« Bobby. » Elle se mit à plat ventre et tendit le bras pour attraper le lapin qui s’était soigneusement planqué sous le canapé. Il avait le chic pour la mettre en retard lorsqu’elle avait des rendez-vous importants. Elle le rassura en plantant un baiser entre ses deux oreilles puis rejoignit sa chambre tranquillement. « Tu me promets d’être sage avec ton petit frère hm ? » Il la fixait sans comprendre, cherchant seulement à s’échapper comme il adorait le faire mais Charlie réussit à le mettre dans son enclos. Il était coincé pour au moins trois bonnes heures, à moins qu’il parvienne à bondir suffisamment haut pour foutre le camp. La blonde mit sa veste, ses gants et vérifia l’heure. Elle était dans les temps. Ses colocataires n’étaient pas là du week-end comme à chaque fois, c’était la saison du retour chez les parents pour gratter un peu d’argent et des lessives gratuites.
Elle attrapa son skate offert par Avalon et descendit quatre à quatre les marches pour rejoindre la rue froide et vide. Yes. Un coup d’œil sur la route et c’était parti pour la tatoueuse. Les pieds sur la planche, les écouteurs vissaient dans les oreilles, elle traçait sa route sans se soucier des voitures, c’était pas peuplé dans le coin, elle pouvait profiter de la sensation de glisse sans risquer de se faire faucher. Dix minutes lui suffirent pour rejoindre le cabinet vétérinaire de son quartier. Certes il était paumé mais le gars était un professionnel et savait ce qu’il faisait. Elle attrapa sa planche, la glissa dans son sac à dos et fit son entrée, saluant le personnel.
Elle allait adopter une loutre, oui une loutre, le truc qui gigotait dans tous les sens et qui faisait des bruits aigus. Pourquoi ? Parce que la dernière fois qu’elle avait amené Bobby, on lui avait parlé du petit animal retrouvé chez un propriétaire négligeant et Charlie n’avait pas pu résister à l’idée de prendre la bestiole sous son aile. Mais ce n’était pas une décision à prendre à la légère alors ils avaient mis en place des rendez-vous pour voir si la loutre se plairait chez Charlie. Une journée dans le salon histoire de s’accommoder puis la nuit chez le véto et ainsi de suite. C’était la troisième fois qu’elle le faisait et le petit Ferdinand, oui oui Ferdinand commençait à se plaire chez elle. « Ah Charlie tu es là ! Ferdinand t’attend ! » Elle offrit un large sourire au vétérinaire et le suivit pour faire face à la cage où se trouvait l’animal.
La trompettiste s’accroupit et offrit un doigt à la loutre qui poussa un cri de joie en la voyant. Il s’agitait dans tous les sens, la faisant rire. « Coucou toi, tu sais que tu reviens à la maison pour de bon aujourd’hui ? » Tout était prêt pour qu’il devienne le cinquième habitant de la colocation au risque de ne plus voir sa meilleure amie y mettre un pied. Charlie le prit dans ses bras et il se réfugia dans son cou alors qu’ils traçaient leur route dans la salle d’attente où elle tiqua sur un visage familier. C’était pas Noa avec… un chat ?
Milady, c’est l’amour de sa vie. Pas le seul, puisqu’il y a Ley, par exemple, ou encore Charlie, pour qui ses sentiments ne s’arrêtent jamais de grandir. Mais Milady, c’est ce petit chat trouvé dans la rue, abandonné, et seul. Une petite bouille qu’elle n’a jamais pu laisser, et qu’elle a pris avec elle. Il en a fallu, du temps, pour que cette petite se fasse à la fois à sa nouvelle maison, mais aussi à sa nouvelle maîtresse. Et bien évidemment, il a fallu aller chez le vétérinaire un bon nombre de fois, pour vérifier qu’elle était en bonne santé, lui faire des vaccins, etc. Tout pour son chaton. Chaton devenu quelque peu grande, désormais. Dans quelques temps, elle ne dira plus « chaton » mais « chatte », en la regardant. Et qu’est-ce qu’elle est belle… Dans les bras de la p’tite Watkins, elle ronronne tout doucement, alors qu’elle prend la cage, au cas où. Elle l’aime, sa belle Milady, et elle ne veut pas la mettre en cage, mais elle ne veut pas non plus que cette dernière s’affole. Il vaut mieux la garder avec elle, pour la protéger. Même si l’idée de la mettre dans cette belle cage lui tire un soupir. Bon. Pas tout de suite. Elle prend la cage sous le bras, elle annonce à sa sœur qu’elle y va, et elle claque la porte.
Portant une doudoune bleue, et un pantalon noir, quelque peu déchiré, la petite Watkins fait glisser son chaton entre sa poitrine et son manteau, pour éviter qu’elle attrape froid. Non, il ne fait pas forcément très froid, l’hiver n’est pas encore là, mais tout de même. Elle ne veut pas qu’un petit malheur, quelqu’il soit, arrive à son petit trésor ronronnant. Surtout sur la route du véto. Parce que oui, examen de routine. Milady mange un peu moins depuis quelques jours, donc c’est aussi un moyen de vérifier que tout va bien.
Passant la porte d’entrée après de longues minutes de marche, maudissant intérieurement l’emplacement du vétérinaire – mais elle n’en changerait pour rien au monde – elle se glisse au devant de la secrétaire du vétérinaire, et s’annonce. Pour ensuite aller dans la salle d’attente. Doudoune enlevée et chaton libéré, elle la caresse doucement, tandis que Milady ronronne. Elle ne fait attention à rien, ni personne. Elle joue juste avec son chaton qui tente ensuite d’attraper sa main. Et lorsqu’elle la laisse l’avoir, elle s’amuse en voyant les petits crocs de Milady tenter de la mordiller. Elle ne lui fera pas mal. Elle ne lui fait jamais mal. Ce n’est pas une attaque, c’est un jeu, une marque d’affection. Et Noa ne peut rien refuser à son petit trésor tout pelucheux.
Lorsqu’enfin la porte du docteur s’ouvre, machinalement, Noa relève la tête. Après tout, elle ne sait pas si c’est à elle, ou non. Est-il en retard ? Y a-t-il quelqu’un d’autre avant elle ? Normalement, elle est arrivée à l’heure, mais avec elle, on sait jamais. Sauf qu’à peine relève-t-elle la tête qu’elle voit la blonde qui hante ses pensées. Charlie. Ni une, ni deux, la p’tite Watkins, qui a perdu sa timidité face à cette femme, se lève et vient à sa rencontre. Charlie ! ça alors, c’est une drole de coïncidence. lui dit-elle, amicalement. Elle a un peu de rouge sur les joues, qu’elle ne peut pas effacer, mais elle est nettement moins passive que la première fois qu’elle a rencontré cette belle femme. Et en voyant la petite loutre, Noa ne peut s’empêcher de faire un Oooooh mais elle est trop choupiiiiiii… C’est qui ? la question est pour Charlie, tandis que Noa, des étoiles dans les yeux, regarde ce petit mammifère niché dans le cou de sa maman. Puis, pour faire les présentation, Noa montre Milady, qu’elle a dans les bras, et qui semble blasée de ne plus être le centre d’attention de sa maman à elle. Je te présente Milady, au fait. Tu ne l’avais pas vue, la dernière fois. Et elle passe sa joue contre son chaton adoré. Elle ne peut pas s’en empêcher. Et Milady ronronne. Ah, c’est trop mignon. Elle ne pourra jamais se lasser de cette sensation. Du coup, Bobby a un petit frère ? dit-elle, après avoir su que la loutre en question était un petit Ferdinand. Et elle craque devant ce petit ange. Noa et les animaux, de toutes façons, c’est une véritable histoire d’amour…
Elle avait presque voulu en faire une occupation, s’occuper d’animaux délaissés pour leur offrir une tendre famille par la suite. Malheureusement elle n’avait ni la place ni le temps pour les chérir convenablement. Elle se contenterait alors de son lapin nucléaire -elle aimait l’appeler ainsi pour sa capacité à bondir partout pour disparaître- et de sa loutre adorablement bruyante -elle allait sûrement lui servir de réveil dans les prochains jours-. Ses parents n’avaient jamais souhaité d’animaux à la maison alors la Suissesse se rattrapait convenablement. Ses colocataires ne s’étaient jamais plein des petits habitants, au contraire, elles appréciaient voir Bobby mettre un peu de bazar dans l’appartement.
La blonde fit attention à ce que son nouvel ami ne se casse pas la figure à rester ainsi perché sur son épaule, le gratifiant d’une petite caresse sur le sommet du crâne. On l’aborda brusquement dans la salle d’attente, certes elle avait cru reconnaître un visage mais n’avait pas eu le temps de confirmer ses pensées qu’on lui sautait déjà dessus. Un fin sourire étira ses lèvres angéliques et son regard se posa sur la mine réjouie de Noa. Elles se connaissaient depuis plusieurs semaines désormais et elles gardaient facilement contact, même si Charlie faisait en sorte de prendre son temps, ce n’était plus son genre de foncer tête baissée. « Hey Noa. » Elle leva légèrement la main pour la saluer.
Elle s’extasiait déjà sur la petite boule d’amour calée contre son bras droit. Ce n’était pas nouveau le caractère surexcité de la Watkins. Ferdinand avait cessé de mordiller une de ses pattes pour poser un regard suspicieux en direction de la bête poilue en face de lui. « Mon nouvel ami, Ferdinand. » Elle assumait totalement ce nom décalé qui ferait sûrement hausser les sourcils de certains, mais la normalité elle n’aimait pas ça la blonde. Milady, c’était donc ça le nom du chat de Noa, elle avait des airs de Diva ainsi blottie dans les bras de sa maîtresse. Charlie avait souvent cette impression pour tous les chats qu’elle croisait. « Enchantée Milady… » souffla-t-elle en direction du félin. « J’espère que Bobby ne va pas avoir trop peur, il n’a jamais eu la chance de voir d’autres animaux depuis que je l’ai adopté, mais je me suis dit que ça pouvait lui faire plaisir d’avoir un compagnon. »
Elle vérifia que la loutre ne tentait pas de s’enfuir puis reposa son attention sur la blonde et son animal de compagnie. « Et toi ? Qu’est-ce que tu fais ici ? Milady est malade ? »
Cette petite loutre est tout simplement adorable. A mordiller sa petite patte, ou à regarder Milady. Noa est complètement sous le charme, et elle a bien envie de la caresser, mais c’est encore un bébé, elle ne veut pas lui faire peur. Et puis, elle préfère qu’il soit bien installé chez Charlie avant de demander à cette dernière si elle peut le prendre dans ses bras. EN attendant, son regard bleuté est obnubilé par ce petit animal si mignon, sa fine fourrure, ses yeux de biche, et ses petits cris aigus, qui ne manque pas de ravir le cœur de la jeune Watkins. Si elle pouvait, Noa aurait chez elle des tonnes d’amis à fourrure, à écailles, à plumes, ou autre. Mais le temps, l’argent, et Marley ne serait probablement pas d’accord. Pas que Marley n’aime pas les petites bêtes, mais bon. Elle ne va pas l’ensevelir sous une tonne de nouveaux amis. Milady est bien suffisante. Milady, qui adore Marley, d’ailleurs, et se réfugie bien souvent sur ses genoux lorsque la petite fofolle des Watkins devient surexcitée. Parce que pauvre chaton, elle qui aspire au calme, et à la fainéantise, elle se retrouve bien souvent surprise par des cris de bonheur, par des mouvements brusques, et par cette folie douce qui plonge souvent la p’tite Watkins dans un état surexcité. Parce qu’elle est comme ça, Noa. Timide au premier abord, fofolle au second. Le seul gouffre qui sépare ces deux états se tient dans la méconnaissance de quelqu’un. D’ailleurs, maintenant que la timidité de la blonde s’est envolée au devant de Charlie, cette dernière risque de se retrouver avec une petite boule d’énergie bien souvent, en guise d’amie – et peut-être plus –. Il est vraiment vraiment vraiment trop trop chou ce petit Ferdinand ! assure la jeune Watkins, avant de rapprocher sa p’tite tête blonde de la loutre, pour lui faire un grand sourire, et un petit Coucouuuuu petit Ferdinand… Tu sais que t’es adorable ? Tu sais que t’es vraiment trop mignon ? Elle n’a pas peur du ridicule devant Charlie. Elle peut passer pour une gaga des animaux, d’ailleurs, c’est ce qu’elle est, ou pour une cinglée qui se met à parler à ces derniers, mais dans tous les cas, cela ne lui fait rien. Pas quand c’est la blonde qui fait doucement battre son cœur qui se trouve devant elle. Pas quand c’est un animal aussi mignon que Ferdinand qui se trouve devant elle. Et puis elle finit par reculer sa tête, pour se retrouver à nouveau face à Charlie.
C’est à ce moment qu’elle présente son chaton, et elle est ravie de voir le sourire de Charlie alors que cette dernière la salue. Milady tend sa patte pour toucher le nez de la Balmat, et Noa glousse doucement, avant de la serrer contre son petit cœur, tout en écoutant Charlie. Je suis sûre que ça ira. Et puis ça lui fera du bien, à Bobby, d’avoir un petit frère à cajoler. Elle veut la rassurer. Même si elle ne connait pas assez Bobby pour deviner sa réaction. Mais bon, que peut-il arriver ? Ils ont tous les deux une maman incroyable, qui saura, elle en est sûre, les faire s’aimer, et les faire se sentir bien. D’ailleurs, Bobby, d’après les dires de la belle blonde que Noa admire, est très content de sa maison et de sa maman. Donc Noa n’a aucune crainte. Elle sait que Charlie saura gérer. Et alors que l’inquiétude de cette dernière passe sur le chaton qui ronronne de plus en plus, les doigts de Noa la gratouillant doucement, cette dernière répond, un sourire sur le visage, un regard qui se veut exempt d’inquiétude, pour rassurer la blonde. Oh, c’est surtout une visite de routine. Un examen médical banal quoi. Mais Milady mange aussi très peu, ces derniers temps, donc je vais demander ce qu’il y a. Elle soulève le chaton, qui se met à poser ses pattes sur les joues de sa maitresse, et elle lui dit Je ne voudrais pas que ma petite princesse aille mal après tout. Hein ma chérie ? Le « chérie » est destiné à Milady, évidemment. Et alors qu’elle la chatouille doucement, le vétérinaire arrive pour dire Miss Watkins ? C’est à vous. Noa sourit, répond On arrive !, avant de demander à Charlie Tu veux nous accompagner ? Une simple invitation. Mais importante. Parce que Noa veut passer plus de temps avec elle.
Ferdinand s’était lassé de l’épaule de la blonde et avait décidé de se trouver un nouvel endroit. Sans plus tarder, il tâtonna le terrain, vérifia que le bras était assez solide pour qu’il puisse s’y glisser. De ses petits cris heureux et légèrement affolés, le nouvel ami de Charlie réussit avec succès à se blottir contre elle. Elle fit attention à ne pas le faire tomber, son bras se faisant plus solide sous lui. Ferdinand n’écoutait pas la conversation des deux humaines mais fixait le chat avec insistance, se demandait de quoi il s’agissait et s’il pouvait le manger. Après tout, il restait prédateur dans l’âme même s’il n’avait jamais mis une patte dans l’eau et que ses petits crocs n’avaient jamais mordu un poisson. Non c’était trop gros et trop poilu pour lui, ça ne devait pas avoir bon goût. Puis il leva la tête vers Charlie comme pour lui demander pourquoi une folle était aussi proche de lui à lui parler comme ça. Mais la blonde était trop occupée à répondre à la folle. « Je verrai bien, je vais y aller progressivement avec lui et Bobby. Puis il faut que je termine d’aménager l’espace de Ferdinand, j’ai fait quelques recherches… »
Il y avait encore un grand bassin à acheter pour qu’il puisse nager et chasser quelques poissons qu’elle ira se procurer au marché. Puis adapter également l’espace de Bobby qui avait toujours eu quartier libre dans l’appartement depuis qu’il était bébé. Il allait râler. « J’espère que ça ira pour Milady alors. » Elle lui sourit et empêcha Ferdinand d’aller voir les autres animaux. Déjà curieux, ça promettait… Le vétérinaire cria le nom de Noa et Charlie lui sourit une nouvelle fois. « Je préfère rentrer pour laisser Ferdinand découvrir sa nouvelle maison mais tu peux venir à l’appartement après. Je te ferai un chocolat chaud. » Non pas d’alcool, elle avait déjà vu la blonde ivre après à peine deux verres, elle ne prendrait pas le risque.
Ce regard sur cette petite loutre continue de faire naître le sourire sur les lippes de la p’tite Watkins, tandis qu’elle écoute son amie, qui lui parle de ses recherches, sur les habitats de ces petits animaux. Elle sourit, sûre que Charlie saura très bien faire de son appartement un véritable paradis pour Ferdinand, et lui répond Il va être comme un poisson dans l’eau, alors. Comme une loutre dans l’eau. Mais ce n’est pas l’expression, donc la petite fofolle des Watkins ne le dit pas. Et alors qu’elle parle de Milady, du fait qu’elle mange moins ces derniers temps, et que Charlie tente de la rassurer, ou de se rassurer elle-même, le vétérinaire les appelle. Charlie décline l’invitation, préférant ramener la loutre à la maison, mais l’invite à son tour, et le sourire de Noa se fait bien plus grand. Avec plaisir ! Elle rougit un peu, surtout en entendant le mot « chocolat chaud ». Oh ouiiii ! Du chocolaaaaat… Son amour de chocolat. Charlie la connait bien. C’est donc avec un grand sourire placardé sur son visage qu’elle dit A tout à l’heure alors !, avant de disparaître dans le cabinet du vétérinaire.
Lorsqu’elle en sort, elle est ravie. Milady n’a rien, et le docteur lui conseille de changer ses croquettes habituelles, de voir si c’est simplement une envie de changer qui empêche le chaton de manger. Alors en quittant le cabinet, elle regarde sa belle petite amie à fourrure, avant de lui dire On va t’acheter de nouvelles croquettes, d’accord ? Je te laisserais choisir, tu me diras lesquelles tu veux. Elle vient lui faire un bisou sur la joue, alors que le chaton miaule. Elle sourit, et la gratouille, avant de la serrer dans ses bras et de sortir dehors. Le temps s’est un peu embelli, c’est une bonne nouvelle. Elle regarde l’heure, puis commence à arpenter les rues, en direction de l’appartement de Charlie. EN chemin, elle n’hésite pas à chantonner pour son petit chat, bien calé contre elle, qui ronronne. Ce serait peut-être intéressant de savoir si le ronronnement est dû à la chanson, où aux caresses que Noa lui donne à intervalle régulier. Bon sang, Milady est vraiment trop gâtée, parfois. Mais la p’tite Watkins ne peut faire autrement, pour son amour de p’tit chat qu’elle aime tant.
Une fois devant l’appartement de Charlie, elle toque à la porte. Charliiiiie ! C’est moiiii ! lance-t-elle, comme si la sonnette n’existait pas, comme si les portables n’existaient plus. Ben oui, parce que gueuler dans le couloir menant à l’appartement, c’est évidemment plus efficace, et plus casse-pieds. Milady le lui fait savoir en bondissant hors de ses bras, et Noa pousse un petit cri de surprise, avant de rattraper son chaton. Désolée ma belle. lui murmure-t-elle, tandis qu’allongée par terre – elle a dû se jeter à terre pour la rattraper –, elle passe son doigt sur son petit museau, la laissant le mordiller. C’est évidemment lorsqu’elle est dans cette position que la porte s’ouvre. Et tournant la tête pour voir le visage de la blonde, Noa ne peut s’empêcher de sentir ses joues rosirent, tandis qu’elle lui fait un petit coucou du sol C’est pas ce que tu crois… commence-t-elle Je me… mets juste dans la peau de Milady. elle éclate de rire, avant de se relever, le chaton dans ses bras qui a très clairement envie d’en sortir, surtout maintenant que la porte est ouverte. Elle ne se fait pas prier, et s’échappe une fois de plus des bras de sa maitresse pour se réfugier dans l’appartement de Charlie. Milady ! Non ! Attends ! Et le chaton s’arrête près du canapé de la Balmat, pour commencer à se lécher la patte arrière. Désolée… lance Noa, confuse, une main venant derrière sa tête. Je crois qu’elle a besoin de se dégourdir les jambes. Euh, les pattes. J’espère que ça ira… Ferdinand va bien ? Et Bobby aussi ? Et.. euh… et toi aussi ? elle rougit un peu plus. Attendant sans doute que Charlie comble le vide, ou la laisse entrer. Après tout, elle lui doit un chocolat chaud.
Elle poussa la porte de l’appartement du bout du pied et tomba nez-à-nez avec Bobby. Son museau s’était redressé pour fixer cette chose qu’elle tenait dans les bras, peu en confiance. Non il n’était pas égoïste, à peine. On n’avait pas le droit de lui voler toute l’attention qu’on lui donnait, surtout celle d’Avalon et de ses caresses, pas touche la mouche. Mais Charlie se pencha pour le gratter entre les oreilles, fausse alerte elle se souciait toujours de lui. De petits bonds, il la suivit jusque dans la chambre où elle déposa le nouvel animal sur le sol. Prudent, le lapin s’étira sur ses pattes arrière pour s’approcher le plus près possible mais la loutre poussa un cri si strident qu’il prit la fuite pour se planquer sous un meuble. Charlie ne put s’empêcher de rire et déposa le nouvel habitant dans une cage suffisamment grande pour le moment, elle y avait glissé une bassine, des couvertures et des petites peluches le temps qu’elle puisse de terminer l’espace du petit Ferdinand. Ses doigts fins caressèrent le pelage de l’animal puis elle referma la grille, se redressa pour aller rassurer son lapin.
Elle passa presque dix minutes, à plat ventre, la main tendue sous le meuble pour tenter de le récupérer. Elle avait beau lui faire le plus beau des discours, il ne bougeait pas d’un pouce et continuait de la fixer comme si elle avait été la plus grande traitresse de tous les temps. Un soupir s’échappa de ses lèvres et elle roula sur le dos. Bon sang, la cohabitation allait clairement être plus dure que prévue. On toqua à la porte après avoir crié. Du Noa tout craché. La Suissesse se redressa sur les coudes, souffla sur une mèche rebelle. « Tu me diras quand t’auras fini ta crise Bob. » lâcha-t-elle, grognonne avant d’aller ouvrir à la blonde. Qui était à plat ventre dans le couloir, son chat dans les bras. Tout allait bien dans le meilleur des mondes. Elle ne put s’empêcher de rire. « Tu vas te mettre à ronronner et miauler aussi ? » Elle rit avec elle et l’aida à se redresser. C’était sans compter le chat qui se mit à bondir dans l’appartement. Bobby n’allait jamais la pardonner à ce rythme.
« Tout le monde va bien. » Elle déposa un baiser sur sa joue comme pour la rassurer, sans penser que cette action accentuerait les battements fous du cœur de Noa. Elle la laissa passer avant elle puis prit place dans la cuisine pour préparer les boissons chaudes. « Fais comme chez toi ! Bobby est sous le meuble, il boude. »
Ce n’est pas nouveau, ni pour Noa, ni pour Charlie, ni pour personne, d’ailleurs. Ce n’est pas nouveau que la p’tite Watkins se retrouve toujours dans de telles situations, que ce soit le ventre à terre, ou le buste coincé dans une chatière. Non, ce n’est même pas étrange. C’est juste… normal. Pour Noa. Mais bon. Elle ne peut pas s’empêcher de rougir, lorsqu’elle est ainsi découverte par l’élue de son cœur, qui ne peut même pas s’empêcher de rire et de la taquiner. Pour toute réponse, Noa lui sort un beau Meow ! lâché avec une petite voix, et un grand sourire sur les lèvres. Comment tu me trouves, en chat ? continue-t-elle, tandis qu’elle attrape la main de Charlie qui l’aide à se relever, avant de perdre à nouveau son chaton dans l’appartement de son amie. Elle espère que Milady n’ira pas embêter ni Ferdinand, ni Bobby, parce qu’elle ne veut pas la voir interdite de séjour ici. Chez Charlie. Et alors qu’elle s’excuse, pour ensuite demander comment se porte le petit troupeau – peut-on dire « troupeau », lorsqu’il y a deux animaux, et complètement différents ? –, et surtout, comment se porte sa belle blonde qu’elle ne peut s’empêcher de regarder, elle se retrouve complètement prise au dépourvu. Ah, là, Charlie a réussi à lui clouer le bec. Chose extrêmement difficile, avec Noa. Parce qu’elle l’a embrassée. Pas sur la bouche, et ses lèvres sont déjà jalouses de sa joue, mais cela reste un baiser. Un baiser qui vient colorer le visage de la jeune Watkins de rouge, tandis qu’elle ouvre la bouche, sans pouvoir prononcer un seul son. Charlie. L’a. Embrassée. Elle n’en croit ni ses yeux, ni sa joue. Elle ne bouge quasiment plus, tandis qu’elle finit par entendre cette voix qui lui fait tant d’effets, celle de Charlie, qui l’invite à entrer, qui lui dit de faire comme chez elle, qui lui dit que Bobby boude sous le meuble. Elle sourit, mais la petite Noa, elle est en train de buguer à cause du baiser. D’ailleurs, Charlie doit bien voir la tomate bien mûre qu’elle est devenue. Elle bégaie doucement A… Ah oui ? P… Pourquoi il boude ? Heureusement pour elle, c’est Milady qui se frotte à ses jambes qui vient la réveiller de son état second, tandis que, toujours aussi écarlate, elle prend son chaton dans ses bras, et la soulève un peu pour lui donner un bisou. Puis, puisqu’elle veut bouger, elle pose sa reine à fourrure sur la table, et cette dernière s’approche de Charlie, curieuse de savoir ce qu’elle prépare. Elle est assez calme, Milady. Elle n’est pas comme ce stéréotype du chat qui va faire exprès de faire tomber un verre ou une tasse pour le plaisir. Non, elle est même plus raffinée, et elle regarde avec attention ce qui se trouve dans les deux tasses, son museau reniflant cette odeur de chocolat qui en sort. Ah ! En reconnaissant, elle se recule. Faut dire qu’avec une telle maîtresse, elle a fini par en avoir marre d’avoir cette constante odeur de chocolat dans l’appartement. Non, à la place, Milady bondit sur les chaises, puis au sol, pour aller vers le meuble cachant le lapin. Et en voyant la boule de poils, elle se glisse sous le meuble avec elle, et s’en approche, curieuse. Mais Noa ne remarque même pas que sa princesse aux grandes oreilles va s’amuser avec Bobby, puisqu’elle a les yeux rivés sur celle qui l’a faite rougir, quelques instants plus tôt. Je… Je peux faire quelque chose ? demande-t-elle, un peu confuse, avant de s’imaginer que « quelque chose » pourrait être romantique. Elle tousse alors un peu, tout en rectifiant. Pour le chocolat je veux dire. Si tu as besoin d’aide. Ou si tu veux que… je sais pas… Elle est toute perdue, la petite Noa. Tout ça, parce que celle qui fait battre son palpitant a fait un premier pas qui l’a complètement bouleversée.
Et maintenant, les seules images qu’elle a dans la tête sont des rêves. Des pensées où Charlie viendrait plaquer ses lèvres contre les siennes. Bon sang, elle n’a plus du tout les idées claires. Charlie lui fait trop d’effet.
Bon il fallait rajouter le chocolat en poudre sur la liste de course qui ne faisait que s’allonger au fil des jours. Aucune des trois colocataires n’avait la fois de prendre un sac et se rendre à l’épicerie du coin, il fallait attendre d’être en pénurie de papier toilette ou de sopalin pour que quelqu’un se décide enfin à faire quelque chose. Mais Charlie les aimait comme ça et ne changerait de colocation pour rien au monde. Elle vérifia que le lait chaud n’était pas en train de brûler dans la casserole et glissa un regard peu rassuré en direction du chat qui guettait le lapin. Bobby était son fils spirituel, il suffisait qu’une griffe touche une de ses oreilles pour qu’elle balance le chat par la fenêtre. Certes elle ne le ferait pas par respect pour Noa et aussi parce que bon c’était un peu illégal de balancer un félin par la fenêtre. « Parce qu’il n’est plus fils unique et que Ferdinand a une voix très aigüe, il s’y fera, il doit seulement s’adapter rien de grave. »
Elle versa le lait chaud dans les tasses, touilla le mélange et le posa sur un plateau. « Oh tu peux aller dans le canapé et nous trouver un petit film à regarder. J’ai envie de buller perso. » Elle porta le tout sur la table basse et vint poser sa main dans le creux du dos de Noa pour qu’elle la suive sur le canapé. Elle ne savait pas trop où elle en était avec la jolie blonde, elle préférait ne pas trop réfléchir et laissait les choses avancer à leur rythme. Elle s’était trop longtemps bercée d’illusions et préférait la prudence aux sentiments maintenant. « Ou on peut essayer la nouvelle console de ma coloc, ça dépend si t’es mauvaise perdante. » Elle se moquait un peu mais gentiment, ses pupilles océan se posèrent sur les joues légèrement rouges de la Watkins. Mignonne jusqu’au bout pour un simple baiser sur la joue, elle dut se mordre l’intérieur de la joue pour ne pas rire.
Derrière elles, Bobby était sorti de sa cachette pour venir se mettre dans les pattes du chaton qui le fixait, une patte suspendue dans les airs comme un avertissement. Elle semblait moins embêtante que la loutre, beaucoup moins bruyante surtout.
C’est juste… le chaos. Dans son esprit. A la petite Watkins. Parce qu’elle craque complètement pour Charlie. Mais genre… vraiment, complètement. Et là, juste d’avoir senti ses lèvres se coller sur sa peau, ça lui a fait un frisson agréable. Alors maintenant, tous les scénarios viennent l’embêter. Etait-ce un baiser amoureux ? Ou amical ? Ou juste mignon ? Faisait-elle souvent ça aux personnes de son entourage ? Leur relation était-elle juste de l’amitié, ou quelque chose se créait-il ? Elle n’en savait rien. Elle n’en sait rien. Elle imagine. Elle imagine, et rêve presque la bouche ouverte et les yeux fixés sur la blonde qui lui fait face, tandis qu’elle comprend que Bobby est jaloux de Ferdinand. Ouf, ça lui permet de se rattraper, de moins bloquer, puisqu’elle laisse échapper un petit rire. Fais gaffe, ils vont se disputer ton amour ces deux-là. Et ils ne seront pas les seuls. Noa aussi veut cet amour que la blonde a à lui offrir. Noa aussi veut être importante dans la vie de Charlie. Noa aussi veut recevoir des caresses, des câlins… Bon, et puis, Noa veut aussi quelque chose de plus… intime. Mais bon.
Alors qu’elle oublie presque son chaton et demande ce qu’elle peut faire, elle entend la belle de ses pensées lui demander de trouver un film. Elle saute presque de joie, la p’tite Watkins qui retrouve sa folie habituelle, non sans perdre le rouge de ses joues. Puis elle entend Charlie lui proposer, aussi, de tester une console. Noa et les jeux, ça fait deux. Elle n’a jamais touché à un jeu vidéo, à une manette, à un joystick. Non, elle, c’est par la musique qu’elle s’est toujours exprimée, qu’elle a toujours passé du temps. Aussi, elle est intéressée. Elle est intéressée, mais elle se doute bien qu’elle n’a aucune chance face à Charlie. Mais bon. Qu’à cela ne tienne, elle veut tester. Aussi, elle acquiesce, avant de dire Tu ne vas peut-être pas le croire, mais je n’ai jamais joué à un seul jeu vidéo. Alors va pour la console. Tu m’apprendras. Et puis elle a tout de même un esprit de compétition quand il le faut, Noa, aussi, elle continue par un Et puis après, je pourrais t’éclater ! Elle éclate de rire. Elle sait bien qu’elle n’a aucune chance. Mais que c’est bon de rire. Et puis, juste, de passer du temps avec Charlie. D’ailleurs, en sentant sa main dans son dos, Noa continue de rougir. Elle s’imagine trop de choses. D’ailleurs, la main de Charlie est juste sur la lanière de son soutien gorge, donc, évidemment, toutes les pensées de la Watkins surchauffent.
Elle s’assoit, avant de prendre sa tasse, et de dire un Merciii. à Charlie, tandis qu’elle trempe ses lèvres dans le bon chocolat chaud. Oh ! Gosh ! Qu’est-ce que c’est bon, le chocolat. Si cela ne rétrécissait pas les jeans, elle pourrait ne se nourrir que de chocolat. Quelle belle invention de la nature et de l’Homme. Vraiment. Purement. La meilleure chose que l’Humanité et la Terre ont dû faire ensemble. Elle aime tellement ça qu’elle gémit de bonheur, avant de dire, avec une petite moustache chocolatée Hmmm, qu’est-ce que c’est bon ! Et alors qu’elle goûte encore de sa boisson, tout en regardant Charlie choisir le jeu, préparer le tout, elle entend un miaulement, et tourne la tête pour voir Milady poser une patte sur la tête de Bobby, puis frotter sa petite tête contre lui. Scène beaucoup trop mignonne pour que Noa ne fasse rien, et elle lâche un Oooooh, c’est trop mignon. Regarde Charlie ! Milady a déjà adopté Bobby. Elle ne plaisante qu’à moitié. Son chaton est possessif, à Noa. Et elle imagine déjà Milady emporter Bobby avec elle. Bon, pas sûr que Charlie soit d’accord. Mais c’est adorable. D’ailleurs, Milady doit se demander ce que c’est que cet animal, puisqu’elle commence à lui tourner autour, joueuse. Bon. Au moins, il ne devrait pas y avoir de problème avec ces deux-là. Espérons que Ferdinand et la petite chatte s’entendent aussi bien… Mais si la loutre est effectivement bruyante, Milady risque de ne pas aimer.
Soudain, elle entend la télévision faire un son, et se retourne à nouveau pour voir l’écran menu. Allez. Il est temps d’apprendre à battre son crush !
Ca lui manquait presque les soirées colocataires où les rires et les larmes s’étaient mêlés, Charlie soupirait intérieurement et haïssait les emplois du temps chargés des deux filles qui partageaient son lieu de vie. C’était devenu difficile de se croiser en journée et encore plus en soirée, à tel point que la suissesse avait cette désagréable impression de partager les lieux avec des fantômes. Alors avoir Noa dans le coin, c’était plutôt sympathique dans le sens où elle apportait bonne humeur et joie de vivre. « T’as même pas l’excuse d’être vieille pour ne pas avoir touché à une console ! ». Elle se moquait gentiment, comme elle aimait taquiner cette fille qui semblait n’avoir rien découvert de la vie en général. Ses joues rougissaient pour un rien, elle bafouillait sur n’importe quel sujet, un enfant dans un corps d’adulte presque. « Ca risque d’être laborieux mais je veux bien t’apprendre. »
Une fois la console allumée et les manettes en sa possession, la blonde s’affala dans le canapé et regarda son amie se saisir de la boisson sucrée pour y tremper ses lèvres. Non elle ne revenait pas sur son jugement, clairement pas. Sa tête se redressa quand le nom de son lapin fut évoqué, pas par curiosité, mais plus par peur de voir le chat dévorer son petit protégé. Si c’était le cas, le chat volerait par la fenêtre, amitié ou non entre les deux jeunes femmes. Mais ce fut drapeau blanc et son cœur cessa de palpiter comme un dingue dans sa poitrine, Bobby ne risquait rien, elle pouvait se concentrer sur l’écran. Elle déposa la manette sur les genoux de la blonde, but une gorgée de son propre chocolat et s’attela à préparer la partie. « Les têtes de chien battu ne marchent pas pour me déstabiliser. »
C’est vrai. Noa n’est absolument pas vieille – heureusement – et pourtant, elle n’a jamais joué à un jeu video. C’est comme si elle était une jeune aujourd’hui, mais née dans les années 50. Elle a l’impression d’être cette outsider, cette femme complètement larguée. Peut-être qu’elle l’est réellement en fait… Allez savoir. Il faut dire qu’elle a l’impression d’avoir vécu dans une grotte, parfois. Est-ce parce qu’elle semble s’émerveiller sur tout ? Mais tout est intéressant. C’est toujours fascinant de voir le monde par ses propres yeux, que par ceux de ses parents qui sont clairement fermés à la vie, telle qu’elle la connait désormais. Mais de là à se penser inculte ? Vivant dans le fin fond d’une grotte ? C’est un peu fort. Disons que c’est plutôt que ses hobbies qui sont vieux, et assez excentrés par rapport à ceux de sa génération. Prenons la musique. Certes, tout le monde aime la musique. Mais Noa se passionne pour la classique, et même si elle aime les autres genres, on la verra bien plus souvent écouter et se relaxer avec ces morceaux si vieux, et tellement riches, tellement incroyables. C’est comme si elle se retrouvait dans la tête de ces magiciens des notes lorsqu’elle joue. Alors comparer du mozart à du queens ? du beethoven à du ariana grande ? Elle ne comprendra jamais. Peut-être qu’elle est vieille, en fait ? Pour s’en dissuader, elle répond J’ai l’excuse d’être mignonne alors ? Elle éclate de rire, sans savoir pourquoi elle a sorti ça. Merde ! Et si Charlie le confirme ? Elle va rougir. Elle rougit déjà, mais là… Oulah, c’est pas bon. Elle va être une véritable tomate durant tout le temps où elle squattera l’appartement de sa belle… Elle sait déjà quel sera son nouveau surnom. Noate. Noate la tomate. Et cette pensée la fait sourire, tandis qu’elle boit son chocolat chaud, et regarde son chaton et le lapin. A peine fait-elle part de sa découverte sur cette nouvelle amitié entre les deux boules de poils qu’elle voit Charlie se retourner vivement. Elle a dû avoir peur. Elle comprend, Noa. Elle comprend tout à fait. Parce qu’elle sait combien Bobby compte pour la blonde. Parce qu’elle sait combien Milady compte pour elle. Elle sait qu’elle ferait tout pour sauver son chaton des griffes de n’importe qui, ou quoi. Et que Charlie en ferait de même. Et entre lapin et chat, c’est le lapin qui est le plus à même d’être en danger. Alors elle comprend. Elle la laisse se soulager en voyant le duo adorable que forment les deux animaux, Milady passant sa patte sur les oreilles de Bobby, visiblement intriguée par leurs formes, leurs longueurs. Tant qu’elle ne tente pas de les manger… Cela devrait aller. A cette pensée, elle jette quand même un nouveau coup d’œil, pour être sûre que son chat ne fait pas, justement, cela. Puis, rassurée, elle devient Noate la tomate en sentant les mains de Charlie déposer la manette sur ses cuisses. Elle finit sa gorgée, repose sa tasse, et se racle la gorge pour éviter de passer pour cette femme écarlate, incapable de se tenir devant son crush.
Puis, manette en main, elle se rend compte que c’est assez instinctif. Ses pouces peuvent atteindre les joysticks sans mal, ou les autres boutons, et ses index peuvent appuyer sur les gâchettes. Hey, c’est vraiment pas mal, cette sensation. J’ai l’impression que je suis invincible maintenant. Elle imite un rire de méchant – muahahaha –, avant d’entendre Charlie lui énoncer la première règle. Les têtes de chiens battus ne peuvent la déstabiliser. Soit. Noa a un petit sourire en coin, et, malgré le rouge de ses joues, se rapproche de sa belle, son visage près d’elle. Puis elle lui dit Et celles de chats battus ? Elle ne imite une, prenant pour exemple le chat potté dans Shrek, avec ses grands yeux. Puis elle se met à rire, hilare. Ca lui fait tant de bien. Elle décompresse, elle passe un bon moment avec Charlie… Elle l’aime, et elle ne veut pas se retrouvée bloquée à cause de ses sentiments. Elle décompresse, en se disant que tout va bien, que tout ira bien… Et que s’il doit se passer quelque chose – oh, qu’est-ce qu’elle en a envie –, alors il se passera quelque chose. EN attendant, il est temps de commencer. Et Charlie lui explique rapidement les touches, et comment s’en sortir dans le jeu. Et il n’y a pas le bouton « battre Charlie » ? Elle rit, tandis que l’écran affiche le nom du jeu.
Charlie revoyait presque sa sœur balancer la manette à l’autre bout de la pièce alors qu’elles n’avaient que huit ans. Elle avait toujours été mauvaise perdante face aux talents de Charlie qui n’avait jamais connu de difficulté à maîtriser la manette. Ca lui manquait cruellement cette époque de complicité, d’amour fraternel pendant laquelle elles s’étaient toujours dit, même jusqu’à aller à s’inventer leur propre langage et maintenant elle n’avait même pas l’affirmation que sa sœur était toujours sur le continent. Elle espérait que Selena l’aiderait dans cette quête, parce qu’elle ne désespérait pas malgré les années, jamais elle ne baisserait les bras, même si les liens familiaux étaient au plus bas. « Rien ne marche Noa, je ne te regarde même pas. » Elle lui tira brièvement la langue et posa sur ses coudes sur ses genoux pour se pencher en avant. Une position qu’elle affectionnait tout particulièrement quand elle jouait, même si elle avait mal au dos après.
Elle rit à l’évocation du bouton pour la battre. « La simplicité n’existe pas quand on parle de jeux vidéo ! Allez Noa, faut de l’huile de coude. » La partie commença alors et Charlie se lança dans la bataille sans hésitation, elle adorait jouer à tous les jeux possibles, c’était un moyen de se détendre, voire même de se défouler pendant ses journées, ses soirées. Elle regardait son petit bonhomme se déplacer sur la carte avec aisance, assénant des coups de marteau aux ennemis sans le moindre remord. Elle murmurait des encouragements, voire des injures quand elle loupait un mouvement. Il fallut un bon dix minutes avant que la première partie ne touche à sa fin. Elle se redressa, fit craquer son dos et posa sa manette. « Toujours trop facile pour moi. » Elle tourna la tête vers Noa et lui sourit « Tu te débrouilles plutôt pas mal en appuyant sur tous les boutons. »
C’est vraiment pas facile. En fait, le côté instinctif n’est que dans la forme qu’a la manette. Dans le fait qu’elle peut poser ses doigts sur les boutons qu’elle veut. Mais dans la pratique, ce n’est absolument pas cela. Elle a beau avoir compris les règles du jeu, elle a beau se concentrer, elle n’y arrive pas. Pas du tout d’ailleurs. Alors elle se dit qu’il y a peut-être une technique pour s’en sortir. et elle commence à appuyer un peu à l’aveuglette sur tous les boutons. Elle finira bien, avec cette méthode, par faire quelque chose de son petit personnage, non ? Au début, visiblement, non. Elle rate tous les coups, elle a même du mal à comprendre comment Charlie peut avoir autant d’aisance. C’est comme si sa belle était née avec une manette entre les doigts. Et à bien y repenser, en fait, c’est même tout à fait possible. Elle imagine bien bébé Charlie, avec une manette spéciale pour bébé, qui jouait déjà dans le ventre de sa mère. Et évidemment, cette pensée la fait rire, tandis qu’elle se rend compte qu’elle a énormément de retard par rapport à celle qu’elle aime. Et alors qu’elle jette un regard sur sa belle, pour savoir si elle est vraiment si concentrée que cela, elle remarque sa position inconfortable. Elle ne sait pas comment elle fait. Pour Noa, c’est le dos bien calé dans le dossier du canapé, dans les coussins du canapé, chaussures enlevées et jambes ramenées vers elle. Un bon moyen d’être bien, de se sentir bien, de ne pas avoir mal, de ne pas avoir l’impression que son dos, que ses jambes, que ses bras se tordent de douleur à cause d’un mauvais mouvement. Et c’est peut-être pour cela, aussi, qu’elle perd. Après tout, peut-être qu’elle s’y prend mal. Enfin… vu la façon dont elle appuie sur les boutons, le « peut-être » est de trop. Elle s’y prend mal. Mais pas grave, elle passe un bon moment, et son personnage semble faire des trucs intéressants, quand, par chance, elle appuie sur le bon bouton.
A la fin de la première partie, alors qu’elle voit sa belle se craquer les doigts – ce qui la fait frémir, ça, elle aime pas du tout –, elle lui sourit en lui disant Ta position est trop bizarre, tu sais… tu vas finir par te péter le dos. Elle ne veut que son bien. EN même temps, depuis le temps qu’elle a des sentiments pour elle, c’est normal qu’elle veuille son bien, non ? Et alors que Charlie se moque gentiment d’elle en la « complimentant » pour sa technique, Noa affiche une mine fière d’elle, et un grand sourire. T’as vu ça ? j’suis sûre qu’en continuant ainsi, je vais finir par t’exploser. Elle éclate de rire. Elle sait très bien qu’elle n’a aucune chance, mais elle ne joue pas avec elle pour la battre. Non, elle joue avec Charlie pour passer du temps avec elle, pour s’éclater, et pour rire. Tu lances la deuxième partie ? ou alors tu me fais un cours de plus ? parce que visiblement, j’ai pas trop trop compris sur quels boutons appuyer à quels moments. Elle a un sourire gêné. Elle est vraiment une vieille dans un corps de jeune, c’est pas possible autrement. Non ?
Accueil 
Dim 20 Jan - 13:41