si seulement tout pouvait être plus facile (tahïs)

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La journée ne peut pas être pire. C'est ce qu'elle essaye de se dire, comme une façon de se rassurer. Mais il faut être honnête, en presque vingt-trois ans d'existence, Camryn n'avait encore jamais connu ça.
Alors qu'elle pensait pouvoir rentrer chez elle en début d'après-midi pour profiter pleinement de la tranquillité de l'appartement, elle s'est retrouvée bloquée au métro à cause d'un malentendu. La tête ailleurs, la blonde a oublié son sac au plein milieu de la station lorsqu'elle est partie aux toilettes et quand elle est revenue, les transports étaient bloqués, les autorités étaient prévenues.
Elle aurait pu partir, s'enfuir, mais quand une personne est innocente, agir de la sorte n'est pas recommandé. Surtout qu'à l'intérieur de ce sac, Camryn savait qu'il y avait des éléments qui pouvaient permettre de la retrouver. Sa licence par exemple. Il n'y avait rien d'important dans ce sac, c'est bien pour cette raison qu'elle l'a oublié. Mais il était suffisamment incriminant pour qu'elle puisse ignorer tout cela et rentrer chez elle comme si de rien était. Elle ne pouvait pas partir, mais elle ne pouvait pas non plus s'approcher et récupérer ses affaires comme cela. Alors pendant de longues minutes, elle a réfléchi à ce qu'elle devait faire. Elle a pesé les pour et les contres dans le choix de ce qu'elle devait faire et elle a fini par se lancer.
Sa journée, un enfer. Mais après de longues minutes de rappel à l’ordre et de morale, elle finit par retrouver le chemin de son appartement. Les forces de l’ordre avaient clairement autre chose à faire, mais ils préféraient certainement cette issue à une autre plus dramatique.
Camryn fait le reste de son trajet la tête baissée. Elle a l’impression que tous les regards sont posés sur elle. Ce n’est que son imagination bien sûr, l’histoire n’a pas eu le temps de s’ébruiter autant, mais elle prend cela comme une punition : son subconscient qui lui fait payer sa maladresse. Arrivée chez elle, elle pousse la porte d’entrée et la tranquillité qu’elle espérait trouver en début d’après-midi a disparu. Son frère est là, s’attelant comme il peut dans la cuisine pour faire quelque chose de potable. Il ne lui faut pas longtemps pour comprendre qu’il n’est pas seul. La blonde tourne la tête et croise le regarde de Tahïs. Tahïs. Une milliseconde plongée dans son regard et déjà des souvenirs de leur nuit ensemble remontent à la surface. Finalement, elle aurait peut-être préféré passer la nuit en garde à vue.
Camryn a toujours eu de l’affection pour la jeune femme, elle n’en a jamais douté, mais à aucun moment elle n’avait imaginé cela, de cette sorte. À vrai dire, sans parler de Tahïs, elle n’avait jamais imaginé franchir le pas avec une femme. Mais quand elle y réfléchit bien, elle ne trouve pas cela dénué de sens. Si elle a attendu aussi longtemps pour faire sa première fois avec un garçon, c’est peut-être parce qu’elle n’était pas tant attirée par eux.
Cette soirée a foutu le bordel, dans sa tête et dans sa vie. Comment peut-elle regarder son frère dans les yeux maintenant ? Surtout qu'à ce moment précis, la blonde ignore si elle regrette son geste ou pas. Ce n'était pas à faire et si son aîné l'apprend, il risque d'être blessé, mais elle ne s'était jamais sentie aussi bien que ce soir-là. « Je n'ai pas faim. Mangez sans moi. » Ils ne lui ont rien demandé et ce n'est pas encore l'heure du repas, mais Camryn ne peut pas rester avec eux, elle ne peut pas être dans la même pièce que Tahïs, pas encore. « Tout va bien ? » Elle s'apprêtait à quitter la pièce quand son frère lui pose cette question. « Ouais super. » Dit-elle, sans prendre la peine de s'arrêter.
Arrivée dans sa chambre, elle peut enfin être et faire ce qu'elle veut. Elle commence par se mettre à l'aise, car autant le dire, après la journée qu'elle a passée, elle veut clairement se poser. Sans attendre plus longtemps, elle s'allonge sur son lit. Sans vraiment s'y attendre, elle se sent partir. Elle devrait travailler pourtant. Elle sursaute, et se réveille par la même occasion, quand elle entend quelqu'un frapper à sa porte. Camryn reste silencieuse pendant un certain temps. Elle regarde son réveil. Quarante minutes, c'est le temps qu'il s'est écoulé depuis son arrivée. « Oui ? » Dit-elle timidement, regrettant déjà d'avoir lancé une invitation à entrer. En quelques sortes.

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À l’instant même où elle prononce ce oui, elle le regrette déjà. Ce qu’elle voulait elle, c’était être seule et là, elle va devoir renoncer à cela, sur un plus ou moins long terme. Mais maintenant que c’est fait, elle ne peut plus revenir en arrière et elle le comprend bien lorsque Tahïs franchit le pas de sa porte. Assise sur son lit, Camryn reste silencieuse. Pourtant, elle aimerait lui demander de partir. En réalité, c’est ce qu’elle devrait faire, peut-être pas ce qu’elle veut vraiment.
Le problème, c’est qu’en présence de la jeune femme, la blonde perd tous ses moyens. Sa voix aussi. Alors sa demande reste au fond de sa gorge et Tahïs dans sa chambre.  
La question de sa belle-sœur n’est pas méchante, elle est remplie de bonnes intentions. Néanmoins, Camryn aurait préféré s’en passer. Tout à l’heure, elle avait dit ne pas vouloir manger et elle pensait avoir été claire. Comme simple réponse, elle se contente d’osciller la tête de gauche à droite. Elle s’attend maintenant à la voir partir, mais visiblement, les deux jeunes femmes ne sont pas sur la même longueur d’ondes. Alors que la benjamine voudrait être seule, ou plutôt loin de Tahïs, l’aînée semble vouloir rester ici. Lorsque la porte de la chambre se referme, l’écrivaine reprend la parole. Une personne aveugle pourrait se demander si Camryn est vraiment là, tellement elle ne parle pas. Ses cordes vocales sont bloquées. La jeune femme lui avoue être inquiète et instantanément, la blonde plante son regard dans le sien, comme si elle venait de dire LA phrase interdite. À vrai dire, peu importe ce qu’elle pourrait dire, Camryn agira tout le temps de la même façon.
Elle ne sait même pas si elle veut lui répondre. Et quand Tahïs vient s’asseoir, la blonde a un geste de recul. Dans l’idéal, elle voudrait se tenir le plus loin possible d’elle, mais si elle se décale encore, elle risque de tomber au sol. Son état ne semble pas passer inaperçu auprès de sa belle-sœur qui avec sa dernière phrase semble vouloir la rassurer. Mais la réalité, c’est que Camryn ne comprend pas vraiment. Elle n’a rien à craindre ? Qu’est-ce que cela veut vraiment dire ? En l’espace de quelques secondes, la jeune femme se demande ou plutôt s’imagine ce qu’il se passerait si jamais elles étaient seules, encore.
Mais ce n’est pas la chose à faire. Alors machinalement, elle secoue doucement la tête. Elle ne doit pas aller sur ce terrain glissant. Elle doit simplement revenir aux questions initiales  et faire sortir Tahïs de sa chambre au plus vite. « Tu veux tout savoir ? J’ai été prise pour une terroriste aujourd’hui. » Elle n’y va pas par quatre chemins. Il n’y a pas de raisons de tourner autour du pot. Elle voulait savoir pourquoi elle était partie dans sa chambre aussi vite, c’est chose faite et clairement, Camryn n’a pas envie de s’étaler plus. Elle est suffisamment honteuse comme ça.
« Pourquoi est-ce que tu es là ? » Dans cette chambre pour commencer, mais au fond d’elle, Camryn se demande aussi ce qu’elle fait là en général. Pourquoi est-ce qu’elle ne réagit pas comme elle ? Pourquoi est-ce qu’elle ne cherche pas à fuir ? Elle a tout de même trompé son petit-ami, ce n’est pas rien. Elle ne devrait pas avoir envie de la voir, de passer du temps avec elle. Elle devrait vouloir être avec celui qui partage sa vie, histoire de rattraper un minimum, pour sa conscience, le geste qu’elle a fait. « Pourquoi est-ce que vous êtes là ? Il me semble que tu as un appartement, vous pourriez y aller. » Finit-elle par ajouter. Les confessions commencent, alors autant être directe maintenant. Camryn, ça la tue de la voir ici. Ça la tue de les voir ensemble et de se rappeler ce qu’elle a fait à son frère. Dans son geste, c’est bien ça qui la gêne le plus. Il est amoureux de Tahïs, il lui semble, et elle, elle ne trouve rien de mieux à faire que de coucher avec elle.
Elle ne saurait expliquer comment, mais la jeune femme a un effet sur elle dès qu’elles se retrouvent dans la même pièce. « Tu devrais retourner avec lui. » Alors que ces mots sortent de sa bouche, la blonde se lève de son lit et fait plusieurs pas en arrière. Comme si ça allait changer quelque chose. Comme si ces mètres en plus allaient réduire à néant l’attirance qu’elle a pour elle. Ça ne suffira jamais et Camryn le sait bien. La seule solution qui s’offre à elle pour ne plus la voir, c’est de se trouver un autre appartement et de venir voir son frère uniquement quand sa petite amie n’est pas là.

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Tahïs a beau répéter que la blonde sait, celle-ci hoche la tête de gauche à droite. Même si c’est vrai, elle refuse de l’avouer. Elle ne peut pas. Son frère est à côté. Il pourrait tout entendre ou alors débarquer par surprise ici, sa copine l’a en quelque sorte fait, alors pourquoi pas lui. Mais ce n’est pas possible. Il ne peut pas les voir ensemble, il ne peut pas supposer quelque chose. L’idée que sa copine et sa sœur vivent une histoire ne doit certainement pas lui traverser l’esprit et ça doit rester ainsi. Le temps qu’elles prennent leur distance, que tout redevienne comme avant, avant cette nuit-là.
Rien que d’évoquer ce moment, les images lui reviennent à l’esprit. Elle sert les dents et secoue légèrement la tête. Elle ne peut pas y penser. Jusque là, elle résiste plutôt bien et ça doit continuer ainsi. Car des deux jeunes femmes, Camryn est la seule qui semble voir le problème, la seule qui semble vouloir s’opposer à tout ça, à cette histoire qui n’a pas de futur.
« J’Y VAIS ! » Non. Non. Ce n’était pas censé se passer comme ça. Tahïs ne devait pas débarquer ici et le frère de l’anglaise ne devait pas partir. Maintenant, elle se sent piégée. Piégée entre sa raison et son envie. Si ça ne tenait qu’à elle, qu’elle ne serait que deux dans cette histoire, Camryn lui aurait certainement déjà sauté dessus. Mais là, ce n’est pas le cas et se tenir éloigner d’elle est la seule solution pour tenir, pour rester forte.
Au final, elle aurait peut-être mieux fait de finir la nuit en garde à vue. Là-bas, elle n’aurait pas eu ce genre de problèmes. En réalité, problème n’est peut-être pas le terme adéquat. Tentation. Ça collerait mieux. Car la jeune femme le sait au fond d’elle, en restant seule ici, avec Tahïs, elle risque de craquer. Elle ne doit pas le faire. Non, non. C’est ce qu’elle se répète, mais c’est bien plus compliqué que prévu. Elle peut toujours essayer de partir, de prétexter avoir quelque chose à faire et suivre son frère. Mais Camryn n’a pas l’habitude de mentir et son corps est complètement tétanisé. Elle ne peut pas bouger, ni parler. Le silence règne dans la chambre de la jeune femme jusqu’à ce que la porte d’entrée claque. Il n’est plus là. Elles ne sont plus que toutes les deux et Camryn ignore si c’est bien ou mal. N’arrivant même pas à la regarder dans les yeux, ça s’annonce plutôt mauvais.
Au fil des minutes ici, Tahïs s’est rapprochée de la blonde. Elle avait pourtant essayé de mettre de la distance entre elles. À mesure qu’elle avançait, Camryn reculait, jusqu’à ce que ce ne soit plus possible, jusqu’à ce que son dos bute contre le mur. Pour fuir, ça devient compliqué. Si jamais elle veut quitter la pièce, elle devra passer tout près de sa belle-sœur et ça, ça pourrait la tuer.
Depuis qu’elles ont passé la nuit ensemble, son parfum la rend complètement folle, alors là, de passer à quelques centimètres d’elle, ça ne pourrait que lui faire perdre pieds. « Tu ne devrais pas rester ici. » Se contente-t-elle de dire. Au fond d’elle, Camryn bouillonne. Cela la met hors d’elle de voir que Tahïs ne comprend pas, qu’elle s’acharne à vouloir la voir autant. Elle bouillonne de colère. Ou alors, c’est simplement l’effet qu’a la blonde sur elle. « Ce n’est pas une bonne idée. Tu devrais partir. » Elles. Toutes les deux, si proche l’une de l’autre. C’est ça la mauvaise idée. Et malheureusement, la blonde n’a pas la force de lui ordonner de partir, pas clairement en tout cas. Alors elle la supplie, en espérant qu’elle accepte. Ça ne s’annonce pas simple, mais qui sait. Qui ne tente rien n’a rien. « S’il te plaît. » La supplier de partir reste la meilleure option qui s’offre à elle.