future stars slow. (JARL&JAY)

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Ils trinquent, encore une fois. Cela fait deux verres ce soir. Deux verres, pour ce qui est de Jarl il s’agit essentiellement de deux verres de vodka pure avec glaçons. Pour lui, l’Islandais ne sait pas, il n’a pas fait attention, après tout chacun est libre de faire ce qu’il désire. Non Jarl désire juste s’amuser lui-même, parfois rien de tel que cette envie lancinante de prendre une bonne murge pour oublier tous les problèmes de la vie. Le détective privé se lâche parfois, peu souvent bien évidemment, mais ce soir c’est différent, il n’est pas seul. Jay est là. Jay, l’ancre du bateau, celui qui a permis tant de choses bénéfiques, celui qui instaure une douce langueur dans la vie et qui a aidé dans tellement de situations : dans les crises de larmes, dans les insomnies douloureuses et dans les déboires de la vie de tous les jours.

Le savoir là, c’est la meilleure des sensations, la drogue est là, vivante, en chair et en os, juste sous mes yeux. Jay, le bel homme. Non pas qu’il n’y ait une quelconque attirance entre eux deux, mais plutôt dans le sens où Jarl se plaît toujours à admirer les autres hommes, et ça en reste là. De toute façon comme le dit le célèbre adage, ce n’est pas parce qu’on est au régime qu’on ne peut pas regarder le menu. Ce qu’il souhaiterait, c’est surtout qu’une autre personne soit présente dans sa vie, mais c’est bien trop compliqué pour le moment. Quoi qu’il en soit, il admet que là pour l’instant il ne sait plus trop quoi faire de sa vie. « Tu veux un verre de… oh merde attends, je ne me souviens plus du nom de ce rouge... » Il se lève brutalement pour aller chercher la bouteille dans le mini bar qui se trouve dans un vieux tonneau qu’il a ouvert lui-même en faisant une porte dedans. Jarl est bricoleur, pas énormément, il se débrouille de temps à autre en faisant ce qu’il peut. Enfin quoi qu’il en soit, il n’est pas ivre pour le moment, pas encore, mais ça ne va pas tarder si jamais il continue à boire ainsi.

Le revoilà assis sur le canapé, avec cette bouteille de vin qu’il ouvre d’un geste expert pour s’en servir un verre à lui et à Jay, parce qu’il faut qu’ils boivent, il le faut. Parole d’ivrogne. « A la nôtre ? dit-il en levant son verre à pied pour trinquer avec son ami. » Il le regarde lui, et sourit agréablement, avec Jay c’est compliqué parfois. Il est sourd, et il doit toujours faire attention à bien articuler en le regardant en face pour qu’il puisse lire sur ses lèvres. Jarl est pourtant compréhensif et n’a jamais trahi son secret, il n’a jamais rien dit à personne, et parfois même, il tente de l’aider quand il le peut quand ils sont en groupe assez nombreux. Le plus extraordinaire c’est que son ami arrive à parler convenablement, parce que certains sourds, en ne s’entendant pas ont une façon particulière de s’exprimer. « Il date de quatre-vingt dix-sept ce vin, j’espère qu’il te plaît ! » Oui, il n’est pas très bon en œnologie mais il sait apprécier les bonnes saveurs assez boisées de ce vin assez délicat sur les papilles au début mais qui laisse une dureté agréable sur le palet par la suite.

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Si son meilleur ami avait déjà entamé deux verres, lui n’en était qu’à la fin de son premier. Jay n’était pas un grand buveur, il devenait même saoul assez rapidement, peu habitué à boire de l’alcool. Il ne comprenait pas l’intérêt qu’avait les autres à se rendre ivre au point de ne plus être en mesure de se souvenir sous prétexte qu’ils avaient juste besoin de s’amuser. Depuis quand avait-on besoin d’alcool pour s’éclater ? Si lui prenait plaisir à boire quelques verres, ce n’était pas pour se changer les idées, pas même pour oublier ou apprendre à se ridiculiser mais parce qu’il appréciait le goût. Un peu de temps en temps n’avait jamais fait de mal à personne, il ne disait pas le contraire. Tout comme une soirée sans quelques gouttes d’alcool n’étaient pas une véritable soirée… N’était-ce pas agréable de se caler devant un bon match à la télévision avec des bières et des pizzas ? Ce genre de chose, ce n’était pas qu’un simple stéréotype, c’était un rituel, un mythe à ne pas manquer pour rien au monde. Certes, aujourd’hui il n’y avait ni bière ni pizza, ni match d’ailleurs, cependant ça ne les empêchait de profiter du moment qu’ils partageaient. L’alcool se trouvait tout de même dans le verre qu’il terminait à l’instant, un alcool bien plus fort que ce qu’il prenait habituellement, suffisant pour lui chauffer les joues et lui donner un brin le tournis.

Il était heureux d’être ici, toujours. Jarl n’était pas n’importe qui à ses yeux et ce, peu importait si leur amitié n’était pas si vieille que cela. Lui avait l’impression de le connaître depuis des années tant, en si peu de temps, son camarade avait déjà fait pour lui. Jay était d’un naturel solitaire, son cercle amical n’était pas aussi grand que ce que l’on pourrait croire et des amis, il n’en avait que très peu. Sa rencontre avec l’autre jeune homme datait de moins de deux ans, un hasard qui avait plutôt fait bien les choses. Un hasard que, si sur le moment le garçon l’avait détesté au plus haut point, il en était reconnaissant à présent. Cela lui avait apporté une merveilleuse personne dans sa vie… Un ami fidèle et formidable pour qui lui ne pouvait s’empêcher de s’inquiéter constamment mais qu’il adorait plus que tout. Jarl non plus, n’avait pas eu une vie facile. Il avait des cicatrices qui n’avaient toujours pas été pansé et dont il ne serait jamais en mesure d’oublier quoi qu’il fasse. Evidemment, avec le temps, certainement qu’elles s’atténueraient, qu’elles deviendraient moins douloureuses néanmoins malgré tout, elles resteraient toujours gravées dans un coin de son cœur. Du mieux qu’il le pouvait, Jay essayait d’être là pour lui, de le soutenir et l’aider à avancer… Il ne savait pas s’il le faisait correctement toutefois au moins, oui, il essayait.

Le sourire aux lèvres, sans relever la rétorque de son ami, il le laissa se redresser afin d’aller chercher la boisson que ce dernier avait mentionné. Il ignorait combien de verres il prendrait ce soir cependant se connaissant, il n’était pas certain de parvenir à suivre le rythme du plus vieux. S’emparant de la coupe que Jarl venait de lui servir, une esquisse toujours accrochée à son visage, il trinqua machinalement son verre contre le sien. « A la nôtre. » Ses yeux ne le quittaient jamais du regard. Une habitude qu’il avait dû prendre depuis de nombreuses années désormais, n’étant plus capable de discerner le moindre bruit autour de lui. Son ouïe avait donc été remplacée par sa vue… Il ne faisait pas que lire sur les lèvres, il était obligé d’analyser chaque trait d’une expression, chaque petit détail afin de saisir ce qu’il se disait. Ce n’était pas aussi simple que ce qu’il n’y paraissait et si on pensait que le jeune homme s’était habitué à cette vie, on se trompait. Vivre dans un silence éternel était frustrant, terrifiant parfois et également décevant, affligeant, quand il savait qu’il ne pourrait jamais entendre la voix de son meilleur ami. Mais, il n’avait pas d’autres choix que de faire avec… La raison pour laquelle, peu importait ô combien ça pouvait être douloureux et difficile, il ne se plaignait jamais.

Après avoir goûté le vin, gardant son verre dans sa main, il finit par hocher la tête en guise de réponse. « Il est délicieux. » Il n’était pas très compliqué, il se satisfaisait d’un rien comme d’un tout. « Mais, je t’avoue que je commence à avoir un peu chaud. » Sa remarque n’avait strictement rien d’ambigüe, c’était juste l’alcool qui s’infiltrait de plus en plus dans son être et qui augmentait la température de sa peau. Lorsqu’il admettait être assez faible avec ce genre de boisson, il ne mentait pas.    

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L’Islandais ne regrette pas son île pour plusieurs raisons, celle qui est principale, tout le monde s’en doute, il est bel et bien inutile de faire un dessin pour en comprendre les tenants et les aboutissants. Une autre de ces raisons serait le prix exorbitant de l’alcool et le fait de ne pas trouver de tout dans les magasins. Le système de vente de boissons alcoolisées est très réglementé, il s’agit d’une grande entreprise qui gère tout et qui s’occupe des ventes, toute autre structure est strictement interdite pour cela. Quand il y habitait, il s’imaginait vivre durant la prohibition et il aurait adoré rencontrer un Gatsby pour faire du trafic d’alcool, un bootlegger pour ami, ç’aurait été classe. Quoi qu’il en soit, maintenant il vit aux États-Unis, un pays libre où chacun peut s’acheter presque tout ce qu’il désire du moment que ce soit dans la légalité. Bien qu’il ne soit pas d’accord avec tout ce qui peut être acheté, en particulier les armes à feu, mais tout cela est un bien autre débat qu’il faudrait commencer à tête reposée.

Voilà aussi pourquoi Jarl est vraiment très proche de Jay, le fait qu’il n’y ait pas besoin de questions inutiles entre eux ou de fioritures. Ils se comprennent, ils savent qui ils sont et connaissent les limites à ne frôler. Les deux hommes sont proches, voire parfois sensiblement un peu de trop, mais cela leur convient. Quand l’Islandais regarde le Coréen ce ne sont plus des nationalités ou des traits physiques qu’il remarque, ce sont deux corps, et deux cœurs qui battent du même désir d’être là l’un pour l’autre, à s’épauler pour toutes les dures épreuves qui arriveront dans le futur. Ce genre de soirée peut sembler banal pour d’autres, mais pour le fils de Sören, cela relève d’une sorte de tradition à respecter : pouvoir se parler, pouvoir se taire, pouvoir se regarder, et surtout s’aimer, comme deux frères. Pour rien au monde il ne souhaiterait abandonner ces petits moments qu’ils partagent ensemble.

Cette petite coupe de vin rouge est enfin servie, pour les deux hommes et c’est tout ce qui compte. Jarl a bien envie de le tester, parce que d’après les vendeur, ce vin reste l’un des meilleurs de la cave où il est allé se fournir. C’est juste par gourmandise et par envie de bonnes choses qu’il l’a sortie. Il est bien entendu hors de question de la finir pour se rendre ivre. Ce n’est pas avec un bon Richebourg de Bourgogne qu’on doit se bourrer la gueule, hors de question. « Il est délicieux. » Un grand sourire se trace sur le visage de l’Islandais, il est heureux que ce met délicat lui plaise, réellement. Il savait que Jay n’est pas un grand buveur d’alcool – et dieu sait qu’il a raison – alors il tente de lui fournir des choses vraiment bonnes à boire. « Tu me fais plaisir à l’adorer, dit-il en riant doucement tout en reposant son propre verre après avoir bu une petite gorgée du vin. » Jarl attrape enfin le vin afin de le reboucher avec l’outil qu’il a trouvé dans un magasin, un bouchon en plastique qui permet de garder la boisson fermée hermétiquement. « Mais, je t’avoue que je commence à avoir un peu chaud. » Là il se met à rire un peu comme un idiot. Jay sait très bien qu’il est comme chez lui, s’il a chaud, il peut aller ouvrir la fenêtre ou se mettre torse nu, peu importe, Jarl s’en moque éperdument. Ce qu’il s’empresse d’ailleurs de lui dire. « Si tu as chaud retire ton t-shirt ou va ouvrir la fenêtre, ça m’est égal. » Avec les paroles, un petit clin d’œil complice est toujours le bien venu. Quoi qu’il en soit, ils commencent à manquer de nourriture à grignoter, les chips sont terminés et les morceaux de saucisson sec sont également finis. « Je te laisse deux minutes, je vais chercher quelques trucs à manger. » Il se relève donc, et pose ses pieds nus sur le sol, c’est avec le feu aux joues qu’il part donc vers la cuisine. Heureusement que lui n'est vêtu que d'un t-shirt bleu ciel et d'un short de sport rouge, sinon il aurait bien trop chaud également.

Une fois arrivé dans la pièce, il attrape un shooter qu’il remplit avec de la tequila. Une petite grimace déforme ses traits, et il repose le verre presque brutalement sur le comptoir. Il n’a aucune idée de pourquoi il fait cela, mais c’est peut-être pour se changer les idées, ou peut-être parce qu’il est à bout de nerf. Quoi que cela soit c’est fait et il est trop tard pour faire quoi que ce soit d’autre. Alors il reprend un peu de chips dans le saladier et quelques morceaux de saucisson avant de retourner rejoindre Jay. « Si tu as envie de quelque chose, n’hésite pas, je ne vais pas te manger, et pour l’amour de dieu, met toi à l’aise ! Je vais pas te sauter dessus, j’ai beau être gay j’ai pris mes médicaments. » Jay sait très bien quand Jarl dit ça que ce dernier plaisante, puis vu l’air espiègle qu'il sur le visage, comme un enfant, il risque très bien de comprendre que c’est pour rire. Quoi que.

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L’amitié, aux yeux du plus jeune, c’était tout. Ce n’était pas qu’un simple terme lancé dans les airs pour se donner un genre, c’était quelque chose de profond et précieux. Lorsqu’il tenait à quelqu’un, Jay ne le faisait jamais à moitié et pour sûr que son ami avait déjà dû le remarquer à plusieurs reprises. Il donnait tout de lui, ses forces comme ses faiblesses, se démenant pour ceux qui lui étaient chers et même si cela signifiait devoir se placer en second. Ses proches comptaient bien plus que sa propre personne parce qu’ils étaient sa principale source de bonheur, sa force et son envie de toujours donner le meilleur de lui-même. Il ne connaissait pas Jarl depuis longtemps toutefois leur complicité n’était plus à prouver… Ils étaient comme les deux doigts d’une main, toujours soudés l’un à l’autre, dans les bons comme les mauvais moments. Entre eux, il n’y avait pas forcément besoin de mots pour se comprendre, un seul regard suffisait et ils savaient que si quelque chose devait arriver, ils ne se laisseraient jamais tomber. Peut-être que son camarade ne s’en rendait pas compte cependant Jay l’adorait énormément, il lui était bien plus précieux que ce que ce dernier n’avouait à haute voix… Pour rien au monde, il ne souhaiterait le perdre et se battrait corps et âme afin de le rattraper, le retenir si Jarl décidait de s’éloigner. Il comptait bien trop pour lui pour qu’il accepte de le voir disparaître de son existence. Selon lui, une amitié ne s’évaluait pas sur le nombre d’années mais sur les moments passaient ensemble, sur l’alchimie qui existe entre deux individus, sur la confiance et la complicité. Probablement que pour certains une telle réflexion n’avait aucun sens seulement pour Jay, ça en avait beaucoup. Sans le savoir, son camarade lui avait tant apporté, bien plus que d’autres qu’il connaissait depuis des années et la valeur de leur amitié, il ne l’estimait plus aujourd’hui. Jarl avait pris une place immense dans son cœur, celle d’un confident, celle d’un ami formidable, celle d’un frère avec qui il ne partageait pas le sang mais c’était tout comme.

Son sourire ne quittait pas ses lèvres, appréciant l’atmosphère qui rodait la pièce mais également heureux du moment qu’il passait avec son meilleur ami. Son rire finit par venir accompagner chaleureusement le sien sans qu’il ne réponde à sa rétorque. Bien qu’il ne soit pas friand de l’alcool, il admettait aimer le goût savoureux du vin. Certes, il n’en boirait pas des litres et des litres néanmoins juste un verre pour faire palpiter ses papilles était agréable. Ce qui d’une certaine façon n’arrangeait pas ses affaires puisque, à cause de la boisson qu’il avait terminé quelques minutes plus tôt, l’alcool s’imprégnait déjà grandement dans son être. Il n’en mourrait pas cependant il sentait clairement ses joues qui se chauffaient de plus en plus. « J’y penserais. » Déclara-t-il d’un ton taquin avant d’acquiescer lorsque l’hôte expliqua partir chercher de quoi grignoter. Jay n’était pas du genre à se gêner en présence de son ami, ils se connaissaient assez désormais pour pouvoir agir confortablement l’un envers l’autre… S’il avait envie de se déshabiller, il le ferait sans hésiter. Sa réflexion avait été simplement émise naturellement puisque ça lui passait par la tête et que sans réfléchir, il l’avait échappé ses mots à haute voix.

Profitant alors de l’absence du plus vieux, le coréen se leva pour ouvrir la fenêtre et aérer la pièce, retournant ensuite s’installer tranquillement sur le divan. Ce n’était qu’après avoir trempé ses lèvres dans sa coupe, se délectant du vin qui déferlait lentement dans sa gorge, que Jarl refit son apparition au salon. Ses yeux s’égarèrent machinalement sur son visage avant qu’un rire franc ne traverse la barrière de sa bouche à ses propos. « Je sais que tu aimes mon corps de rêve, ne dis pas le contraire. » Le charria-t-il, amusé. Il n’avait jamais jugé son camarade sur son orientation, l’acceptant tel qu’il était et comme aujourd’hui, il se plaisait parfois à le taquiner sur le sujet. Il n’avait eu peur des sentiments de Jarl ni que celui-ci puisse être attiré par lui sous prétexte qu’il était un homme. Après tout, lui aussi pouvait bien être ami avec des femmes sans éprouver une quelconque attirance à leurs égards. « Je me mets à l’aise, promis. Mais pour l’instant ça va. » Il avait chaud, oui, mais pas au point de se déshabiller. Pas encore. « Et j’ai ouvert la fenêtre ! » Accompagnant ses dires d’un signe de tête, il glissa ses doigts dans le saladier afin de se saisir de quelques chips puis de les manger. L’esquisse présente sur sa figure ne quittait pas ses lèvres tandis que lentement, il sirotait son verre de vin. Il n’était pas ivre cependant, clairement, l’effet de l’alcool agissait déjà drôlement sur son être. « Je vais finir saoul avant même que la soirée ne commence. » Plaisanta-t-il dans un léger rire, le verre d’avant avait déjà suffi à lui seul pour le rendre pompette. « C’est quoi le secret ? » Pour tenir ? Probablement de boire plus souvent et régulièrement, ce que lui ne ferait sûrement jamais. Dans le fond, la réponse il la connaissait cependant ça avait été plus fort que lui de poser cette question puis d’en rigoler subtilement. Peut-être était-il déjà plus éméché que ce qu’il imaginait.

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Non, Jarl ne dirait pas que son meilleur ami n’est pas à son goût. Ce serait mentir éhontément. Il ne mentirait pas à ce propos là. Jamais, mais il n’est pas attiré, pas attiré dans le sens où il y a des limites instaurées, cette limite qu’il ne franchira pas, parce qu’il ne veut pas gâcher une amitié aussi importante à ses yeux. Parfois il se dit que son camarade a quelques tendances, oui, pas de là à être considéré comme de la jaquette mais juste un peu trop tactile ce qui pourrait intriguer les gens. Sauf que l’Islandais sait très bien que ce n’est pas pour cela, qu’il y a d’autres raisons et puis il ne va pas dire que ça le dérange, au contraire, avoir un peu de contact humain aide à mieux se sentir. « Je sais que tu aimes mon corps de rêve, ne dis pas le contraire. » Il se met à rire d’une voix franche, parce qu’en effet, Jay sait toujours trouver les mots assez drôles pour les situations cocasses. Pour seule réponse, le détective privé se met à lui sourire de façon lubrique avec un regard en coin et un lever de sourcil assez équivoque pour qu’il comprenne ce que ça veut dire par lui-même.

Pour finir, il s’installe convenablement dans le canapé, assis en rabattant ses jambes contre lui et en attrapant une cigarette pour se l’allumer. Oui, il a tous les vices, il fume et il boit. Il ne couche pratiquement pas, mais parfois. La première bouffée de nicotine et de tabac l’aide à mieux se sentir et à se soulager la tête. « Je me mets à l’aise, promis. Mais pour l’instant ça va. » Il hoche la tête pour dire qu’il comprend, de toute manière c’est pas le plus important, il fait ce qu’il veut, et il est encore libre de choisir ce qu’il désire. « Et j’ai ouvert la fenêtre ! » En effet, le petit courant d’air de l’hiver est agréable et permet d’aérer la pièce qui va rapidement sentir le tabac. Donc c’est mieux comme ça. D’ailleurs si Jarl ose fumer, c’est parce que la dite fenêtre ouverte est non loin et que cela évite que Jay se prenne toute la fumée dans la figure et fasse du tabagisme passif. C’est mieux comme ça. Les deux hommes finissent par prendre un peu de gâteaux apéritifs afin de se sustenter, parce que pour boire de l’alcool, il ne faut jamais oublier de manger, parce que sinon l’estomac prend tout rapidement et ça rend saoul plus vite. « Je vais finir saoul avant même que la soirée ne commence. » Oui c’est vrai qu’à bien y regarder les pupilles de Jay sont un peu dilatées et que ses joues se colorent d’un petit carmin léger. Jarl l’a rarement vu comme ça, mais il doit avouer que c’est assez drôle à voir. Enfin ce dernier ne doit pas être dans un état meilleur à vrai dire. « C’est quoi le secret ? » Le secret pour boire beaucoup ? « La branlette, répond-il au tac-o-tac pour le surprendre et le faire rire. » L’Islandais sourit et finit par tirer la langue tout en reprenant une longue bouffée de son bâton de nicotine. Il finit par boire à nouveau dans son verre de vin, il va vite finir ivre s’il continue comme ça.

Jarl finit par se lever et jeter le mégot dans le cendrier qui est sur le rebord de la fenêtre et revenir s’asseoir comme un vrai pacha dans le canapé, vautré les jambes écartées. Il adresse un regard à Jay pour voir s’il veut une vraie réponse à sa question. « En fait, oui, l’expérience aide, mais ça ne sert à rien, il vaut mieux être bien reposé et le vouloir, ça aide vraiment à résister contre l’alcool. » Il lui a fourni une explication, et c’est le moindre qu’il peut faire. Après tout, aucun tabou, aucune envie de dire des mensonges. Une nouvelle gorgée de son verre de vin rouge, qu’il aime vraiment beaucoup trop en fait, il a un goût délicieux. « Mais ne boit que pour le plaisir du goût de l’alcool, pas pour autre chose, c’est comme ça qu’on devient accro. » Il regarde le bord de la cheminée qui est éteinte, il serait peut-être temps de faire un feu d’ailleurs, alors il se redresse et va fermer la fenêtre et commence à mettre des bûches dans l’âtre et y met le feu grâce à un bloc fait exprès et une allumette qu’il craque sur l’emballage pour y faire surgir une flamme. Une seule qui commence déjà à faire son effet. Le feu de cheminée aidera à être dans une ambiance un peu plus intimiste, et après tout, il commençait à faire un peu froid pour être honnête, c’est l’hiver en même temps. Puis il y a le cadre photo, avec eux deux, il le baisse, il le retourne. Ce soir il ne faut pas y penser. « Après tu verras que si tu bois et que tu es bourré, tu auras les sens désinhibés et que tu risques de faire des choses un peu folles. » Il sourit et d’ailleurs c’est peut-être aussi ce qui va se passer pour sa part, là il y a l’alcool qui commence à faire ses effets et il est légèrement saoul.

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A l’origine, Jay n’était pas réellement un garçon tactile, cela dépendait des personnes qui le côtoyaient. S’il se sentait en confiance et bien, il pouvait se montrer très affectueux sans se soucier de l’ambiguïté que ses gestes pouvaient avoir. Peut-être devrait-il se contenir en présence de son meilleur ami au vue des attirances de ce dernier cependant lui avait envie de le considérer comme n’importe quel être humain et ne pas être différent avec lui juste parce que Jarl aimait les hommes. Si lui souhaitait l’embêter, l’enlacer ou le coller parce qu’il en éprouvait le besoin, il ne se posait pas de questions. Il avait ce petit côté de sa personnalité assez enfantin et innocent… Un côté que tous ceux qui le connaissaient savait qu’il s’agissait en réalité de l’une des raisons de sa fragilité, sa vulnérabilité ainsi que ses blessures qu’il s’entêtait à garder au plus profond de son âme. Jay n’en parlait jamais cependant ses réactions s’exprimaient pour lui dans ses moments là. Evidemment, il ne manquait pas de courage ni de détermination… Il s’en était bien sorti depuis cet accident, avait réussi à avancer toutefois cela n’empêchait pas le fait que, comme tout le monde, lui aussi avait ses coups de moues de temps en temps. Hors, parce qu’il n’était pas totalement seul, parce que malgré tout, il était bien entouré, il n’avait pas à se plaindre. Son meilleur ami était devenu un véritable pilier pour lui, une personne sur qui il pouvait s’appuyer et compter, et c’était la raison pour laquelle il ne cherchait pas à faire semblant auprès de lui. S’il avait envie d’être tactile avec lui, il le faisait et se fichait bien de ce que les autres pouvaient en penser. De toute manière, si une telle attitude dérangeait son camarade, il le lui aurait probablement dit depuis le temps n’est-ce pas ?

Ses yeux s’égarèrent machinalement vers le ciel à la réponse de son interlocuteur avant qu’un éclat amusé ne prenne forme sur ses lèvres. C’était du Jarl tout craché de plaisanter de cette manière et ça fonctionnait bien puisque Jay n’avait pu s’empêcher de se mettre à rire finalement après quelques secondes de silence. Il n’était pas idiot et se doutait que, non, ce n’était pas ça le secret pour tenir à l’alcool… Un secret, au bout du compte, il n’y en avait pas vraiment. Cela dépendait probablement du métabolisme d’un individu, de la fréquence à laquelle il buvait et aussi le nombre degré d’alcool qu’il prenait en un seul verre. Croisant ses jambes sur le canapé, il suivait chaque mouvement de son camarade, prêtant une profonde attention à ce qu’il lui disait. Jarl avait raison dans ses propos cependant en réalité, cela ne servait pas à grand-chose au coréen de connaître tout ça puisqu’il n’avait pas l’intention de boire énormément à l’avenir. Il en finirait vite écœuré s’il enchaînait les verres sans jamais les compter. « De toute façon, tu me connais. Je ne veux pas boire juste pour boire. » Rétorqua-t-il en souriant. « Ça n’a pas d’intérêt. » De son point de vue tout du moins.

Inclinant sa tête légèrement sur le côté, il observait son meilleur ami qui se mouvait dans la pièce puis allumait la cheminée après avoir fermé la fenêtre. Jay n’était pas un grand frileux, il supportait facilement le froid donc l’air frais de l’extérieur ne le gênait pas tant que ça, surtout pas avec sa température corporelle actuelle. Hors, il admettait que l’ambiance plus cosy créé par le feu et l’odeur du bois qui brûlait, était extrêmement agréable. « A-t-on besoin d’être ivre pour faire des choses un peu folle ? » Le taquina-t-il ensuite, incapable de retenir le rire franc qui s’échappait de ses lèvres. Fut un temps où Jay était le premier à faire des bêtises, à se ridiculiser sans s’inquiéter de son entourage… Un Jay que son camarade n’avait malheureusement pas eu la chance de connaître, ce dernier ayant disparu à tout jamais le jour où son monde s’était plongé dans le silence. Un monde qui lui faisait soudainement peur, qui diminuait la confiance qu’il avait en lui-même et qui l’avait naturellement forcé à se renfermer peu à peu, à se montrer plus discret, plus réservé. « Qu’est-ce que tu as déjà fait comme folie en étant bourré ? » Oh, probablement qu’il en savait déjà certaines cependant c’était toujours intéressant d’en apprendre des nouvelles.

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Non, il est hors de question qu’il se laisse avoir par l’alcool. Jarl a vu les ravages que cela causait quand il était dans la police et il ne supporterait pas de voir son meilleur ami subir un des déchets de la société comme les appellent les policiers. Cela le rendrait malade et il serait incapable d’agir convenablement, il prendrait trop le parti de l’ami et pas assez de l’ancien flic. L’Islandais ne sait pas toujours faire la part des choses et c’est bien dommage, parfois dans certaines situations il n’arrive tout simplement à gérer correctement. « De toute façon, tu me connais. Je ne veux pas boire juste pour boire. » Non, il a raison, ce n’est pas son genre, pas du tout même. Le problème c’est que le détective privé devrait faire pareil mais n’y parvient pas, enfin ça dépend du moment, parfois certaines envies ne peuvent pas être contrées, pas du tout même. « Ça n’a pas d’intérêt. » Au contraire, de temps à autre cela a un intérêt certain. Pour sa part, Jarl est plutôt convaincu que dans les moments compliqués, l’alcool peut avoir son intérêt, sauf que le lendemain matin, on se retrouve souvent avec plus de problèmes que de base, mais c’est une toute autre affaire cela.

La cheminée enfin allumée, l’Islandais se repose dans le canapé et repose son regard sur le Coréen, avide d’écouter ce qu’il a à dire ou d’entendre ses questions à propos de l’alcool. Le début de la chaleur du feu est revigorant, cela donne un autre coup de fouet et installe une ambiance assez agréable dans la pièce. « A-t-on besoin d’être ivre pour faire des choses un peu folles ? » Pas vraiment non, mais cela décuple les sensations et la désinhibition ainsi donc les corps humains et les mentalités ont plus tendance à se laisser aller à des folies que l’on aurait pas osé faire en temps normal. Puis Jarl se rend rend compte que c’était de l’ironie qui suintait des propos de son ami, alors il se met à rire et à se moquer de lui-même, se moquer quant  à sa crédulité et à son côté parfois un peu trop terre à terre. « Qu’est-ce que tu as déjà fait comme folie en étant bourré ? » Il en connaît certaines, mais d’autres sont plus lointaines, et parfois un peu inavouables. Jarl perdrait toute crédibilité s’il racontait absolument tout. Mais il pourrait bien lui raconter un truc assez drôle, qu’il a déjà fait, mais il s’agissait plus d’un pari que d’une folie, quoi que l’un peut aller avec l’autre en fin de compte.

Avant de répondre, Jarl attrape son verre de vin pour en boire une gorgée, histoire de se donner un peu de courage, pour dire c’est un peu inavouable. Enfin quoi que. La douce odeur du vin et son goût âpre donnent une sensation agréable sur le palais. « Je me suis travesti pour aller faire un spectacle transformiste dans un bar en Islande. » Il le regarde le plus sérieusement du monde et s’approche de lui rapidement, histoire que le Coréen ne puisse pas s’échapper rapidement et met son torse en dessous de ses yeux. Jarl s’amuse à imiter une poitrine de femme et lui plaque sous les yeux avant de se retirer pour qu’il puisse lire sur ses lèvres : « Tu m’imagines avec de gros seins et une minijupe ? dit-il avec un sourire enjôleur sur les lèvres et légèrement aguicheur aussi, il faut le dire. » Il finit par se retirer et se réinstaller en se mordant la lèvre inférieure en le regardant et lui lance un bisou dans le vent, simplement pour rire, simplement pour lui montrer qu’il est toujours aussi drôle. « Et toi ? Quelle idiotie aurais-tu pu faire ? Je te préviens je veux du croustillant. » Oui, quitte à continuer dans le ridicule, autant y aller à fond, et ce n’est pas négociable, ils se connaissent assez pour le savoir de toute manière.

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Pour lui, l’alcool n’était pas un moyen de s’amuser ou de décompresser. Il l’appréciait principalement pour son goût et ne comprenait pas ceux qui l’utilisaient comme prétexte pour oublier. Ce n’était qu’une excuse, qu’un moyen de fuir les problèmes plutôt qu’essayer de les affronter. Peut-être qu’en effet, pendant l’espace d’un instant, être ivre permettait de ne plus penser à ses soucis toutefois ça ne les effaçait pas pour autant… Il comprenait qu’on puisse avoir envie de se changer les idées, de s’aérer l’esprit néanmoins tout ce qu’il aimerait était que cela ne devienne pas une habitude. L’alcool ne résolvait rien, notre vie ne changerait pas soudainement parce qu’on avait bu… Ce n’était qu’une illusion pour laquelle on se berçait, pas plus, pas moins. Jay était plus saint, plus raisonnable qu’il n’y paraissait et on pouvait bien le traiter de petit joueur à ce sujet, il s’en fichait. Il estimait avoir assez de problèmes pour s’en ajouter des nouveaux… Des bêtises, il en avait fait plusieurs quand il était plus jeune et il n’était pas sous l’emprise de l’alcool à cette époque. Fut un temps où le ridicule ne l’effrayait pas et où il était le premier à s’amuser à faire le pitre rien que pour attirer l’attention. Aussi incroyable soit-il, il était ce genre de garçon… Certainement que Jarl lui-même peinerait à y croire après avoir passé deux années à ses côtés. Le jeune homme n’était plus celui qu’il était, il était beaucoup plus calme, beaucoup plus terre à terre, moins enthousiaste et fou. L’expérience avait joué sur sa personnalité, le transformant en un garçon plus réservé, plus discret et qui appréhendait les relations humaines. Sa surdité était assurément l’une des raisons pour laquelle, peu à peu, Jay avait commencé à installer des distances avec le monde. Toute cette confiance qu’il avait auparavant s’était lentement dissipé à partir du jour où il n’était plus en mesure d’entendre. Dans ces moments là, évidemment que tout finissait par changer, par devenir différent. Il avait dû s’habituer à vivre dans un univers nouveau et dieu seul savait que ça n’avait pas été simple… Hors, pourtant oui, si son camarade l’avait rencontré à cette période, il serait étonné de voir celui qu’il était à présent.

Les yeux rivés sur son vis-à-vis, il eut un léger mouvement de recul en le voyant si proche de lui. Qu’est-ce que Jarl faisait tout à coup ? Il n’avait pas eu d’autres choix que de fixer ce torse que son ami lui montrait, un brin gêné par la situation, avant de redresser ses prunelles en sa direction. Un doux rire s’échappa de ses lèvres alors à sa remarque. Bien sûr que non, ce n’était pas imaginable… Quoi que, au vue de la personnalité du plus vieux, ce n’était pas si surprenant. Lui, en transformiste, dans un bar islandais, Jay aurait adoré voir ça. Il ne pouvait pas dire s’il en aurait été fasciné ou amusé cependant il aimait découvrir chaque nouvelle facette de son ami. « C’est un peu difficile à concevoir. Tu serais une femme avec un peu trop de muscles à mon goût. » Se moqua-t-il gentiment, non pas sans rigoler légèrement de plus bel. Un rire qui s’accentua un peu plus à la réception du baiser dans le vent que l’islandais venait de lui adresser. Quel idiot ! Ses phalanges se saisissant de son verre de vin, il finit alors le fond qui restait avant de s’amuser à faire tourner lentement la coupe entre ses doigts. « Moi ? » Répéta le coréen instinctivement. « Ça ne sera jamais aussi croustillant que les tiennes » C’était même certain. Il en avait fait des bêtises en étant plus jeune mais rien de fascinant. Et encore, il n’était pas saoul. D’aussi loin que remonter ses souvenirs, il n’avait jamais fait des choses folles après avoir bu puisqu’il faisait toujours attention à ce qu’il prenait. « Je me suis déjà déguisé en fille ceci dit pour un festival au collège. » Il ne put s’empêcher d’en rire avant d’ajouter un « Et je n’étais même pas ivre. » Haussant les épaules, l’éclat sur son visage ne fit que s’élargir un peu plus à ses propos. « Je me suis aussi enfui en boxer dans la rue. » Parce qu’il avait été surpris par les filles qu’il avait tenté d’espionner dans les vestiaires. Assurément que oui, Jay avait bien changé… Il n’était pas que différent, il avait grandi aussi et évolué en maturité.

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Oh que cela doit lui paraître étrange de l’imaginer dans un tel accoutrement juste parce qu’il a perdu un vulgaire pari. Il faut cependant dire que l’Islandais a vraiment trouvé cela amusant et même assez instructif. Comment se rendre compte de la souffrance féminine autrement qu’en l’expérimentant ? Le plus risqué, c’était probablement les talons, quand l’on ne sait pas se mouvoir avec, l’on peut avoir l’impression d’être sur des échasses. C’était assez comique en y repensant attentivement, et c’est bien pour cela que Jarl est en joie à se souvenir assez lointain. « C’est un peu difficile à concevoir. Tu serais une femme avec un peu trop de muscles à mon goût. » Oui, en effet, le policier avait déjà une carrure assez imposante à l’époque, le métier oblige. Ou plutôt obligeait. En effet, Jarl n’est plus policier, et c’est justement l’un des plus grands regrets de sa vie. Mais il convient de ne plus réfléchir à cela, ce n’est pas le lieu, ni le moment, ça il le réserve à quand il se retrouve tout seul avec la seringue remplie de ce liquide dévastateur pour son organisme et pour ses sentiments, mais ô combien salvateur.

S’ensuit alors cette question en retour, sur les actes fous qu’il aurait pu accomplir lui, l’homme sage, celui qui ne bouge pas, et ne fait pas un pas de travers, celui à la vie si lisse que cela pourrait en être ennuyant si l’on ne s’aventurait pas au-delà de cette apparence. « Moi ? Ça ne sera jamais aussi croustillant que les tiennes. » Cette fausse modestie est accablante, il ment, et ce n’est pas possible autrement, tout le monde a fait des choses inavouables, il suffit d’oser les dire pour que cela devienne amusant. « Je ne te crois pas lorsque tu dis ça ! » Oh que non, ce n’est pas possible qu’il n’ait rien d’aussi croustillant, tout le monde a déjà fait des erreurs de parcours comme lui. Dieu sait que cela doit être assez intéressant venant de sa part, personne ne s’attendrait à le voir faire ça. « Je me suis déjà déguisé en fille ceci dit pour un festival au collège. » Voilà, c’est intéressant comme anecdote. En réalité, c’est aussi drôle dans un cas que dans l’autre, voir deux hommes que eux en femmes est assez étrange. « Et je n’étais même pas ivre. » En même temps cela aurait été étonnant qu’il soit complètement saoul, à vrai dire personne n’a dû le voir enivré par l’alcool. Et c’est peut-être mieux ainsi d’ailleurs. « Je me suis aussi enfui en boxer dans la rue. » Là c’est encore mieux et un sourcil levé sur le visage de Jarl esquisse la question qui ne tardera pas à venir poindre sur le bout de ses lèvres. Avant cela, il se rallume une cigarette. Car oui, l’Islandais fume trop, beaucoup trop, comme un pompier si l’on suit l’expression à la lettre.

Le nouveau bâton de nicotine aux lèvres et l’alcool qui commence à oindre ses veines de leur ivresse délicate, et cette envie d’éclater, de ne plus se laisser faire par les conventions. Le jeune homme pose à nouveau ses yeux sur ceux de son ami et décide d’avoir cette explication. « Laisse moi deviner. Tu as été surpris la main dans le sac pour une quelconque raison ? Si c’est ça, je veux tout savoir ! » La commère du quartier, peut-être une déformation professionnelle ceci dit. Quand l’on est détective privé, il faut tout savoir et Jarl aime tout savoir des personnes qu’il apprécie. Il tire une nouvelle bouffée de sa cigarette et commence à ressentir une chaleur incroyable s’emparer de son être. Des bouffées de tabac, des bouffées de chaleur, et peut-être une désagréable impression que quelque chose lui échappe, que son corps ne répond peut-être pas convenablement, comme s’il allait faire une chose qu’il allait probablement regretter.

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Non, Jay n’était vraiment plus celui qu’il était par le passé. Autrefois, il était un garçon tellement jovial, qui n’avait pas peur de se ridiculiser pour se faire remarquer et qui parlait parfois bien plus que ce qu’il n’écoutait. Il était une véritable bouffée d’air frais, une tornade qui laissait toujours une trace de son passage et le plus souvent, on appréciait sa personnalité dynamique et chaleureuse. Il était plus populaire qu’il n’y paraissait néanmoins il n’était pas arrogant, encore moins superficiel. La différence avec aujourd’hui était qu’à l’époque, le jeune homme avait confiance en lui et n’avait pas peur de qui il était, il n’avait pas peur des répercussions que sa situation pouvait avoir sur autrui… Il était plus naïf, plus rêveur également qu’il ne l’avait jamais été, heureux et amoureux également. Certainement que oui, en effet, son existence semblait beaucoup trop belle qu’on avait décidé de l’entacher et y ajouter un brin de noirceur. S’il s’en était relevé, malgré lui, Jay avait changé… Plus fragile et vulnérable, plus d’insécurité si bien qu’il n’était plus en mesure d’agir avec autant d’innocence qu’autrefois. La raison pour laquelle, l’imaginer lui faire tant de bêtises n’était pas forcément pensable… C’était vrai, chacun avait une part de folie en lui néanmoins ce n’était pas tout le monde qui osait en réalité. Il y avait des personnes qui étaient réellement timides et n’avaient jamais tenté d’affronter leurs peurs. Peut-être qu’avec le temps, il parviendrait à récupérer cette personnalité qu’il avait auparavant cependant il ne l’espérait pas vraiment. Cela faisait partie de la vie après tout et tout le monde finissait par changer avec le temps.

Le sourire aux lèvres, le visage rivé vers son meilleur ami, le garçon ne pouvait s’empêcher de rire doucement à ses propos. Jarl faisait partie de ces personnes qui le connaissaient le mieux, celui qui en si peu de temps avait pris une place importante dans son cœur et à qui Jay n’hésitait pas à se confier… Leur amitié n’était pas si vieille seulement il se sentait en confiance avec lui et son camarade avait connaissance d’une grande partie de sa vie. Il n’en parlait pas beaucoup parce qu’il s’agissait de sujets qu’il n’aimait pas aborder toutefois lorsqu’il en avait besoin, il savait qu’il pouvait compter sur cet ami. Il y avait certains aspects de son passé que le jeune homme souhaitait oublier cependant il y avait également ceux qu’il gardait précieusement, des souvenirs qui lui manquaient, le rendaient plus nostalgique… Un nouveau rire franchit la barrière de ses lèvres au désir de tout savoir de son vis-à-vis avant qu’il ne hausse naturellement les épaules. « J’avais espionné les filles dans les vestiaires. » Vraiment, à cette période non, il n’avait honte de rien. Il s’en rappelait comme si c’était hier alors qu’avec l’un de ses amis, ils s’échappaient, un éclat brillant sur le visage. « Après tout, on m’a fait des yeux, c’est pour regarder non ? » Bien qu’il ne le faisait plus désormais… Evidemment, dire qu’il n’observait pas les belles femmes qui passaient près de lui serait mentir néanmoins il ne les espionnait plus de manière aussi déplacé. « Pour ma défense, j’étais jeune et innocent. » Totalement.

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« J’avais espionné les filles dans les vestiaires. » Là, Jarl se met à rire franchement. Rien qu’à imaginer la tête déconfite de son ami devant des filles en petite tenue dans un vestiaire sportif, l’insulaire ne peut retenir le fou rire grandissant qu’il sent poindre en lui. « Je le savais ! crie-t-il presque en pouffant comme un idiot. » Qu’aurait-il donner pour pouvoir connaître Jay à cette époque. Alors n’imaginez pas que le détective privé n’apprécie pas celui d’aujourd’hui, mais avoir pu voir les deux facettes de cet individu lui aurait beaucoup plu. « Après tout, on m’a fait des yeux, c’est pour regarder non ? » Ah ce n’est pas lui qui dira le contraire. Même s’il ne le fait pas, ou alors très peu. Comme dirait le célèbre adage, ce n’est pas parce que l’on est au régime que l’on ne peut pas regarder le menu, à bon entendeur. Jarl sait très bien que Jay ne le fait pas non plus, ne le fait plus tout du moins, et il le comprend, il sait ce que ça fait que de perdre la personne que l’on a aimé. Même si les circonstances pour les deux hommes sont bien différentes et beaucoup moins tragiques pour le coréen. « Pour ma défense, j’étais jeune et innocent. » Ah oui ? Venant de lui, cela ne l’étonne guère. L’islandais a toujours su que son meilleur ami était quelqu’un de prude, et cela ne s’est jamais démontré, du moins en sa présence et comme ils passent beaucoup de temps à deux, il doute que ce soit un vrai pervers.

Il attrape au final une nouvelle cigarette, encore une, un vrai pompier. Jarl a la désagréable tendance à allumer bâton de nicotine sur bâton de nicotine. Il sait bien que cela finira par le tuer, et peut-être est-ce ce qu’il désire au plus profond de lui, même s’il n’ose pas se le formuler ainsi. « Le bon vieux temps, dit-il d’un ton beaucoup plus grave d’un coup, en songeant au passé et aux bêtises qu’ils ont pu faire en étant jeunes. » Oui, parfois, Jarl aurait aimé avoir le pouvoir de voyager dans le temps, de changer les choses, d’affecter le cours de l’histoire. Pourtant ce n’est pas possible et il est obligé de vivre avec le poids des affres des événements qui se sont déroulés et qui l’ont détruit. Marqué au fer rouge pour le restant de ses jours, ses blessures ne se refermeront jamais vraiment. « Dis, j’ai une idée à la con, mais tu voudrais pas qu’on fasse des bracelets de l’amitié ? » Oh là, quand il commence à proposer des trucs pareils, c’est qu’il est vraiment complètement bourré. Mais il sait qu’il aimait en faire quand il était beaucoup plus jeune. En parlant il sort de dessous la table basse une boite avec du fil fin de couleur et des fils de coton. « De toute façon, t’as pas le choix, je nous en fait deux ! » Ce qu’il ne garantis cependant pas, c’est le résultat, peut-être qu’ils vont être déglingués, mais peut-être que c’est le plus important. Ils représenteront au moins ce qu’ils sont plus au plus profond d’eux, des êtres abîmés par la vie.

Les doigts commencent à faire coulisser les fils les uns par dessus les autres, à faire des nœuds et à s’activer pendant que Jarl fume, sa cigarette coincée dans le coin gauche de ses lèvres. Il se concentre et commence à oublier un peu la tristesse qu’il ressent à avoir repensé à cet accident qui a détruit sa vie tout entière. « Bon, ils sont pas vraiment beaux, mais on est pas vraiment beaux de toute façon ? » Il plaisante, bien évidemment, mais c’est surtout pour faire la conversation, il lève le bracelet qui est tressé de fils blancs et noirs pour le mettre autour du poignet de son ami, il finit par fermer le nœud et lui sourit doucement. « Maintenant fait un vœu, quand il se brisera, il se réalisera. » Franchement le résultat n’est pas aussi beau que ce qu’il a déjà pu faire quand il était plus jeune, mais au moins ça a le mérite d’exister, et de sceller indirectement cette amitié fusionnelle qui existe entre eux. « A ton tour de fermer le mien ? » Il ferme les yeux et laisse Jay opérer la même attention, le nœud se verrouille finalement et pendant les quelques secondes où cela se fait, une seule pensée fugace : Qu'on me rende le bonheur à nouveau.