come around 'cause i need you. (keala)

Notre lien commence à changer sensiblement, nous sommes moins dans la retenue - j’imagine que l’alcool aide, pour ce soir - j’ai envie de la bousculer, un peu, la sortir de sa zone de confort pour qu’elle pense à autre chose que ses tracas. Et ça semble fonctionner, je n’en suis pas peu fière. Taquine, je viens lui faire croire qu’un requin pourrait bien la dévorer, et je la sauve de cette bête imaginaire, opérant un rapprochement stratégique duquel je ne suis que partiellement consciente. C’est plutôt quelque chose de naturel, d’instinctif. J’ai envie de la voir sourire, rire, de la voir heureuse, alors que je ne la connais même pas, ou à peine. C’est une sensation particulièrement étrange, mais pas désagréable pour autant. Au contraire même. La jolie brune se retourne face à moi après que je lui ai parlé de son père, mes mains initialement à sa taille restent dans les parages, pivotant simplement en même temps qu’elle, pour se retrouver presque dans son dos, nos corps si proches que je peux sentir son souffle sur mon visage. « Et il te sera reconnaissait pour ça. Mais pas autant que moi. » Je souris, mon regard finalement attiré par sa lèvre qu’elle vient emprisonner entre ses dents. Je ne sais pas si je dois prendre ce signe pour argent comptant, mais je sens simplement qu’elle est en train de faire vriller mon palpitant qui ne sait déjà plus où donner de la tête. « Qu’est-ce que je pourrais faire pour te remercier ? » Mon regard se redresse pour plonger dans le sien, mon coeur n’arrêtant pas sa course folle. « Je te dois bien ça. » ajoute-t-elle, me faisant cette fois vriller le cerveau. Je crois qu’elle n’est pas prête à entendre ce qui me ferait vraiment envie, au vue de l’alcool, de notre proximité, du fait qu’elle me plaise au delà de la raison. Non, Loïs aime les garçons, ça se voit, comme le nez au milieu de la figure, et je refuse de profiter de l’alcool qui crépite dans son sang. Alors je lui offre un sourire avant de lui répondre. « Ton sourire, ça me suffit. » C’est super cul cul dit comme ça, mais au fond, c’est la vérité. Je plaque un baiser furtif sur sa joue et m’éloigne d’elle avant d’être tentée de faire une bêtises que je pourrai sans doute regretter s’il s’avérait que la brune réagisse à l’inverse de mes désirs. Alors je joue la carte de la sûreté, de la raison, même si c’est dur. « Ça va, t’as pas trop froid ? » Je fais glisser mes mains cette fois le long de ses bras pour la frictionner légèrement, attendant sa réponse. Si elle veut rentrer, on peut. Si elle veut rester encore, alors on restera. Ce soir, je me plie à ses volontés, parce qu’elle m’a appelée pour que je sois là pour elle, et je le suis.

Elle n’en était pas encore à tituber sous l’effet de l’alcool ou du rire, mais elle ne devait pas en être loin. Les mots s’échappaient d’entre ses lippes sans qu’elle ne puisse les retenir. Un peu pompette, elle avait l’impression d’être envahie d’une certaine gaieté qui la transformait, la rendait sans filtre. Habituellement, Loïs n’avait pas particulièrement l’alcool gentil, même si elle ne devenait pas méchante non plus. Peut-être un peu paranoïaque. Mais pas là, pas avec Keala. Rentrant dans le jeu de la blonde, elle lui demandait ce qui lui ferait plaisir, comment elle pourrait la remercier. Il y eut un moment de flottement avant que la russe ne finisse par lui répondre : « Ton sourire, ça me suffit. » Elle avait répondu cela en lui adressant un sourire, avant de venir plaquer un baiser furtif sur sa joue. Elle la relâchait alors précipitamment, s’écartant pour lui rendre sa liberté. Loïs se sentit comme un animal en captivité retrouvant finalement la liberté, et cela ne lui plaisait pas forcément. Elle avait soudainement l’impression d’être en possession de trop d’espace. « Ça va, t’as pas trop froid ? » lui demandait Keala en venant frotter ses bras, comme pour chercher à lui apporter un peu de chaleur. « Ça allait un peu mieux quand tu me servais de couverture, mais je dirais que ça va. » Elle avait répondu avec un air taquin, vrillant son regard dans le sien. Le contact de la main de Keala contre son bras était loin d’être désagréable. Mais en dehors du fait d’être une couverture humaine, il était possible que la blonde soit également soumise au froid, ce qui pouvait être embêtant. Sa question était peut-être justifiée par sa propre hypothermie. « Et toi ? Ça va ? » demandait soudainement Loïs. L’alcool aidait à faire transparaître l’inquiétude dans sa voix. Se rapprochant de Keala, elle venait à son tour frotter son dos, pour tenter de la réchauffer. Après tout, elle avait bien pédalé sur le vélo, avait dû avoir bien chaud, et quelques minutes après, elle se retrouvait complètement soumise au froid. « Tu veux qu’on tente d’allumer un feu pour te réchauffer ? » Elle avait proposé cela en désignant les arbres derrière elles. Loïs n’était pas tellement ce qu’on pouvait considérer comme une figure de Robinson Crusoé des temps modernes, mais elle était prête à essayer si cela pouvait faire en sorte que Keala ne tombe pas malade.

Je sais pas trop dans quoi je m’embarque, je remarque simplement qu’avec un peu d’alcool dans le sang, j’ai une tendance à être beaucoup plus tactile, et je voudrais surtout pas que Loïs en soit mal à l’aise, qu’elle imagine quoi que ce soit. Après tout, je l’ai quand même emmenée boire un paquet de shots, puis l’ai amenée jusqu’ici dans un coin paumé. J’crois que si j’avais été un mec, ça aurait été carrément creepy. Je lui demande si elle a pas trop froid, frictionnant un peu ses bras pour la réchauffer avant même qu’elle ne prenne le temps de me répondre. « Ça allait un peu mieux quand tu me servais de couverture, mais je dirais que ça va. » Je mets ça sur le compte de l’alcool, parce qu’à l’entendre, je comprends qu’elle aurait préféré que je la garde tout contre moi. J’aurai préféré aussi, mais j’ai juste eu peur qu’elle s’imagine quelque chose, que la situation devienne bizarre, qu’elle me fuit, j’en sais rien. J’ai jamais eu trop peur de ça avant, enfin si, un peu, mais pas de cette manière. Avec elle, j’ai juste envie de bien faire. C’est étrange. « Et toi ? Ça va ? Tu veux qu’on tente d’allumer un feu pour te réchauffer ? » Je la laisse frictionner à son tour mes bras, souriante, les yeux vrillés dans les siens. « Ça va, mais j’aime bien quand tu fais ça, ça fait circuler tout mon sang. » Je ris un peu, sentant déjà des picotement dans le bout de mes doigts. « Et je suis pas sûre d’être douée pour allumer un feu, à moins que tu aies fait un stage de survie dans les bois, j’crois que pour le feu, on repassera. En plus, j’crois qu’on a pas vraiment le droit. » Je hausse les épaules un peu déçue de devoir lui refuser quoi que ce soit. « On peut rentrer si tu veux, on reviendra ici en journée, il fera meilleur. » Je lui souris à nouveau, sans la lâcher des yeux. Je me sens étonnement bien, bien comme je n’avais pas été depuis très longtemps. Je ne cherche pas à comprendre pourquoi ni comment c’est possible, mais je savoure, le plus simplement du monde.

Loïs prenait soudainement conscience que si Keala posait cette question, c’est qu’elle était elle-même soumise au froid. Elle se sentait un peu idiote à ne pas y avoir pensé avant et elle se mit à passer ses mains sur ses bras et son dos pour tenter de la réchauffer un peu. Il était vrai qu’elle n’était pas très couverte et qu’elle risquait de tomber malade. Ce qui serait assez embarrassant. « Ça va, mais j’aime bien quand tu fais ça, ça fait circuler tout mon sang. » Keala riait et Loïs n’hésitait pas à la suivre de bon cœur. « Et je suis pas sûre d’être douée pour allumer un feu, à moins que tu aies fait un stage de survie dans les bois, j’crois que pour le feu, on repassera. En plus, j’crois qu’on a pas vraiment le droit. » Loïs esquissait une grimace. C’était vrai qu’elles n’avaient pas particulièrement le droit, elle n’y avait pas pensé. Il lui arrivait pourtant de devoir lutter contre ça grâce à son travail, mais la beauté de l’instant lui avait fait oublier quelques principes essentiels. L’alcool aussi, sûrement. « J’essayerais bien, mais… Je suis pas sûre de savoir le faire. J’envisage de passer mon tour. » admit-elle en riant une nouvelle fois. Elle ne voyait pas tellement l’intérêt de faire tourner un bâton entre ses mains, pour ne même pas parvenir à faire s’échapper la moindre fumée – du moins, elle se doutait que cela allait se passer ainsi. Elle fit une légère moue désolée, comme pour s’excuser d’avoir fait une proposition qu’elle ne pouvait elle-même pas honorer. « On peut rentrer si tu veux, on reviendra ici en journée, il fera meilleur. » La blonde souriait et la lieutenante se mit à hocher la tête. Ça semblait être une bonne idée. Enfin, à une seule condition : « Je veux bien qu’on rentre, mais seulement si tu me promets qu’on se reverra très vite. » Elle battait des cils, adoptant une allure de gamine, jusqu’à ce que Keala cède. Enfin, elle ne lui en laissait pas le temps. Cessant de lui frictionner le dos, elle s’éloigna légèrement. « Je crois que je t’aime bien. » lui glissa-t-elle sur le ton de la confidence. Elle se retournait finalement pour marcher vers le passage qui les avait conduites jusque cette plage paradisiaque. C’était dur de laisser cet endroit derrière elles. Loïs n’était même pas sûre de savoir y retourner en étant sobre. Elle avait tellement ri sur la route qu’elle n’avait pas mémorisé le chemin. Et pourtant, elle lançait à Keala par-dessus son épaule : « Allez, pour le retour, c’est moi qui pédale. J’veux pas te laisser t’épuiser. » Elle ne lui laissait pas le choix.