bloody mess (elou)

Je suffoque, je peine à reprendre le dessus et quand Sofia prend la parole pour presque hurler ce que j’imagine être des insultes dans sa langue natale, je prends conscience de ce qui est en train d’arriver. Elle est là. Elle est bel et bien là où je ne l’attendais pas. Bordel de merde. Je me redresse, ôte mes mains du corps de Lou et quitte le canapé alors que la brune est déjà en train de se vêtir. « Je connaissais le dicton "Quand le chat n'est pas là les souris dansent" mais alors le "Quand ma copine part en week-end, j'invite des putes à la maison" c'est nouveau ça ! » Ow. Alors ça, ça risque de pas plaire à Lou, enfin pour le moment, j’en ai bien rien à faire de ce que Lou pourrait bien penser. J’enfile mon boxer et mon t-shirt à la hâte. « Sofia écoute c’est… » Si si, c’est bien c’que tu crois. Je suis une putain de conne et t’as toutes les raisons de m’en vouloir jusqu’à la fin de tes jours. Mais Lou prend les devants et je sens que ça va puer grave. « Insulte moi encore de pute une fois et je te fracasse le crâne. » Non, non, pas maintenant. Je secoue la tête en regardant Lou l’air de lui demander de ne rien dire, qu’elle n’empire pas les choses.

Finalement je repose mon regard sur Sofia, cherchant à trouver le moyen de calmer tout la merde que j’ai foutue. « Je suis désolée, je suis vraiment désolée. » Est-ce que je le suis vraiment ? Evidemment, je ne l’étais pas vraiment tout à l’heure quand je m’amusais avec Lou, mais désormais c’est différent. « Mon amour… ça veut rien dire ça, c’est… c’est rien, c’est juste pour m’amuser. » Putain mais quelle conne… Je soupire un peu, passe ma main dans mes cheveux en bataille et essaie de trouver quoi dire, quoi faire, qu’elle me foute une baffe que ça me réveille, j’en sais rien, mais qu’elle ne reste pas là sans rien dire, je vais péter un plomb…

J’y suis peut-être allée un peu fort, ou pas. Je ne sais plus. Un voile de rage semble s’être déposé sur toutes mes idées rationnelles. Le sang italien qui coule dans mes veines y est peut-être pour quelque chose. Déjà qu’en temps normal je pars au quart de tour, mais là… “Ah ouais ? Essaye un peu pour voir !” je m’écris à l’intention de la fille qui étais nue sous Eliott quelques secondes auparavant. Mon attention se retourne contre elle. Les deux se rhabillent en vitesse. Et j’avoue que je suis un peu perdue. Je me sens à la fois trahie et comme si j’étais de trop. J’en culpabiliserais presque. Enfin non ce n’est pas de la culpabilité, plutôt une sorte de gigantesque malaise ? “Ah bah t’es désolée, forcément ça change tout hein !” je m’écris, furieuse. Je n’ose pas m’approcher d’Eliott. A ce stade, dans l’état où je suis, je ne sais même pas de quoi je serais capable. Enfin, certes je suis un poids plume, mais je suis hargneuse et je sais faire mal quand je veux. “T’as entendu la greluche ça veut rien dire alors casse-toi. MAINTENANT. Dégage de CHEZ MOI.” Je crois que je ne me contrôle plus vraiment. “Non mais tu te fous de ma gueule ? Pour s’amuser on.. je sais pas on fait la fête, on saute en parachute, mais on va pas fourrer ses doigts dans le premier vagin qui passe !” Non en effet je ne me contrôle plus, j’en suis rendue à hurler maintenant. Et je suis assez vulgaire, ce qui n’est pas vraiment dans mes habitudes d’ordinaire. Mais ce n’est pas une situation ordinaire il faut croire...

Son cerveau lui hurlait de foutre le camp et de disparaître comme elle avait l’habitude de faire. Mais là, Lou n’avait pas envie de se laisser faire, de se laisser insulter et marcher dessus. Elle ignora le regard suppliant d’Eliott et se passe une main dans les cheveux puis empoigna son sac dans une tentative désespérée de dompter ses pensées. Mais rien n’y faisait, Sofia avait frappé sa fierté et elle se devait de lui rendre la pareille. Les paroles d’Eliott la blessèrent plus que de raison et la française savait qu’elle ne pouvait plus se contenir. S’amuser hm ? Rien que ça, tout ça n’était que s’amuser à ses yeux ? N’y avait-il rien de plus, pas une once d’amitié ? D’attachement ? Soit elle allait aussi s’éclater alors. Sans un mot et dans de grandes enjambées, Lou fut en face de Sofia et l’empoigna par le col de son haut pour la plaquer contre le mur. « Ferme la. » cracha-t-elle « Au lieu de gueuler comme une chienne, tu ferais mieux de te remettre en question. » Elle la libéra dans un dernier regard assassin puis fixa Eliott, le message passa dans ses pupilles dilatées de colère. Trahison, l’amusement oui mais elle avait pensé que c’était devenu ne serait-ce que quelque plus intime. Quelle conne. Elle claqua la porte.

Non, il ne fallait pas que ça se passe comme ça, il ne fallait pas que Sofia rentre, pas qu’elle provoque Lou, parce que je la connais Lou, je sais qu’elle va s’emporter, je sais qu’elle va pas se laisser marcher sur les pieds. Bordel, on peut revenir quelques heures en arrière ? Non ? Merde. « Ah bah t’es désolée, forcément ça change tout hein ! » Non ça change rien, je sais bien. Mais Sofia ne s’arrête pas là et dans sa colère elle continue de provoquer Lou qui ne tardera pas à rétorquer, je le sais. « Non mais tu te fous de ma gueule ? Pour s’amuser on.. je sais pas on fait la fête, on saute en parachute, mais on va pas fourrer ses doigts dans le premier vagin qui passe ! » Je serre les dents, ouvre la bouche en prenant une inspiration pour lui répondre mais Lou est plus rapide, elle empoigne le col de ma petite amie pour la plaquer contre le mur et je hurle « LOU ARRÊTE ! » Mais tu parles, ça ne l’arrête pas. Elle lâche sa phrase acerbe avant de quitter notre appartement en claquant la porte, et je sursaute avant de soupirer. Je passe nerveusement ma main dans ma tignasse, avant de faire l’effort de plonger mon regard dans celui de celle qui était jusqu’à il y a quelques minutes encore, ma petite amie. « J’ai jamais eu de sentiments pour elle, ça n’a rien à voir avec toi, t’étais pas là et je… merde, je sais pas quoi te dire, je suis conne je sais, tu m’en veux et t’as raison, mais j’te jure que ça signifiait rien pour moi. Rien du tout. » Rien qui ne vaille le coup de foutre en l’air mon couple en tout cas. « Sofia, s’il te plait, ne m’en tiens pas rigueur, tu m’connais je… »  Non ne t’enfonce pas là dedans Eliot. « Je suis désolée. » Oui, même si ça changera rien.

Lou fonce sur moi, j’entends à peine Eliott qui lui crie de ma lâcher. Mais à moi elle ne me fait pas peur. Ce serait même plutôt le contraire. Je m’apprête à riposter quand finalement elle me lâche et s’enfuit de l’appartement. “Espèce de lâche !” je m’écris avant de reporter mon attention sur Eliott qui commence à essayer de m’expliquer ce qui pourtant était très explicite. J’ai presque l’impression qu’elle m’en tient rigueur ! Non mais elle se fout de ma gueule c’est pas possible ?! J’hallucine là ! “Non mais attends, tu t’entends un peu ? A t’écouter on dirait que c’est moi qui suis responsable de toute cette merde ! T’es pas sérieuse rassure-moi ! C’est parce que j’étais pas là que hop tu couches avec une autre ? Ou alors, quoi, je t’ai coincée dans une relation sérieuse ? Je sais bien que t’étais mal à l’aise avec ça, mais je te l’ai proposé et tu as dis OUI. Je t’ai jamais forcée à t’engager avec moi, mais tu l’as fait ! Et maintenant tu va me raconter que c’est ma faute si tu te tapes une salope derrière mon dos ?!” Je fais les cent pas avant de finalement aller dans la salle de bain, claquer la porte et fermer à clé. J’ai besoin de cinq minutes rien qu’à moi. Je n’arrive pas à croire ce qui est en train de se passer. Je ne sais pas ce que je suis censée faire. Je me passe un peu d’eau sur le visage, comme si ça pouvait aider ! Et puis je souffle un coup. Je ne peux pas rester ici éternellement. Il va falloir que je sorte et que j’affronte Eliott. Mais j’ai vraiment tout sauf envie de la revoir en train de me dire qu’elle m’aime, qu’elle est désolée et que c’est pas de sa faute, qu’elle est comme ça. Rien que d’y penser ça m’énerve encore plus. Finalement je ressors de la salle de bain, je vais directement vers ma valise. “Je ne veux plus jamais te voir Eliott. Toi et moi c’est terminé.” J’ai parlé d’un ton froid et déterminé. “Je vais me trouver un hôtel pour la nuit. Tu as jusqu’à demain pour récupérer toutes tes merdes et dégager de mon appartement.”

Lou est partie et je me retrouve seule avec Sofia, je ne suis pas sûre que ce soit mieux, peut-être que j’aurai dû les laisser se crêper le chignon, et m’éclipser quand il en était encore temps. Mais si je suis une petite conne infidèle, je ne suis pas une lâche, et je reste plantée là, les yeux fixés sur le visage en colère de la femme que j’aime, attendant qu’elle finisse de déverser son venin sur moi. Je la comprends, j’aurai sans doute fait la même chose à sa place. « C’est pas ce que j’ai dit Sofia je… c’est pas de ta faute, Sofia attends, attends ! » Je la suis jusque dans la salle de bain mais elle échappe à chacune de mes tentatives de la toucher, et s’enferme dans la salle de bain, à clé. Je viens d’entendre le cliquetis de la serrure. Bordel. Il n’y a plus rien à faire, j’en ai bien peur. Mais je dois essayer, je dois tout faire pour apaiser sa peine, recoller le pot cassé, je refuse de mettre un terme à notre histoire, juste pour une coucherie.

Alors en attendant qu’elle se calme, je fais les cent pas dans le salon, tourne en rond, m’assois une seconde et me relève, incapable de tenir en place. Et quand finalement elle sort, je m’avance vers elle, mais encore une fois elle m’évite, si dirigeant cette fois vers la porte d’entrée où se trouve encore sa valise. « Je ne veux plus jamais te voir Eliott. Toi et moi c’est terminé. » « Arrête dis pas un truc pareil, t’es en colère c’est normal, mais tu vas digérer, on va, je sais pas on… » Elle ne m’écoute pas, me coupe la parole et m’assène de sa décision. « Je vais me trouver un hôtel pour la nuit. Tu as jusqu’à demain pour récupérer toutes tes merdes et dégager de mon appartement. » Je secoue la tête, elle peut pas me foutre dehors. « Nan nan nan nan nan Sofia, s’il te plait, s’il te plait, tu sais que j’ai pas de famille et nulle part où aller, tu peux pas me foutre dehors, je sais que j’ai déconné, je peux dormir sur le canapé autant de temps que tu voudras, je peux faire tout ce que tu voudras, pour te prouver que je suis réellement désolée, mon Amour je t’en supplie… » Je crois que je suis en train de prendre conscience que ma connerie aura eu raison de la chose qui m’était le plus cher au monde, à savoir mon couple. Je tente d’attraper son poignet et croiser son regard du mien, humide. « Sofia… fais pas ça… » Loin de moi l’idée de retourner la situation, je sais que je le mérite, mais j’ai pas du tout envie de me retrouver à la rue…

Je suis complètement perdue. Je ne sais ni quoi penser, ni quoi faire, ni quoi dire. Mon esprit est trop embrouillé pour que je pense rationnellement. Je suis envahie de sentiments bien trop forts pour réussir à faire le clair. Je n'arrive pas à croire ce qui est en train de se passer. Je ne comprends pas. Ou plutôt je ne comprends que trop bien. Elle m'a clairement prise pour une conne. Et je doute que ce soir ait été la première fois. Depuis combien de temps ça dure ? Depuis combien de temps elle me trompe ? Avec combien de filles est-ce qu'elle m'a trompée ? Est-ce qu'au moins elle peut en faire le compte ? J'en doute. J'ai été stupide de croire qu'elle avait changé, qu'elle m'aimait et que notre couple... allait bien. Je me sens tellement stupide... J'ai l'impression d'être une petite fille naïve. Je me suis laissée avoir bêtement, et ce n'est pas mon genre, ce n'est pas moi. Et je déteste ça. Je déteste cette situation, je déteste en être indirectement l'instigatrice, je déteste ce que je suis devenue, ou ce qu'on est devenues. Je ne sais même pas. Est-ce que je raconte à au moins un sens ? Je n'en suis même pas sûre. "Parce que tu crois vraiment que ce serait suffisant ? De me dire que t'es désolée ? Mais ça marche pas comme ça Eliott ! Je te faisais confiance putain ! J'avais confiance en toi ! Ce que j'ai pu être conne ! Tu t'es foutue de moi. Tu m'a fait croire qu'on était bien, que tu étais bien, tu m'a menti pendant combien de temps ? Des semaines ? Des mois ? Des années ?? Pendant combien de temps tu m'as menti ? Non, en fait je ne veux pas savoir. Je veux plus rien savoir de toi." Je crache mes mots comme si je lui crachais du venin en plein visage. J'aimerais tellement lui faire mal. Lui faire aussi mal qu'elle vient de me faire mal. Je voudrais qu'elle souffre. Est-ce que c'est normal ? Je ne sais pas. Je ne sais plus. "Et si tu te retrouve à la rue et bien à qui la faute ?! Tu vas pas me faire porter le chapeau en plus non mais sérieusement, tu t'entends ? C'est normal pour toi de faire ces conneries ? Bah voilà, tu vas savoir ce que ça fait que devoir assumer ses actes ! Et puis, t'auras qu'à aller chez une de tes pouffiasses. Parce que tu va pas me faire croire que cette fille c'était la seule que t'as baisé pendant qu'on était ensemble ! Alors tu sais quoi, démerdes toi comme tu veux. Je m'en fous." J'attrape ma valise et lui lance un dernier regard avant de lâcher un: "Adieu Eliot." Je ferme la porte et je m'éloigne le plus possible de la porte avant de m'effondrer en larmes. Mais qu'est-ce qu'il vient de se passer exactement ?