the me inside of me. (roni)

Vendredi soir. Je viens à peine de rentrer mais je n’ai pas le temps de m’avachir sur mon canapé. J’ai eu la chance d’avoir pu terminer un peu plus tôt, laissant à Damen le soin de finir toute la paperasse de la semaine. Je pense qu’il m’en voudra ; je crois même qu’il a grogné et qu’il a m’a probablement insulté quand je lui ai tourné le dos – mais j’avoue que ça m’est égal. Je ne me fais pas encore, pas vraiment, à l’avoir pour partenaire. Einar me manque. Sa solidité. Son calme. Cette aura puissante qui émanait de chaque pore de sa peau. Mon partenaire, le vrai, me manquait. Mentalement, je me promets de passer le voir demain cependant que j’ouvre toutes les fenêtres de mon appartement et cherche le balai dans le placard. Je lance un peu de musique, un vieux rock des années soixante-dix que je me mets instantanément à siffloter alors que je m’active à redonner une certaine allure à mon chez moi – comme chaque vendredi. D’ici quelques heures, Roni va frapper à ma porte et je vois que, encore une fois, tout soit parfait pour l’accueillir. Depuis cet été où je l’avais débusquée chez sa camarade Harper, dans le garage de ses parents plus précisément, je m’étais montré plus présent pour ma petite sœur. Je m’étais efforcé de lui montrer, peut-être avec un peu trop d’insistance, que j’étais là. Que même si nous n’avions jamais été très proches, je restais son grand-frère quoiqu’il arrive.

Et puis ce petit rituel s’était instauré. Doucement. Petit à petit. Elle était d’abord venue une fois, à mon invitation, avant que ça ne devienne une habitude : chaque vendredi, Roni venait dîner dans mon appartement et nous prenions le temps de discuter, un peu de tout et de rien. Si cela avait été maladroit au début, j’aime à penser que c’était depuis devenu plus naturel. Les conversations s’enchaînent avec un peu plus de facilité malgré les quelques silences qui règnent parfois, sans être gênants. Le dîner est prêt depuis la veille, ne restera plus qu’à le réchauffer et, une fois le sol balayé, je m’occupe de dresser la table. Comme chaque Vendredi, il y a les serviettes rouges, les bougies de part et d’autre de ma petite table de salon. Pas d’alcool, jamais – ma sœur était trop jeune et il m’arrivait de la reconduire chez nos parents ou à l’internat. Je sortais quand même mes plus beaux verres, même si ce n’était que pour y boire une menthe à l’eau ou du jus de fruit s ; je sortais des couverts un peu plus chics. Roni m’avait déjà fait remarquer que j’exagérais mais je ne pensais pas – j’aimais bien recevoir ma petite sœur et la recevoir comme une reine. J’aurais fait pareil pour Imelda. J’aurais fait pareil pour nos parents. J’aurais fait pareil pour toutes les personnes qui avaient leur importance dans ma vie – et il y en avait peu, mais ça me convenait. Je viens à peine d’allumer le feu sous la cocotte quand on frappe à la porte. J’ouvre sur la brunette et je la prends dans mes bras, soulevant ce poids plume de terre sans difficulté aucune. « Salut princesse ! je lâche dans un léger rire avant de la reposer au sol pour la laisser entrer. Comment tu vas ? ta semaine, ça a été ? » Les mêmes questions à son arrivée, toujours. Il y avait quelque chose d’incroyablement apaisant à l’entendre me raconter sa vie quotidienne.

les cours terminés, je me dépêche de repasser par ma chambre pour filer sous la douche. oui, vendredi soir j'ai mon petit rituel. mes devoirs sont faits, il ne me manquera plus qu'à réviser les maths pour l'examen de lundi mais je ferai ça demain ou après demain. j'ai déjà bien avancé dans mes révisions c'est juste de la relecture. la fin de l'année approche, les dossiers de candidatures ne vont pas tarder à partir, je ne peux pas me louper maintenant. alors même si c'est compliqué, que c'est chiant de réviser, je mets toutes les chances de mon côté. j'ai jamais été très studieuse mais je m'en suis toujours sortie. maman dit que j'ai des facilités. je crois que c'est ça, c'est plus facile pour moi ce genre de choses. donc si je m'y mets à fond, je peux avoir ce que je souhaite. mais il faut que je le fasse quoi. et je le fais. mais ce soir c'est la pause dans les révisions. ce soir je vois nino. depuis qu'il m'a trouvé chez harper le jour de mon anniversaire, on a cet arrangement. et moi ça me va. parce que je l'adore mon grand frère mais c'est vrai qu'on a pas vraiment grandi ensemble. j'dis pas qu'il est vieux mais bon... il a le double de mon âge quoi. donc on est pas proches-proches. avec imelda c'est plus simple parce que c'est une fille aussi. mais je ne la vois pas souvent non plus. elle me manque parfois. j'aime bien quand elle me raconte quelles inventions rocambolesques elle a mis au point. y'a ça aussi, on aime la création toutes les deux. pas trop le même domaine mais voilà... une fois douchée, j'enfile un jean, un tee shirt rapidement et zou. quelques stations de métro et me voilà face à la porte de chez lui. je n'attends pas plus et frappe. l'aîné des reynolds ouvre avant de me soulever du sol avec une facilité déconcertante. " salut princesse ! comment tu vas ? ta semaine, ça a été ? " une fois que mes pieds ont regagné le sol je l'embrasse sur la joue et rentre dans son appartement. " un jour tu vas m'envoyer sur la lune toi... " n'empêche ça pourrait être drôle. " ça va ça va... longue semaine, les exams arrivent bref pas l'éclate... " puis le léger détail joy qui m'obsède actuellement mais ça... " et toi alors ? bon j'te demande plus si t'attendais quelqu'un d'autre hein... " j'indique la table mise comme pour un rencard et rigole. " j'suis sure que ça pourrait plaire en plus. t'as personne d'autre à inviter que ta pauvre petite soeur le vendredi soir ? " c'est pas que je m'inquiète mais bon... la quarantaine approche quand même !

Ce petit rituel entre Roni et moi amenait un peu plus de gaité et de fraîcheur à mon quotidien morne. Chaque journée se ressemblait et, si j’aimais mon petit train-train quotidien, cela n’en restait pas moins difficile à supporter certains soirs. Quand la solitude semblait refermer ses griffes acérées sur ma peau, la déchirant en profondeur. Laissant des traces qui jamais ne s’effaceraient. Alors revoir le sourire de ma plus jeune sœur était comme une douceur sur mon âme. Je retombais un peu dans mes jeunes années, comme un enfant qui se laissait enivrer par le goût sucré des bonbons sur sa langue. C’était agréable. C’était tout ce que semblait réclamer mon cœur fatigué, certains soirs. « Avoue que ce serait un voyage très intéressant, je ris alors que je repose Roni les pieds sur terre. » Notre différence d’âge avait comme rendu difficile nos liens. La brunette et moi nous aimions, c’était indéniable, mais il était compliqué de trouver de quoi parler avec sa petite sœur quand elle avait la moitié de votre âge. Ces repas, c’était aussi pour mieux la connaître. C’était aussi pour retrouver mon rôle de grand-frère – ce rôle que je n’ai pas eu la sensation de remplir auprès d’elle. « Tu es brillante, Roni, alors je suis sûr que tu vas les réussir, ces examens, j’assure avec un petit hochement de tête. Mais ne fais pas exploser cette petite tête avec toutes ces connaissances, hein. » Je lâche un petit rire alors que ma main vient se passer entre les mèches brunes avec tendresse.

Sa remarque sur ma table me fait tiquer et je manque de lui tirer puérilement la langue. C’était une petite blague entre nous, depuis que nous avions commencé à dîner tous les deux les vendredis soir. « Ah ouais, tu es comme ça, toi ? Tu attaques fort, dis-moi. » Parler relations amoureuses avec Roni me semblait étrange – je ne savais rien de ce genre de choses pour elle et inversement. Un peu maladroit, je me gratte l’arrière du crâne, les yeux rivés sur notre table. « D’accord, j’en fais peut-être un peu trop, j’admets dans un sourire contrit. Mais je n’ai envie de passer la soirée avec personne d’autre que ma petite sœur adorée, voyons ! » Je ris un peu avant d’ajouter, la moue songeuse : « Bon, ce serait encore mieux si Imelda était présente mais quand il s’agit de lui sortir le nez de ses machines, celle-là… » Un jour, j’irai simplement la chercher, l’obligerai à se laver, s’habiller et venir avec moi jusqu’à chez moi pour que l’on dîne tous les trois. Ce n’était pas quelque chose que l’on faisait aussi souvent que l’on devrait. Et je n’étais pas doué pour appeler régulièrement, envoyer des messages – j’étais encore plus nul quand il s’agissait d’y répondre. Alors j’avais toujours un peu l’impression de rater beaucoup de leur vie à toutes les deux. « Je trouve quand même que tu poses beaucoup de questions sur ma vie amoureuse, tu as peur de me voir devenir vieux garçon avec cinquante chats ? » Si l’idée peut paraître amusante au premier abord, il y a tout de même ce petit pincement qui devient douloureux dans ma poitrine – comme si la peur était déjà là, présente jusque dans les couches de ma peau déchirée.

” avoue que ce serait un voyage très intéressant. ” oh c’est sur que de voyager dans l’espace, rejoindre la lune ce serait quelque chose de génial. mais ce n’est pas pour moi. je n’ai pas le vertige enfin pas aux dernières nouvelles. mais me retrouver dans cet environnement étranger etc je ne suis pas sure. non je suis même certaine que ça ne me plaira pas. enfin de toute façon ce n’était pas une vraie demande, la réalité ni rien. c’est juste comme ça. ” tu es brillante, Roni, alors je suis sûr que tu vas les réussir, ces examens. mais ne fais pas exploser cette petite tête avec toutes ces connaissances, hein. “ il a une sacré confiance en moi quand même. enfin je sais que je peux réussir mais il y a toujours une part de chance. sur le sujet et sa compréhension. et ça peut me faire perdre tous mes moyens. ” promis et puis si ça doit arriver je n’exploserai pas dans ton appart pour ne pas salir les murs. “ je lui tire la langue et me moque ouvertement de lui. mais ce n’est pas méchant. ça ne l’est jamais entre nous. j’aime bien quand il a ces gestes tendres parce que c’est ce qui me fait sentir comme à la maison. même si ce n’est pas chez moi. c’est chez nino. alors… ça compte un peu comme tel. et puis forcément en bonne petite soeur, je dois taquiner mon grand frère. c’est une obligation. c’est dans mes gênes. ” ah ouais, tu es comme ça, toi ? tu attaques fort, dis-moi. d’accord, j’en fais peut-être un peu trop. m Mais je n’ai envie de passer la soirée avec personne d’autre que ma petite sœur adorée, voyons ! bon, ce serait encore mieux si Imelda était présente mais quand il s’agit de lui sortir le nez de ses machines, celle-là…“ je rigole en pensant à ma grande soeur. c’est vrai qu’on ne se voit pas souvent. nos emplois du temps ont du mal à correspondre. ” je suis certaine que si on avait des boulons et des microprocesseurs on l’intéresserait bien plus. “ mais je dis ça en souriant. même si oui, j’aurai aimé qu’elle soit là quand même. ” et contente d’être ta priorité. “ ça ne fait pas tout c’est clair mais c’est mignon. il est un poil protecteur, j’ai pas l’habitude sauf qu’il garde mon secret alors je lui dois bien ça. ” te trouve quand même que tu poses beaucoup de questions sur ma vie amoureuse, tu as peur de me voir devenir vieux garçon avec cinquante chats ? “ installée devant la table, je m’assois et m’adosse le plus confortablement possible. c’est un peu ça oui. même si compte pas sur moi pour venir les nourrir quand tu seras trop faible pour le faire ! j’aurai ma carrière de styliste internationale tu comprends que j’ai des priorités. “ j’éclate de rire bien loin encore de ce rêve mais j’y travaille. puis je serai là pour lui. ” mais ça m’étonne oui. parce que t’es loin d’être moche puis t’es pas trop con alors c’est bizarre ! sauf si tu vois quelqu’un et que tu ne nous dis rien ? “ ça peut aussi hein… deux petites soeurs, c’est pas les meilleures confidentes qui soient.

Roni et moi n’avions jamais eu véritablement l’occasion d’être proches l’un de l’autre. J’avais essayé de remplir mon rôle de grand-frère au mieux mais la différence d’âge avait fait que nos existences ne s’étaient finalement que croisées. Pendant toutes ces années, j’avais regardé ma petite sœur grandir, devenir une jeune femme sans avoir réellement l’impression de faire partie intégrante de sa vie. Quelque part, ces repas forcés chez moi, c’était aussi un peu une façon maladroite de rattraper tout ce temps perdu, tous ces moments manqués entre elle et moi. Je savais bien que ça ne ferait pas tout mais j’avais l’espoir que ça fasse comprendre à ma sœur benjamine que j’étais là pour elle – qu’elle en ait besoin ou non. « Les murs de mon appartement ne craignent pas grand-chose, tu sais, je ris avec elle, attendri par son air de petite fille faussement boudeuse. » Il y a quelque chose d’agréable à entendre son rire qui ricoche contre le béton, comme si elle imprimait un peu de sa présence dans les cloisons de mon foyer parfois si terne et si silencieux. J’aimerais pouvoir emprisonner la mélodie de ses sourires, les garder avec moi et pouvoir les laisser me caresser les tympans les soirs où la nuit se fait trop noire et la lune trop grise. « Ma famille a toujours été ma priorité, même si je n’ai pas toujours assez de temps à lui accorder, déploré-je, l’air dépité, avec un haussement d’épaules. »

Ma vie est assez routinière, dans le fond. Métro, boulot, dodo, comme ils disaient. En réalité, je laissais mon travail prendre beaucoup de place dans ma vie, même si ces derniers temps la présence de Damen rendait les choses plus difficiles. Les souvenirs qu’il portait avec lui sans même le savoir pesaient sur ma poitrine comme un énorme rocher qui m’empêchait de respirer. « Je rêve ou tu m’as fait deux compliments en une phrase ? » Amusé, je lui adresse un clin d’œil bien que touché par sa façon de m’exposer sa façon de me voir. C’était sûrement ainsi que nous fonctionnions tous les deux : à nous dire les choses trop personnelles de manière détournée, sans vraiment utiliser les bons mots, trop pudiques lorsqu’il s’agissait de nos émotions. « Pour tout t’avouer, il y a bien quelqu’un, oui, j’avoue finalement à mi-voix. C’est tout récent alors je ne voulais pas encore en parler… Mais puisque tu poses la question et que tu sembles si curieuse… » Je me mets à rire doucement. « Elle s’appelle Gina. » Il y a un goût de papier mâché qui m’envahit soudain la bouche mais je force un sourire, comme dans l’espoir de voir s’évanouir l’amertume au fond de ma gorge. Si Roni savait seulement. Si elle savait que son frère n’était même pas capable de construire une véritable relation.

" les murs de mon appartement ne craignent pas grand-chose, tu sais. " je hausse les épaules feintant quand même de cacher ce sourire qui pointe. c'est mon grand frère, c'est ma famille. " ma famille a toujours été ma priorité, même si je n’ai pas toujours assez de temps à lui accorder. " ce n'est pas que je ne le crois pas. c'est juste que c'est bizarre. sachant qu'on n'a jamais été tous très proches. on s'aime, c'est pas le soucis. on s'aime et on sera là pour les autres. même si moi j'ai plus l'habitude qu'on soit là pour moi que l'inverse. ça doit être la malédiction quand on est la plus petite. ne pas arriver à se sentir légitime de vouloir aider ses aînés. " je rêve ou tu m’as fait deux compliments en une phrase ? " je plaque mes mains sur ma bouche et ouvre grand les yeux comme si je venais d'être prise en faute. je tourne vivement la tête de droite à gauche à moitié hilare. " ja-mais ! je ne vais pas te faire de compliments quand même. c'est pas mon genre. " et le rire finit par s'échapper. j'aime mon frère et je suis sincère dans ce que je lui ai dis. " pour tout t’avouer, il y a bien quelqu’un, oui. " alors là il a toute mon attention. j'arrête tout ce que je suis en train de faire pour ne me concentrer que sur lui. " c’est tout récent alors je ne voulais pas encore en parler… mais puisque tu poses la question et que tu sembles si curieuse… elle s’appelle gina. " je tente de fouiller dans le fin fond de ma mémoire si j'ai déjà entendu ce prénom mais il ne me semble pas non. ou alors je l'ai oublié. ce n'est pas du tout dans mes habitudes mais sait on jamais. " gina hein ! c'est son prénom ou surnom ? et elle est comment ? elle a quel âge ? elle fait quoi dans la vie ? puis je l'ai déjà vu ? tu l'as rencontré comment ? " oh il ne va pas échapper à l'interrogatoire en règle, ça je suis certaine qu'il le sait.

Je crois que j’ai commis une erreur en amenant Gina dans la conversation. Roni est soudainement trop curieuse, trop intéressée aussi. Et ma relation avec la brunette n’est qu’un peu de vent, de paillettes jetées aux regards extérieurs parce que nous étions tous les deux mauvais pour les vraies histoires de sentiments. Heureusement, je connaissais assez la jeune femme pour répondre aux questions de base mais j’avais encore beaucoup à apprendre d’elle et je ne savais pas si j’en aurais véritablement l’occasion un jour. Je ne savais pas ce que deviendrait ce que nous étions en train de faire ensemble. Je ne peux cependant pas m’empêcher de sourire à voir ma petite sœur avec ses yeux brillants, un peu comme si on lui avait présenté tout un tas de gâteaux et de friandises à déguster. « Hey, je croyais que c’était moi, le flic de la famille, j’ironise en riant chaleureusement d’un air amusé avant de tendre la main pour lui pincer gentiment le nez. »

Et même si je ne voulais pas l’admettre, Roni avait grandi. Elle n’était plus un bébé. « J’ai longtemps cru que Gina était son prénom mais un jour elle a fait une gaffe et j’ai appris qu’elle s’appelait Georgina. Je crois qu’elle n’aime pas vraiment son prénom en entier alors je l’appelle toujours Gina. » Je crois même que la brune serait capable de m’étriper si je venais à l’appeler par son prénom véritable et elle me faisait bien trop peur pour que je m’essaye à vouloir m’amuser avec elle sur ce point-là. « Elle a trente-trois ans et elle travaille dans la danse. Elle est agent artistique mais elle se définit plutôt comme baby-sitter parce que certains artistes dont elle s’occupe ressemblent plus à des bébés qu’à des adultes, comme elle dit souvent, continué-je en laissant échapper un léger rire. Mais ça se voit qu’elle aime son métier. » Elle ne me l’avait jamais dit véritablement mais ça se sentait quand elle en parlait. Je crois que c’était surtout par rapport à la danse que ça la faisait vibrer mais elle ne semblait jamais véritablement l’avouer. C’était toujours à demi-mot, comme si elle retenait quelque chose d’un peu plus secret. « Non tu ne la connais pas tout simplement parce que, comme je t’ai dit, c’est tout récent et je ne pensais pas encore en parler à qui que ce soit. » En réalité, je crois que j’aurais voulu garder ce semblant de relation dissimulé à mes proches le plus longtemps possible. « Notre rencontre n’a rien de glamour et tu es trop jeune encore pour que je te raconte ça, alors tu n’as qu’à te dire que, comme dans un conte de fées, je suis arrivé sur mon beau cheval blanc et que je l’ai sauvée d’un méchant monstre qui voulait la manger. » Je ne peux m’empêcher de rire, tout de même un peu honteux de devoir avouer à ma jeune sœur que si j’étais en couple aujourd’hui avec Gina c’était parce qu’on s’était trouvés tous les deux dans ce bar, désespérés et dans le besoin d’une compagnie pour la soirée. Quelle qu’elle soit.