this is how we run. (dakota)

Bordel mais c'est pas possible. J'en peux plus. Je ferme les yeux, je la vois. Je ferme les yeux, j'ai une masse de cheveux roux qui m'hypnotise. Je ferme les yeux, j'ai ses yeux qui me transpercent encore et encore. Non, ce n'est définitivement pas possible. J'en ai marre. Je n'ai jamais jamais été comme ça. Pourquoi elle bordel ? Pourquoi elle. Je ne la connais pas. C'est peut être ça le soucis ? Je ne la connais pas ? Je n'aime pas le mystère et elle c'en est un gros. Je suis rentrée, je ne bosse pas ce soir, j'ai toute ma soirée en plus de ma fin d'après midi. Je veux me changer les idées, je ne veux plus penser à elle. De toute façon ça ne sert à rien. Je ne touche pas aux femmes mariées. Même fiancées. Ca n'apporte que des emmerdes. Déjà avec Hina c'est le bordel mais elle c'est une exception. C'est elle qui est venue me chercher. Je suis pas non plus sans coeur non ? Alors voilà, tant pis. Je couche avec elle, c'est comme ça. Ca me fait du bien, à elle aussi. Puis au moins dans ces moments là elle ferme sa gueule, ce qui est loin d'être désagréable. Entendre simplement mon prénom être prononcé entre deux cris étouffés, c'est bien suffisant. Je rentre à l'appartement, je erre encore et encore. Comme un lion en cage. Je vais au frigo, je prends un truc à grignoter. Je reviens dans la chambre, je me fous sur l'ordinateur, casque sur les oreilles et je prépare de nouveaux mixs. J'arrive à rien. Je me relève, je vais chercher à boire. Je reviens, même rengaine. Ca devient lassant. Mais je ne suis pas la seule à le penser. " Je bosse enfin je tente. " C'est pas faux. C'est pas vrai non plus. J'arrive pas à en parler parce que je ne sais même pas quoi en dire. Avalon me connait. Ca fait un peu plus d'un mois qu'on vit ensemble et malgré tout, on est proches. Faut dire que partager son espace de vie, ça rapproche quand même un peu. " Si si... " Piètre mensonge. Mais c'est pas grave. Je sais qu'elle me percera à jour. Et elle a une idée. Elle veut me sortir. C'pas une mauvaise suggestion là en fait. " Oh oui ! " Je retrouve mon sourire. Un tatouage oui. Une bonne idée.

Elle commande un uber, on grimpe à l'intérieur. Je fournis l'adresse et on est en route. Avalon se laisse faire, elle ne connait pas toute ma vie ni tous les endroits où je passe mon temps. On sort de la voiture et on se dirige vers le salon encore ouvert. Même s'il ferme bientôt, ils resteront disponibles pour moi. " Hello bonsoir ! " Je suis accueillie comme d'habitude par mes potes tout autant tatoués que moi si ce n'est plus. Des sourires, des questions habituelles. " La salle est libre, tu veux quoi aujourd'hui ? " En fait, je n'en ai aucune idée. Si je m'écoutais là de suite, je me ferai tatouer un renard. Étonnant n'est ce pas ? Non, pas vraiment. Je l'ai clairement dans la peau. Mais la voix d'Avalon me ramène à la réalité. Et mon sourire s’agrandit. " Nooooon ? C'est vrai ? " Je sautille sur place et lui attrape les mains. Je regarde Elea avec une moue à laquelle elle ne peut pas résister. " Je peux diiiiiis ? " Elle acquiesce en soupirant. " Ouuuuuuuui ! " J'entraîne ma co-chambrée sans même attendre une seule seconde de plus. Je l'installe sur la table et lui indique de s'allonger. " Tu veux quoi alors dis moi tout ? " J'ai déjà tatoué pas mal de monde, d'ailleurs les tatoueurs qui sont à côté portent pour beaucoup ma trace. Mais avant je dois dessiner le motif. Je ne veux pas me louper, pas sur elle.

Spoiler:

Il y a quelques minutes encore, je ruminais à l’appartement et là, me voilà dans mon salon de tatouage favori. Avalon sait comment m’appréhender, sait comment me faire sourire et surtout me changer les idées. Et j’en ai bien besoin en ce moment. Je n’ai pas besoin de lui parler, elle le sait. C’est aussi simple que ça. Je lui raconterai peut être si j’arrivais moi même à comprendre ce qu’il se passait dans ma tête. Mais en attendant un tatouage me semble être une excellente idée. Enfin ça, c’était avant qu’Avalon en propose une bien meilleure. Vraiment parfaite. La tatouer elle. J’ai le sourire d’une gosse le matin de noël face à ses cadeaux. Et je n’ai jamais vraiment connu ça alors c’est que c’est vraiment quelque chose de très fort pour moi. Je la regarde, j’ai les yeux qui pétillent. J’attends l’aval de tout le monde et j’entraîne Ava à ma suite. La salle est libre, le matériel est prêt, il ne manque qu’une seule chose. Le dessin, celui qu’elle aura sur la peau pour le reste de sa vie. C’est quelque chose d’important, c’est un acte auquel on réfléchit. Mais je n’ai pas l’impression qu’elle y ait vraiment pensé. Mais ce n’est pas grave, je la tatouerai, c’est comme ça. Elle n’y échappera pas. Elle n’a pas signé de contrat mais sa parole vaut pour un. D’ailleurs en parlant de ça, je ne dois pas oublier de lui faire signer la décharge et tout le reste. Ca m’engage moi mais aussi le salon. Même si c’est ma colocataire, qu’elle ne paiera pas et moi non plus. C’est une assurance si quelque chose se passe mal. Mais tout se passera bien, c’est une obligation, pas le choix. Je lui pose la question donc, elle m’avoue ne pas y avoir réfléchi. Elle ferme les yeux et y réfléchit. Moi je sors le papier pour dessiner et la décharge sous le bureau. J’ai quelque peu l’habitude de ce genre de choses. Elle rouvre les yeux après quelques minutes et me parle de couleurs. ” J’ai déjà fait ça en effet, ce sera un peu plus long mais ça me plait comme défi. “ Oui, totalement. Il faut savoir se dépasser sinon on ne progresse jamais. Même si je n’espère pas devenir tatoueuse bien sur. C’est un passe temps, un hobby comme un autre. Ca peut paraître étrange mais j’aime voir le dessin qu’on fait sur papier, prendre vie sur l’être humain. La peau, le corps en mouvement. Il faut penser à ça également. Elle m’explique son idée, je les note sur la feuille pour ne rien oublier. J’ai une idée qui me vient en tête. C’est assez clair pour moi. ” Okay je commence alors. “ Je lui tends la décharge pour qu’elle s’occupe le temps que je créé le dessin. ” Tiens, j’ai besoin de ton autographe. Juste au cas où. “ Je lui fais un clin d’oeil et commence le coeur. Ce n’est pas ce qui me prend le plus de temps. J’essaye de lui donner un peu de relief, pour le côté pin-up surtout. Je fais un dessin grossier pour le moment pour avoir une idée approximative, voir les proportions. ” Et tu le veux où au fait ? “ Je continue le dessin, j’attends sa réponse mais je n’en ai pas besoin pour continuer mes quelques détails. ” Je peux rajouter ma touche personnelle ? “ De toute façon, je ne crois pas que je lui laisserai le choix à ce sujet. Alors je dessine une banderole où je placerai quelque chose de personnel, qu’elle ne verra pas sur le dessin, simplement quand ce sera sur sa peau. Et une fois le modèle terminé, je lui montre le résultat. ” Alors ? “

Je lui file la décharge pour qu’elle la signe. Formalité comme une autre, détournée par une phrase de sa composition qui m’amuse à nouveau. ” Totalement fan de toi, je collectionne tes petites culottes donc t’étonnes pas s’il t’en manque. “ Je dis ça le plus sérieusement du monde avant d’éclater de rire. ” Je te les rendrais promis. “ Comme si j’avais que ça à faire que de lui piquer ses sous vêtements. Enfin ce n’est pas le plus important. Je me concentre sur le dessins que je trace tout d’abord sur le papier. Je lui demande où elle le veut pour adapter surtout la taille du dessin à la taille de l’espace disponible. Ca ne sera forcément pas la même chose à différents endroits du corps. Son bras, ça laisse de l’espace mais je dois faire attention à l’arrondi naturel du membre. Mais bon avec le dessin qu’elle m’a demandé ça ne devrait pas poser de problème alors je m'attèle à la tâche et commence à tracer sur le papier. Ses indications étaient plutôt claires et précises alors je ne mets pas longtemps à finir l’esquisse. Je lui demande quand même si je peux rajouter quelque chose de personnel, une idée qui me trotte en tête. Un rappel de notre amitié en quelque sorte. Assez subtil si l’on ne nous connaît pas. Et sans être trop précis au cas où. Je ne vais pas lui tatouer un “dakota” sur le bras non plus. Même si Avalon fait partie de ces personnes que je suis certaine de garder très longtemps dans ma vie. Je ne sais pas pourquoi, c’est comme ça, je le sens. Je termine les derniers traits, ceux qui m’aideront et me guideront avant de lui montrer le résultat, attendant son aval. Je suis contente parce que visiblement ça lui plait vraiment. Un tatouage ce n’est pas anodin, ça reste à vie. Alors si elle approuve, c’est en toute connaissance de cause. Sinon on n’hésite pas à dire que tel truc nous dérange. Mais pas là. ” Parfait alors. “ Je souris et tapote sur son doigt à l’aide du crayon pour l’éloigner du dessin. ” Surprise. “ Je passe le dessin dans la machine qui l’imprimera sur du papier carbone qui se reportera plus facile sur sa peau, comme une empreinte qui s'enlève rapidement. Elle est impatiente Ava et ça m’amuse d’autant plus. ” Bah écoute maintenant. Vas y installe toi confortablement. “ Avant de commencer, je branche la machine et enfile mes gants après m’être désinfecté les mains. La sécurité avant tout. Je sors les deux aiguilles de leurs emballages mais ne me préoccupe que de celle pour le noir, pour le contour. J’ouvre les pots de couleurs que j’ai choisi pour coller à son thème et les place à côté du reste. Tout est prêt, plus qu’à appliquer le calque sur sa peau. Je la nettoie d’abord avec une lotion avant de mettre la crème qui permettra au carbon d’adhérer. ” Comme ça ça te va ? “ Dernière modification possible avant que je ne commence à la tatouer réellement, j’attends la confirmation de l’endroit. Et une fois que c’est fait, je retire le papier pour qu’il ne reste que l’empreinte grisâtre. ” Alors c’est parti. “ Le sourire aux lèvres, je commence le premier trait pour la laisser s’habituer. ” On peut parler en attendant, ça risque de durer une bonne heure si je veux faire quelque chose de net. “ Hors de question que je lésine sur la qualité du dessin sur sa peau.

Il est temps de commencer. Je lui applique le dessin et j'attends de savoir si ça lui va au niveau de l'emplacement. " Nickel. C’est exactement là que je l’imaginais. Disposé pareil, au millimètre près. " Je souris, c'est parfait. Je laisse le carbone faire son oeuvre, marquer sa peau pour que je puisse avoir la base. Mes gants sont enfilés, la machine ronronne, c'est donc partit. J'attrape le pistolet et appuie sur la petite gâchette pour m'assurer que tout est en ordre. C'est bon, je le pose doucement contre sa peau. Je reste concentrée, je ne veux pas la regarder. Je n'observe que sa peau. Et je vois qu'elle ne tressaille pas, c'est un bon début. Je continue, je commence par les contours mais je n'appuie pas pour marquer définitivement sa peau. Lorsque j'aurai mis la couleur, je sais qu'il faudra que je repasse sur le noir donc autant ne pas trop fragiliser sa peau. De ma main libre, j'essuie les gouttelettes de sang qui perlent parfois. Rien de très grave mais ça m'empêche de me repérer. Je tente de lancer une discussion, pour l'occuper, pour ne pas qu'elle réfléchisse à ce que je suis en train de faire. " Sérieux ? Aussi longtemps ? J’espère que ça ne te dérangera pas si jamais… Tu sais. Si jamais on doit faire une pause. " Je souris et relève le regard vers elle. " Bien sur que non, dis moi des que tu sens que t'en as besoin. Même si faut en faire plus de pauses. " J'ai la salle pour un bon moment, j'avais prévu le coup. Donc ça ne me dérange pas de prendre mon temps. Puis c'est Ava, je veux m'appliquer. " Mais du coup, si on peut vraiment parler… N’hésite pas si t’as besoin de parler de quelque chose toi aussi. Tu sais que je serais toujours là pour toi hein ? " J'arrête la machine un instant, je la regarde. Je crois que je sais de quoi elle veut parler mais je me reconcentre bien vite sur le tatouage. Je ne l'ignore pas, je sais juste pas comment aborder ce sujet qui déjà est étranger pour moi. " Après, j’te force pas la main non plus hein ! Mais entre koalas, on ne se lâche pas et on ne se juge pas. N’oublie jamais ça. " Je souris, finissant le dessin de la rose, les contours. " Je sais que tu sera toujours là. C'est juste que c'est.... " Je finis mon trait, qu'il soit net avant de souffler. " Compliqué. " Je continue ms contours, dans cinq minutes c'est terminé, ce n'est pas plus long. " J'ai un mariage en ce moment, et la mariée est... Différente. Tellement différente que je ne sais pas... " Ah non je sais vraiment pas. " Sa mère est casse couille mais genre vraiment. " Je me redresse et continue de lui parler en changeant l'aiguille. " Et elle, elle est différente. Je ne sais même pas si elle a envie de se marier. " Et je ne parle pas du fait qu'elle soit juste magnifique. Je prends le rouge, attaque la couleur. On avance, on avance.

Je me concentre sur mon travail, sur ce que je fais. Mais c'est vrai que la discussion commence à me déconcentrer. Je me stoppe quand je lui parle, quand je lui explique ce qu'il se passe. Parce que sans concentration, les conneries peuvent vite arriver. Et je ne supporterai pas de me louper sur la peau de mon amie. Les mots sortent les uns après les autres, sans grande suite logique. J'ai déjà tellement de mal à faire le point dans mon cerveau de base que de lui raconter tout ce bordel et bah c'est le bordel en fait. Ca n'a pas de sens et je sais même pas ce qu'elle peut en tirer. Je déteste être comme ça. Je reprends le tatouage, j'attaque la couleur. Ca va aller vite maintenant, c'est que du coloriage. Les détails ce sera pour après. " Et tu ne t’étais jamais retrouvée face à quelqu’un qui n’avait pas vraiment envie de se marier ? Ou qui donnait l’impression d’avoir envie de vomir rien qu’à l’idée d’y penser ? " Je réfléchis à ce qu'elle me demande mais non. " Non j'ai eu beaucoup de mariées stressées mais jusque là aucunes dans cette situation. Elle a l'air tellement désemparée et puis j'te dis sa mère contrôle tout. Comme si c'était son mariage à elle et pas celui de sa fille. " J'ai jamais eu une relation fusionnelle avec ma génitrice mais alors je crois que je ne l'échangerai pour rien au monde avec la dame Chateaubriand. Et puis peut être que je suis une optimiste dans l'âme à penser que le mariage c'est quelque chose de beau et qu'on se marie parce qu'on en a envie. Donc là, la situation m'échappe. Je finis le rouge, attaque le reste des couleurs, laissant toujours cet espace du milieu libre. Pour la fin. " Attends ! Non, sérieux ? " Je m'arrête pour la regarder et voir sur son visage cet air étrange. " Si je ne te connaissais pas, je pourrais croire que tu as un crush sur cette future mariée et que c’est ça qui te perturbe tant. " Et j'ai bien fait de m'arrêter. J'en profite pour changer l'aiguille et revenir au noir pour cacher la gêne qui se pointe. " Je... Non. Enfin je la connais pas alors c'est pas possible ça. " Puis avoir un crush c'est pas mon genre. Les filles elles arrivent et repartent dans ma vie ça a toujours été comme ça. Je reprends le tatouage en soupirant et chassant cette idée folle - mais pas si folle que ça - de mon esprit. Les contours faits j'arrive à la partie la plus intéressante. " Maintenant ferme les yeux jusqu'à ce qu'il soit terminé. Et pas de triche sinon je te fous un bandeau. " Je lui fais confiance et commence à dessiner les lettres. Je passe un mouchoir, corrige les derniers détails et éteins la machine, victorieuse. " C'est bon ! " Maintenant, à voir si elle aime ou pas.