how are you true ? / zocee #1

fatiguée mais courageuse la gosse. elle s'accroche. elle doit le faire puis de toute façon, elle le fera. elle a confiance, elle va y arriver. elle a confiance, elle peut y arriver. les cours la journée, le boulot le soir et les week ends, l'écriture sur son temps libre. ça fait beaucoup de choses mais elle y croit. puis de toute façon ça lui permet de ne pas penser à autre chose. de ne pas se perdre dans les méandres de son esprit. il n'y a que sur ses tâches qu'elle se concentre. et ça lui réussit bien. le service de ce soir ne fut pas bien compliqué mais étant du dernier de la soirée, elle a finit relativement tard. la perspective de rentrer chez elle ne l'enchante guère alors elle traîne un peu des pieds. elle met du temps à débarrasser ses tables, à les redresser pour le petit déjeuner. même si elle ne sera pas là, c'est dans ses obligations. du moins dans ce service là. ça allège le travail de ses collègues et comme ils tournent, de toute façon ça lui est rendu à un moment ou un autre.
dernière table enfin mise, direction la cuisine. c'est qu'elle a faim. minuit approche et elle n'a rien mangé depuis le burger englouti à la va vite ce midi. elle n'a pas vraiment le droit de piquer de la bouffe comme ça mais les restes il y en a tellement qu'ils ont pris l'habitude de lui laisser une assiette dans le frigo. elle inspire confiance la gosse, une sympathie qui lui permet d'avoir ce genre de privilèges. ce sourire triste qu'elle laisse traîner sur son visage. ça attire, ça intrigue. ça ouvre des portes. notamment celui de ce frigo. sauf que ce soit ce frigo est ouvert et quelqu'un est déjà en train de manger son plat. et ça, ça ne lui plait pas. un homme vu la carrure. de dos, à peine éclairé par la lumière de la machine ouverte. " ce sont mes spaghettis en fait... " voix fatiguée mais ferme malgré tout. assez pour qu'il l'entende pas assez fort pour alerter qui que ce soit.

il y a des moments comme ça où elle se permet d'être dans son monde. ailleurs. cet univers qui n'appartient qu'à elle. sauf que ce soir, quelqu'un dérange cet équilibre qu'elle tente de garder intact au possible. y'a un goinfre en train de s'enfiler son plat de spaghettis. ça ne va pas le faire ça. elle a faim la gosse et se mettre entre elle et sa nourriture c'est dangereux. très dangereux. c'est encore pire quand il se retourne. elle ne pensait pas ça possible, et pourtant. " merde je… pardon… désolé…. pardon…. " fixée sur le garçon plus que sur les pâtes, elle tente de comprendre ce qu'il se passe. pourquoi est il là. comment se fait il que sur toutes les personnes qu'elle aurait pu croiser dans une cuisine, c'est lui qui se tient là. elle le dévisage, tente de s'assurer qu'il s'agit bien de ce mec qu'elle a rencontré sur le bateau. mais il n'y a aucun doute. si elle peut avoir des problèmes à retenir un prénom, elle n'en a aucun à retenir un visage. et c'est celui là. pas d'erreur possible. est ce qu'il l'a reconnu lui aussi ? elle n'en sait rien. il ne laisse rien transparaître. en même temps elle le prend en train de bouffer dans les cuisines d'un hôtel après le service. il y a plus important à penser. du moins de ce qu'elle pense. elle récupère l'assiette et regarde le trou formé par ce qu'il a déjà mangé. elle aurait pu continuer, terminer ce plat. ça ne l'aurait pas dérangée. ce n'est pas une princesse ou une fille qui s'attarde sur ce genre de choses. " jpeux essayer de te cuisiner quelque chose si tu veux… j'suis vraiment désolé. " cette phrase l'arrête net dans son mouvement, elle qui voulait récupérer une fourchette pour manger. mais la perspective qu'il lui cuisine quelque chose l'intéresse vraiment plus. " okay. " comme un défi lancé. " dans le frigo de droite, y'a le reste des ingrédients du jour. " surtout pas celui de gauche ou la mise en place du lendemain attend les cuisiniers. " je savais pas que tu cuisinais. " perche lancée, comme pour lui faire comprendre qu'elle le connait. enfin presque.