just you and me (steloan#2)

Le déjeuner avec Ellen m’a ouvert les yeux vis à vis de Stella. Je dois la reconquérir, pour la simple et bonne raison que je l’aime à en crever, et au lieu d’utiliser mes forces pour des conneries, autant mettre mon énergie dans une bonne cause, à savoir : retrouver la femme que j’aime, coûte que coûte. Toute la journée je réfléchis à quelque chose qui pourrait être une bonne idée, quelque chose d’original. Et finalement, je décide de laisser la vie me guider. « Niev’,j’te laisse faire la fermeture ça te dérange pas ? Je vais essayer de… » J’hésite, mais la jeune femme est devenue une année après toutes ces années. J’hésite plus pour le fait qu’elle est aussi en pleine séparation, bien que plus récente que la mienne. « … passer du temps avec mon ex-femme. »  Je hoche un peu la tête en souriant et elle comprend tout à fait, me laissant bien sûr finir le travail pour ce soir. L’avantage de ce bar et de cette ambiance bonne enfant que j’ai pu créer, c’est que nous avons toutes une confiance les unes en les autres, ce qui permet de moduler les plannings un peu comme on a envie. Chacune est responsable de compter ses heures, et elles lui seront payées à la fin du mois. Je n’ai aucun problème financier depuis que j’ai réussi à remettre de l’ordre dans les comptes du Planet et j’en suis heureuse.

Il est vingt et une heures lorsque je rentre à la maison, m’attendant à trouver tout le monde. Mais non. Joy sort de sa chambre toute bien habillée. « Salut puce, tu vas où comme ça ? » « Salut M’man, je sors, y’a Julie qui m’attend en bas. » Je hoche la tête. « Et tes soeurs ? » « Rylee est aux abonnés absents, et Casey est à son cours de théâtre je crois. » « Maman ? » Elle fait un signe pour désigner l’étage du duplex où j’entends couler l’eau. « A la douche. Je file. A demain. » A demain ? Quoi ? Mais quel jour on est ? Vendredi. Ok. Je soupire un peu mais suis rassurée de savoir que je suis seule avec Stella. Je dépose mes affaires, me mets à l’aise et vais jeter un oeil dans la cuisine, visiblement le repas a déjà été servi. Hésitante, je monte à l’étage pour rejoindre la chambre de Stella, frappe quelques coups, et attend qu’elle me laisse le droit de pousser la porte. Elle est simplement entourée d’une serviette, ses cheveux bruns dégoulinant sur ses épaules. Mon coeur s’emballe. « Je… salut ! » Je tente un sourire qui se veut naturel. « Je suis rentrée plus tôt, Joy vient de partir chez sa meilleure amie, et je crois… qu’on est seules. » Je me pince un peu les lèvres avant d’ajouter. « Tu as mangé ? »

Il n'y a rien de meilleur qu'une bonne douche... Me dis-je en mon for intérieur. APrès une journée à faire des aller-retours entre les écoles de chacune, les courses, déposer les fringues au pressing, aller voir Fanny mon éditrice pour le rendez-vous mensuel, je ne me suis pas posée une minute et je suis claquée. Je ne sais même pas l'heure qu'il est quand je rentre chez moi et la vérité c'est que je m'en fiche. Je sais qu'en rentrant, Rylee sera chez sa nouvelle amie, que Joy sera quasiment en route pour la maison de Julie et que Casey sera de sortie avec "une amie" dont elle m'a rapidement parlé il y a peu. Bien évidemment, j'aurai la maison pour moi seule comme ce n'était plus arrivé depuis plusieurs à présent. Je ne pense même pas à Loan qui sera sans doute au Planet, comme d'habitude à cette heure-ci. Ce bar qui est un véritable repère pour les femmes qui s'assument et qui cherchent la compagnie de véritables partenaires valables, est aussi la cause de notre divorce. La belle y passait, et y passe toujours, tellement de temps que notre couple s'est en quelque sorte dissout de lui-même. Il n'y avait plus d'alchimie, plus de magie, plus de temps passé ensemble en fait. Je n'étais plus qu'une mère qui s'occupe de ses trois filles, qui gère son boulot à la maison en même temps et qui n'a plus le temps pour quoi que ce soit d'autre. Une mère célibataire presque. Une mère... plus une femme... Mes pensées voguent dans la salle de bain, elles sont presque visibles et se mélangent à la vapeur d'eau qui émane de ma peau toute chaude et mouillée. J'attrape une serviette pour m'enrouler dedans. Le tissu tout doux et duveteux épouse mon corps et je comprime mes formes à l'intérieur pour me sécher délicatement. J'entends soudainement la porte d'entrée qui claque et j'imagine assez bien Joy partir en courant vers les bras de son amie qui l'attend devant la maison. Je passe donc de la salle de bain à ma chambre d'un pas gracile, mais à la fois toute excité. Je ne sais pas pourquoi j'ai l'impression d'être montée sur ressors. Un sourire étire mes traits alors que rien n'en est la cause. Je me mets à fredonner un petit aire de musique, puis je bouge mes hanches en rythme, mais c'est alors que je me retourne subitement lorsque j'entends une voix derrière moi. Je tourne la tête et m'aperçois que c'est en fait Loan qui vient de monter et qui me demande à travers la porte si elle peut rentrer. Elle n'a donc rien vu de compromettant : Ouf... « Vas y, entres Loan. » Et je reste là un instant alors qu'elle ouvre la porte et que moi je suis là au milieu de la pièce nue sous une simple serviette. Après tout, elle a tout vu de moi. Je n'ai rien à lui cacher. Et pourtant, si cette situation est si simpliste pourquoi est-ce que j'ai tout à coup très chaud, malgré ma tenue, j'ai chaud. Si chaud. Une chaleur qui me brûle dans le bas ventre, un désir qui gronde en moi comme la lave d'un volcan qui tente de s'expulser de son cratère. « Salut toi... Lâche-je enfin. Oui, nous sommes orphelines ce soit apparemment... » Je me tourne délicatement, un pied après l'autre pour donner un caractère sensuel à mon volte-face. Puis je fais quelques pas en avant, mes cheveux mouillés laissent couler l'eau encore là sur mes épaules, puis elle coure sur mes bras et termine sa course sur le parquet de ma chambre. Je souris à mon ex-femme. Toujours aussi belle, j'ai l'impression de la retrouver des années en arrières. Je me stoppe à à peine trois pas de sa position, je retiens ma serviette sous mes bras, elle pourrait tomber à tout moment. « Non je n'ai toujours pas mangé et je n'ai pas eu le temps ce midi non plus. En fait je meurs de faim! Haha! » J'en ai même oublié de manger ce midi... Bravo. Je lève un bras pour venir attrape ma crinière et la passer par dessus mon épaule droite en une seule masse assez informe et dégoulinante. Je penche la tête du côté opposé et je lui dis : « On se fait un tête à tête? Tu as envie de quoi toi? » Moi... de toi... Et je me mords la lèvre inférieure, silencieuse.

« Salut toi… » me dit-elle d’une voix qui me ferait succomber en une fraction de seconde. « Oui, nous sommes orphelines ce soit apparemment... » Mon sourire s’étire un peu plus, le terme est plutôt mignon je trouve. Je peine à détacher mon regard d’elle, elle est si belle, surtout dans cette tenue. Ou non tenue d’ailleurs. Sa manière de se déplacer me donne affreusement chaud et je tente de me contenir. « Non je n'ai toujours pas mangé et je n'ai pas eu le temps ce midi non plus. En fait je meurs de faim! » J’ouvre un peu plus grand les yeux, surprise qu’elle n’ait pas eu le temps de manger. De nous deux, c’est elle la femme équilibrée, c’est à elle que revient le mérite d’être toujours parfaite, ou presque. Alors je m’étonne qu’elle ait loupé un repas, ça ne lui ressemble pas vraiment. « Tu vas devoir m’expliquer ce qui te prend autant de temps pour aller jusqu’à louper des repas… » Devoir n’est pas le mot parce qu’elle ne me doit rien, mais à en voir mon sourire, j’espère bien qu’elle se doute que ce n’est pas un ordre. Loin de là. Elle me parlera de ce qu’elle a envie, quand elle aura envie, et si elle a envie. « On se fait un tête à tête? Tu as envie de quoi toi? » Mon regard accroché au sien, une seule réponse ne me vient en tête dans l’immédiat : elle. Je meurs d’envie de la retrouver sous tous les aspects possibles, l’embrasser à nouveau, la toucher, la caresser, lui faire l’amour comme si ma vie en dépendait. Deux longues années que j’ai perdu ce droit, et que je le regrette amèrement. « Je vais voir ce qu’il y a dans le frigo. Prends le temps de t’habiller, je m’occupe de tout. » Je fais glisser mes doigts sur sa mèche de cheveux rebelle encadrant son visage pour la faire passer de l’autre côté avec les autres, et finalement je fais demi-tour pour descendre à la cuisine, et éviter de faire une bêtise. Je ne veux surtout pas aller trop vite, je dois mettre à profit les conseils d’Ellen, absolument. Une fois dans la cuisine, je sors quelques ingrédients du frigo, des placards, de quoi concocter à mon adorable ex-femme un repas digne de ce nom. Je n’ai jamais trop aimé cuisiner, c’était plutôt son rayon, mais depuis deux ans que je n’ai pas le choix que de m’y coller, je crois avoir appris pas mal de choses, et je dois dire que j’aime ça beaucoup plus qu’avant. Si je pouvais marquer des points et lui montrer que j’ai changé, ça pourrait être une bonne chose. Je m’attèle à faire quelque chose de bon, quelque chose qui pourrait lui faire plaisir. Je l’entends finalement arriver derrière moi et cette sensation est indescriptible. Si je fermais les yeux je pourrai même la rêver s’approcher de moi, entourer ma taille de ses bras menus et déposer un baiser sur ma joue, me demandant ce que je lui prépare de bon. Mais ne mettons pas la charrue avant les boeufs.

Depuis la "retour" des filles à la maison le rythme s'est intensifié. Par intensifié j'entends qu'il faut plus de provisions, donc faire plus de courses, les repas sont un peu plus longs à préparer, les allers-retours vers les écoles aussi ont grandi en nombre. Bref, c'était comme il y a quelques années en arrière et je dois encore m'habituer à ce retour en arrière. Je le fais avec plaisir d'ailleurs. C'est simplement pour ça que je n'ai pas eu le temps de manger ce midi. Il a fallu déposer Casey, puis aller chercher Joy et ayant oublié mon pc portable à la fac j'ai dû y passer pour le récupérer afin de tenir mes cours à jour durant le weekend. Loan qui s'interroge sur le pourquoi aura sa réponse tout à l'heure. Pour le moment elle sort tranquillement de la chambre et je me retrouve seule à nouveau. Mon cœur semble se relâcher et mes muscles se détendent à leur tour. Je me rends compte que j'étais plus impressionnée que je ne l'aurais cru. La sensation de mes épaules qui retombent me fait un bien fou. Mes bras se desserrent lentement et la serviette que je coinçais par ce biais choie au sol. Je me retrouve tout à coup complètement nue mais je ne cherche pas à me couvrir de mes bras. Je file fouiller dans ma commode et tire un débardeur blanc d'un tiroir, un shorty d'un autre et enfin un large pantalon qui traînait au pied de mon lit. Le tout fera l'affaire pour une soirée passée à la maison tranquille.

Je descends tranquillement à la cuisine et l'espace ouvert me donne une vue depuis le salon sur la magnifique blonde qui s'affaire comme je ne l'avais jamais avant. Loan aux fourneaux, c'est une chose à marquer d'une pierre blanche. Ceci me tire d'ailleurs un large sourire et je ne manque pas de glousser doucement en me couvrant la bouche de la main droite. Moqueuse mais surtout taquine, je m'avance finalement vers elle et lui dit : « Alors ça c'est un vue que je n'aurais jamais cru possible... Mais qui êtes-vous? Rendez-moi ma f... Madame Kelley. » Dis-je sur un ton jovial. La voir cuisiner pour nous deux me rend tout à coup bien heureuse. J'en ai même failli lâcher un "ma femme" inopiné, fait qui réellement n'est plus depuis plus de deux ans. Je serais presque tentée de l'attraper par derrière, d'enrouler mes bras atour de sa taille pour la serrer passionnément contre moi, plonger mon visage dans son cou pour y déposer de tendres baisers. Je remonterais ainsi jusqu'à son oreille et... Je secoue la tête pour me reprendre les yeux écarquillés. Mais à quoi tu penses Stella... Ma conscience me met en garde contre mes propres idées déplacées. Je pose une main sur le plan de travail et alors que je regarde ce sur quoi elle était en train de se lancer, je lui demande si elle a besoin de moi : « Je vois que tu t'en sors bien, mais tu souhaites un coup de main? » C'est sens réellement attendre de réponse que je viens me poster à ses cotés, j'attrape une tomate et un couteau pour la couper en rondelles. Un petit sourire aux coins des lèvres, ce moment paisible me rappelle des souvenirs d'une époque aujourd'hui révolue. Mais si seulement à cette époque-ci nous avions eu le temps de faire tout ça... Sans doute ne serions-nous pas séparées. Je tourne la tête vers mon ex-compagne pour l'observer un instant, et lorsqu'elle tourne son visage vers moi je me ravise, presque comme prise sur le fait en train d'observer la femme que l'on convoite. Le rose me monte aux joues, j'ai l'impression d'être une adolescente en mal d'amour.

J’entends les pas de Stella derrière moi mais je reste concentrée sur le repas que je suis en train de lui concocter. A mesure qu’elle approche je sens mon coeur s’emballer et mon corps se réchauffer. Je n’ai jamais ressenti ça pour personne d’autre qu’elle. C’est dingue. Je l’entends ricaner et ça me fait sourire. Je me doutais bien qu’elle ferait une réflexion. « Alors ça c'est un vue que je n'aurais jamais cru possible... Mais qui êtes-vous? Rendez-moi ma f... Madame Kelley. » Je tourne la tête dans sa direction, souriante. « Tu t’y attendais pas à celle là hein ? Attends toi à découvrir une nouvelle moi. Un peu plus parfaite que la version précédente… » Je ris un peu, parce que je n’ai jamais été parfaite, bien loin de là, et ce n’est pas mes nouveaux ‘talents’ de cuisinière qui pourra me faire reconquérir le coeur de ma belle, je le sais bien. « Je vois que tu t'en sors bien, mais tu souhaites un coup de main? » « Si tu veux oui… » Lorsque je me suis mise à la cuisine après notre séparation, je me suis souvent imaginé un moment comme celui-ci, de partage tout en faisant à manger pour notre famille. J’ai l’impression de vivre une vie parallèle depuis que je suis ici, je ne sais pas exactement comment me comporter, je fais au mieux, et écoute les conseils de ma meilleure amie dans l’espoir de pouvoir reconquérir le coeur de cette femme que j’aime plus que tout.

Stella attrape de quoi m’aider et je me sens souriante, peut-être un peu bêtement. Je continue ce que j’étais en train de faire et sentant son regard, je tourne les yeux pour la regarder à mon tour et mon sourire s’étire en la voyant détourner le regard, et rougir un peu. « Reste concentrée, tu risquerais de te couper… » lui dis-je en murmurant, comme un secret. Je suis taquine, je crois que j’ai simplement envie de retrouver cette complicité qui nous animait et que nous avons perdue depuis, par la force des choses. « J’ai décidé de donner une promotion à Nieves. » Stella connaît le nom de mes employées, du moins celles qui sont là depuis longtemps, et c’est le cas de Nieves, qui est d’ailleurs depuis devenue une amie. A la base simple barmaid, je lui ai donné un peu plus de pouvoir en étant manager, et aujourd’hui elle bondit encore. « Elle est ma co-gérante désormais. Ce qui va me permettre de lâcher un peu la bride, sortir plus tôt, comme ce soir… » Je ne lui dis pas ça au hasard, j’aimerai qu’elle comprenne que je prends mes dispositions, que je veux changer, que je mettrai tout en oeuvre pour la reconquérir comme il se doit, pas avec de simples paroles, mais des actes, aussi.

Loan est une femme nouvelle. Plus attentive, plus attentionnée et plus investie dans le quotidien qu'elle ne l'a été auparavant. Je ne dis pas qu'elle n'a pas été une femme exquise, mais ce qui est certain c'est qu'elle priorisait son job au Planet avant sa famille et son rôle de même de compagne. Ce qui a été la cause de notre séparation au final. Mais la Loan que je vois là devant moi semble différente. Elle rayonne presque. La voir cuisiner, se donner du mal alors que je sais que ce n'est pas sa spécialité, me touche en plein cœur. Un peu plus parfaite... Sur certains points elle n'a pas changé. J'ai toujours aimé le fait qu'elle soit si sûre d'elle même. Elle a une prestance qui frôle le divin. C'est un charisme hors normes qui l'habite et qui fait qu'elle est si douée dans ce qu'elle fait aujourd'hui. Je souris lorsque je note cette petite pointe d'assurance.

Je me perds quelques instants en contemplation. Prise sur le fait, je détourne le regard trop tardivement, prise à mon propre jeu. Je ne sais pas pourquoi je suis tout à coup gênée et je sens le rouge venir colorer mes joues. Toute sourire je reprends ma tâche. Je coupe les aliments, les disposent dans le plat. Je ne sais pas encore ce que mon ex-compagne cherche à me faire, mais j'adore les surprises. Et puis savoir que c'est préparé pour moi avec a... mitié... C'est encore meilleur. Je ris à sa délicate remarque : « Haha! Oui excuses-moi, je profitais de cet instant... Te voir ici avec moi, c'est... Comme un rêve éveillé tu vois ce que je veux dire? Je m'attache les cheveux qui me tombent devant le visage en une queue rapidement exécutée. Tu me ramènes des années en arrière. Ce sont de doux souvenirs qui se ravivent. » Ces derniers mots sont prononcer comme dans un souffle. Non pas pour les lui cacher, mais plutôt pour garder ce précieux moment intact. Une fois tout ma tâche terminée, je me recule du plan de travail, m'essuie les mains sur un torchon et je tique tout à coup sur ce qu'elle me dit : « Ah oui? Nieves? Ooooh félicitation à elle. J'aime beaucoup Nieves. Elle s'est toujours beaucoup donnée pour toi. Elle le mérite. Dis-je sincère. Et donc... Si tu as plus de temps tu vas pouvoir... Voir les filles plus souvent alors... Profiter de la vie aussi... » Cette fois pensive. Je lèves les yeux aux ciel en un signe de réflexion. Imaginez si ceci était arrivé plus tôt...? C'est ce que j'ai attendu toutes ces années en réalité : qu'elle prenne du temps pour elle, mais surtout pour nous.
J'ouvre le placard où je range habituellement les alcools. J'en sors une bouteille de pino gris et je sors deux verres à pieds. Sans même lui demander si elle souhaite un verre -je la connais bien- je serre le nectar coloré et lui tends le récipient avec un large sourire. « Trinquons à cette bonne nouvelle. Que ceci t'apporte un nouvel élan dans la vie Loan. Je te souhaite le meilleur, tu le sais... »

J’aime sentir son regarde sur moi, c’est absolument divin, je ne peux m’en cacher, ça me rend même toute chose. Je sens une douce chaleur s’immiscer en moi et je souris, plus pour moi même et ce sentiment que pour elle. Mais ce sourire devient rapidement sien lorsque je tourne la tête pour croiser son regard une fraction de seconde avant qu’elle ne baisse les yeux, ses joues rougissantes. Elle est tellement belle. « Oui excuses-moi, je profitais de cet instant... Te voir ici avec moi, c'est... Comme un rêve éveillé tu vois ce que je veux dire? » Je ne la lâche pas des yeux et lui souris, sans doute un peu trop amoureusement, je n’en sais rien, je ne contrôle plus rien.  Je tente de rester concentrée sur ma préparation mais la voir s’occuper de ses cheveux à côté raaaahhh ça me rend folle. J’ai toujours adoré ses cheveux, je me souviens de toutes ces fois où je lui ai lavés quand on prenait des bains ou des douches en amoureuses, quand on avait encore le temps de faire ce genre de choses. « Tu me ramènes des années en arrière. Ce sont de doux souvenirs qui se ravivent. » Je souris et dévie le regard, émue par ses mots. « Ça fait du bien de raviver ce genre de souvenirs… » J’ajoute entre mes lèvres, comme un murmure, des paroles inavouées.

Volontairement, je lui parle de Nieves et du fait que je suis en train de choisir de me dégager du temps, en donnant plus de confiance à une de mes employées et amie. « Ah oui? Nieves? Ooooh félicitation à elle. J'aime beaucoup Nieves. Elle s'est toujours beaucoup donnée pour toi. Elle le mérite. Et donc... Si tu as plus de temps tu vas pouvoir... Voir les filles plus souvent alors... Profiter de la vie aussi... » Je souris et hoche vivement la tête. « Oui, c’est ça. Profiter des filles, et de la vie. » Et d’elle aussi. Mais ça, je n’ose pas encore vraiment lui dire, pas de but en blanc, pas comme ça. Même si j’imagine qu’elle doit déjà le comprendre, elle me connaît si bien.

Je commence à mettre à cuire les ingrédients, la viande, et laisse mijoter alors que Stella nous sert un verre de pinot à chacune. « Trinquons à cette bonne nouvelle. Que ceci t'apporte un nouvel élan dans la vie Loan. Je te souhaite le meilleur, tu le sais... » Je récupère le verre en question et me tourne vers elle pour plonger mon regard dans le sien. Un nouvel élan. Oui, un nouvel élan pour la reconquérir. Emue, je souris, un peu et baisse les yeux pour regarder le liquide à l’intérieur de mon verre. « Merci… » Je sens ma voix légèrement chevrotante sous l’émotion. « Je sais pas ce que j’ai fait pour te mériter Stella. Et c’est sûrement la pire connerie de ma vie que de ne pas avoir su garder ce qu’on avait… » Mon regard ancré au sien, je sens mon regard devenir plus brillant. Je me racle la gorge un peu et esquisse un sourire pour chasser ces pensées. « A notre nouvelle vie alors. Enfin… oui. Je me comprends. » En fait, pas du tout. Je suis complètement dépassée par cette nouvelle proximité.

Nous trinquons à notre santé, à une nouvelle vie, à un nouvel élan. Je souhaite que la vie de mon ex-compagne aille de l'avant. Que nous puissions passer à autre chose que... Le fil de ma pensée est interrompu par son regard. Je reste un micro instant surprise par les larmes retenues que je vois mouiller les yeux de la blonde. J'allais porter ma coupe à mes lèvres mais je me retiens un instant. Un sourire que j'essaie de cacher étire tout de même le coin droit de ma bouche. Puis je bois une gorgée du pino. Je me permets un petit commentaire qui se veut appréciateur du vin que nous partageons. J'observe les courbes toujours aussi attrayantes de mon ex-femme. Je me demande comment j'ai pu me passer de "ça" aussi longtemps... Si je ne m'écoutais, je lui sauterais dessus dans l'instant. Je la lèverais pour qu'elle vienne reposer sur le plan de travail et... Stella! Non! Me dis-je en mon for intérieur. Immédiatement je me souviens de pourquoi nous en sommes venues à nous séparer. La distance qui s'est installée entre nous, les secrets, les nuits passées seule... Alors sans doute instinctivement, je fais un pas de recule et mon expression se referme doucement. « Oui Loan, effectivement ça a été la pire connerie de notre vie de tout envoyer voler. Les filles avec... J'espère au moins que tu t'es amusée pendant un temps... » Mes mots ne se veulent pas méchants. Ils sont réalistes. Ils ne sont que l'écho d'une lointaine déception, d'une amertume passée aux relents encore vivaces. Ils sont la voix d'une femme blessée qui a mis du temps à se rétablir et qui voit aujourd'hui son cœur se serrer lorsque l'amour de sa vie tente de la séduire à nouveau. Je me mords la lèvre inférieure pour ne pas continuer à proférer ces horribles paroles. Je m'en veux déjà d'avoir appuyé là où ça fait mal. Ce n'est pas pour la blesser elle réellement, sinon que pour me souvenir de là où je viens et de ne pas laisser les choses recommencer. Je ne sais plus quoi dire, ni quoi penser en fait. Alors pour me donner de la contenance je me redresse, le dos droit, je vide mon verre d'une traite et le dépose un peu trop fortement sur le bois du meuble. Je me lance, l'alcool n'aide pas encore pourtant : « Loan, ne crois pas que je suis insensible à tout ce que tu dégages. Tes regards, tes sourires, tes attentions... Quand je dis que tu me ramènes des années en arrières, je suis sincère. C'est génial... Tu es géniale! Je passe une main sur mon front. Mais... Mon cœur ne supporterait pas une nouvelle désillusion. Et les filles? N'en parlons pas... Elles seraient dévastées. Je... N'ose pas imaginer ce que Casey pourrait penser de tout ça... Et puis il est vrai que je... t'aime toujours Loan. Ces derniers mots resteront dans mon esprit. Pour l'instant au moins. En parlant je me suis approchée de la blonde qui se tient à quelques pas. Et sur mon silence, comme pour l'accentuer, je viens poser le bout de mes doigts sur sa joue et je les fais glisser sur ses lèvres. Délicatement, doucement, tendrement...

Je suis émue d’être là avec elle, nos regards ancrés l’un dans l’autre, et ce pétillement dans nos yeux. Je sens la tension de faire un peu plus présente, elle l’a toujours plus ou moins été, depuis le premier jour, depuis notre première rencontre. Le temps file à toute allure, mais il y a des choses qui ne faneront jamais, de toute évidence. Mais alors que j’avais la sensation d’avoir happé l’aura de Stella, je la sens s’éloigner sans comprendre ce qui est en train d’arriver. Elle recule d’un pas et mon coeur se serre dans la seconde. « Oui Loan, effectivement ça a été la pire connerie de notre vie de tout envoyer voler. Les filles avec... J'espère au moins que tu t'es amusée pendant un temps... » Je fronce les sourcils alors que je sens une vague désagréable s’emparer de moi. Si je me suis amusée ? Je soupire un peu et baisse les yeux sur le sol un instant, tentant de trouver les mots juste pour répondre à ça sans m’emporter. J’avais envie d’une trêve, j’avais envie d’être seulement avec elle, profiter d’un moment sans penser à ce qui nous avait séparées, juste les bons moments partagés. Mais visiblement, ce n’est pas possible, et j’ai juste la sensation de foncer dans un mur en béton armé, tête baissée. Je suis sonnée par le carton qu’elle vient de me mettre avec une violence qu’elle ne soupçonne même pas. Je me suis fourvoyée je crois, je n’arriverai jamais à la reconquérir. Je lui ai fait trop de mal. Je passe ma langue sur mes lèvres et me mordille nerveusement la lèvre inférieure. Je ne relève alors le regard qu’à l’instant où j’entends le claquement du verre sur le meuble. « Loan, ne crois pas que je suis insensible à tout ce que tu dégages. Tes regards, tes sourires, tes attentions... Quand je dis que tu me ramènes des années en arrières, je suis sincère. C'est génial... Tu es géniale! » Je fronce un peu les sourcils, pas sûre de savoir où elle veut en venir après ce qu’elle vient de dire un peu plus tôt. Je me sens totalement perdue dans un océan de questions qui se bousculent les unes après les autres. « Mais... Mon cœur ne supporterait pas une nouvelle désillusion. Et les filles? N'en parlons pas... Elles seraient dévastées. Je... N'ose pas imaginer ce que Casey pourrait penser de tout ça... Et puis il est vrai que je… » Je reste pendue à ses lèvres, attendant la fin de sa phrase qui de toute évidence ne viendra pas. « Stella je… » Je soupire un peu, comme pour me donner un peu de courage. « Je sais que tu m’en veux, tu as tous les droits de m’en vouloir, j’ai pas fait ce qu’il fallait, j’ai baissé les bras quand il aurait fallu que je me batte davantage, pour nous, pour notre famille. Je sais pas exactement pourquoi j’ai arrêté d’y croire l’espace d’un instant… » Ma voix commence à trembler et mon regard se charge d’une émotion brillante. « Mais j’ai pris conscience de mes erreurs, et je me suis rendue compte que… que je n’ai jamais été plus heureuse que lorsque j’étais avec toi, avec nos filles… » Je déglutis avec difficulté et lève les yeux au ciel comme pour essayer de ravaler les larmes qui cherchent à poindre au coin de mes yeux. Je laisse échapper un rire un peu nerveux avant de reposer les yeux sur elle. « Je sais pas pourquoi, j’ai cru que… qu’on pourrait juste oublier ces deux ans d’enfer. J’ai été naïve… » A mon tour de vider le contenu de mon verre de vin.

Lui en vouloir? Ce n'est pas l'expression que j'utiliserais. J'ai dépasser le stable de la culpabilité ou celui d'à tout prix vouloir trouver quelqu'un à diaboliser. Au bout de ces deux années passées seule à m'occuper de Casey et d'avoir les visites ponctuelles des filles, j'ai appris à relativiser. Je sais que les tords étaient partagés, que nous avons toute les deux notre part de responsabilité dans l'effondrement de notre couple. Moi trop investie dans la maison, l'écriture et les filles, Loan trop impliquée dans son affaire pour que son bar fonctionne correctement. Nos raisons étaient honorables, mais nous nous sommes perdues en cours de route. Aujourd'hui les morceaux sont difficiles à recoller. Certaines miettes sont déjà perdues à jamais d'ailleurs. On se relève difficilement d'un divorce surtout quand vous aimez toujours profondément la personne qui vous quitte. Pourtant, je retrouve une Loan différente aujourd'hui. C'est une Loan amoureuse, tendre, attentionnée que j'ai connu il y a fort longtemps qui se présente à moi dans ma cuisine. Je souris à nouveau, mais d'un sourire en demi-teinte. Un sourire qui masque une tristesse amoindrie par les mois de solitude : un masque de composition. Je pose une main sur le comptoir pour me soutenir, et je penche la tête sur le côté laissant mes cheveux pendre sur mon épaule. « Ne part pas tout de suite dans des extrêmes Loan. Ne te victimise pas non plus. Et arrêtes de dire que tu as été la source de tous nos ennuis. Je souffle doucement. Tu n'as pas été la seule responsable de la perdition de notre mariage ma belle. Nous étions deux, et nous sommes toute les deux responsables si le navire a coulé. Et c'est de notre faute si les filles ont souffert. Bref... Arrêtes de t'auto-flageller... » Dis-je en terminant presque dans un souffle.

Je quitte alors le plan de travail pour faire deux pas en avant et combler la distance qui me sépare de mon ex-femme. Toujours ce petit rictus qui m'étire les traits du visage, je capte son regard et ne compte pas le lâcher. A bonne distance, je tends alors le bras pour venir frôler de mes doigts frais sa joue droite. Je caresse celle-ci tendrement, j'y dépose ma paume et glisse ensuite derrière sa tête pour venir agripper sa nuque. « Si tu souhaites que nous retrouvions un équilibre de vie toute les deux, ne baisses pas les bras. Faisons des efforts ensemble. Je... Je t'ai attendu depuis tout ce temps tu sais...? Je pense que nous méritons de nous donner une autre chance. » Ce discours encourageant se veut optimiste et est terriblement sincère. Si elle savait la vitesse à laquelle bat mon cœur dans ma poitrine juste là. Et si elle pouvait imaginer la force que je dois employer pour lutter contre l'envie de l'embrasser aussi...

Je suis complètement dépassée pas les évènements. La sentir là avec moi, près de moi, pouvoir la regarder dans les yeux, ressentir chacun de ses mots jusqu’au plus profond de moi. « Ne part pas tout de suite dans des extrêmes Loan. Ne te victimise pas non plus. Et arrêtes de dire que tu as été la source de tous nos ennuis. » C’est difficile à accepter, alors que je suis certaine d’avoir été à l’origine de notre séparation. Je crois intimement qu’elle a subi la situation sans rien pouvoir vraiment faire. Qu’aurait-elle pu faire de toute manière ? Je souffle un peu, prise par l’émotion, je dois faire en sorte de ne pas pleurer, ne pas me montrer faible. « Nous étions deux, et nous sommes toute les deux responsables si le navire a coulé. Et c'est de notre faute si les filles ont souffert. » Je secoue sensiblement la tête en baissant les yeux, je ne suis pas d’accord avec elle, mais je préfère ne rien dire.

Elle s’approche de moi et je sens mon coeur s’accélérer davantage sans réussir à me calmer. Je crois même que tout mon corps réagit à la proximité de son corps qui se fait plus importante à mesure que Stella s’approche. Je relève les yeux vers elle et me sens prise comme d’un long frisson, d’une décharge électrique. Son regard est puissant, comme il l’a toujours été. Ses doigts frôlent ma joue et je ferme les yeux légèrement plus longtemps comme pour faire durer le plaisir des sensations de ma peau qui s’imprègne de son toucher. Une fois sa paume rencontrant ma joue, je penche un peu la tête sur le côté pour amplifier le contact. « Si tu souhaites que nous retrouvions un équilibre de vie toute les deux, ne baisses pas les bras. Faisons des efforts ensemble. Je... Je t'ai attendu depuis tout ce temps tu sais...? Je pense que nous méritons de nous donner une autre chance. » Mon coeur est à deux doigts d’imploser dans ma poitrine. Elle m’a attendue ? Elle n’a jamais eu d’aventure ? N’a vu personne ? J’ai presque du mal à y croire. Mais Stella et moi sommes réellement différentes. Nous donner une autre chance. Jen’y croyais plus, je ne sais même pas si j’ai un cru un jour qu’elle me laisserait une deuxième chance. Mon regard s’embue sous l’émotion. « Je pensais pas mériter une deuxième chance, mais si tu me la laisses, je te promets de tout faire pour ne pas gâcher une deuxième fois ce que nous avons… » A moi de venir caresser sa joue tendrement, m’approchant d’elle doucement, ma main libre se glisse à sa taille et j’approche mon visage du sien, murmurant tout près de ses lèvres. « J’ai très envie de t’embrasser… » Mais pas seulement. J’ai aussi envie de l’appeler par tous ces petits noms d’amour que j’avais l’habitude d’employer quand je lui parlais, ou quand je parlais d’elle…

Notre histoire s'est terminée en eau de boudin. Nous avons toutes les deux perdues beaucoup dans l'histoire et nous regrettons sincèrement ce qui s'est passé. Loan se sent coupable, mais je ne peux la laisser prendre toute la responsabilité dans cette affaire. J'aurais pu faire quelque chose plus tôt pour sauver notre couple, j'aurais du faire quelque chose. Je ne sais pas quoi en fait... J'aurais du me donner davantage, j'aurais du lui dire ce qui n'allais pas et lui parler franchement plutôt que de laisser la situation s'embourber. Nous nous sommes laissées entraîner dans notre train-train quotidien et je n'ai rien vu venir. Je me suis retrouvée un matin avec les papiers du divorce sur la table sans plus pouvoir faire marche arrière. Le cœur en miettes et les enfants dévastées, j'ai du reconstruire ma vie et mon quotidien avec Casey durant ces deux années passées. Lorsque je lui ai dit que je n'avais eu personne d'autre depuis son départ, je n'ai pas menti. Je suis sortie, j'ai fait des rencontres bien sûr. Mais je n'ai jamais pu passer le cap du simple baiser rapidement échangé. Lorsque je regarde une autre femme, je ne vois que Loan. Je ne vois que Loan pour partager mes draps, mes nuits, ma vie...

J'initie le premier rapprochement, je pose ma main un peu fraiche sur sa joue et je souris en pensant qu'elle sentira cette fraîcheur à on contact. Froideur qui contraste tellement avec mon cœur qui bat à mille à l'heure et qui pulse dans ma poitrine. Parce que j'ai chaud en fait. Très chaud. Si cela ne tenait qu'à moi je me mettrais en soutif là de suite. Mais je sais me tenir lorsque j'ai de la compagnie. Et même si Loan est de la famille, notre histoire si compliquée ne m'encourage pas à autant de familiarité. Et alors que je pense à ça, je vois qu'elle me rends mon geste à son tour. La blonde vient me caresser à son tour et son incroyable douceur met le feu à mon bat ventre. C'est tout à coup comme si une boule de feu s'était embrasée spontanément. « J'ai toujours voulu nous donner une seconde chance Loan... Dis-je dans un souffle. Et ne penses pas à gâcher quoi que ce soit... Il n'y a rien à gâcher si on ne se laisse pas le temps de reconstruire quelque chose. » Je lui souris. Mes yeux fixent les siens et comprends avant même qu'elle ne le dise. L'intensité si caractéristique que je sais lire en elle s'exprime à ce moment. Mon sourire s'agrandit alors qu'elle dit tout haut ce que j'ai lu tout bas. « Et alors... Si tu en as très envie Loan... Vas-tu simplement rester là à me le dire ou tu vas faire quelque chose à ce propos? » J'ajoute un clin d’œil entendu à mes propos volontairement aguicheur. Qu'elle m'embrasse. Qu'elle vienne chercher au creux de mes lèvres cet amour perdu que je souhaite tellement retrouver. Embrasse-moi Loan...

Je suis honnête avec elle, je ne pensais pas qu’elle me laisserait une seconde chance. J’ai cru que je lui avais fait trop de mal, qu’on s’était fait trop de mal pour imaginer pouvoir recoller quelques morceaux. Notre famille est ce que j’ai de plus cher, je m’en suis rendu compte bien trop tard. Il est temps de tout mettre en oeuvre pour changer notre présent, notre futur. Ellen m’a brieffée, elle a été mon coach pour la mission ‘reconquérir Stella’. Ma meilleure amie sait ô combien j’aime cette femme, et ça n’a jamais cessé d’être le cas, même dans les bras de toutes ces femmes que j’ai connues entre notre séparation et aujourd’hui. J’ai bêtement cru que je pourrai penser à autre chose qu’à elle, m’épanouir dans les bras d’une autre femme. Mais je me suis fourvoyée. Il n’y a jamais eu qu’elle. Dans un océan de femmes toutes plus belles les unes que les autres, je n’aurai aucun mal à retrouvé celle qui a fait battre mon coeur d’une toute nouvelle façon, il y a de ça plus de vingt ans. « J'ai toujours voulu nous donner une seconde chance Loan… Et ne penses pas à gâcher quoi que ce soit... Il n'y a rien à gâcher si on ne se laisse pas le temps de reconstruire quelque chose. » Je ne sais pas comment je dois prendre ça. Evidemment que si nous ne construisons rien à nouveau, il n’y aura rien à gâcher. A-t-elle vraiment envie de reconstruire quelque chose avec moi ? Panser les blessures du passé pour reprendre là où on s’est arrêtées ? Je ne veux plus me retenir de lui dire de que je ressens, qu’ils s’agisse de mes peines ou de mes envies, comme maintenant, celle de trouver à nouveau ses lèvres. « Et alors... Si tu en as très envie Loan... Vas-tu simplement rester là à me le dire ou tu vas faire quelque chose à ce propos? » Je prends ça pour une approbation, j’imagine que si elle n’avait pas voulu que je l’embrasse, elle me l’aurait dit. Alors je ne réfléchis plus et m’approche d’elle, scellant mes lèvres aux siennes. Un baiser, un simple baiser, lèvres contre lèvres, immobiles pendant quelques secondes que je voudrais interminables. J’y mets fin en laissant échapper un soupire qui traduit l’émotion forte que je sui sen train de ressentir. Collant mon front contre le sien, les yeux clos, je viens chatouiller son nez du mien, nos souffles se mêlant avec douceur et envie. J’ai encore envie de l’embrasser, évidemment. Alors je repense à ses paroles, à celles d’Ellen. Pourquoi attendre lorsqu’on peut faire quelque chose, maintenant. Sans plus attendre, je viens à nouveau chercher les lèvres de la brune. Mais cette fois, le baiser se fait plus appuyé, plus intense, plus intime. Après une légère hésitation, je viens glisser ma langue entre nos lèvres pour caresser les siennes, à la recherche de sa langue. Mon coeur est à deux doigts d’imploser, j’ai l’impression de revenir à notre première fois, ce jour où je l’ai rencontrée, embrassée jusqu’à perdre mon souffle…

Mon cœur bat à tout rompre dans ma poitrine. Je crois qu'il n'a jamais battu aussi fort que pour cette femme. Et il n'a certainement pas battu comme ça depuis un moment. Si je réfléchis bien, je retrouve les sensations du début de notre histoire. Mais après tout, n'est-ce pas de circonstance? Hm? Une flamme qui retrouve sa force d’antan. Un feu presque éteint qui retrouve sa vigueur passée. Vous voyez où je veux en venir avec ces métaphores?

J'ai les mains moites et je sers les poings le long de mon flanc quand Loan vient déposer ses lèvres sur les miennes. Comme si un courant électrique me traversait je me tends de ta ma hauteur et j'en ai même les cheveux qui se hérissent sur le tête. Les petits poils de ma nuque se dressent eux aussi lorsque c'est la langue de la blonde que je sens venir forcer son entrée dans ma bouche. C'est une danse charnelle et intense qui s'organise sans trop y penser. Je réponds à ses attentes parce que je sais que c'est ce que je veux moi aussi. Beaucoup trop attirée par Loan pour mon propre bien, la petite pause qu'elle a fait il y a quelques secondes m'a laissé le temps pour me décider : je la veux. Oui je la désire. Mais pas juste pour une nuit, pas seulement pour une minute de plaisir, non. Je la veux à nouveau dans ma vie, je veux qu'elle me revienne et qu'elle oublie nos différents. Ce qu'en diront les gens m'importe peu, ils ne pourraient pas comprendre. Elle et moi, c'est spécial. Je me le suis toujours dit d'ailleurs. Au milieu de ce baiser, je souris et je sens mes dents entrer en contact avec les siennes. J'expire avec un petit râle de plaisir et je croque tendrement sa lèvre inférieure avant de m'écarter de son corps. Oui, je dois jouer un petit peu quand même. Je ne vais pas me laisser faire aussi facilement. Loan doit chercher à m'avoir si elle me veut vraiment et je ne vais pas lui rendre la tâche aisée.
Je me recule jusqu'au plan de travail, mes yeux ne quittent pas son regard azuré. Je lui dis dans un souffle sensuel : « Attrapes moi Loan... » Et je ris. Oui je ris presque comme une enfant. Je fais volt-face alors et m'enfuis jusque dans le salon pour me placer derrière un fauteuil que je prends comme couverture. Mes cheveux rabattus sur mon épaule droite, je penche la tête du même côté et la regarde venir vers avec un air mutin, ma lèvre inférieur pincée entre mes dents. « Viens à moi mon amour... ».

Je me lance, m’approche de me saisis de ses lèvres comme j’en ai deviné l’envie dans son regard. Enfin. Enfin je retrouve le goût divin de ses baisers, et le soupir que je laisse s’échapper est la preuve que l’attente a été longue, et que la récompense en vaut la chandelle. Après une courte hésitation, je décide de mettre davantage d’entrain à cet échange, davantage de désir, de plaisir, d’échange charnel. Mon coeur bat à tout rompre dans ma poitrine, presque comme le jour où je l’ai rencontrée, et embrassée pour la première fois. Ce jour me semble à la fois si proche, et si loin. Mes mains enserrent son corps fin et gracile pour l’approcher de moi un peu plus, comme par peur qu’elle s’envole, qu’elle s’éloigne à nouveau sans que je ne puisse jamais la rattraper. Les dents de mon ex-femme se referment sur ma lèvre inférieure me laissant une légère douleur agréable, avant qu’elle ne s’éloigne. C’est cette douleur qui est plus difficile à supporter. Son éloignement, son absence. Mon souffle est plus court, mon regard ne la quitte plus, j’attends de savoir ce qu’elle veut de moi, ce qu’elle attend de moi. « Attrapes moi Loan... » Mon regard s’emplit d’une émotion nouvelle, d’une malice presque oubliée, et je la regarde partir en courant, en riant. Un sourire étire mes lèvres, prenant la moitié de mon visage. Je prends alors appui sur mes pieds pour la rejoindre dans le salon où elle s’arme de fauteuil comme bouclier. « Et si je t’attrape ? » Je marche doucement vers elle, féline, les yeux pétillants de malice. Sa manière de mordiller sa lèvre inférieure me fait chavirer « Viens à moi mon amour... ». Je frissonne à l’entente de ces quelques mots qui font battre mon coeur plus vite encore. Peut-elle lire dans mon regard à quel point je suis folle d’elle. Je profite d’un moment de latence pour repartir sur les chapeaux de roues et lui courir après comme demandé. Je contourne les obstacles, enjambe les objets, passe même par dessus le canapé, toujours en riant, retrouvant notre jeunesse. Et voyant que la brune est douée pour m’échapper, je me risque à jouer la comédie pour l’attirer dans mes filets, comme le jour de notre rencontre où je lui ai faussement renversé un verre dessus pour l’accompagner dans la salle de bain. Ce soir, je fais semblant de me cogner le pied dans la table basse et me laisse tomber sur le canapé en feignant une grimace de douleur. Sans tarder, Stella approche visiblement inquiète et j’en profite pour la faire basculer sur le canapé en souriant largement. « Je t’ai eue. Pas à la loyale, mais le résultat est le même ! » Et mes lèvres retrouvent les siennes avec un plaisir inespéré.