Quipropo

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Quipropo

En tout bon psychiatre qui se respecte, Yann partait de principe qu’il n’existait pas de bonnes journées et des journées de merde. Tout dépendait de son état d’esprit dès les premiers instants du réveil. Si on commençait la journée en partant de l’idée qu’elle allait bien ou mal se dérouler, alors inconsciemment on se focalisait sur cette idée et l’on faisait tout pour que cela se déroule selon nos prévisions sans même s’en apercevoir, augmentant dans nos souvenirs les bons moments lors d’une « bonne journée » ou aggravant au contraire les mauvais lors d’une « mauvaise journée ».

Quoi qu’il en soit, Yannick était bel et bien entrain de passer une journée de merde.

Theo faisait ses dents depuis plusieurs semaines et elle avait été infernale, pleurant toute la nuit sans réussir à s’endormir. Empêchant donc accessoirement son père de dormir aussi. Il avait donc passé sa nuit, le bébé dans les bras, à arpenter l’appart en lui chantonnant des berceuses. Miracle, Theodora avait fini par s’endormir vers 4 heures du matin. À 4 heures 30, Yann était réveillé par un appel du travail. Un homicide particulièrement sordide et son expertise était requise surplace.

Il avait donc refilé le bébé nouveau réveillé et hurlant et était parti au travail. Son jean avait encore une tâche de purée de banane de la veille au soir. Sa chemise n’était pas repassée ni rentrée dans son pantalon, la fermeture éclaire de son veston était foutue et il pleuvait à verses.

Yann passa le reste de la journée au bureau sur son rapport préliminaire et quand il voulut enfin aller récupérer sa petite et rentrer, ils emmenaient le premier suspect au poste. Il assista donc à l’interminable interrogatoire au terme duquel il annonça en privé aux détectives que ce type était bien incapable de tuer qui que ce soit, et encore moins de cette manière. Et enfin il fut libre…

Il longeait la rue quand un camion passa très près du trottoir, prit une flaque restant de l’averse du matin, et aspergea Yann propre en ordre.

Mais What the fuck… ?! Va te faire foutre putain de karma de mes deux !, s’écriait-il, tête levée vers le ciel qui lui répondit en lui balançant une nouvelle averse sur la tronche. Une courte averse, à peine une minute, mais juste assez pour lui faire comprendre qu’on se fichait royalement que ça journée lui plaise ou pas.

Au bout du rouleau, Yann s’adossa à la devanture d’un magasin fermé depuis des semaines et se laissa glisser en poussant un long RHAAAAAAAAAAA de frustration jusqu’à se retrouvé assit à même le sol, sous le regard indignés des rares passants non focalisés sur leurs téléphones.