the beautiful people | joey

Vingt deux heures était affiché sur l’horloge en haut de la porte de sa boutique. Normalement, elle aurait du fermer il y a deux heures de ça mais aujourd’hui, elle devait faire les inventaires du magasin. Ça lui avait pris beaucoup plus de temps qu’elle ne l’aurait cru. Entre les commandes de certaines agences pour des fêtes d’anniversaires ou bien encore des mariages, cette semaine qui arrivait allait être chargée. Ce soir, elle n’avait pas pris Arès avec elle. Pourtant, il était toujours auprès de Sam mais aujourd’hui, elle l’avait laissé au manoir. Fallait qu’il se repose aussi, lui qui vivait au même rythme que sa maîtresse depuis cinq ans. Elle ferma la porte et descendit la grille du magasin. Le dimanche soir il n’y avait plus grand monde dans le quartier, du moins là où se situait sa boutique. Pourtant, Sam entendit des pas s’arrêter derrière elle après avoir cadenassé la grille. « Hey la boutique est fermée ? Dommage on aurait voulu acheter des bouquets de fleurs ! » La brune se retourna face à trois grands gaillards qui s’étaient postés devant elle. Le sourire aux lèvres, les mains dans les poches et l’air légèrement menaçant. Sam connaissait que trop bien ce genre de racaille. Ils semblaient être jeunes, la vingtaine à peine passé. Elle les avait déjà vu traîner dans le quartier mais ils n’avaient jamais franchi la porte de son magasin. Ce soir, ils avaient décidé enfin d’aller la voir. Pourtant, elle aurait pu afficher une certaine appréhension face à eux mais rien. Elle était calme et elle leur sourit à son tours. « Désolée les garçons, il se fait tard, revenez demain dans la journée pour vos bouquets. Ça sera un plaisir de vous conseiller. » rétorqua-t-elle tout simplement. Elle ne se sentait pas en danger alors que dans cette situation toute personne normale ne se sentirait pas à l’aise. Mais pas elle. L’un d’eux s’avança vers elle. Même peut-être trop près. Sûrement. « Oh c’est vraiment dommage, on voulait tellement passer du temps avec vous. » le sourire sur le visage de Sam était toujours affiché. Cependant, il n’était plus chaleureux. Il était vraiment trop près d’elle. « Et bien, repassez demain si vous le voulez bien. » son ton était froid mais elle ne bougeait toujours pas. De toute façon, ils ne lui laissaient pas la moindre brèche pour s’enfuir. Il fallait qu’ils abdiquent sinon ils allaient passer un mauvais quart d’heure s’ils continuaient sur cette voie là.

La journée a été rude, depuis que je suis en arrêt pour cette foutue histoire qui a mal tourné, c’est moi qui tourne clairement en rond. J’en ai marre de rester chez moi, alors je sors, je vais boire des bières dans des bars, je n’ai pas envie forcément de voir du monde, juste prendre l’air, voir autre chose que cette putain de télé qui diffuse des trucs de merde à longueur de temps. Alors j’erre dans les rues, je me laisse aller, à observer ce qui s’y passe. Je m’attarde sur des choses inutiles, quand soudain je sens que quelque chose ne tourne pas rond. Dans la rue piétonne non loin de là, j’entends quelques mecs parler à quelqu’un, ils ressemblent en tout point à ces racailles, des petits cons prêts à foutre la merde. Alors je m’avance, entends alors une voix féminine, pourtant visiblement pas apeurée. « Hey, tout va bien ? » Que je demande à l’attention générale, mais surtout pour la nénette qui se retrouve prise au piège par ces grandes racailles.

Les gars se retournent, je sais que si je cherche la merde, je peux avoir des soucis, d’autant que ma blessure n’est pas tout à fait guérie, je ne porte pas mon écharpe quand je sors et si je bouge trop mon épaule, ça pourrait avoir des conséquences. Mais je n’allais décemment pas rester là à rien faire, la laisser se faire potentiellement agresser. « Les gars, vous feriez mieux d’aller voir ailleurs… » Ils se retournent vers moi, sourire carnassier au coin des lèvres. « Oh, mais t’inquiète pas, on lui voulait pas de mal à la jolie fleuriste, mais par contre, toi, on va peut-être se faire un petit casse-dalle… » Cette fois c’est moi qui ricane. « Nan, vous allez gentiment vous casser d’ici, laisser la dame tranquille, et pas faire d’histoires. » « Mais c’est qu’elle essaie de faire peur la p’tite blonde ! Qu’est-ce que tu veux faire pour nous en empêcher ? Hein ? » Je décale ma veste en cuir légèrement sur le côté pour dévoiler mon arme, glissée dans mon jean. « Vous voulez pas d’ennuis j’imagine. Si vous voulez pas finir menottes au poignets, j’vous conseille vivement de dégager d’ici. » Faut croire que sur certaines fausses racailles, ça suffit à les faire détaler. Je hoche la tête en les voyant s’éloigner et je pose mon regard sur la brune aux yeux quasi transparents. « Tout va bien ? » que je demande plus par excès de politesse qu’autre chose.

Cette obscurité à l’intérieur d’elle commençait à se mouvoir. Passant dans son regard comme un éclat noir alors que ses pupilles transparentes semblaient n’être que douceurs et gentillesses. Cependant, cette obscurité qui avait été toujours auprès d’elle, malgré elle, voulait à tout prix faire son apparition. Il était trop proche d’elle. Beaucoup trop proche… Pourtant, Sam ne demandait rien. Elle avait encore les rennes en main avant d’imploser et laisser place à ce démon tapi au fond d’elle et qu’elle essayait tant bien que mal de contenir. Parce que ce n’était pas bien. Ce n’était pas ce qu’elle voulait. Elle, elle voulait être tranquille. Ce n’était pas pour rien qu’elle avait raccroché et cela depuis dix années. Tout ses efforts ne devaient pas être vaines. Et pourtant… pourtant.. sa main allait partir. Oui, sa main allait l’étriper. Le repousser pour qu’elle s’éloigne d’elle. Et cette même main allait briser les os des deux autres lascars qui étaient juste derrière lui. L’obscurité allait les engloutir. « Hey, tout va bien ? » cette voix féminine repoussa ce moment fatidique. Interrompant le destin funeste que ce démon réservait à ces trois là. Sa main resta en place et son iris se mouva en direction de cette voix tandis que les gaillards dévièrent leur attention sur la jeune femme qui vint se positionner près d’eux. Heureusement… oui, heureusement que quelqu’un soit intervenu. Le soulagement prit place en son être et cette obscurité fut enchaînée à nouveau. Dans sa prison scellée dans les profondeurs de son âme. Lui faisant fermer les yeux, s’endormant une nouvelle fois et ça depuis dix ans. « Les gars, vous feriez mieux d’aller voir ailleurs… » dit l’inconnue. Le gaillard, lui, ne mâchait pas ses mots. « Oh, mais t’inquiète pas, on lui voulait pas de mal à la jolie fleuriste, mais par contre, toi, on va peut-être se faire un petit casse-dalle… » Il avait envie d’en découdre on dirait. Mais maintenant, elle n’était plus seule et cette personne avait l’air de vouloir l’aider. Même si elle savait pertinemment qu’elle en avait nullement besoin. « Nan, vous allez gentiment vous casser d’ici, laisser la dame tranquille, et pas faire d’histoires. » c’était comme ça alors que les gens normaux aidaient les autres personnes face à une difficulté ? Pas la peine de leur ôté la vie ? « Mais c’est qu’elle essaie de faire peur la p’tite blonde ! Qu’est-ce que tu veux faire pour nous en empêcher ? Hein ? » n’empêche, Sam n’appréciait vraiment pas comment il se comportait. « Vous voulez pas d’ennuis j’imagine. Si vous voulez pas finir menottes au poignets, j’vous conseille vivement de dégager d’ici. » la blonde portait une arme et vu son allure et ses dires, Sam ne mit pas longtemps à deviner que cette dernière travaillait en tant que flic. Les racailles devaient se plier et à la vue de son engin mortel, ils reculèrent et s’éloignèrent. « Tout va bien ? » dit la flic, enfin elle supposait. Sûrement même. Fallait qu’elle tombe sur une flic. Un léger sourire s’afficha sur ses lèvres tandis qu’elle passa une main sur son front. « Oui.. oui, merci beaucoup de m’avoir prêté main forte, je ne savais pas du tout comment me dépêtrer de cette situation. » rétorqua-t-elle, l’air soulagé comme si elle était sans défenses et que son apparition était une bénédiction. Elle finit de cadenasser sa grille et se retourna vers l’inconnue, tendant sa main. « Je m’appelle Samantha, enchantée vraiment. » c’était comme ça qu’une personne normale réagirait lorsque quelqu’un venait à son secours, non ? Enfin elle imaginait en tout cas. « Est-ce que je pourrais vous offrir un verre pour vous remercier d’être intervenue ? » une aide, un remerciement. En tout cas, dans les films c’était à peu près comme ça que les personnes réagissaient. Sam ne faisait qu’imiter.

Une fois le danger écarté, mon regard se pose à nouveau sur la grande brune aux yeux électriques. Il y a de quoi se sentir happé quand on est face à un regard pareil. Presque hypnotisée, je lui demande tout de même si elle va bien, mais elle semble plutôt forte et visiblement, elle n’a pas l’air d’avoir eu si peur que ça. « Oui.. oui, merci beaucoup de m’avoir prêté main forte, je ne savais pas du tout comment me dépêtrer de cette situation. » Je sens quelque chose qui n’est pas naturel chez elle mais je suis incapable de mettre le doigt dessus. Elle m’intrigue. Je plisse un peu les yeux en la regardant finir de fermer sa boutique, dans un calme qui semble olympien. « Je m’appelle Samantha, enchantée vraiment. » dit-elle en se retournant face à moi, me présentant sa main que je serre en guise de premier réel échange. « Joey. Enchantée. » Je ne sais pas si elle est si enchantée que ça, je sens quelque chose de vraiment étrange en elle, presque pas net, mais j’ignore si c’est simplement parce qu’elle a été un peu chamboulée par la scène qui vient de se dérouler, ou si c’est parce qu’elle cache quelque chose. « Est-ce que je pourrais vous offrir un verre pour vous remercier d’être intervenue ? » Un verre ? Pour me remercier ? D’autant plus bizarre. Je ne suis pas le genre à accepter ce style de proposition, pas le genre à boire un verre avec quelqu’un de toute manière. Pourtant, je me sens si intriguée par la brunette que je me sens l’âme vagabonde. « Oui, pourquoi pas… » De là à paraître enjouée, c’est une autre affaire. « Dites-moi juste une chose, ils vous voulaient quoi ces lascars ? » Sait-on jamais, peut-être cache-t-elle quelque chose, peut-être était-ce un règlement de compte. On voit de tout ici, on entend de tout, et je travaille sur tout. Elle a forcément fait le rapprochement, mon arme, ma manière de les faire fuir, les mots employés. Il n’y a pas trop de doutes sur ma profession. Alors soit elle est pas nette mais très intelligente de me proposer d’aller boire un verre, soit elle est simplement sonnée par cette histoire. L4avenir nous le dira. Après tout, je fais ce métier pour me mettre en danger, aussi.

Elle avait la main ferme, cette Joey, pensa immédiatement Sam lorsqu’elles se serrèrent la main pour se présenter. Elle avait l’air d’avoir du caractère et ça se sentait rien qu’avec sa poignée de main. Enfin, déjà vu comment la flic avait fait fuir les gaillards, c’était évident. Sam ne put s’empêcher de lui demander si la blonde voulait boire un verre avec elle, afin de la remercier comme il se devait sa sauveuse du soir. C’était comme ça que faisaient les gens de toute façon. D’accord elle travaillait pour la police - Sam se demandait même si elle les attirait - ce genre de proposition pouvait tourner en sa défaveur. Pourtant, elle avait tellement joué le rôle de Samantha, fleuriste énigmatique mais sympathique, qu’elle se devait de coller parfaitement au personnage qu’elle avait crée aux yeux de tous. Au plus profond d’elle, elle voulait quand même comprendre comment les personnes puissent se lier. Flic ou pas, il semblerait que ce comportement là était le plus adéquat à montrer. Certaine que c’était ce que ferait une personne normale. « Oui, pourquoi pas… » Sam sourit. Lui montrant qu’elle était contente qu’elle ait accepté sa proposition malgré que Joey ne semblait pas être très enthousiaste non plus. Enfin bon, au moins elle n’avait pas refusé. « Dites-moi juste une chose, ils vous voulaient quoi ces lascars ? » elle sourcilla, voilà les questions qui apparaissaient. C’était bien une flic. Elles avaient à peine avancer pour aller au bar en face de sa boutique de fleur, que Joey commençait déjà à l’interroger. « Je pense qu’ils voulaient juste embêter une femme qui était seule. » répondit-elle, entrant dans le bar. Le patron qui était derrière le comptoir la salua avec un grand sourire. Tout le monde appréciait Sam dans le quartier même s’ils ne savaient pas grand-chose d’elle. D’un geste de main, elle le salua à son tour. « Je les voyais déjà rôder autours de ma boutique depuis quelques temps, sans vraiment entrer ou jeter juste un coup d’œil. Et là ce soir, ils ont montré leur vrai visage. » ses pupilles transparentes se fixèrent sur Joey. « Je pense qu’il ne faut pas se leurrer sur leurs intentions. » elles rejoignirent le comptoir, s’installant sur les chaises de bar. « Il était évident qu’ils n’avaient pas envie juste de discuter. » enfin même si Joey n’était pas intervenue, ces gaillards n’auraient pas fait long feu. Pourtant, Sam ne put qu’être reconnaissante qu’elle se soit interposée. Elle ne voulait pas que son démon brise les chaînes qu’elle avait entouré autours de lui depuis dix années. La violence et le sang, elle n’avait connu que ça depuis sa plus tendre enfance. Ce n’était pas pour rien qu’elle avait raccroché. Même si elle cherchait toujours cette paix que peuvent ressentir les gens normaux et que pour l’instant, elle ne l’avait pas encore trouvé. Elle commanda à boire et attendit que Joey puisse en faire de même. « Heureusement que vous êtes passée par là. C'est rare de voir la police faire leur tour de ronde dans ce quartier. C'est tellement tranquille qu'ils pensent que ce n'est pas obligatoire. »

Je suis suspicieuse, je l’ai toujours été, et d’autant plus avec le métier que je fais. Alors forcément, lorsqu’il arrive un incident de cette envergure, j’ai ce besoin presque maladif de poser des questions pour savoir ce qui se trame en dessous de tout ce qui reste visible. Ces gars là étaient louches, mais lui voulaient-ils du mal depuis longtemps, ou était-elle simplement au mauvais endroit au mauvais moment ? « Je pense qu’ils voulaient juste embêter une femme qui était seule. » Je me contente d’un hochement de tête en guise de réponse. « Je les voyais déjà rôder autours de ma boutique depuis quelques temps, sans vraiment entrer ou jeter juste un coup d’œil. Et là ce soir, ils ont montré leur vrai visage.  Je pense qu’il ne faut pas se leurrer sur leurs intentions. Il était évident qu’ils n’avaient pas envie juste de discuter. » « Oui, c’est évident. » Que je réponds avec un poil de nonchalance. Je crois que je suis simplement blasée de ces personnes qui foutent vulgairement la merde juste pour le plaisir, terrorisant des personnes sur leur passage. Je n’ai pourtant pas l’impression que la grande brune ait vraiment été impressionnée par ces lascars. Elle ne semble absolument pas perturbée par ce qui vient de lui arriver. Je reste pour le moment silencieuse, me demandant tout de même s’il pourrait éventuellement se tramer autre chose derrière cette histoire.

Je laisse la jolie brune aux yeux clairs commander, mais elle fait en sorte que je sois la première à le faire. Un café, ça suffira. Je ne bois pas d’alcool en présence d’inconnus. Sait-on jamais, je dois avoir la tête froide. Surtout que mon intuition me dit que quelque chose cloche. « Heureusement que vous êtes passée par là. C'est rare de voir la police faire leur tour de ronde dans ce quartier. C'est tellement tranquille qu'ils pensent que ce n'est pas obligatoire. » Je me pince un peu les lèvres. « Je n’étais pas en service, je n’étais même pas obligée de vous venir en aide. » Enfin, déontologiquement oui, mais j’aurai bien pu faire comme si je n’avais rien vu, et passer mon chemin. Mais la non assistante à personne en danger, tout ça. On connaît. Et puis c’est plus fort que moi, même si je suis une flic aigrie, comme dirait Willie. « Et puis comme quoi, on est tranquille nulle part. » Heureusement surtout que je portais mon arme de service, pour les faire fuir un minimum. « C’est la première fois que vous avez à faire à ce genre d’individus ? » Et oui, encore des questions.

Un café à cette heure-ci ? Hm, original. Ou peut-être que la flic était du genre à ne pas boire d’alcool ? Son regard l’observait. Oui peut-être. Parce que Sam pensait qu’elle était en service aussi. « Je n’étais pas en service, je n’étais même pas obligée de vous venir en aide. » elle sourcilla. Au moins, elle avait l’air de ne pas avoir sa langue dans sa poche. Son café arriva et la bière de Sam. Oui, elle était du genre à boire de la bière. Ça lui arrivait. Elle n’était pas non plus dans l’excès. D’ailleurs le patron ne leur demanda même pas de payer, c’était pour lui. Comme quoi il appréciait réellement la fleuriste. « Et bien, je suis tout de même contente que vous l’ayez fait. » rétorqua-t-elle. Parce qu’au fond, c’était vrai. Elle ne voulait pas leur faire du mal. Parce qu’elle savait qu’elle risquait peut-être de perdre pied et de ne plus faire machine arrière. Alors oui, elle était contente qu’elle soit intervenue. Ça au moins, elle ne pouvait le cacher.  « Et puis comme quoi, on est tranquille nulle part. » Sam acquiesça de la tête. Mais bon, encore ça, ce n’était rien par rapport à ce qu’elle avait vu dans sa vie. C’était juste de la petite frappe qui ne savait pas du tout dans quoi ils s’embarquaient. Des simples oisillons face à un serpent camouflé. Elle n’aurait fait qu’une bouchée s’ils avaient attaqué. « C’est la première fois que vous avez à faire à ce genre d’individus ? » elle but une gorgée de sa bière. Elle sentait que Joey n’allait pas lâcher. C’était un flic après tout. « Je dois avouer que c’est la première fois qu’on m’attend après la fermeture de ma boutique pour venir me chercher des problèmes. » Vrai. « Mais bon, ce n’est pas non plus la première fois que je tombe sur des personnes malveillantes. » elle tourna son regard vers elle. « J’ai beaucoup voyagé avant de m’installer ici, c’est triste de voir combien l’humain peut être malintentionné juste parce que ça leur fait plaisir de créer de la frayeur chez les personnes qu’il veuille agresser. » elle n’était pas explicite dans ses propos. Mais pour l’instant son discours tenait. Il y avait toujours une pointe de vérité sur ses dires. Elle avait fait parti de ces humains là. Dans sa vie passée, elle en avait effrayé plus d’un juste lorsqu’on entendait son surnom.

Je fais comprendre à la jolie fleuriste que je n’avais aucune obligation, si ce n’est mon code moral, que de la tirer de là. Je m’en serai voulu de la laisser dans la merde, je ne suis pas de ce genre de flics qui ont jusqu’à perdu leur code éthique, même si la motivation n’est plus réellement là. « Et bien, je suis tout de même contente que vous l’ayez fait. » Je ne souris pas, me contente seulement d’un hochement de tête et d’un rictus. Je ne souris déjà pas beaucoup au naturel, alors à une inconnue, m’en parlez pas. Malgré tout, je me sens l’envie et le besoin d’en savoir un peu plus, déformation professionnelle j’imagine. « Je dois avouer que c’est la première fois qu’on m’attend après la fermeture de ma boutique pour venir me chercher des problèmes. Mais bon, ce n’est pas non plus la première fois que je tombe sur des personnes malveillantes. » Je lève les yeux au ciel d’un air légèrement dépité. « C’est le problème de la racaille. Ce genre de mauvaises herbes, on peut pas faire grand chose, même nous. Une nuit au poste, ils recommencent le lendemain, à moins de les prendre la main dans le sac, et c’est tellement rare… » Ça doit se sentir que je suis un peu dépitée de mon métier. Surtout du système juridique à vrai dire. « J’ai beaucoup voyagé avant de m’installer ici, c’est triste de voir combien l’humain peut être malintentionné juste parce que ça leur fait plaisir de créer de la frayeur chez les personnes qu’il veuille agresser. » Je hoche la tête à nouveau, tournant la cuillère dans mon café. J’ai une sensation étrange avec cette femme, je ne sais pas quoi en penser. D’un côté elle me semble clean, mais d’un autre, j’ai l’impression qu’elle cache quelque chose. L’espace d’un instant, je me repasse en boucle tous les gros dossiers sur lesquels j’ai pu bosser depuis le début de ma carrière. Ils sont nombreux, mais j’ai une très bonne mémoire. Pourtant, son visage est assez particulier pour qu’on s’en souvienne, et là, rien ne me vient, mais ça m’intrigue. « C’est étrange, j’ai l’impression de vous connaître…. » Je prêche un peu le faux pour avoir le vrai…

« C’est le problème de la racaille. Ce genre de mauvaises herbes, on peut pas faire grand chose, même nous. Une nuit au poste, ils recommencent le lendemain, à moins de les prendre la main dans le sac, et c’est tellement rare… » Sam la regarda, Joey avait l’air légèrement désabusé en disant ça. Ce qu’elle pouvait comprendre. Ça pouvait être frustrant. Et surtout en sachant que le gouvernement avait pas mal de cadavres cachés sous le tapis. Elle le savait que trop bien vu les vies qu’elle avait volé lorsqu’elle travaillait pour des organisations de la pègre qui étaient étroitement liées avec lui. Sinon, ça ferait longtemps qu’elle serait peut-être derrière les barreaux même si Sam avait été un vrai fantôme du temps où elle était tueuse à gage. Elle n’était pas dupe. Elle hocha de la tête avant de continuer son récit. « C’est étrange, j’ai l’impression de vous connaître…. » elle sourcilla buvant une gorgée de sa bière, souriant légèrement « Ah oui ? On s’est peut-être croisées dans la rue sans que l’on fasse attention à l’une et à l’autre. Je sillonne souvent la ville pour diverses commandes. » oui c’était fort possible. Impossible que Joey ait pu voir une photo d’elle dans les dossiers de la police. Peut-être qu’elle savait juste son surnom en tant que tueuse à gage mais c’était tout. Sam gardait toujours son assurance d’ailleurs face à cette remarque, restant le plus naturel possible. « Est-ce que vous aimez votre travail ? » demanda-t-elle, curieuse aussi de connaître un peu son interlocutrice. « Vu comment vous décrivez le système qui n’est pas très fiables apparemment... » elle gardait son regard ancré dans le sien. Elle l’observait elle aussi. Sam savait que Joey en faisait de même de toute façon. C’était une flic après tout. La suspicion était de mise et sur ça, elles se ressemblaient. Sam aussi était quelqu’un de méfiant surtout lorsqu’elle se retrouvait face à quelqu’un qui travaillait pour la police. Avec Armenio aussi, elle était sur ses gardes même si ça faisait un an qu’ils se côtoyaient et avait tissé peut-être un lien - elle ne savait pas trop, cette notion était encore floue pour elle même si elle appréciait Armenio - . Ça n’empêchait pas qu’elle reste vigilante avec lui aussi.

J’ai bien conscience que je ne suis pas le cliché de la flic qu’on voit dans les séries d’aujourd’hui, à fond dans ses missions, qui croit qu’elle peut sauver le monde. Loin de là. Je ne suis qu’un pion, un pion du gouvernement, qu’ils utilisent comme bon leur semble sans aucun juste retour des choses. J’ai abandonné l’idée de justice depuis un bon paquet d’années de toute manière, même si j’adore mon boulot. Sauver la veuve et l’orphelin c’est bien, mais enfermer les salauds ce serait encore mieux. Manque de bol, c’est pas comme ça que marche la justice ici, encore moins depuis qu’on a un enculé de nouveau président. Bref, j’ai pas envie de débattre de ça avec une inconnue. Je sais même pas pourquoi j’ai accepté ce verre en plus de ça. Malgré tout, j’ai une impression un peu étrange, comme si je l’avais déjà croisée, mais ça a l’air de toucher à mon boulot, c’est là que c’est encore plus bizarre. « Ah oui ? On s’est peut-être croisées dans la rue sans que l’on fasse attention à l’une et à l’autre. Je sillonne souvent la ville pour diverses commandes. » Je plisse un peu les yeux. Elle est bonne comédienne, mais je vois bien qu’il se cache quelque chose en dessous de son apparente gentillesse. Son calme un peu plus tôt lors de l’altercation est quelque chose qui n’est pas commun, il y a quelque chose qui cloche. « Je crois pas que ce soit ça non… mais c’est pas grave, c’est peut-être une fausse impression. » Même si je ne crois pas que ce soit le cas. « Est-ce que vous aimez votre travail ? Vu comment vous décrivez le système qui n’est pas très fiables apparemment... » Je grimace un peu face à sa question, je n’avais pas envie de parler de ça avec une inconnue. D’ailleurs, je n’ai toujours pas envie. « Oui j’aime mon travail, même s’il est bridé par les généraux. Mais c’est le mal de notre société de toute manière. » Je n’irai pas plus loin que ça. Vidant l’intégralité de ma tasse en une seule gorgée, je repose finalement mon regard dans celui presque translucide de la grande brune en face de moi. Cette impression ne risque pas de me lâcher, elle est bizarre, y’a quelque chose qui cloche. « Vous avez toujours été fleuriste ? » Je devrais pas entrer là dedans, mais c’est plus fort que moi.

« Je crois pas que ce soit ça non… mais c’est pas grave, c’est peut-être une fausse impression. » ah bon ? Pourtant Sam était une personne physionomiste. Elle n’oubliait jamais un visage. Cependant Joey ne lui disait absolument rien. En même temps dans le passé, elle évitait d’avoir à faire au corps de la police. Et elle savait aussi que les flics n’avaient jamais eu son visage sur une photo ou une description d’un potentiel indic’. A part des descriptions approximatives évidemment. Vu qu’elle changeait tout le temps de ‘têtes’ lors de ses missions. Tantôt brune, tantôt blonde ou bien rousse ou encore d’autres couleurs. Cheveux courts ou longs. Ondulés ou pas, frange ou pas. Les couleurs des yeux bleus, brun ou verts. Enfin bon, Sam savait que c’était impossible qu’on l’ait décrit d’une manière claire et limpide. Elle préféra hausser des épaules. « Oui sûrement, en tout cas dorénavant vous savez qui je suis. » elle sourit ayant toujours l’air sympathique. Elle eut quand même la curiosité de savoir si Joey appréciait de travailler en tant que flic. Elle avait l’air blasé. C’était l’impression que la flic donnait en tout cas. « Oui j’aime mon travail, même s’il est bridé par les généraux. Mais c’est le mal de notre société de toute manière. » elle hocha de la tête. Joey n’avait pas l’air de vouloir en parler plus que ça. Et bien soit, ce n’était pas Sam qui allait lui tirer les vers du nez. Elle aurait pu, elle savait y faire pour soutirer des informations. Mais bon vu qu’elle faisait partie de la police, elle ne préférait pas en faire trop. Histoire de ne pas éveiller trop sa curiosité. Parce que Sam sentait quand même que Joey était peut-être intriguée par elle. Vu les nombreuses questions qu’elle lui posait depuis tout à l’heure. « Vous avez toujours été fleuriste ? » un léger rire s’extirpa d’entre ses lèvres, ses pupilles transparentes s’ancrèrent dans les siennes. « Est-ce que je dois appeler mon avocat pour répondre à vos questions ? » plaisanta-t-elle. Même si au fond, elle sentait bien que Joey voulait en savoir plus. « Non j’ai été femme d’affaire avant. Pour une grosse boîte de marketing. Pas du tout une vie tranquille comme je peux avoir maintenant. » elle inspira quelque peu avant de reprendre « J’ai voulu changé complètement de métier car la stabilité me faisait envie. Arrêter de voyager un peu partout dans le monde pour le travail et rester tranquille pour vivre une vie paisible. Enfin tant que l’on essaye pas de m’agresser, ça va. » en référence aux petites racailles de tout à l’heure. « Et vous, vous avez toujours été flic ? » demanda-t-elle, souriante. Oui elle ne voyait pas pourquoi elle non plus elle ne pouvait pas lui poser des questions.

Déformation professionnelle, je ressens le besoin de lui poser des questions. Après tout, c’est un échange. Elle en a posé, j’en pose aussi. Comme ça nous sommes sur un pied d’égalité. « Est-ce que je dois appeler mon avocat pour répondre à vos questions ? » J’arque un sourcil, esquissant un léger sourire sous le ton taquin employé par la brune. « Tout dépend de la réponse. » Je la laisse me répondre, ou pas, mais je crois que si elle se défile, je risquerai d’avoir des doutes plus prononcés que ceux que j’ai déjà. « Non j’ai été femme d’affaire avant. Pour une grosse boîte de marketing. Pas du tout une vie tranquille comme je peux avoir maintenant. J’ai voulu changer complètement de métier car la stabilité me faisait envie. Arrêter de voyager un peu partout dans le monde pour le travail et rester tranquille pour vivre une vie paisible. Enfin tant que l’on essaye pas de m’agresser, ça va. » Je me contente d’un hochement de tête pour lui signifier que je comprends, ou du moins, je tente de comprendre. Je n’ai pas un métier qui me vaut d’aller partout sur le continent, ni même de beaucoup bouger. Et je ne suis pas sûre que j’aurai apprécié ça de toute manière. « Et vous, vous avez toujours été flic ? » Je me pince un peu les lèvres. « Et oui, de père en fille. » Je ne m’étale pas, je n’en ai ni l’envie ni l’obligation. « D’ailleurs, en parlant de boulot, je reprends mon service d’ici… » Juste le temps de regarder l’heure sur ma montre. « Un vingtaine de minutes. Je vais devoir couper court à cette conversation. » Ça m’arrange bien, j’ai jamais trop aimé qu’on me pose des questions. « En espérant que vous vous ferez pas emmerder à l’avenir, sinon, vous connaissez le numéro. » Oui, le numéro de la police quoi. « Je vous souhaite une bonne fin de journée. » Je sors de ma poche un billet de 5 dollars que je dépose sur la table pour payer mon café, et adresse à la brune un simple hochement de tête pour la saluer, avant de quitter le café. Je crois que je vais être obligée de chercher dans les vieux dossiers si je veux savoir pourquoi elle me disait quelque chose…

Elle aussi avait envie de lui poser des questions. Sam ne voyait pas pourquoi seulement Joey pouvait se le permettre. Après tout, c’était juste une simple conversation entre deux personnes qui apprenaient à se connaître même si Sam avait la sensation que Joey cherchait peut-être à savoir d’où elle la connaissait. Elle faisait partie de la police en même temps, ça se sentait, vu les nombreuses interrogations que la blonde lui faisait part depuis tout à l’heure. Il fallait tout de même qu’elle fasse attention à ce qu’elle lui disait. Cependant, Sam avait l’habitude. Elle sortait la même histoire lorsqu’une personne voulait en savoir plus sur elle. Et ses réponses étaient parfaitement calculées et tout à fait crédibles. Disant qu’elle voyageait de partout avant de s’être installée à LA. Ce n’était pas une information fausse en soit. C’était la pure vérité. A part le fait qu’elle était à LA depuis cinq ans. Ça, ce n’était pas vraiment la vérité. Enfin bon, elle ne voyait pas non plus l’utilité de dire qu’elle était née ici dans une famille qui n’en était pas une pour elle à vrai dire. Du coup c’était comme si elle était toute nouvelle dans la ville d’un sens. « Et oui, de père en fille. » Sam hocha de la tête. « Oh c’est une vocation alors. » elle a été baignée dedans. Ce qui ne l’étonna pas grandement non plus. Joey avait vraiment l’air d’être fait pour ce métier là. Elle l’avait l’allure et l’attitude. « D’ailleurs, en parlant de boulot, je reprends mon service d’ici… Un vingtaine de minutes. Je vais devoir couper court à cette conversation. » Sam sortit sourire sympathique habituel. « Alors je ne vous retiens pas plus, allez sauvez des vies. » lança-t-elle avec un ton de plaisanterie. C’était ce que faisaient les flics pas vrai ? « En espérant que vous vous ferez pas emmerder à l’avenir, sinon, vous connaissez le numéro. Je vous souhaite une bonne fin de journée. » elle hocha de la tête. « Oui, merci à vous aussi. » répondit-elle simplement, elle ne savait pas si elles allaient avoir l’occasion de se recroiser à nouveau, ça ne la dérangerait peut-être pas à Sam même si elle trouvait que cette Joey avait tout de même une curiosité exacerbée à son égard. Ses pupilles la suivirent sortir du café tandis que le sourire de Sam disparut de son visage, retrouvant ce faciès robotique qui était installé depuis fort longtemps dans ses expressions. Elle se tourna, continuant à boire sa bière, se retrouvant seule à nouveau avec ses noires pensées rien que de se souvenir de ce moment où les racailles avaient voulu l’emmerder. Heureusement que Joey était intervenue, vraiment.

FIN