i'm not the dragon you think i am (maéden #5)

Ma propre fille me déteste, c’est un constat. J’avais réussi à retrouver un semblant de confiance en elle, et j’ai tout foiré en me rapprochant un peu trop de sa professeur de théâtre qu’elle admirait au point de croire qu’elle en était amoureuse. J’aurai dû faire plus attention, et en même temps, je ne vois pas comment j’aurai pu empêcher ce qui est arrivé par le plus grand des hasards. Aujourd’hui je suis partagée entre mes réels sentiments pour Rayan, et la déception que j’ai pu lire dans le regard de Maé le jour où je lui ai avoué qu’il s’était bel et bien passé quelque chose entre la jeune actrice et moi. J’ai craqué à nouveau, l’alcool aidant, passer à nouveau une nuit avec Rayan était devenu presque un besoin, et je me suis sentie comme un démon de devoir mettre à nouveau un terme à tout ça après cette nuit merveilleuse passée dans ses bras. Au boulot on me prend pour le dragon, mais au fond, blesser les personnes que j’aime n’est pas chose facile. Parce que mon coeur n’est pas de pierre contrairement à ce qu’on pourrait penser.

Aujourd’hui, j’ai réussi à avoir un rendez-vous avec l’agence de jeunes acteurs dont j’avais parlé à Maé. J’ai envoyé un message à son père pour le prévenir que je passais la chercher, sans qu’il ne lui dise la raison. Il est dix heures et le rendez-vous est prévu pour onze heures, j’ai un peu de temps devant moi. La porte s’ouvre sur mon ex mari que je prends dans mes bras dans une étreinte amicale. « Elle est dans sa chambre, c’est pas la joie. » Je suis heureuse qu’il ne me fasse pas la leçon sur ce qu’il s’est passé, c’est un adulte, il sait aussi bien que moi que le béguin de notre fille sur sa prof n’est qu’un béguin d’adolescente. Pour autant, je vois bien dans son regard qu’il aurait préféré que les choses se passent autrement. « J’imagine. Je vais voir ce que je peux faire. » Je pose ma veste et mon sac dans le salon, rejoignant la chambre de mon adolescente. Quelques coups frappés à la porte entre-ouverte, que je pousse un peu plus. « Bonjour chérie. » Je tente un sourire qui ne trouve aucune réponse. « Je voulais te faire la surprise, j’ai réussi à avoir n rendez-vous avec l’agence de jeunes acteurs dont je t’avais parlé. Ils veulent te rencontrer… » J’espère que ce pas que je fais vers elle pourra nous rapprocher à nouveau, même si je n’espère pas un pardon total aussi rapidement.

Dans sa chambre, elle restait à son bureau, son regard perdu dans des pensées qui n’appartenaient qu’à elles seules, les derniers rêves d’une adolescente amoureuse, qui revoyait constamment cette scène, ce moment, sa mère qui venait interrompre ses doux rêves, pour lui lâcher cette horrible bombe. Et les cauchemars arrivaient, et elle serrait les poings. Sa propre mère, celle dont elle était la chair, le sang, l’avait trahie. Une seconde fois. Et si la première était censée être pardonnée, désormais, elle ne savait plus. elle n’avait plus aucun pleurs, mais une colère noire. Le béguin toujours présent, il ne berçait plus ses nuits, il ne berçait plus ses jours, mais alimentait cette haine. C’était exagéré. Haine était un grand mot, mais elle ne trouvait pas mieux. Elle se sentait trahie, déçue, abattue. Elle avait l’impression que le sol s’écroulait sous ses pieds. Et ce n’était pourtant pas le genre de maé, qui était désormais fade, qui rentrait des cours pour monter dans sa chambre, qui n’adressait pas un regard à quiconque. Presque pas. Et pourtant, elle le sentait. Ce besoin de retrouver sa mère, ce besoin de retrouver la complicité qu’elles avaient réussi à forger ces derniers mois. Mais était-ce réellement possible ? avec tous les ressentiments qui revenaient quand elle y pensait ? était-ce réellement possible ? une question qu’elle se posait sans cesse, tandis qu’elle laissait le crayon tomber dans la trousse, qu’elle posait sa joue sur son bras, tout en espérant que le jour s’éteigne, et que le sommeil lui permette d’oublier un peu, de pardonner un peu.
Pourtant, non.
La nuit ne s’en venait point, et la porte d’entrée s’ouvrant, elle put entendre les pas lourds de sa mère traverser le pallier, tandis qu’elle s’énervait déjà, et se plongeait dans un livre, n’importe lequel. Tout pour oublier qu’elle était là, tout pour la punir mentalement. Tout pour ne pas la voir autrement que cette femme qui lui avait planté un poignard dans le cœur en couchant avec sa prof, en sachant à quel point elle l’aimait. Et bordel, ça faisait mal. Tellement mal. Elle savait bien, pourtant, maé, que cette idylle était illusoire, que jamais rayan ne la verrait autrement qu’une simple élève, et que la différence d’âge était telle que le jour où elle pourrait enfin prétendre à cet amour viendrait lors de ses vingt et un ans, de quoi la rendre folle. Attendre sept ans, c’était impossible pour un béguin, à son âge. Et encore, cela ne voulait même pas dire que rayan se laisserait charmer. C’était chose impossible, et pourtant. Pourtant, elle avait espéré, pourtant, elle le voulait. Et sa mère avait jeté le dernier rempart à cette idée.
Elle la détestait.
Elle voulait la détester.
Mais c’était si difficile de se perdre dans une telle haine, alors que toute une partie de son être ne rêvait que de faire la paix et de la prendre dans ses bras.
Elle restait sa mère.
Et ce fut la raison pour laquelle elle ne la chassa pas de sa chambre, lorsque cette dernière l’ouvrit, passant la tête pour la saluer. Néanmoins, il était hors de question de lui laisser la vie facile, et maé ne répondit pas. Jusqu’à ce qu’elle entende la suite.
Et merde.
Zut.
Elle la prenait par les sentiments, et l’attirait à elle par un appât, son rêve. Sa future carrière. ah oui ? le ton était froid. Mais eden ne devait pas être dupe, sa fille était intéressée. Parce que son nez se relevait de son bouquin, et qu’elle se retournait, affrontant le regard du dragon. compte pas sur moi pour t’excuser, maman. comme ça, c’était dit. pas d’ambiguïté, elle savait à quoi s’en tenir. Enfant rebelle contre parent coupable. mais… je veux y aller. son ton était toujours glacial. Il était sa seule façon de démontrer sa colère, sa déception. Et elle se leva, suivant sa mère dans les escaliers avant d’attraper son manteau, ses chaussures, et de la suivre dans la voiture. Un baiser pour son paternel avant de quitter la maison, et un regard noir pour sa maternelle alors qu’elle pénétrait dans la voiture. Au moins, sa mère avait l’air de comprendre la situation. Elle l’avait blessée. Terriblement.

Je m’en veux. Je m’en veux terriblement d’avoir pu blesser ma fille. Pourtant je ne pensais pas à elle lorsque Rayan et moi foulions les même draps. C’était plus fort que moi, plus fort que le béguin que pouvait avoir Maé face à sa professeur. Mais elle est trop jeune pour comprendre, trop jeune pour se rendre compte de ce que sont les vrais sentiments, ceux qui m’ont animée lorsque j’ai rencontré son père, lorsque j’ai rencontré Cora, lorsque je suis tombée sous le charme de Rayan. Mais je ne lui en veux pas de me faire la vie dure, elle a mal, et tel un animal blessé, elle se renferme. C’est ce qui est le plus difficile dans tout ça. Parce que j’aime ma fille et que je ne voulais pas lui faire de mal, j’aurai préféré qu’elle ne l’apprenne pas, c’est certain, qu’elle passe à autre chose avant même de comprendre que je pouvais vivre quelque chose avec Rayan. Mais il est trop tard, et avec des si on referait le monde. Alors pour tenter de me rapprocher d’elle à nouveau, je choisis - faiblement - de jouer sur la corde sensible, sur son rêve que je suis peut-être la seule à pouvoir l’aider à toucher du doigt. Lorsque je passe la tête dans l’embrasure de sa porte, je sens déjà mon corps se faire plus lourd sous la tension qui règne. Elle fait la gueule, et elle a des raisons. Cette fois, ce n’est pas juste la crise d’adolescence. « ah oui ? » demanda-t-elle le ton très peu enjoué. Mais, intéressée tout de même, la voilà qui fait volte face pour me regarder. Je tente un sourire tendre alors que Maé reste fermée comme une huitre. « compte pas sur moi pour t’excuser, maman » Je ne peux réfréner un léger soupir, pas d’exaspération non, de désespoir plutôt. « Je sais mon ange. Je sais. » Je ne demande pas son pardon, il est trop tôt. Je voudrais juste lui prouver par des actes que je l’aime et que je suis désolée. « mais… je veux y aller. » Je souris davantage, rassurée qu’elle accepte ma proposition. Je la laisse se préparer et prends le chemin retour, plutôt satisfaite de ce début, même si elle fait la gueule, ça je m’y attendais. Je salue Jude au passage et nous entrons dans la voiture Maé et moi. Je démarre et prends le chemin de l’agence de jeune acteurs. « Je suis désolée, c’est un peu précipité, tu n’as pas eu le temps de te préparer. Mais c’est pas une audition je te rassure, je pense qu’ils veulent juste te poser quelques questions, peut-être faire quelques photos… » Je la rassure comme je peux, parce qu’elle doit être aussi excitée que stressée même si elle ne montre rien. « Je suis contente que tu aies accepté de venir… » Même si je sais qu’elle ne le fait pas pour moi. « Et ça me fait plaisir de te voir. »

c'était trop difficile... être dans cette voiture, avec sa mère à ses côtés, le regard qui se faufilait par instant sur sa chevelure blonde, avant que les mauvais rêves ne reviennent. parce que désormais, elle les voyait constamment. un baiser, qui lui donnait envie de vomir, les bras qui s'entrelaçaient, et la rancoeur qui l'animait. elle ne savait plus voir sa maman, sans la voir dans les bras de rayan, et détournait aussitôt le regard, préférant envoyer un sms à mary pour lui dire dans quelle situation elle était. c'était la merde. clairement. elle aurait voulu garder sa colère fermée un peu plus longtemps, mais elle ne pouvait pas passer à côté de la chance que lui offrait sa mère. après tout, c'était son rêve. son rêve, qui était à portée de main. son rêve. et bon sang, elle aurait sauté de joie, si elle n'avait pas appris l'horrible nouvelle quelques jours auparavant.
et elle l'écoutait. d'accord... elle n'arrivait pas. elle n'y arrivait pas. à faire comme si de rien n'était, à oublier qu'elle était en colère, blessée. elle tentait, pourtant, se concentrait sur cette rencontre qui allait se faire, se concentrait sur tout ce qu'elle pouvait, mais elle n'en pouvait juste plus. et les paroles de sa mère n'aidaient pas. c'est parce que c'est mon futur, maman. je ne viens pas pour toi... elle avait l'impression d'être horrible, elle avait l'impression d'être une garce, sa mère faisait un effort, et elle ne lui disait même pas merci. elle avait été élevée mieux que cela, et elle ne put s'empêcher d'éviter tout regard en lui disant merci... d'avoir organisé ça. son ton était entre la colère et la tristesse, mais elle était sincère. être en colère ne changeait rien au fait qu'elle reconnaissait que sa mère avait fait un effort, avait réussi à lui offrir un beau cadeau. et ses poings se serraient, sur ses jambes, tandis qu'elle soufflait lentement, qu'elle tentait de se calmer, de ne pas laisser parler les émotions qui étaient légion, dans sa tête. elle avait l'impression d'être prise dans un étau, d'être enfermée avec la rage, avec le chagrin, avec la gratitude. comme si chaque émotion devenait humaine. comme si chaque émotion voulait passer entre ses lèvres, pour dire ce qu'elle avait sur le coeur. chose qu'elle ne devait surtout pas laisser passer. parce que maé n'était pas idiote. elle savait bien qu'à gueuler, elle allait le regretter. elle ne devait pas pardonner à sa mère, mais ne devait pas non plus l'engueuler, lui crier dessus, ou faire une scène. elle devait se comporter en adulte. elle devait se calmer. elle devait se préparer à ce rendez-vous, se concentrer sur autre chose que cette boule qu'elle avait au fond de la gorge.
et alors que la voiture se garait, elle ne se sentait toujours pas prête. elle avait évité de se laisser porter par ses états d'âme, mais elle avait peur de craquer. elle avait peur de tout détruire. elle avait peur de devenir le dragon qu'elle voyait en sa mère.

Ma fille est froide, distante, et elle a toutes les raisons de l’être. Ce serait mentir de dire que ça ne me fait pas mal, mais je ne peux m’en prendre qu’à moi-même après tout. En adulte responsable, j’aurai simplement pu éviter le drame en ne flirtant pas avec le danger comme j’ai toujours aimé le faire. Mais là, il s’agissait de Maé, et j’aurai dû me retenir, aller contre ma nature, même si c’était difficile. Mais je n’ai pas réussi, je ne suis même pas sûre d’avoir eu l’envie d’essayer. C’est terrible quand j’y pense, je me sens vraiment comme un monstre. Je sais bien que ce moment avec elle, que je lui offre aujourd’hui, ne suffira pas à ce qu’elle me pardonne, il n’y aura que le temps pour apaiser sa peine, et ma culpabilité. Mais je veux quand même lui montrer que malgré tout ça je ne l’oublie pas, je l’aime, et je crois en elle. C’est important qu’elle le sache. « c'est parce que c'est mon futur, maman. je ne viens pas pour toi… » Je hoche la tête, restant concentrée sur la route sans dévier le regard vers elle, encaissant seulement avec une boule dans la gorge. Je sais. Je sais mon ange. Elle me remercie quand même d’avoir organisé ça, je sais qu’elle fait un effort, et je remercie son père de l’avoir aussi bien élevée en mon absence. Encore un poids qui s’ajoute à ma culpabilité. Je soupire légèrement, ce qui s’apparente plus à une grande inspiration pour tenter d’évacuer ce poids qui me comprime la poitrine. Je me gare devant le bâtiment, nous sommes en avance sur l’heure de rendez vous. C’est en silence que nous laissons s’égrainer les minutes, j’hésite. « Je veux que tu saches que c’est fini avec Rayan, les choses ont été claires, je sais que je t’ai profondément blessée et j’en suis tout aussi profondément désolée. Mais tout ça c’est du passé maintenant. » C’est important qu’elle sache, et surtout c’est la vérité. Rayan et moi c’est fini. « Je sais aussi que ça mettra du temps pour que tu arrives à me pardonner, si tu y arrives un jour, mais je t’aime et j’ai espoir que tu y arrives. » Je frotte mes mains un peu moites sur mon pantalon de tailleurs et la regarde à nouveau, je vois ses yeux brillants, ça me brise le coeur. « Je crois qu’il est temps d’y aller. Est-ce que tu as besoin d’un peu de temps toute seule dans la voiture ? » Je peux sortir et lui laisser le temps dont elle aura besoin.

comment pouvait-elle lui pardonner ? c'était insensé. elle avait tout de même surpris sa mère et rayan. elle n'en pouvait plus, de penser à elle en regardant sa maman, elle détestait cette situation. et d'une certaine façon, elle haïssait être en colère contre sa mère. mais elle ne savait pas faire autrement, et c'était probablement normal. après tout, elle l'avait dit à a sa mère, qu'elle en pinçait pour sa prof. c'était logique qu'elle soit en colère. et d'un autre côté, elle se demandait si rayan avait éprouvé des sentiments pour sa mère. elle savait, depuis peu, que la relation entre cora et eden était particulière, qu'il n'y avait pas de sentiments lorsqu'elles allaient voir ailleurs. mais, et rayan ? n'y avait-il pas eu des sentiments ? avait-elle été sotte de penser pouvoir un jour l'aimer ? l'aimait-elle vraiment ? si elle l'aimait, ne devait-elle pas accepter ses choix ? tant de pensées, dans cette voiture. et elle se perdait dedans. elle était bientôt une adulte, il était normal qu'elle se pose toutes les questions, qu'elle ne se retrouve pas dans une mauvaise situations. et en tant que future actrice, elle se devait de contrôler ses émotions.
comme celles qui survenaient alors que sa mère prenait la parole au sujet de cette pseudo-trahison.si seulement t'avais fait ça avant... parce que le mal était fait. d'accord, rayan et elle n'étaient plus ensembles, la nuit, à faire des cochonneries. mais c'était trop tard. maé l'imaginait, parfois, et avait un haut-le-coeur. elle aurait voulu pouvoir poursuivre ses fantasmes, mais dès qu'elle se mettait à penser à sa prof, elle revoyait sa mère.
les paroles suivantes vinrent cependant toucher son coeur. et elle souffla, un peu en boudant (beaucoup) je sais... bien sûr qu'elle savait que sa maman l'aimait. mais tout en le lui disant de façon quelque peu triste, ses yeux se mirent à briller, larmes arrivant, et elle les essuya rapidement, ne voulant pas craquer. elle était sur le point d'accomplir un rêve, elle n'allait pas le faire avec les yeux larmoyants. oui, je veux bien... faut que je me ressaisisse. elle laissa sa mère sortir, et souffla doucement, laissant ses exercices de théâtre revenir. elle se préparait mentalement, elle tentait d'évacuer toutes les questions, tous les problèmes, toutes ses émotions. elle ne voulait garder que son ambition, celle de réussir, celle de les impressionner, celle de réaliser son rêve. puis elle sortit. allons-y. et alors qu'elles entrèrent, maé ressentit l'angoisse la prendre. il fallait dire que c'était la première fois qu'elle avait à faire à ce genre de rencontre. j'ai le trac... tu crois que ça va bien se passer ? osa-t-elle demander à sa mère, signe que même dans les pires moments, si elle se sentait en détresse, elle recherchait toujours ses conseils, sa voix. elle restait sa fille. et même en colère, elle ne pouvait pas se détacher de sa maman, qui l'aidait, qui l'aimait. si seulement elle trouvait le moyen de lui pardonner.
mais ce moyen ne pourrait sans doute pas venir avant la réunion, et à peine rencontra-t-elle l'homme qui l'accueillit, qu'elle se présenta tout en lui serrant la main, faisant preuve de tous ses efforts pour paraître sûre d'elle. enchantée... je m'appelle maé. avec un sourire.
elle n'était sûrement pas prête.
mais elle allait faire son possible.

« si seulement t'avais fait ça avant… » Comme un poignard planté dans mon coeur. Je le mérite. Je ne mérite que ça. Tout est en train de s’effriter, et j’en suis à l’origine. Ma vie n’a toujours été qu’un vulgaire chaos de toute manière. Je lui dis tout de même que je l’aime et que je suis désolée. Elle sait. Je sais qu’elle sait. Mais ça me semblait important de lui dire de vive voix. J’ai appris que ce genre de choses pouvaient avoir beaucoup de valeur. Tard. Mais je l’ai appris. Je lui propose de la laisser seule un moment, et elle accepte. Je sors alors de la voiture et m’éloigne un peu, le temps de reprendre un souffle à peu près convenable, faire s’atténuer la boule dans ma gorge. Après quelques longues minutes, Maé finit par sortir de la voiture et je referme cette dernière d’une pression sur le bouton dans ma poche. Nous nous dirigeons vers l’entrée de l’agence, et en chemin, j’entends sa petite voix me demander. « j'ai le trac... tu crois que ça va bien se passer ? » Je la regarde alors, lui offrant un sourire rassurant. « Je sais que tu feras de ton mieux mon ange. On ne peut pas plaire à tout le monde, et si tu ne leur plais pas à eux, tu plairas à d’autres, j’en suis persuadée. Il faut le prendre comme un exercice, et donner le meilleur de toi-même. » Je glisse une main tendre sur ses cheveux toujours en lui souriant, et nous entrons, alors qu’un homme vient à notre rencontre, serrant nos mains une à une.
Je sais qu’elle fera de son mieux, cette enfant a le caractère battant de ses deux parents. Et si ce n’est pas pour cette fois, ce sera pour une autre. Je n’ai pas assez de recul pour savoir si elle a le potentiel pour réellement être une actrice, mais je sais qu’elle vit pour ça, et je me promets de l’aider tant que j’en aurai le pouvoir, et la protéger tant que je sera sur cette Terre.