tell me it’s fucking joke (dylake #1)

Un message. Le début de la fin. Voilà comment la supercherie a commencé. Un jeu malsain. Curiosité mal placée. Je n’aurais certainement pas dû la contacter sur cette application. Au final, je me suis prise à mon propre piège. De nombreux messages ont suivi le premier. Tout ça pour en savoir plus à son sujet. Secrètement. Pour savoir à qui j’ai réellement affaire. Qui se cache derrière ce profil mystère. Je dois savoir, c’est plus fort que moi. Depuis que je sais que Morgan m’a trompé, c’est le bordel dans ma tête. Dans mon cœur. Et je perds totalement le contrôle de moi-même. Tout me glisse entre les doigts. Mais ça n’a pas d’importance. Ça n’a plus d’importance. Sur un coup de tête, j’ai fini par lui donner rendez-vous. Pousser le vice jusqu’au bout. Jusqu’à pouvoir me confronter à elle. En face à face. Pouvoir déverser ma haine sur quelqu’un. M’en servir comme pushing ball. J’ai besoin d’évacuer cette frustration qui me hante. Jour et nuit. Un rendez-vous au café du coin. Elle portera un chapeau noir en signe distinctif. C’est tout ce que je sais d'elle. Et pourtant, avec les messages, c’est comme si je la connaissais déjà. Comme si nous étions connectées – en quelque sorte. Sauf qu’elle ne sait pas pourquoi je l’ai contacté à la base. Elle ne sait rien du vrai fond de l’histoire. De mes véritables intentions. Elle ne sait pas que je suis au courant. Morgan, elle, leur nuit ensemble. Rendez-vous à seize heures. Il est temps. C’est maintenant. J’enfile un simple haut décontracté accompagné d’un jean. Pas besoin de plaire, ce n’est pas le but recherché. Bien au contraire. En réalité, je ne sais pas encore comment je vais réagir. On verra le moment venu. A l’instinct. Arrivée dans le café indiqué, j’aperçois une femme au fond de la salle. La femme au chapeau, la fameuse. Je m’approche doucement pour la rejoindre. La gorge serrée, le ventre noué. Je suis à deux doigts de rencontrer la femme qui a couché avec ma petite-amie. La responsable de toute cette histoire. J'ai besoin de savoir, j'ai besoin de comprendre. Que peut-elle bien avoir de plus que moi ? Pourquoi Morgan s'est-elle jetée dans ses bras si facilement ? Ça me rend dingue, putain. Un an de relation parti en fumée, détruit, comme ça. Était-ce seulement un coup d'un soir ou entretiennent-t-elles une vraie relation ? Mais ça change quoi finalement ? Le mal est fait, le mal est le même. A quelques mètres d'elle, je m’arrête brusquement. Je connais cette femme. « Ne me dis pas que... » Murmurais-je dans un demi souffle. Plus pour moi-même que pour me faire entendre. C’est bien elle. Dylan, en personne. Mon ex-fiancée, mon premier amour. Celle qui m'a abandonné comme une conne devant l'autel le jour de notre mariage. Elle est là, juste devant moi, assise à sa table. Même la tête baissée, impossible de me tromper. Elle n’a pas changé. Je me souviens encore de chacun de ses traits. De chacun de ses gestes. Là, tout de suite, j’ai envie de fuir. Loin, très loin. D’oublier ce moment à tout jamais. Allez, c’est maintenant. Pars. Mais elle relève finalement la tête et nos regards se croisent. Putain, merde. Le temps se fige quelques secondes. Elle me regarde, je la regarde. Et rien. Je suis comme paralysée. A cet instant, c’est une tornade de sentiments tous plus contradictoires les uns que les autres qui me consume de l’intérieur. Tout se mélange dans ma tête. « C’est une blague ? » Que je laisse échapper malgré moi. Non, ça ne peut pas être elle. C’est impossible. Ça me détruirait. Et pourtant.

Voyager ne m’a jamais fait peur, j’ai passé sept ans de ma vie à être onze mois sur douze ailleurs que chez moi au point où j’avais presque la sensation de ne pas vraiment avoir de point d’attache. Mais ce temps là c’est du passé et j’avais fini par m’installer, me construire une vie plus ou moins posée. Alors déménager, quitter Portland pour L.A c’est différent que d’aller à l’autre bout du monde pour une dizaine de jours pour un tournoi. Je suis contente de ce nouveau départ, j’aime l’appartement que j’ai trouvé et je ne me fais pas trop de soucis pour m’installer dans cette ville, tisser des liens. Déjà j’ai mon frère dans le coin et ça c’est un sacré plus. Avec lui à mes côtés je sais que tout ira bien, on veille l’un sur l’autre. Une fois installée, mes premières soirées libres ont été un peu longues, mais mes nouveaux collègues ont tôt fait de me mettre au courant d’une application de rencontre centrée sur la ville et sa périphérie : The Chart. Il ne m’a pas fallu bien longtemps pour créer mon profil, avoir mes premières conversations, aboutissant sur une première rencontre concluante. Je ne laisse pas vraiment de doute sur mes intentions, c’est de l’éphémère je ne suis pas là pour promettre quoi que ce soit à personne si ce n’est un moment de plaisir partagé. Avec ce genre d’appli c’est facile, et les discussions s’enchainent. Certains sont plus intéressantes que d’autres, le feeling passant plus ou moins bien par écran interposés.
C’était le cas avec cette jeune femme que j’attends assise à une table dans un bar. Nous avons échangés beaucoup de messages, jusqu’à ce qu’elle propose de nous rencontrer. J’ai accepté sans hésitation, lui indiquant mon habituel signe distinctif, un chapeau noir. C’est mon petit truc quand je vais à un rencard du genre, ça m’amuse et ça a un côté pratique, de quoi garder un peu le mystère que j’entretiens sur mon profil, n’ayant pas de photos où l’on puisse vraiment me voir. Elle ne devrait plus tarder si j’en crois l’heure affichée sur l’écran de mon téléphone sur lequel je pianote. Quelques minutes s’écoulent, je relève la tête, regarde en direction de la porte et j’ai comme l’impression de voir un fantôme. Mon cœur rate un battement ou deux, je sens une décharge électrique me parcourir. Blake. Non je ne rêve pas, elle est là devant moi. On se fixe, totalement prises au dépourvue de cette rencontre fortuite. C’est elle qui rompt le silence, demandant si c’est une blague. Je l’ignore, mais si c’est le cas j’étais très loin de la voir venir ! C’était quoi les probabilités de nous revoir ? De nous croiser à L.A, d’être dans le même bar au même moment ? C’est tout un tourbillon d’émotions qui m’envahi à cet instant, j’ai des difficultés à les identifier, mais celle qui prend le dessus c’est la gêne, peut-être même une part de honte. Pour mon comportement lâche, mais aussi pour ce que je m’apprête à dire « Je…euh. J’aurais bien discuté un peu, mais j’attends quelqu’un à vrai dire. » c’est classe, je sais.

Tel est pris qui croyait prendre. La supercherie s'est retournée contre moi, et je me sens un peu conne. Je reste figée pendant quelques secondes, complètement immobile. Aucune réaction, rien. Le néant le plus total. Et pourtant, dans ma tête c'est le tremblement de terre. La troisième guerre mondiale. Comme un coup de poignard reçu en plein coeur. Dites-moi que je suis en train de rêver, toute cette mascarade ne peut pas être réel. Que quelqu'un me réveille bordel. Mais il n'y aucun réveil, aucune alarme. La scène qui se joue sous mes yeux existe vraiment. Il doit y avoir une autre explication, n'importe quoi. C'est juste mon cerveau qui me joue des tours. Je vais tourner la tête et trouver un autre chapeau dans la salle. Une autre femme susceptible de correspondre au profil. Mais non, il n'y a qu'elle. Il est encore temps de faire demi-tour et de partir, elle ne pourra jamais savoir que c'était moi. Fuir, comme elle a su le faire elle-même il y a quelques années. Tourner les talons et ne plus jamais revenir. Ça serait peut-être la meilleure chose à faire pour ne pas souffrir. Pour ne plus souffrir. Mais le mal est déjà fait, c'est trop tard. Tout est en train de se bousculer dans mon esprit comme si je voyais ma vie défiler sous mes yeux. Morgan, elle, tous les souvenirs... ça fait mal putain. « Je…euh. J’aurais bien discuté un peu, mais j’attends quelqu’un à vrai dire. » Evidemment. C'est pas étonnant que Dylan essaye de se défiler. Encore. C'est la spécialiste de ce côté-là. Une lâche, une putain de lâche. Mais cette fois elle ne pourra pas le faire. La jeune femme n'en a peut-être pas encore conscience mais son invité mystère est là, juste sous ses yeux. « Tu t'entraînes pour être aussi lâche ou ça a toujours été une évidence chez toi ? » Les mots se délient de mes lèvres avec une facilité déconcertante. En réalité, je ne les contrôle plus. Je ne suis plus capable de rien. Seule la colère devient maître de mon corps. Comment peut-elle encore être capable de se regarder dans le miroir ? « Ça t'as pas suffit de m'humilier comme tu l'as fait ? » Je me laisse envahir par une haine qui me dépasse complètement. Mais elle a au moins le mérite de tout balayer sur son passage. Je me focalise uniquement sur elle, et en oublie presque tous les autres sentiments qui me traversent. « Non fallait que tu continues à me pourrir la vie. » Dylan ne semble pas comprendre là où je veux en venir. Et pour cause elle ne sait pas la vérité qui se cache derrière toute cette histoire. « Tu pouvais pas en baiser une autre franchement ? » Je continue sans lui laisser le temps de dire quoi que ce soit. Je me fous bien de ce qu'elle à a dire pour sa défense. Tout ce qui m'importe, là maintenant, c'est de pouvoir déverser ma haine sur elle. « Putain mais merde. »

Me retrouver face à Blake c’est comme voir un fantôme. D’ailleurs je dois à peu près faire la même tête que si je me retrouvais devant Casper… C’est un gentil fantôme mais ça surprend quand même. Et à la différence, la jolie brune a toutes les raisons du monde de m’en vouloir. Moi même je m’en veux encore beaucoup pour ce que je lui ai fait, fuyant comme une lâche parce que j’avais honte mais surtout peur, tout simplement. Il n’y a pas vraiment de bon moment pour revoir l’ex qu’on a planté devant l’autel le jour du mariage, mais clairement là elle tombe très mal. Parce que j’attends quelqu’un et puis je ne suis pas prête pour cette conversation. Encore le manque de courage… Y’a bien que dans le boulot que je sois courageuse finalement ! Toute en classe et en finesse j’essaie d’esquiver la discussion dont j’ai le pressentiment qu’elle sera houleuse. Rien de surprenant, mais si je peux l’éviter, je prends. La réaction de Blake ne se fait pas attendre, je prends un retour, direct le long de la ligne le truc qui claque bien. Mais clairement je le mérite. Est-ce que je m’entraine à être lâche ? Non même pas, c’est inné. Je grimace légèrement et murmure entre mes dents « Outch. C’est de bonne guerre. ». Elle ne va pas s’en tenir là, je le sais, je le vois à son regard. Durant ces dernières années elle a bien eu le temps d’imaginer ce qu’elle me dirait si elle avait l’occasion de me revoir. Je vais prendre cher et le pire c’est que je n’ai pas de raison de me défendre parce qu’elle aura raison de m’enfoncer. Ses mots me font mal, parce qu’ils font raisonner ma culpabilité, ma honte « Je voulais pas… » l’humilier, c’était pas mon but, ni de la faire souffrir d’ailleurs mais c’était inévitable et puis… Ok j’ai zéro excuse. Si ses yeux étaient des armes je serais probablement déjà criblée de balles gisant dans une flaque de mon propre sang. Je ne sais pas si c’est la colère qui la fait délirer, mais là je commence à ne plus bien comprendre où elle veut en venir. Continuer à lui pourrir la vie ? Je ne savais même pas qu’elle habitait L.A, sinon j’aurais réfléchis à deux fois avant de venir habiter ici. Croit-elle que je l’ai suivi ? Je suis de plus en plus perplexe à mesure que Blake m’accable. Baiser qui au juste ? Va falloir préciser. J’ai quand même une bonne liste de conquêtes à mon actif. Est-ce qu’elle sait que je l’ai trompé ? Mon palpitant s’affole. Comment elle a pu l’apprendre ? Je regarde un peu autour de nous, je n’aime pas franchement me donner en spectacle et là clairement les autres clients du bar ont l’air intrigué par cette conversation houleuse. Enfin peut-on vraiment parler de conversation ? Elle fulmine, j’encaisse, c’est un peu à sens unique. J’affiche un petit air désolé aux tables voisines avant de reporter mon attention sur Blake. Je soupire « T’as tous les droits de m’en vouloir… Mais arrête ça s’il te plait. Je comprends pas de quoi tu parles. » je suis impardonnable je le sais. Autant pour l’avoir trompé que de lui avoir menti et l’avoir abandonné. Cependant j’ai du mal à la suivre. « Assieds toi. » dis-je en désignant la chaise face à moi « Je crois qu’on a des choses à se dire. » Je la regarde plus attentivement, elle n’a pas vraiment changé, elle est toujours aussi belle, même furieuse.

J'ai longtemps imaginé les mots que je pourrais lui balancer à la gueule si j'étais amenée un jour à la revoir. J'ai même rêvé de nos retrouvailles pendant de nombreux mois après notre non-mariage. A attendre un signe de sa part, un message, un appel, n'importe quoi. Comme si je m'accrochais à un infime espoir de continuer à croire à notre histoire. Et pourtant, je n'aurais jamais pu envisager de la retrouver dans de telles circonstances. Qu'elle soit celle avec qui ma petite-amie me trompe. C'est un scénario tellement improbable. Combien il y avait de chances pour que ça soit elle ? Une chance sur un million ? Une chance à laquelle s'accroche chaque joueur qui noircit une grille de loto. Ça nous parait impossible, et pourtant. Simple coup du hasard ou signe d'un destin qui s'efforce à se jouer de nous ? On ne le saura probablement jamais. Une chose est sûre, là, tout de suite, Dylan représente mon pire cauchemar. Et ça, c'est bien réel. « T’as tous les droits de m’en vouloir… Mais arrête ça s’il te plait. Je comprends pas de quoi tu parles. » Tous les regards sont rivés sur nous, mais je ne compte pas me gêner pour autant. J'en ai strictement rien à faire de me donner en spectacle. Un peu plus ou un peu moins, je ne suis plus à ça près. Et je ne compte pas m'arrêter en si bon chemin. Ça serait mal me connaitre d'en être arrivée jusque là et de finir par abdiquer. Non, pas même en rêve. « Assieds toi. » Je m'exécute par réflexe, même si j'ai aucune envie de prolonger la discussion aussi longtemps. En réalité je ne tiens pas en place tellement je bouillonne de l'intérieur. Ce qu'elle voit à l'extérieur n'est qu'un infime échantillon de tout le reste. « Je crois qu’on a des choses à se dire. » Je lève les yeux au ciel avant d’enchaîner sans sourciller. Elle veut parler ? Très bien, elle va être servi. « Morgan ça te dit quelque chose ? » Je reste plantée devant elle, le regard assassin et les bras croisés. « Ou tu les baises sans même prendre la peine de leur demander leur prénom ? » A cet instant mes mots dépassent clairement mes pensées. Je suis doublement en colère contre elle. Pour Morgan déjà, mais pour le passé aussi. Pour son abandon devant l'autel, pour les explications qu'elle n'a jamais pris la peine de me donner. Pour tout le mal qu'elle m'a fait. « T'as un problème d'ego pour coucher avec des nanas en couple ou t'es juste complètement conne ? » Tout se mélange dans mon esprit et mon discours devient totalement décousu. Il n'a ni queue ni tête. Mais il est pourtant possible de faire la connexion et de lier les informations entre elles. Morgan, nana en couple... si elle comprend pas avec ça, c'est qu'elle est peut-être complètement conne en effet. Je plante mon regard dans le sien avant d'ajouter. « Tu me dégoûtes. » Une grimace se fige au coin de mes lèvres. C'est même plus du dégoût à ce niveau-là, c'est pire que tout. Je ne juge pas nécessaire de préciser que c'est avec moi qu'elle a parlé sur l'application, que c'est moi qu'elle attendait précisément dans ce café. Clairement je m'en fous qu'elle comprenne ce détail là ou non, ça n'a plus aucune foutue importance.

Furieuse, Blake se fout pas mal de se donner en spectacle et surtout de me mettre mal à l’aise, au contraire. Je mérite ce qui m’arrive, ce retour de bâton imprévisible, petit coup du destin. Pas que je sois croyante, pas du tout même, mais c’est peut-être une sorte de punition. Après ce petit scandale de mon ex-fiancée je crois que je ne vais pas remettre les pieds dans ce bar avant un petit moment. Dommage, c’était sympa comme point de rendez-vous. Je comprends qu’elle soit très remontée contre moi, je l’ai planté devant l’autel et c’est impardonnable… mais pour le reste je dois dire que ça m’échappe. Mal à l’aise certes, mais également soucieuse de la tranquillité des autres usagers du bar je l’invite à s’asseoir. Pas sûre que ça calme la tempête mais je peux toujours essayer. Elle obtempère, me fusillant toujours du regard en adoptant une position de défense, les bras croisés. Morgan ? Ok donc en plus faut que je fasse bosser ma mémoire. Allez Dylan concentre toi. De qui elle parle ? La réplique, assassine, suivante me mets un peu plus sur la voie. Ça me revient même assez vite, y’en a pas eu milles de Morgan et c’est plutôt récent. Une jolie rousse avec qui j’ai passé une nuit vraiment très agréable. J’en conclue que mon ex ici présente la connaît et sans même avoir à poser de question, Blake me donnant d’avantage d’éléments sur leur lien. Je tique à la fin de sa phrase fronçant les sourcils, qu’elle m’en veuille ok, mais me laisser insulter peut-être pas quand même ! Pourtant je ne réplique pas, ce qui n’est pas mon genre, me concentrant plutôt sur l’analyse des informations qu’elle lâche à l’envolé. Alors qui est-elle pour elle ? Quoi que Blake puisse en penser je ne suis pas conne et trouve rapidement la solution à cette énigme. Il semblerait que j’ai couché avec la copine de mon ex. « L’égo n’a rien à voir là dedans, je savais même pas qu’elle avait quelqu’un. » c’est pas vraiment venu dans la conversation, elle devrait se poser de sérieuses questions sur cette nana. Est-ce que je suis plus ou moins en train de dire que ce n’est pas de ma faute ? Tout à fait ! Morgan est majeure et vaccinée à ce que je sache, elle savait ce qu’elle faisait et moi je suis célibataire. Je n’ai rien à me reprocher, pas sur ce coup là en tout cas. Le regard de la brune change. Elle attendait des excuses ? La sentence tombe, je la dégoute. C’est con mais ça me blesse de l’entendre, pourtant ce n’est pas une surprise, je viens clairement d’aggraver mon cas auprès d’elle sans même le vouloir. « Je te jure que je savais pas. » dis-je, comme si c’était encore utile de me justifier « J’étais même pas au courant que tu vivais ici… Alors crois pas que c’était un coup tordu ou quoi que ce soit. » elle serait capable de le penser, et clairement je n’ai pas fuit sans nouvelles il y a 4 ans pour jouer les stalkeuse tordues ensuite. « Je suis désolée. » c’est un début « Pour…tout. » comme si ça suffisait.

Je lui déballe toutes les informations à la vitesse de l'éclair sans sourciller. Je pense qu'il n'est pas difficile de comprendre de quoi il s'agit vraiment. On parle effectivement bien de ma petite-amie, Morgan. Celle avec qui elle s'est apparemment envoyée en l'air il y a peu de temps. Ma mâchoire et mes poings se serrent sous l'effet de la colère. Mon corps se met même un peu à trembler, signe de ma totale perte de contrôle. Elle n'a jamais dû avoir l'occasion de me voir comme ça auparavant. Je n'ai jamais été aussi excessive, jamais été aussi énervée. C'est une grande première et j'en suis moi-même un peu déboussolée. « L’égo n’a rien à voir là dedans, je savais même pas qu’elle avait quelqu’un. » Je secoue la tête sans vraiment prendre la peine d'écouter ce qu'elle a à dire. Ça change quoi en fait ? « Je te jure que je savais pas. » Je continue de bouillonner de l'intérieur alors qu'elle essaye de se justifier. « J’étais même pas au courant que tu vivais ici… Alors crois pas que c’était un coup tordu ou quoi que ce soit. » Encore heureux. « Je suis désolée. Pour…tout. » A cet instant, je tourne la tête pour fuir son regard. Je ne veux pas la regarder dans les yeux. Surtout pas. « Stop, ne dis rien. » Je me fous de ses excuses et du reste. « Je ne veux rien entendre. » Rien de ce qu'elle pourra dire pour sa défense ne changera quoi que ce soit. Le mal est déjà fait, c'est trop tard. Pour Morgan, comme pour le passé d'ailleurs. Pour tout comme elle le dit si bien. « T'es pathétique. » Bah quoi ? Les mots qui sortent de mes lèvres sont impossibles à contrôler. C'est la douleur de mon coeur qui parle. La colère d'un être tout entier. Je devrais quitter ce café, là, maintenant. Tout de suite. C'est sans doute ce qui a le mieux à faire. Tourner les talons et ne plus jamais revenir. Ne plus jamais la revoir. Et pourtant, je reste là devant elle. Incapable de m'enfuir. Je n'arrive pas à comprendre pourquoi ni comment, et c'est en train de me rendre complètement folle. Un léger silence s'installe avant que je décide de le rompre à nouveau. « En tout cas si tu pensais te faire une nouvelle conquête aujourd'hui grâce à l'application, c'est raté. » Un rire nerveux s'échappe alors d'entre mes lèvres. Oui, c'est moi la fille avec qui elle avait rendez-vous. En personne. La fille avec qui elle a potentiellement joué le même scénario qu'avec Morgan. Après tout, une de plus ou une de moins elle n'est plus à ça près. « Fiasco total. » Je tourne la situation à la dérision, me servant de cet avantage comme une arme. « Tu penses que tu vas pouvoir t'en remettre ? » Je me fous ouvertement de sa gueule juste pour le plaisir. Parce que putain ça fait du bien quand même. C'est peut-être le seul bénéfice que je pourrais retirer de toute cette mascarade alors autant ne pas m'en priver non ?

Je crois que je n’ai jamais vu Blake dans cet état… sans doute parce que j’ai fuis avant même que cela ne puisse arriver après que je l’ai planté devant l’autel le jour de notre mariage. Le concept de courage m’a échappé à ce moment de ma vie je l’admets. Ces retrouvailles impromptues avec mon ex sont sans doute une forme de punition. Quoi qu’il en soit le destin à de l’humour ! Fallait le faire de coucher avec l’actuelle petite amie de celle qui a presque été ma femme, non ? J’ai jamais gagné de tournoi du grand chelem, mais pour ça je mérite au moins un trophée équivalent. A vrai dire cette situation invraisemblable me fait prendre conscience de la vie décousue que je mène. Elle me convient, mais je dois bien avouer que je fais quand même un peu n’importe quoi. Bon cette fois pour ma défense je ne savais pas que la fameuse Morgan est – était ? en couple. Cependant ça ne m’a jamais arrêté. C’est mal je sais, mais je ne suis pas celle qui fait le choix de tromper, je suis juste la tentation. Je me défends comme je peux, faut dire que sur ce coup là et surtout face à Blake je suis plutôt indéfendable. Je ne veux pas qu’elle imagine que tout ça est un coup tordu, par contre j’ai besoin de lui dire que je suis désolée. Excuses qu’elle ne veut pas entendre, je peux aisément le comprendre, car elle a raison je suis pathétique. Je hoche la tête, me pince les lèvres, incapables d’ajouter quoi que ce soit. Cette jolie brune pour qui j’avais craqué il y a quelques années me semble presque être une inconnue tant la colère s’est emparée d’elle. On se regarde à peine, l’une de nous devrait partir, qu’on continue notre vie même si ce bref échange n’aura rien changé c’est peut-être un bon moyen d’enfin tourner totalement la page. Et puis j’attends toujours quelqu’un… elle a peut-être déjà fuit en voyant la scène que m’a fait Blake, ça ne m’étonnerait pas. A moins que ? La remarque de mon interlocutrice me fait tiquer. Je n’ai pas parlé de l’application de rencontre, j’ai seulement dit attendre quelqu’un. Elle surenchérit, c’est un fiasco total. Je comprends alors ce qu’il en est, ce rendez-vous, cette fille avec qui je parlais, ce feeling c’était avec elle. Je suis comme un peu sonnée tout à coup. Cette histoire est encore plus tordue que je ne le pensais ! M’en remettre ? Je reconnecte avec le présent et arque un sourcil en regardant Blake, laquelle se fout ouvertement de moi et du ridicule de la situation. Je lève les yeux, agacée qu’elle me voit comme une vamp insatiable « Ça ira. » je lui adresse un sourire ironique « Au pire j’ai toujours mes deux mains, dix doigts et tout un tas de sex toy qui ne demandent qu’à être utilisés. » répliqué-je avec un air de défi. Elle me voit comme un salope ? Je peux l’être, sur tout un tas de registre et elle le sait, elle me connaît… sans doute mieux que quiconque. « Et toi je pense que tu devrais avoir une discussion avec ta copine. » une pique pour une autre, j’outre passe mes droits mais de toute façon je n’ai plus rien à perdre, plus rien à rattraper j’ai merdé bien trop gravement auparavant. « Tu faisais quoi d’ailleurs sur ce site ? Tu voulais la piéger ? Me piéger ? » j’échappe un léger rire, un peu jaune « C’est tordue ça pour le coup. ». Si c’est à cause de moi qu’elle est comme ça je pense que je pourrais m’en vouloir.

Les mots se délient de mes lèvres avec une facilité déconcertante. Je crois que j'en suis moi-même la première surprise. Mais je n'ai pas suffisamment de recul pour en prendre totalement conscience pour le moment. Tout ce qui m'importe, là maintenant, c'est de pouvoir déverser ma haine sur quelqu'un. Et ce quelqu'un c'est elle. Et dire qu'il a fallu que ça tombe sur elle franchement. Comme si Dylan ne m'avait déjà pas assez brisé le coeur comme ça. Comme si ce n'était jamais suffisant avec elle. Putain de merde. Je suis quand même un peu fière du coup tordu que j'ai pu mener, du piège que je viens de leur tendre, à elle et à Morgan aussi. C'est débile, profondément immature peut-être mais ça n'a foutrement aucune importance. C'est rien du tout comparé au mal qu'elles ont pu me faire. Et je me raccroche tant bien que mal à ça. Cette petite ouverture que je vois comme une bouée de sauvetage. C'est le seul moyen pour moi de me sentir encore vivante, et surtout de m'empêcher de sombrer au-delà du précipice. « Ça ira. » Mais c'est mal connaitre Dylan que de penser qu'elle ne répliquera pas à cette attaque. Je devrais pourtant le savoir... « Au pire j’ai toujours mes deux mains, dix doigts et tout un tas de sex toy qui ne demandent qu’à être utilisés. » Je lève les yeux au ciel à mon tour alors qu'elle me lance un air de défi. « Evidemment. » Je crois que son air détaché me fout encore plus les nerfs en vrac. Elle a le don de m'énerver au plus haut point, je sais pas comment elle fait. « Et toi je pense que tu devrais avoir une discussion avec ta copine. » Là, je vois rouge. Mon regard devient encore plus assassin qu'il n'a pu l'être jusqu'à maintenant. Pour qui se prend-t-elle au juste ? Qui est-elle exactement pour me donner des conseils sur mon couple ? « Tu faisais quoi d’ailleurs sur ce site ? Tu voulais la piéger ? Me piéger ? C’est tordue ça pour le coup. » Je secoue la tête en laissant échapper une réponse malgré moi. « Je voulais juste en avoir le coeur net. » Mais je me rends rapidement compte de mon erreur. Ce n'est pas à moi de me justifier, je n'ai aucun compte à lui rendre. Et je ne vais pas me rabaisser à elle, surement pas. Non mais c'est le monde à l'envers franchement. « Pourquoi, tu veux me faire une leçon de moral peut-être ? » Je la fixe du regard, levant légèrement le menton vers le haut.  « Laisse-moi rire. » Ajoutais-je dans un rire un peu nerveux. « C'est pas comme si tu avais déjà eu des valeurs dans ta vie. » Sous-entendu des valeurs de couple je précise. Parce que au vue de son comportement avec moi, dans ce qui était notre couple à l'époque, elle est extrêmement mal placée pour l'ouvrir. C'est l'hôpital qui se fout de la charité comme on dit. « Enfin si tu sais vraiment ce que ça veut dire. » Je la défie à mon tour du regard. Je ne parle plus de Morgan, ni de mon couple d'ailleurs, je parle bien d'elle et moi. De ce "nous" qui a pourtant bien existé par le passé. Même si de toute évidence c'est un peu dur de le voir à présent. Encore plus de l'admettre en mon âme et conscience.

Ok donc là pour résumer j’ai couché avec l’actuelle copine de mon ex avec qui je me suis pratiquement mariée. Bien sûr sans le savoir et cette ex m’a piégé sur une appli de rencontre. Donc la fille que je devais rencontrer c’est Blake. Y’a que moi qui trouve ça super tordu ? Le destin fait très très fort là quand même ! Furieuse, elle a de quoi, la brune me lance des piques. Croyait-elle que la culpabilité suffirait à me faire taire ? Peut-être, mais il n’en est rien et je réplique avec tout autant d’acidité à ses provocations. Je sais que je m’enfonce, mais ai-je encore quoi que ce soit à sauver auprès d’elle ? Non je ne crois pas. Le hasard nous a joué un sale tour certes, en revanche si sa copine l’a trompé j’y suis pour rien. Enfin un peu mais c’est un choix qu’elle a fait de coucher avec moi plutôt que de lui être fidèle et pour cette raison je crois qu’il faut qu’elles aient une discussion toutes les deux. Mon conseil est mal accueilli et si Blake avait des armes à la place des yeux je serais déjà morte pour la je ne sais combientième fois aujourd’hui. Tout ça me semble tellement invraisemblable que j’essaie d’avoir des explications. Pourquoi me draguer sur l’appli ? De toute évidence elle ne savait pas qui j’étais, mais que cherchait elle à faire ? En avoir le cœur net. C’est sa réponse. Elle voulait être sûre de ses soupçons, sûre qu’elle est cocue. C’est tordu sur la manière de faire mais ça peut se comprendre. Pas le temps d’ajouter quoi que ce soit, Blake s’emballe à nouveau, elle riposte comme un animal blessé qui chercherait à mordre quiconque l’approche. Sans même m’en rendre compte je lui ai donné la parfaite opportunité d’enfin me déverser sa colère au visage, de cracher son venin. Je soupire et secoue la tête, je ne comptais pas lui faire la morale, à quoi bon ? C’est une grande fille. Elle en profite pour être méchante, me tacler, dire que je ne sais pas ce que sont les valeurs, que je ne sais même pas ce que ça veut dire. Comment la blâmer ? Après ce que je lui ai fait, bien sûr qu’elle me voit comme la pire des personnes, moi-même j’ai parfois du mal à me regarder dans le miroir en repensant à la manière dont j’ai fuit, lâchement. Je soutiens son regard plein de défi « Qu’est-ce que tu veux que je te dise Blake ? » je hausse les épaules « T’as la meilleure des raisons pour me détester. Je peux pas lutter, j’ai rien à dire contre ça. » je soupire, passe la main dans mes cheveux « Mais ça te va pas… cette méchanceté. T’es pas comme ça. » je baisse les yeux « Ou alors tu l’es peut-être devenue par ma faute. Ça me ferait une raison de plus pour m’en vouloir. Je suis plus à ça près. » je récupère mon sac que j’avais posé à côté de moi « Je suis pas fière de ce que j’ai fait, vraiment pas. Mais ce qui est fait est fait, je vis avec mon erreur, c’est comme ça. » je me lève « T’as peut-être raison dans le fond. J’ai peut-être pas de valeur… ou trop de lâcheté. Je ne sais pas. ». Finalement rien n’est facile, ni pour elle ni pour moi, je ne veux pas savoir qui souffre le plus, ce n’est pas un concours, juste une triste réalité.

Je crois que je suis en train de perdre totalement le contrôle de moi-même. Comme si cette vulgaire supercherie s'était finalement retournée contre moi. Parce que oui, me retrouver nez à nez face à Dylan me fout le coeur dans tous mes états. Tout se bouscule dans ma tête, et c'est un vrai bordel. Même si ça m'arrache la gueule de l'admettre. Pourtant il y a bien un truc, là, au fond de ma poitrine. Quelque chose que je ne peux pas nier. Une douleur qui me cisaille et me compresse de l'intérieur. C'est une évidence, même si je suis foutrement incapable de l'expliquer. Incapable de mettre des mots dessus ou de comprendre exactement ce que ça représente. Et c'est sans doute ça qui m'effraie le plus finalement. De ne pas savoir et de me sentir affreusement impuissante. Complètement vulnérable, démunie. Il n'est désormais plus question de Morgan ni de mon couple... c'est d'elle qu'il s'agit à présent. D'elle et moi, de nous. « Qu’est-ce que tu veux que je te dise Blake ? » Il n'y a rien à dire. « T’as la meilleure des raisons pour me détester. Je peux pas lutter, j’ai rien à dire contre ça. » Je hoche un peu la tête. Pour une fois qu'on est d'accord sur quelque chose. « Mais ça te va pas… cette méchanceté. T’es pas comme ça. » Je baisse les yeux à mon tour. Bon ok, c'est vrai. Ce n'est pas moi tout ça, je ne me reconnais pas. Toute cette colère qui m'anime ne me ressemble pas. Mais je ne sais même plus comment réagir face à toute cette histoire ? Je suis perdue. « Ou alors tu l’es peut-être devenue par ma faute. Ça me ferait une raison de plus pour m’en vouloir. Je suis plus à ça près. » Elle récupère son sac, et je capte une nouvelle fois son regard. Un regard différent, beaucoup moins agressive que précédemment. La colère s'est transformée en une profonde déception. « Tu ne me connais pas Dylan. » Je secoue un peu la tête, le coeur serré. « Tu ne me connais plus. » La faute à qui ? Nous sommes plus que deux vulgaires étrangères à présent l'une pour l'autre. Deux filles qui ne se connaissent plus mais qui partagent toujours un passé en commun. Et ça, ça ne pourra pas s'oublier. Jamais. « Je suis pas fière de ce que j’ai fait, vraiment pas. Mais ce qui est fait est fait, je vis avec mon erreur, c’est comme ça. » Pourquoi ça me fait encore quelque chose de savoir qu'elle s'en veut et qu'elle n'est pas fière de ce qu'elle a fait ? Je devrais plutôt rien en avoir à faire. Mais non, ce n'est pas aussi simple... merde alors. J'aurais peut-être préféré continuer de penser qu'elle n'en avait jamais rien eu à foutre de moi. « T’as peut-être raison dans le fond. J’ai peut-être pas de valeur… ou trop de lâcheté. Je ne sais pas. » Elle semble se résigner, et ça ce n'est pas habituel de sa part. Je me lève à mon tour, et attrape son avant-bras pour la retenir. Je ne prends pas réellement conscience de mon geste sur le moment - geste totalement incontrôlé. « Dylan... » Je plante mon regard dans le sien avant de murmurer du bout des lèvres. « Pourquoi ? » Est-ce que je vais un jour avoir le droit à des explications ?

C’est dur de me retrouver face à Blake. Ce n’est pas pour rien si à l’époque j’ai fuit comme une lâche. J’avais honte de l’avoir trompé, encore plus honte de la planter devant l’autel et absolument pas le courage d’affronter son regard, d’y lire sa peine en sachant que j’en étais la seule responsable. Egoïstement je ne voulais pas m’infliger ça, alors je lui ai infliger le silence, l’absence de réponse. Mais le destin a de l’humour – douteux – et des années après je me retrouve finalement à devoir faire face à mes erreurs. Des nouvelles, toutes récentes, mais pour lesquelles je ne suis finalement qu’à demi responsable, et puis les anciennes, les vraies dont je n’ai pas guérit encore aujourd’hui. Blake non plus, je ne lui en ai pas donné l’opportunité puisqu’elle n’a jamais su pourquoi j’étais partie sans un mot, disparaissant simplement de la circulation presque comme si je n’avais jamais existé. J’étais même allée jusqu’à coupé les ponts avec nos amis communs, filtrants leurs appels, incapables de recevoir quelques leçons de morale que ce soit. En y repensant, je suis tombée vraiment bas ce jour là et hormis dans mon boulot, je crois que je ne suis plus jamais remontée. La jolie brune m’enfonce, fait mon procès et c’est légitime puisqu’elle n’a pas pu le faire avant aujourd’hui. Je n’ai rien pour me défendre, aucune raison de le faire et si je suis de nature fière allant même jusqu’à en devenir froide, à cet instant je ne peux qu’encaisser et me résigner. Je vis avec ma culpabilité depuis le jour où je l’ai trompé et elle a redoubler d’intensité quand j’ai pris la décision de la laisser seule devant l’autel le jour de notre mariage. A cet instant je vois ce que j’ai provoqué, le résultat de mes actes. Je ne reconnais pas Blake dans cette méchanceté dont elle fait preuve sous le coup de la colère. Elle a raison je ne la connais plus et ce constat me serre le cœur. Est-ce à nouveau un manque de courage ou juste la volonté de ne pas aggraver les choses ? Je l’ignore, mais je décide qu’il est temps pour moi de partir. Au moment où je me retourne pour prendre la direction de la sortie je sens la main de Blake se refermer sur mon avant-bras. Son geste me surprend, je m’arrête nette dans mon élan et la regarde à nouveau. Elle souffle mon prénom, c’est à la fois douloureux et rempli de souvenir heureux que de l’entendre le dire ainsi. Elle murmure un “Pourquoi ?“ qu’elle a tout les droits de poser là. Je la fixe, silencieuse, la gorge plus serrée que je le voudrais. Elle est toujours aussi belle, peut-être même encore un peu plus. Elle attend une réponse, je pense pouvoir la faire tenir en quelques mots « Je ne te méritais pas. ». Sans doute que ça ne lui suffira pas, mais c’est tout ce que j’ai à lui offrir. Me dégageant de sa prise cette fois c’est à enjambées rapides que je quitte le bar, la laissant une nouvelle fois plantée là. A croire que c’est une habitude chez moi.