Et j’ai envie que ça continue. Mais je ne comprends pas concrètement pourquoi. C’est juste comme ça. Et c’est une de rare émotions que j’arrive à comprendre sans demander d’aide. Et ça n’a pas de but précis. Passer du temps ensemble ça me fait simplement… plaisir. Et j’y pense, tout le temps. Alors que je devrais plutôt avoir mon travail en tête, ou autre chose. Je ne sais pas. C’est ça le truc. Je ne sais pas. Et je n’ai pas l’habitude. »

Apprendre à comprendre Thylo implique de passer du temps avec elle, poser des questions, l’écouter, faire des erreurs aussi parfois. Parce qu’il n’y a pas d’apprentissage sans erreurs. Et si le timing de ma question était plutôt mal choisi je ne pensais pas pour autant qu’il créerait cette brèche dans le fonctionnement binaire de la journaliste. Poser une question à laquelle elle ne se sent pas capable d’apporter un bonne réponse est donc un truc à éviter, en tout cas dans le genre de moment qu’on partageait à cet instant. Voilà, j’apprends. La blonde m’explique sa définition de passe-temps, notamment de celui-ci, et je ne peux m’empêcher de sourire parce que sa façon singulière de voir les choses je crois que ça me plait plus que je le pensais. Est-ce qu’elle essaie de me rassurer d’un certaine manière, en m’affirmant que je suis unique ? On dirait. Je suis flattée et hoche la tête pour lui signifier que je prends en compte cet argument. Mais il n’est pas question de me prouver quoi que ce soit, je souhaite juste comprendre, la comprendre, aussi vaste et compliqué soit ce chantier. Les émotions, les nuances ça lui échappe j’en ai conscience, sans le vouloir j’ai foutu le bordel dans sa logique bien établie et c’est pas sûr qu’après ça elle ai toujours la même idée en tête. Je lui demande si elle souhaite que je parte, mais elle préfère que je reste. A mon tour d’essayer de lui expliquer pourquoi j’ai posé cette question… le besoin de savoir où tout ça se situe pour elle, dans sa logique, afin de savoir où je vais. Ça lui échappe sans doute mais Thylo fait l’effort de me donner une réponse. Je l’écoute attentivement, mieux vaut ne pas perdre le fil parce que si je la coupe je risque de la faire buger à nouveau. Mais à ce moment là c’est moi qui bug un peu, pas parce que je ne comprends pas ce qu’elle me dit, plutôt parce que j’ai un peu peur de comprendre la direction que ça prend. Sa crise de jalousie m’a amusée, c’était son égo qui parlait, du moins c’est ce que je pensais. Peut-être bien que c’était finalement déjà plus que ça, mais comme la blond est incapable de traduire ses émotions, ça fausse la donne. Je crains d’être en train de jouer avec le feu, d’avoir provoquer certains choses sans vraiment l’avoir cherché… J’ai cru être comme face à une machine, mais elle n’en est pas une et à vouloir trouver ses limites, faire une sorte d’étude de cas, je crois que je me suis un peu perdue en chemin. Non pas qu’un peu, j’ai perdu le contrôle au moment où j’ai flanché la dernière fois. C’est un étrange mélange d’émotions que je ressens à cet instant. Une forme de satisfaction se mêlant à une pointe de culpabilité avec un légère crainte d’être en train de faire une connerie. Le truc c’est que ça ne m’a jamais vraiment arrêté par le passé et je ne suis pas sûre d’avoir envie de renoncer. A quoi ? J’en sais même trop rien… juste ça, ce truc bizarre qu’on partage la journaliste et moi. Je ne l’ai pas lâché du regard, elle conclue et je hoche la tête en souriant « Ok. Maintenant je sais un peu mieux. Merci pour ta réponse complète. » c’est pas du tout le genre de truc que je dirais en temps normal mais là, avec elle, je crois que c’est ce qu’il faut. « On peut reprendre où on en était si tu veux. » mon regard se fait un peu plus charmeur et je m’approche à nouveau lui laissant cependant combler ou non la distance qui reste entre nous.