“Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.” Ft Anastase

 :: A little break :: archives :: rps abandonnés
Aller à la page : 1, 2  Suivant
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
“Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.” Ft Anastase
Mer 19 Aoû - 20:31


Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] & Vinnie Woodford
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]

20h. Allongé sur le dos, sur son lit, en caleçon, Vinnie souriait. Les écouteurs vissés dans les oreilles, les bras derrière la tête et surtout, le téléphone posé sur son torse, l’écran contre sa peau. Son père aurait fait exploser la serrure de sa chambre à coup de fusil automatique avant de venir vider le reste du chargeur dans la tête de son fils s’il n’avait entendu ne serait-ce que les premières notes des musiques qu’il écoutait. Du rap. Des rappeurs racisés qui chantaient sur le racisme, leur fierté d’appartenir à une communauté, Vinnie ne ressentait plus de haine à leur égard depuis bien longtemps. A vrai dire, il n’avait jamais réellement ressenti de haine envers qui que ce soit à part son père et très nouvellement son ex et ceux qui avaient choisi son camp qu’il avait jadis appelés « amis ». Il avait changé.


Il fut un temps, plus récent qu’il ne l’aurait aimé où il sentait l’empreinte du masque sur son visage, les gants à ses mains pour ne surtout pas laisser de trace, le contact froid même à travers le tissu du métal du revolver sur ses doigts, ses cordes vocales qui s’usaient à force de menacer, d’hurler, d’insulter, et tout ça pour faire peur et récolter quelques billets qui allaient lui permettre de passer le mois, payer le loyer et d’acheter de quoi manger. D’autres billets verts contre un sachet de poudre, quelques cachets, de l’herbe pour ne plus craindre l’expulsion. Son propriétaire ne se doutait de rien. Ou alors savait tout, en y réfléchissant bien, Vinnie avait vraiment le physique de l’emploi.
Toujours habillé de la même manière, héritage des skinheads anglais qu’il avait ramené jusqu’aux USA, attaché à ses Dr Martens, ses slims usés aux genoux, ses polos et ses bretelles. Quant à son crâne rasé il avait choisi de le garder par pure praticité, et aussi parce qu’à l’époque, Nina adorait.


S’il n’avait pas abandonné les symboles, il avait fini par se rendre compte que cette vie n’était pas faite pour lui. Qu’il ne voulait plus être comme ça. Et il avait fait l’erreur d’en parler à Nina. Nina, jeune fille aussi abîmée par la vie que lui, Nina de qui venait la solution magique à leurs problèmes d’argent. « Le problème, c’est les immigrés. La solution, c’est de prendre de force ce qu’ils nous ont volé. » Avait-elle dit un jour avant d’offrir son premier revolver à Vinnie. Elle avait fait grande impression auprès de ses parents, c’était une femme forte qui ne se laissait pas faire et c’était probablement une des meilleures relations de Vinnie, jusqu’à ce que tout bascule.


Depuis, retour à la case départ. Chez ses parents, à supporter l’haleine alcoolisée de son père, ancien légionnaire à la retraite qui hurlait sur sa mère, la saisissait par le poignet l’avait sans doute frappée plusieurs dizaines de fois et à devoir essuyer les larmes de sa mère à l’abri des regards. Cette situation n’était pas viable. Vivable. Supportable. Mais que faire ? Elle refusait l’aide et il était bien impossible de lui faire entendre raison. Vinnie aurait pu craquer, décrocher un fusil du mur, déterrer le revolver offert par Nina qu’il avait promis de ne plus toucher et lui faire exploser la cervelle. Mais il s’était fait une promesse. Ne plus être violent, arrêter de se battre, s’améliorer. Nina était persuadée qu’il ne pouvait pas tenir, qu’il était fait pour ressentir l’adrénaline, le danger, qu’il ne trouverait son salut que dans la souffrance qu’il infligerait aux autres et surtout, qu’ils étaient faits pour être ensembles. Deux âmes détruites. Il voulait lui donner tort. Lui prouver qu’il n’était pas que ça. Qu’il allait devenir la meilleure version de lui possible et tuer son père était un pas dans la mauvaise direction.


Et il avait commencé par avancer seul, se cachant pour écrire, passant des journées entières à la bibliothèque Universitaire à étudier les langues, n’osant parfois même pas ôter ses blousons de cuir, par peur que s’il se dévoilait ne serait-ce qu’un peu, on allait le reconnaître, le chasser, se moquer. Il avait bien été obligé d’ôter son bonnet et révéler son crâne rasé en entrant dans le bâtiment, mais c’était la seule concession qu’il était prêt à faire. Son talon bien maintenu dans sa Dr Martens montante qui avait foulé les pavés humides des ruelles sombres de Los Angeles, poursuivant quelqu’un ou en étant poursuivi par quelqu’un tapait nerveusement au sol. C’en était presque ironique de le retrouver là. Aussi angoissé de surcroit. Il ne s’autorisait des pauses que pour fumer, ne parlant à personne et de toute façon, vu son look et son attitude il se doutait bien qu’il n’allait pas finir par être populaire.


Et puis elle était apparue, pas moins méfiante que les autres, beaucoup plus sophistiquée que lui, tout aussi timide et sa vie avait basculé de nouveau.
Si aujourd’hui il tenait l’écran de son téléphone contre sa peau ce n’était pas pour le cacher, mais instinctivement, pour le sentir encore plus près de lui. Sur l’écran de l’appareil, un message. Un rendez-vous, une promenade. Et si un sourire radieux étirait ses lèvres, ses yeux n’exprimaient pas que ça. De la culpabilité. Beaucoup de culpabilité et un peu d’angoisse. Parce qu’elle avait proposé de passer le chercher chez lui et qu’il avait brutalement refusé.
Rattrapant le coup en lui annonçant qu’il allait la rejoindre par chez elle et qu’ils trouveraient sans doute un parc où marcher, il s’en voulait. Terriblement.

Mais s’il avait refusé, ce n’était pas bien entendu sans raisons. Il habitait une cité, un endroit bien oublié du gouvernement et de l’Etat qui fermaient les yeux sur les centaines et les centaines d’agressions qui rythmaient les journées. Surtout des femmes, surtout du harcèlement de rue. Vinnie en était exempté. On n’avait jamais tenté de lui voler quoique ce soit. Auparavant parce que trainer avec des suprémacistes blancs lui avait au moins apporté cet avantage et maintenant parce que même seul, il n’était pas une proie facile et n’inspirait pas la sympathie. Alors on le laissait tranquille. Mais il ne voulait pas qu’Ana prenne des risques, surtout pas pour lui.


Alors il avait fini par se lever et avait lentement ôté ses écouteurs. Faisant taire la musique qui, en plus de lui donner une occasion d’écouter ce qu’il aimait, lui donnait aussi un alibi. Avec le volume à fond, il n’entendait rien de ce qu’il se passait au rez-de chaussée. Le gouvernement avait été à peine assez reconnaissant envers son père pour leur permettre d’habiter dans un appartement avec une mezzanine. Une pièce, la chambre de Vinnie et une salle de bain minuscule que la moisissure dans les murs menaçait de faire s’effondrer à tout moment. Quand il était à l’étage, il s’y sentait presque en sécurité. Son père montait parfois pour le menacer ou l’insulter, mais au moins il avait le temps de l’entendre arriver.

Dès qu’il ôta ses écouteurs, les éclats de voix de son père couvrant le son de la télé lui agressèrent les tympans. Sa mère avait dû avoir le malheur de passer devant l’écran pour faire le ménage, elle n’allait pas arrêter d’en entendre parler pendant au moins deux mois, avant qu’il ne trouve autre chose à lui reprocher. Mais tout ça était devenu beaucoup trop normal pour qu’il fasse autre chose que de soupirer, attrapant un slim noir dans son armoire pour l’enfiler, fourrant son téléphone et ses écouteurs roulés en boule dedans. Il attrapa son portefeuille, trop léger pour être réellement important et un polo Fred Perry noir aux liserés champagne orné du logo si reconnaissable de la marque qu’il rentra dans son jean et par-dessus duquel il passa ses bretelles. S’habiller était devenu une routine à laquelle il ne pensait presque plus. Pourtant, il savait qu’on le regardait de travers dans la rue, ancien skinhead ou skinhead repenti, il ne passait pas inaperçu.
Un blouson Harrington noir doublé de tweed rouge et sa paire de Dr Martens Jadon Hi qui clairement avait vécu des jours meilleurs et il ouvrit la porte de sa chambre, abandonnant immédiatement son sourire quand il se rendit compte qu’il n’allait pas pouvoir couper à une petite entrevue avec son père.

Arrivant en bas des marches, ce fut sa mère qui l’accueilli, le complimentant sur son apparence, son parfum, les bagues qu’il avait pensé rajouter à ses doigts, elle pensa même à lui conseiller de sortir vite. Il lui sourit et se retourna. Pour tomber nez-à-nez avec son père.


« Putain tu ressembles à ce que j’allais m’apprêter à lâcher dans les toilettes. »


Il leva les yeux au ciel et haussa les épaules, le contournant pour finalement sortir. Une fois que la porte fut fermée derrière lui, il s’autorisa enfin à respirer, sortant de nouveau ses écouteurs pour les visser à ses oreilles. Il avait entendu assez de merde pour la journée et il tenait à ce que la prochaine personne à s’adresser à lui soit Ana.


Il arriva à Willowbrook avec un peu de retard, travaillant sur sa ponctualité, l’esprit encore préoccupé par son contexte familial et aussi par le fait qu’il avait laissé sa mère seule avec son père mais quand il aperçut Ana au loin, tous ses problèmes semblèrent s’envoler, il se redressa, plus léger, plus souriant et rangea ses écouteurs et son téléphone.


« Je t’ai pas fait trop attendre ? »



La dernière personne à qui il avait souri de la sorte (voire souri tout court) était sans doute Nina. Et si ce fait même était lourd de sens, il n’y pensait même pas ou ne s’en rendait même pas compte. A ce moment précis, dans sa tête, il n’y avait qu’elle.

Codage par Jibunnie sur [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
“Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.” Ft Anastase
Mar 15 Sep - 17:54
20h. Bien qu'inconscient de ce que Vinnie était en train de faire, Aze ne pouvait s'empêcher de songer à lui alors qu'il lisait un de ces ouvrages qu'il fallait absolument poser sur une surface solide, sous peine de finir avec les genoux en confiture ou une tendinite aux poignets. Sa lecture n'était guère efficace, et il devait souvent reprendre au paragraphe précédent pour se replonger dans le contenu alors que son esprit vagabondait bien loin de ce précieux livre qui exposait pourtant l'histoire des femmes à travers les siècles. Un sujet sur lequel autrefois il aurait passé sa journée et sa nuit sans même s'en rendre compte. Mais ce temps était fini, et la jeune personne découvrait ce qu'était avoir autre chose en tête que ses études.

Bien entendu il avait déjà connu les distractions, notamment car il vivait avec sa sœur Celeste – bien que celle-ci soit en vadrouille depuis plusieurs semaines déjà – et puis il avait rencontré Seamus. Artiste talentueux qu'il avait longuement admiré à distance, et que le hasard avait projeté dans sa vie. Oui, maintenant il pouvait le considérer comme un ami. Un ami proche, peut-être trop parfois. Mais Aze tout comme Ana ne songeait pas aux choses que les gens de son âge expérimentent depuis des années. Avant de rencontrer Seamus, il vivait absorbé par ses études et son rôle de chargé de cours, dans l'espoir d'être ensuite retenu comme enseignant à plein temps. Il pourrait ainsi rapporter plus d'argent à la maison, bien que la charge de travail n'en serait pas amoindrie. Dorénavant il s'accordait quelques soirées de repos en compagnie de Seamus, et il devait avouer – bien que silencieusement – que cela améliorait radicalement son quotidien. Ne vous y trompez pas, il était toujours passionné par tout ce qui touchait à l'Université. Mais ne pensez-vous pas que tout le monde mérite quelques distractions ?

Là où Vinnie vivait dans un climat de violence, Aze pouvait profiter la plupart du temps d'un environnement calme et serein, bien qu'il ait souvent le ventre serré de peur de ne pas être à la hauteur de ses projets professionnels. Cependant il gardait cela pour lui, ne désirant pas se plaindre. Cela ne faisait pas partie de son caractère, il était d'un naturel doux mais très protecteur et secret lorsqu'il s'agissait de ses sentiments. Même sa sœur lui tirait difficilement une réponse, malgré son insistance et quelques flatteries. Depuis la mort de leur mère, Anastase avait enterré et clôturé son cœur et son âme. Il faut dire qu'à l'époque de la maladie dégénérative de sa maman, il n'avait pas été présent, se concentrant pour ramener de quoi manger et payer le loyer. Peut-être avait-il usé de ce prétexte par peur. Il n'en savait rien. Tout ce dont il se souvient après les cinq années marquant le décès de sa mère, ce sont les reproches de sa sœur auxquels il n'avait répondu que par un silence résolu. Puis ce corps inanimé. Il n'avait pas pleuré, par même lors de l'enterrement. Au lieu de cela il était retourné dès le lendemain à l'Université et avait prétexté un rendez-vous médical pour justifier son absence. Nul ne savait. A quoi cela aurait-il servi ? Il ne souhaitait pas la pitié de ses étudiants, et ses collègues titulaires ignoraient avec force conviction son existence.

Cinq années. Cinq années à rejeter en bloc tout ce qui pouvait le distraite de ses projets. Les réconciliations avec sa sœur étaient passées sans que cela ne l'ébranle. A peine s'était-il senti soulagé. Dès leur discussion achevée, il était retourné se plonger dans le travail, buvant plusieurs cafetières par jour pour se maintenir au rythme effréné qu'il s'imposait. Un jour, il allait craquer. Consciemment, il le savait. Cependant chaque semaine il se battait pour repousser ce moment fatidique. Il ne quittait sa chambre que pour faire un passage éclair dans la cuisine et la salle de bain. Ses seules sorties à l'extérieur de la vieille maison étaient dédiées à l'Université, où il s'appliquait à gérer son alternance entre Ana et Aze, en plus du reste. Parfois, lorsque Celeste n'avait pas eu le temps de le faire, il faisait un détour en rentrant pour se rendre à l'épicerie la plus proche. Puis une fois les commissions terminées, il retournait dans sa piaule, dont la porte demeurait alors close pendant des heures durant. Nul ne pouvait prévoir lorsqu'il verrait la pointe de ses cheveux. Seamus avait d'abord été un élément perturbateur, mais il avait cédé à la tentation d'avoir enfin un ami. Bien évidemment ils se voyaient peu, ou alors le musicien le voyait en coup de vent puis Anastase le laissait profiter du canapé pour retourner à son bureau.

Un second événement imprévu créa une seconde source de distraction. Alors qu'il étudiait à la bibliothèque universitaire, il était apparu. Crâne rasé, vêtu d'une manière qui effraya Anastase au premier abord. Puis ils s'étaient recroisés, toujours au même endroit. Progressivement, la peur s’amoindrit, en même temps que la distance entre leurs espaces de travail. Cela fut laborieux mais ils finirent par échanger leurs prénoms. Puis lorsque l'un des deux se levait – signifiant qu'il avait terminé sa session d'étude – l'autre suivait. Parfois Ana allait rejoindre ses cours ou sa classe, parfois ils se retrouvaient à descendre les escaliers ensemble. En silence, puis en échangeant quelques banalités. Jusqu'au jour où le monde bascula. Le jour où ils se furent assez côtoyés pour échanger leurs numéros de téléphone.

C'est ainsi qu'il se retrouvait aujourd'hui incapable de se concentrer sur son précieux livre. Il ne cessait de vérifier son portable, après avoir envoyé une invitation cordiale à se rencontrer en dehors des cours, comme ils l'avaient fait quelques fois auparavant. L'homme aux allures de loubard l'avait même raccompagné chez lui une fois, alors qu'il faisait nuit. Il ne l'avait pas fait monter, ne souhaitant pas dévoiler son intimité. Songeant à ce cheminement, il fut refroidit lorsqu'il reçut une première réponse sèche. Sa gorge se serra. Puis vint le second SMS quelques minutes plus tard, qui lui arracha un sourire, bien qu'il ne comprenne pas le retournement de situation. Il enfila un jean tartans assez moulant, son binder puis une chemise noire qu'il laissa dépasser de son pantalon. Vint ensuite la question des cheveux. Il trancha rapidement pour choisir l'option habituelle : un chignon bas caché sous un bonnet noir qui ne laissait s'échapper que quelques mèches folles. Un léger coup d'eyeliner pour masculiniser son regard, une paire de vieilles rangers trouvées dans un carton et voilà. Ne restait maintenant plus qu'à attendre le prochain SMS. Et peut-être le laisserait-il passer le seuil de sa porte cette fois-ci. Perdu dans ses pensées, il ne songea à aucun moment que Vinnie ne l'avait jamais vu vêtu autrement que comme Ana. Tailleur, chignon strict et petits escarpins.
Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
“Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.” Ft Anastase
Mar 15 Sep - 18:54


Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] & Vinnie Woodford
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]

Anastase et lui étaient très différents. Ils ne venaient pas du même monde, ils n’avaient pas la même histoire et le fait qu’ils se soient entendus aussi bien malgré quelques premiers contacts assez froids relevait plus du miracle que de l’heureuse coïncidence. Vinnie n’avait pas la prétention de penser que si les premiers mots étaient sortis assez hachés de la bouche de la jeune fille c’était parce qu’il était impressionnant. Non. C’était parce qu’il faisait peur. On ne voyait que très peu de Skinheads au 21ème siècle, ou alors dans les bars dédiés, dans les espaces où ils se réunissaient pour maudire toutes personnes qui ne leur ressemblait pas où ne partageait pas les mêmes convictions, ils n’étaient que haine. Haine et violence. Alors, voir Vinnie déambuler dans les couloirs de la bibliothèque universitaire, écouteurs vissés dans les oreilles, donnait une impression étrange. Souvent, on se sentait mal à l’aise près de lui, comme si quelque chose n’était pas à sa place. Quelque chose ou quelqu’un. Lui qu’on pensait trainer plutôt dans les champs ou devant la maison de personnes racisées pour y hurler des slogans racistes et y enflammer des croix, était tellement plongé dans ses livres qu’il en oubliait l’heure qui passait.

Et pourtant. Pourtant il y avait été, dans ces champs à apprendre à tenir une arme dont on avait lavé le numéro à l’acide pour que personne ne puisse la tracer, il avait participé à des manifestations, il avait hurlé ces slogans racistes qui clamaient la puissance et la supériorité de la race aryenne, il avait scandé « White Power » comme un possédé, et il en avait tellement honte qu’il avait très vite décidé de ne parler à personne à l’Université. Baissant les yeux quand quelqu’un passait près de lui. Il y avait sa honte et sa fierté aussi. Vinnie était conscient d’être une ordure. Il n’avait pas oublié le sang qu’il avait sur les mains. Et son égo avait été violemment atteint quand son ex petite-copine, Nina, l’avait jeté hors de leur appartement en pleine nuit avec un petit sac à dos rempli de vêtements qu’il avait à peine eut le temps de ramasser, elle qui menaçait d’appeler le reste de la bande pour le faire sortir de force, certainement les pieds d’abord. Vinnie restait un homme à qui on avait répété toute sa vie qu’il était supérieur, parce qu’il avait un pénis et que la nature était faite comme ça. Mais au fond, ce n’était pas un mauvais gars à vrai dire. Il avait comme réelle ambition de s’améliorer, de s’éduquer, de comprendre ce qu’il avait haï par peur ou négligence. Et plus il en apprenait sur le monde, sortant enfin la tête de ses bars miteux où il se soulait à la mauvaise bière allemande et aux cigarettes, plus il prenait conscience à quel point il ne méritait pas de seconde chance. Tout le monde devait mourir un jour et Vinnie savait que lorsque son tour allait arriver, sa mort n’allait sans doute pas être des plus douces. Parce qu’il ne méritait pas ce privilège. Au fond d’ailleurs, était-il réellement capable de s’améliorer ? Les mauvaises graines ne germaient jamais et finissaient par pourrir.


Et puis, faisant le calme et ramenant le soleil dans sa tête pleine de nuages et d’orages, Ana avait fait son apparition. D’abord quelques regards, timides, curieux, pas charmeur, Vinnie n’étant absolument pas prêt pour s’attacher, ils avaient fini par parler. Tout d’abord de sujets qui étaient d’habitude capable de le tuer d’ennui comme la météo, le temps qui passait etc et qui pourtant, tendait à le passionner lorsque c’était elle qui en parlait. Mais les sujets restaient ennuyeux, ce qui changeait, c’était elle. Depuis, il avait l’impression de vivre une double vie. Continuer à la fréquenter tout en tentant de lui cacher à quel point il était un monstre, à quel point il avait été une ordure et il savait bien que la vérité finissait toujours par éclater mais il appréciait tellement cette sensation de calme et de paix intérieure quand il était avec elle qu’il ne tenait pas à ce que tout ça ne prenne fin. Alors il repoussait, encore et encore, le moment où il n’allait plus être capable de se cacher. Le moment où son ancienne bande de camarades qui avaient forgé l’homme qu’il avait été et dont l’image duquel il s’affairait tous les jours à détruire allait débarquer à l’Université, probablement armés et allait tirer sur tous les étudiants racisés sur leur chemin pour finalement trouver Vinnie et le tuer lui aussi, le tuer, ou pire. Parce que pour eux, Vinnie était pire qu’une personne racisée. C’était un traître. Il avait trahi la cause, il avait trahi Nina, il ne méritait même pas la mort. Mais il repoussait ce moment fatidique où il n’allait plus être capable de se cacher derrière un sourire et s’approcha d’Anastase pour la saluer d’un grand sourire. Il la trouvait changer, plus masculine, moins apprêtée, mais étrangement, son regard sur elle ne changea pas d’un poil. Vinnie n’avait jamais réellement fait attention aux apparences. Au fond, il se foutait bien de si sa copine était épilée, maquillée, maigre, de la taille de sa poitrine, sa taille, ses fesses. Il s’en fichait. Malgré les blagues graveleuses que lui et ses anciens amis avaient l’habitude de hurler en pleine rue à 4h du matin sans que personne, pas même les flics, n’aie assez de courage pour venir les arrêter, malgré le fait que s’il était venu parlé à Nina la toute première fois c’était parce qu’Alexandre l’avait poussé dans sa direction en lui chuchotant « regarde la, elle est super bonne non ? » et qu’il avait hoché la tête. Il tombait amoureux d’un regard, d’un geste, d’une attention. Et s’il était amoureux, il aurait été sans doute le dernier à s’en rendre compte. Parce que son esprit était encore trop occupé à broyer du noir pour s’intéresser à ce genre de choses.


Se rendant compte qu’il n’avait rien dit depuis plusieurs secondes, il se gratta l’arrière du crâne d’un air gêné et finit par souffler


« Tu… Je te trouves… Changée ! »



Changée. De tous les adjectifs du monde, c’était le seul qui lui était venu et s’il avait trouvé une machine à remonter dans le temps, il l’aurait sans doute utilisée pour venir s’empêcher de dire une connerie pareille, bien avant de s’empêcher de faire toutes les autres conneries de son passé. Conscient qu’elle pouvait mal le prendre, il se corrigea d’un air à la fois gêné et admiratif


« Ca te va super bien ! Enfin, les couleurs sombres et le rouge… Enfin, t’es super belle quoi… »


Deuxième gifle qu’il méritait. Et certainement pas la dernière de la soirée.

Codage par Jibunnie sur [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
“Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.” Ft Anastase
Mar 15 Sep - 19:36
Innocent et innocence, Anastase n'était pourtant pas si candide. Il se doutait bien que Vinnie n'était pas né avec cet accoutrement. C'est ce qui le rendit méfiant au départ. Bien que blanc de peau, voire même translucide (jeu de mot pourri pardon) il était particulièrement au courant du climat haineux et raciste des Etats-Unis. Et pour cause, sa sœur. Demie-sœur, à vrai dire. Qui était loin d'être blanche, mais clairement racisée. Combien de fois Anastase avait-il eut envie d'intervenir lorsque l'on emmerdait Celeste sur sa couleur de peau ? Probablement plus d'une centaine. Mais la seule famille qui lui restait s'était toujours très bien débrouillée toute seule. Il faut dire qu'elle n'avait pas le petit gabarit d'Aze. Elle le surplombait d'une bonne dizaine de centimètres, si ce n'est plus. Et elle avait du caractère et de la répartie. Tout cela elle le tenait de leur mère, qui lui avait appris très tôt combien sa seule couleur de peau ferait d'elle une personne dangereuse ou méprisable pour certains. Une vie à éliminer pour les plus radicaux. Et des skinheads, il en restait. Personne n'en parlait à voix haute, mais à Willowbrook cela se chuchotait entre deux ruelles. Parfois un habitant disparaissait subitement et ne revenait jamais. Des bougies étaient alors déposées sur un muret couvert de tags. Anastase passait devant cet endroit tous les jours pour aller prendre le bus, et priait pour ne jamais à avoir à déposer un cierge pour Celeste.

Toute cette histoire familiale et sociale l'avait conforté dans sa décision d'étudier la sociologie en espérant donner un nouveau souffle et une nouvelle idée de l'Humanité à ses étudiants. Depuis il ne cessait pas, parlant autant de la place des femmes que des personnes racisées, faisant souvent des parallèles ou des associations. Il lui suffisait de s'inspirer de la une des journaux, ou de quelques minutes à écouter la radio pour se rendre compte de la haine raciale dans sa ville, et tout autour. Il avait jugé sévèrement Vinnie dès le départ, et pourtant il ne put s'empêcher d'être songeur. Que faisait-il à l'Université, où il croisait tous les jours des étudiants de tous horizons ? Était-il en recherche de victimes, ou bien était-ce une sorte de rédemption ?

Il l'observa beaucoup à la dérobée, et constata avec un certain soulagement que le jeune homme au crâne rasé semblait se foutre complètement de celles et ceux qui l'entouraient, trop occupé à lire. C'est ainsi qu'il se rapprocha petit à petit de lui, avec tout d'abord l'intention de vérifier ses lectures. Ne trouvant rien à reprocher de ce côté là, il se laissa entraîner dans un ballet que chacun menait en alternance avec un naturel rare. C'est ainsi que les numéros et les SMS commencèrent. Les conversations demeuraient de surface mais il espérait bien en apprendre plus sur lui pour se fixer un avis définitif. Evidemment, Vinnie était secret mais il ne pouvait pas le lui reprocher puisqu'il agissait de même.

La route avait été longue pour qu'Anastase arrive à lui proposer en quelques mots de se rencontrer. Mais finalement c'était fait et l'affaire était conclue pour qu'ils se retrouvent en bas de chez lui. Et là il réalisa l'immense gaffe qu'il venait de faire. Lui qui était d'habitude si attentif à ses changements d'identité avait agit comme un sombre crétin. Pourquoi donc n'avait-il pas songé à ce qui était loin d'être un détail ? Qu'avait-il en tête ?

La réponse était simple : Vinnie. Vinnie qui semblait avoir envahi son cerveau. Jamais il n'avait prêté autant d'attention à son portable. Celui-ci était généralement perdu loin de son bureau pour qu'il n'ait pas de distraction durant son temps de travail. Actuellement il l'accompagnait partout et était vérifié environ toutes les dix minutes. Même avant de rejoindre son lit, il jetait un dernier regard à l'écran.

Il ne fut pas très étonné qu'il "la" trouve changé"e" et se mit à tordre ses mains dans toutes les positions imaginables, sentant qu'il allait devoir faire un choix crucial. Mentir et risquer d'être découvert un jour ou l'autre. Dire la vérité et prendre le risque d'avoir affaire à un skinhead qui aurait bien caché son jeu et en profiterait pour lui péter le nez, les dents et probablement le laisser agoniser devant sa porte. C'est l'esprit embrumé qu'il entendit la seconde phrase. Un compliment. Il la trouvait belle. Même habillé ainsi. Même habillé tel un garçon. Peut-être qu'il pouvait lui faire confiance ? Mentalement il se reprit et calcula de son mieux le pourcentage de chance qu'il avait de conserver son visage en état. Approximativement 50/50. Bon. Il ne croyait pas au karma, ni vraiment au destin. Mais il était convaincu au plus profond de lui - et l'enseignait avec force à ses élèves - qu'une vérité valait toujours mieux qu'un mensonge, même par omission. Il arrêta ses tics nerveux. Se redressa autant qu'il lui était possible. Plongea son regard dans celui qui l'obsédait pour une obscure raison. Et il se lança.

- Merci Vinnie ! Par contre, je préférerais que tu me dises que je suis beau.

La bombe était larguée, et il se tendit. Prêt à reculer. Prêt à encaisser. Prêt à tout, même à recevoir de plein fouet son mépris ou son poing. Pourtant il ajouta d'une petite voix une blague un peu idiote, essayant de justifier ce qu'il n'était pas possible d'expliquer en si peu de mots.

- C'était pas prévu que tu découvres ça... Mais bon, surprise !
Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
“Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.” Ft Anastase
Mar 15 Sep - 20:59


Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] & Vinnie Woodford
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]

Parfois, Vinnie avait l’impression de redécouvrir le monde. D’autant qu’il se souvenait, il l’avait toujours vu par le prisme de sa bande, d’Alex, de Nina, des autres. Un monde souvent menaçant qu’on essayait d’envahir et dont ils s’étaient auto-nommés protecteurs. Un monde qu’on essayait de lui voler, un monde pour lequel il devait se battre. Et, si menaçant qu’il soit, Vinnie avait étrangement adoré cette époque d’insouciance. Bénis soient les ignorants, avant qu’il ne se rende compte des horreurs qu’il avait fait endurer à des centaines de personnes ne serait-ce qu’en manifestant contre leur existence propre, il avait l’impression d’être libre. Il adorait sentir l’ivresse de la vitesse quand ses Dr Martens tapaient le sol de plus en plus vite, que son blouson en cuir se soulevait dans son dos au rythme de sa course effrénée, qu’il renversait les étalages des commerçants sur son passage, dans sa course, qu’il courrait tellement vite et depuis tellement longtemps qu’il ne savait même plus qui le poursuivait ni pourquoi. Parfois la police, parfois quelqu’un qui avait décidé de faire justice lui-même en effaçant ces skinheads de la surface du globe. Il avait adoré rire en se voyant bien plus rapide que ses agresseurs, il avait adoré la sensation d’adrénaline qui était bien tout ce qui lui avait permis de tenir debout, il avait tout adoré.

Il avait adoré ce sentiment de puissance quand il revendait de l’herbe, de la poudre, quand il mentait aux clients en disant qu’ils faisaient une bonne affaire, que c’était la meilleure de la ville, quand des petits malins tentaient de le menacer voire de l’attaquer pour s’emparer du stock et qu’il s’en sortait toujours, parfois avec un passage aux urgences, parfois juste en demandant à Nina de passer une compresse sur ses contusions, désinfecter ses plaies, embrasser sa peau bleutée, parce que ça le soulageait toujours. Il avait adoré, et puis il avait commencé à froncer les sourcils devant les démonstrations de violence gratuite qu’il avait été le premier à utiliser jadis, il avait commencé à se questionner et il avait fini par comprendre. Comprendre qu’il n’avait rien de supérieur parce qu’il était blanc, parce qu’il avait des origines européennes, il se pensait faisant partie des premiers Hommes et en étudiant l’histoire, il s’était bien vite rendu compte qu’il ne pouvait pas avoir plus tort.

Mais le monde était vaste et même s’il s’y était plongé corps et âme, il n’avait pas la prétention d’avoir tout découvert. Alors il se demandait, se renseigner, découvrait ce qu’était le féminisme à 27ans, découvrait que ce n’était pas un complot, ni un Lobby, que les féministes n’étaient pas des hystériques qui voulaient un monde matriarcal. Que le patriarcat était réel et que c’était un fléau. Mais en face d’Aze, il se retrouvait devant un cas qu’il n’avait jamais étudié, quelque chose qu’il ne connaissait pas. Plus encore, quelque chose qui dépassait son entendement. Qu’il ne pouvait même pas concevoir. Lui qui pensait dur comme fer qu’il n’y avait que des hommes et des femmes mais sans se sentir en conflit avec qui que ce soit, juste parce que pour lui, les choses étaient ainsi faites. Qu’à la naissance, on regardait les chromosomes et les attributs sexuels et on déterminait le genre d’une personne de cette manière. Que le genre et le sexe était la même chose et que personne n’avait le pouvoir de contester, que c’était comme ça. Alors, quand Aze le corrigea, il fronça les sourcils et laissa passer une dizaine de secondes de silence, repassant dans sa tête la scène pour être sûr d’en avoir compris tous les éléments. Beau ? Il crut un instant qu’il s’agissait d’une blague et la commissure droite de sa lèvre s’étira d’un demi-millimètre le temps qu’il comprenne quand Aze prononça le mot « surprise » en avançant qu’il aurait préféré qu’il l’apprenne autrement.

Il avait récemment appris l’existence des travestis et des drag-queens mais aucune des descriptions qu’on lui en avait fait ne correspondait à Aze, enfin, il n’arrivait pas à le ranger dans ces deux catégories. Alors il ouvrit la bouche, interdit, comme sur le point de dire quelque chose mais sans savoir quoi. Puis finalement, il finit par souffler


« Pardon ? »



Un sourire gêné étira ses lèvres, bien loin des sourires charmeurs qu’il avait arboré à son arrivée. Et si c’était un homme depuis le début ? Vinnie n’était pas gay et pourtant… Et pourtant l’idée que la personne qui semblait lui plaire depuis quelques temps pouvait être un homme n’était pas gênante de la manière dont il avait pu l’imaginer. Il ne trouvait pas le fait qu’il puisse être un homme gênant mais plutôt le fait de l’apprendre seulement maintenant. Le mensonge de ne jamais l’avoir corrigé quand il avait dit « elle » et avait accordé les adjectifs au féminin. Alors, pour en avoir le cœur net et surtout tirer cette affaire au clair, il bafouilla


« Mais… Mais je croyais que tu étais une fille… »


Il n’avait pas l’air agressif, d’ailleurs, il n’était pas agressif. Simplement perdu. Aze aurait pu se détourner et partir qu’il serait resté coi, sans bouger ni même parler.

Codage par Jibunnie sur [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
“Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.” Ft Anastase
Mar 15 Sep - 21:55
Lorsque le silence se fit, Anastase eut l'impression que tout s'était figé autour de lui. Il n'entendait plus le brouhaha habituel de Willowbrook, ni les voitures qui freinaient toujours au dernier moment au stop au bout de la rue. Ni la musique toujours trop forte de ses voisins. Il ne percevait plus que ces sourcils froncés, ignorant totalement ce qui allait advenir ensuite.
Plus rien d'autre que ce silence et ces sourcils muets.
Pesant. Étrange. Et terrifiant.

Le sourire qu'il afficha ensuite ne rassura pas Aze. A quoi pensait Vinnie ? Il ne lui connaissait pas cette expression faciale, tout comme il ne l'avait jamais vu froncer les sourcils sur autre chose qu'un livre particulièrement ardu. Le "pardon" raisonna en écho dans son crâne sans trouver de fin. Que dire. Que faire. Il songea à foncer s'enfermer chez lui et à ne plus jamais mettre les pieds dans la bibliothèque universitaire. Mais à défaut d'être un combattant, il n'était pas un lâche. Alors lorsque Vinnie le confronta au fait qu'il s'était toujours présenté comme une fille, il mit méthodiquement de l'ordre dans ses pensées, essaya d'échapper à ses idées de scénarios catastrophes, et avala sa salive douloureusement.

- Je suis une fille. Dit-il simplement, avant de continuer dans un souffle, son courage s'échappant en même temps que les mots sortaient de sa bouche. Mais je suis aussi un garçon.

Il se tut, le temps de le laisser digérer ces deux phrases courtes mais percutantes et probablement très étranges, voire dérangeantes à entendre à la suite. Le fait qu'il n'ait pas encore reçu la moindre insulte ou le moindre coup durant ce laps de temps l'encouragea à poursuivre, et inconsciemment il reprit son rôle de professeur. Droit, légèrement intimidant malgré sa frêle silhouette, et surtout pédagogue.

- Je suis ce qu'on appelle non binaire. J'ignore si tu le sais, mais le sexe et le genre ne sont pas liés. Le sexe est déterminé par ce qui se trouve entre tes jambes. Malheureusement c'est selon ton sexe que l'on t'assigne un genre à la naissance. Il lui laissa une petite pause, le temps que la première partie des explications fasse effet, avant de reprendre avec toujours ce même ton posé. Le genre est un spectre. Certaines personnes se sentent en adéquation avec le genre qu'on leur a assigné, que cela soit garçon ou fille. D'autres personnes ne se reconnaissent pas dans leur genre, mais dans le genre opposé du spectre. Et d'autres personnes, je vais me prendre pour exemple, ne se reconnaissent pas dans les extrémités du spectre. Dans mon cas, selon les jours je me sens homme ou femme. Parfois je ne me sens ni l'un ni l'autre. On pourrait dire que je me promène sur le spectre en fonction des jours, ou des semaines. Parfois il m'arrive de changer de genre durant la journée. Cela m'arrive fréquemment, et je vais t'avouer quelque chose que; j'espère; tu garderas pour toi. Tu connaissais uniquement ma partie féminine, que j'appelle Ana. Ana, c'est celle qui est chargée de cours à l'Université et qui s'habille de manière à maintenir son rang et sa position de professeur. Par contre, et cela tu l'ignores, je suis également encore étudiant à côté de mon travail. Je m'y rend au masculin, où l'on me connait sous le surnom d'Aze, car je suis plus à l'aise ainsi.

Voilà qui était fait. Un résumé extrêmement rapide et incomplet mais qui lui donnait quelques clefs pour comprendre. Cependant, il comprit que quelque part Vinnie avait besoin d'être rassuré. Alors il lui adressa un petit sourire à la fois gêné et encourageant avant de reprendre la parole.

- Je ne t'ai jamais menti. Lorsque tu me voyais à la bibliothèque je me sentais toujours comme une femme. Et il y a de nombreuses fois où tu ne m'as pas vu, bien que moi je t'ai toujours repéré, car je venais en tant qu'Aze. Même si j'étais passé à côté de toi tu ne m'aurais pas reconnu, ou tu aurais pensé que j'ai un frère. C'est déjà arrivé.

Il eut une petite pensée amusée pour Seamus, mais conserva un visage neutre tandis qu'il penchait légèrement la tête en attente d'une réaction face aux révélations extrêmement personnelles qu'il venait de lui livrer.
Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
“Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.” Ft Anastase
Mer 16 Sep - 17:59


Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] & Vinnie Woodford
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]

Vinnie n’avait jamais été du genre à subir énormément d’oppressions. C’était un homme, blanc qui s’était toujours pensé hétéro et qui n’avait jamais remis son genre en question. Il était sportif, musclé et n’avait jamais souffert d’aucun complexe. Il était dangereux. Parce que c’était le genre d’hommes qu’on écoutait, même s’il n’avait aucune connaissance sur le sujet dont il était question. Parce que c’était un homme et que son insolence et son physique inspirait à la fois la crainte et le respect. Il n’avait jamais souffert de discrimination, même au collège ou au lycée, il avait toujours été du côté des populaires, de ceux de qui on cherchait l’approbation. Et cette impression n’avait pas changé quand il avait fait la connaissance d’Andrew, d’Alex et des autres. Vinnie, c’était une tête brulée, qui n’avait pas peur de prendre des coups comme si la douleur n’avait aucun effet sur lui, Vinnie c’était le chien fou qui avait d’abord servi de pion parce que c’était là où il brillait avant qu’on tente d’en faire une tête pensante, et c’était précisément là que tout avait basculé. Vinnie s’était toujours contenté de frapper ce qu’on lui disait de frapper sans réfléchir et ce fut quand on lui demanda de réfléchir qu’il se rendit compte qu’il avait été dans l’erreur tout ce temps.

Il haïssait toujours mais plus les mêmes personnes, et s’il s’était encore battu depuis, ce n’était pas parce qu’on le lui avait ordonné mais parce que même en tentant de s’éduquer sur le monde et les différentes cultures de ses peuples, Vinnie restait un chien fou. Peut-être qu’au fond, Alex avait raison. Peut-être que Vinnie ne pourrait jamais réellement quitter la Cause, peut-être qu’au fond, il était condamné à rester l’incontrôlable et ignoble connard qu’il était. Et mêlée à un véritable désir profond de s’améliorer, il y avait aussi l’envie de lui prouver tort. De lui montrer qu’il était intelligent, tolérant, qu’il pouvait le faire et qu’il allait le faire.


Alors, il fronça les sourcils, réellement désireux de comprendre ce qu’Aze tentait de lui expliquer, comprenant bien que s’iel ne lui avait pas demandé de se justifier sur son existence propre, il n’avait aucune raison de le faire. Mais il lui manquait encore beaucoup d’informations sur ce sujet et son débit de paroles n’aidait pas. Certainement sous le coup du stress. Alors, Vinnie plongea ses yeux clairs dans les siens, comme pour accrocher mieux ses paroles. Comme si son regard aidait, ce même regard qui l’empêchait de se concentrer à la Bibliothèque Universitaire, ce même regard qui réussissait à lui faire oublier l’espace d’un instant que son père était en bas, en train de hurler sur sa mère ou probablement de la battre. Ce regard. Ce regard hypnotique sur lequel il comptait.


« Attend… »


Il avait déjà entendu parler, dans un vieux livre de 1933, de personnes transgenres. Des personnes dont le genre n’était pas en adéquation avec ceux qu’on leur avait assigné à la naissance. Et si ce concept peinait à trouver sa place dans la tête préoccupée de Vinnie, il arriva tout de même à le retrouver dans ses souvenirs. Pourtant, il avait toujours cru qu’il n’y avait que des hommes et des femmes, et que parfois, on naissait entre les deux. Heureusement, l’idée de lui demander ce qu’iel avait entre les jambes n’était pas prête de frôler son esprit, bien trop pudique et bien trop fier pour ça. Alors, il se contenta de froncer de plus belle les sourcils, clignant des yeux, quittant enfin son regard pour accrocher le vide


« Ca veut dire que… Des fois tu préfères Aze et genre… Des adjectifs au masculin, et des fois c’est l’inverse, avec Ana. C’est ça ? »


Vinnie n’aimait pas qu’on lui pose des questions indiscrètes. Par extension, il n’aimait pas en poser. Lui, il préférait cent fois les questions étranges qui découlait de son esprit critique très fin mais de ses connaissances nulles en la matière.


« Et si des fois imaginons, tu te sens Ana mais t’as quand même envie de t’habiller comme Aze… Comment tu fais ? Enfin, tu ne t’y perds pas ? »


Vinnie, au fond, n’était pas méchant. Il était juste très curieux. Lui qui s’était souvent questionné sur son identité n’avait pas idée qu’il était possible d’avoir un questionnement encore plus profond qui remontait jusqu’à son genre. Pour lui, il était un homme, il était né homme et allait mourir homme.

Codage par Jibunnie sur [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
“Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.” Ft Anastase
Mer 16 Sep - 18:56
La scolarité d'Anastase avait toujours été... Mouvementée. Au début de son primaire, ses camarades de classe commencèrent à la titiller sur sa timidité. Les mots durs de ses instituteurs et institutrices qui lui reprochaient de ne pas prendre la parole ne faisaient qu'aggraver les choses. Pourtant il était bon élève, probablement aurait-il été le premier si les adultes avaient pris le temps de réfléchir avant de lui ôter systématiquement des points pour « non coopération, nuit à l'unité de la classe ». Chaque bulletin qu'il ramenait à la maison le faisait pleurer, alors que sa mère tentait de le réconforter, lui assurant que cela n'était pas si important. Mais il avait un second problème, qu'il se gardait bien d'exprimer à sa maman pour ne pas la rendre triste. Alors que les classes se succédaient, il n'avait toujours aucun ami. Tel une Hermione Granger, il s'était passionné pour les livres. Ceux de la petite bibliothèque de son école, car il n'y avait pas assez d'argent dans la famille pour investir dans l'intérêt spécifique toujours plus accru d'Aze. Il aurait pu vivre ainsi, dépasser l'avis des professeurs et passer ses récréations à lire dans un coin. Seulement ce qui n'était que taquinerie au départ devint progressivement du harcèlement, que les adultes responsables ignorèrent avec un grand enthousiasme. Au départ ce fut quelques élèves de sa classe et des plus âgés qui venaient le trouver dans son coin pour se moquer de son incapacité à s'intégrer. Puis cela dévia sur l'évidente pauvreté de sa famille, que l'état de ses vêtements trouvés dans des brocantes ou chez des chiffonniers trahissait. Et enfin arriva le drame. On lui arracha son livre, et sous ses yeux effarés et pleins d'incompréhension, il vit l'objet être détruit. On arracha des pages, on déchira la couverture, avant de piétiner le tout. Il eut le malheur de se mettre debout, découvrant ce qu'était la colère. Aussitôt on le fit retomber à terre et il ne se releva pas. Au lieu de cela, il ramassa consciencieusement chaque page, essayant de réparer l’oeuvre de Dickens qu'il avait emprunté. Lorsque la cloche sonna, il ne retourna pas en cours. D'un pas lent et indécis, il se rendit à la bibliothèque et déposa le livre devant la responsable des lieux. Celle-ci avait l'habitude de voir cette minuscule personne plusieurs fois par semaine, toujours timide mais se révélant peu à peu par ses choix littéraires. Elle s'y était attachée, constatant que l'enfant prenait grand soin des ouvrages qui lui étaient confiés. Alors doucement elle repoussa l'objet détruit plus loin, sortit de derrière son bureau et s'agenouilla pour faire face à Anastase qui se mit à trembler, n'osant plus regarder que le sol. D'une main délicate, la bibliothécaire redressa le visage de l'enfant et lui offrit un sourire rassurant avant de prendre la parole, réfléchissant aux mots qu'elle allait employer.

- Anastase... Je ne sais pas ce qui s'est passé et je ne te le demanderai pas. Cet accident n'a jamais eu lieu, et si l'on me pose des questions je ferai celle qui n'est au courant de rien. Mais saches que tu seras toujours accueilli ici.

Des larmes vinrent aux yeux de l'enfant mais il les essuya bien vite, et offrit un minuscule hochement de tête à celle qui semblait être sa seule alliée en ces murs. Puis sans prévenir il décampa, fuyant l'école et retournant chez lui. Lorsque sa mère le questionna il se réfugia dans le silence. Comprenant qu'elle ne tirerait rien de lui, elle lui ordonna simplement de retourner en cours le lendemain, lui promettant d'écrire un mot d'excuse pour son absence.

Le harcèlement ne cessa pas, mais plus jamais Aze ne vit une de ses lectures souillées. Il se réfugiait à la bibliothèque pour pratiquer son activité favorite, et subissait en silence les railleries de ses « camarades ».

Lorsque vint l'époque du collège, il fut malheureusement suivi par les mêmes élèves, qui firent rapidement passer le mot : on pouvait s'en prendre à lui, il ne cafardait pas auprès des professeurs. Le cycle se poursuivit ainsi jusqu'au lycée, où l'ampleur de l'agressivité prit d'autres proportions. Evidemment, il était facile de s'en prendre à lui, et son petit corps encore presque enfantin fut maintes fois bousculé, envoyé valser contre les murs, ou poussé dans les escaliers. Il eut la chance de ne jamais rien se casser, cependant sa peau prenait chaque jour qui passait un dégradé de couleurs allant du bleu au violet. Il se mit à systématiquement porter des manches longues, malgré la température étouffante. Sa mère prit cela comme une nouvelle lubie, bien qu'elle sente par son instinct que quelque chose de plus profond se jouait. Malgré cela, elle ne pouvait intervenir tant qu'Aze ne se serait pas confié à elle. Il ne le fit jamais. Seul l'espoir miroitant de se fondre dans la masse une fois arrivé à l'Université l'avait poussé à ne pas abandonner, à ne pas se laisser envoyer valser un peu trop fort, tête la première dans les nombreux escaliers de l'établissement. Il avait songé plusieurs fois qu'il ne méritait pas sa place parmi les autres humains, et se consola en lisant des livres qui lui parlaient. C'est ainsi qu'il commença à se considérer comme un freak. Maigre satisfaction que d'avoir trouvé un nom à poser sur toutes les sensations qui envahissait son être.

Puis ce fut l'Université, dans laquelle il fut pris car seules ses notes furent examinées. Il découvrit l'anonymat et la tranquillité. Bien qu'il ne se lia avec personne, il était capable d'échanger quelques mots avec ses camarades. Il participa même à des travaux de groupe, dans lesquels il s'étonna que l'on ne le blâme pas pour ses idées. C'est ainsi que l'Université le réconcilia avec le système scolaire, bien qu'il n'oublierait jamais toutes ses années où il avait été le martyr des autres. Maintenant que le temps était passé, il s'en servait comme d'une force pour propager autour de lui un discours de tolérance, et était intraitable lorsque assis derrière son bureau ou en marchant dans l'Université il croisant des étudiants en train de tenter de saboter la vie d'un autre. Les larmes ne couleraient plus, et il se tenait plus droit que jamais lorsqu'il devait prendre la parole devant ses classes pour répandre la bienveillance.

Ce fut ce long parcours qui l'amenait à ces minutes planté face à Vinnie, tentant de lui faire le résumé d'un cours qui aurait mérité plusieurs années pour tenter d'être un minimum complet. Il découvrit devant lui un jeune homme attentif, et c'est pourquoi il avait tenu jusqu'au bout, jusqu'à lui confier un de ses secrets qui pouvait détruire son ambition de carrière s'il était révélé. Mais les yeux de l'homme au crâne rasé lui redonnaient espoir, et il attendit patiemment lorsqu'il le lui demanda, sachant que cela faisait beaucoup d'informations à digérer en peu de temps. Leurs yeux se détachèrent, et il sourit gentiment en hochant la tête lorsque Vinnie fit un résumé sommaire de ce qu'il venait de raconter.

- C'est exactement ça. Et pour répondre à ta seconde question, je fais comme bon me semble. Je ne m'impose pas de limite, si ce n'est sur mon lieu d'études ou de travail. Je ne peux pas me permettre de risquer d'être discriminé si cela venait à se savoir. Tu te doutes que mon poste et par conséquent mon avenir sont en jeu.

Ce fut un soulagement de pouvoir balayer le côté problématique aussi simplement. Aucun mensonge, une vérité stricte qu'il se devait d'asséner pour bien faire comprendre à son interlocuteur que cela devait rester privé.
Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
“Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.” Ft Anastase
Mer 16 Sep - 20:05


Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] & Vinnie Woodford
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]

A vrai dire, Vinnie était déjà allé à Willowbrook, la population n’était pas entièrement blanche et son cerveau tentait d’oublier qu’il y avait fait quelques descentes avec la bande pendant des années. La nuit, on avait entendu le bruit de leurs bottes, des cris et le matin, des taches de sang, quelques mots dans les journaux locaux, rien de plus. Parce que c’était trop commun, parce que même la police savait mais s’en foutait. Parce que la police était de leur côté. Quand l’agresseur était blanc, il était toujours victime d’une erreur, d’un complot, ce n’était qu’une erreur de jeunesse. Le mot « terroriste » n’était employé que lorsque l’agresseur était une personne racisée. Vinnie avait eu l’impunité de pouvoir se balader armé dans les rues, autant celles de Creenshaw que celles de Willowbrook. En bientôt 28ans d’existence, jamais n’avait-il était aussi violent que pendant la période où il n’était qu’un pion et où le regard suppliant d’une mère, criant silencieusement, par les yeux, l’implorant de laisser son mari tranquille pendant qu’il le passait à tabac. Et depuis, il vivait tous les jours pour tenter de se racheter, ou d’oublier. Parfois, quand il croisait une personne racisée dans la faculté, il voyait de la peur dans son regard, et parfois même de la colère et lui, baissait les yeux. Montrait qu’il n’était pas dangereux, ou du moins plus maintenant.

Mais on ne changeait pas du tout au tout en seulement quelques mois. La rupture avec Nina était encore trop fraiche, la blessure encore ouverte, béante, dans son cœur qu’il croyait de pierre et son égo avait pris un trop gros coup pour qu’il laisse tout passer sans se défendre. Masculinité toxique, fierté, égo, Vinnie n’avait pas pu se débarrasser de tout d’un coup.


« Mais bordel porte un kilt au pire ce sera moins ridicule ! »



Une voix, quelque part, à sa droite, un cri, une insulte, une moquerie du pantalon d’Anastase. Vinnie avait vivement tourné la tête, comme s’il se réveillait et son regard glacial était tombé sur un jeune homme qui devait avoir son âge ou quelques années de moins qui rigolait grassement en fixant sa victime. Le jeune homme n’était pas du genre à refuser ce genre d’occasion pour se défouler. L’homme allait prendre pour sa moquerie mais aussi pour toutes les phrases de son père, toutes les insultes à sa mère, toute la colère qu’il avait emmagasinée contre Nina. Et le pire, ou le meilleur, était sans doutes qu’il ne s’y attendait même pas, pensant certainement Vinnie pour un autre agresseur en train de le dépouiller.

Alors, sans attendre ne serait-ce qu’une seconde, il se détourna et barra la route du jeune qui tenta vainement de le contourner mais les paumes de mains puissantes du skinhead sur son torse suffirent à le faire reculer, le gardant devant lui


« Mais essaie pas de fuir en fait, tu veux quoi ? Tu veux forcément un truc sinon pourquoi t’as ouvert ta gueule ? Vas-y on s’explique, tu veux quoi ? »


Son ton avait énormément changé. Anastase avait eu le droit ou plutôt le privilège à une voix calme, sérieuse, curieuse, intéressée, mais pour lui, ce n’était plus que des aboiements et des grognements.


« Mais putain détend toi t’as cru quoi ? J’veux rien en fait ! Pourquoi tu protèges ton pote ? Dis lui plutôt que s’habiller comme ça c’est illégal ! »


Un deuxième coup au torse, pour le pousser, les bras écartés, des hochements de tête successifs pour le provoquer, les sourcils haussés, le regard acéré et la mâchoire serrée


« Mais tu cherches la merde en fait ? Genre tu cherches vraiment à m’énerver ? T’as craqué ? »



Comprenant qu’il n’allait pas échapper à une confrontation physique, l’homme tenta un crochet du droit vers la tempe de Vinnie mais c’était très mal le connaître que de penser que c’était la première fois qu’on tentait de l’attaquer de la sorte. Naïvement, on pensait que l’attention de Vinnie restait portée sur ce qu’il se passait devant lui alors qu’il avait été trop souvent jeté dans la fosse aux lions, à subir des rites d’initiation à la con à devoir se battre contre trois mecs en même temps. Eviter le premier coup en se baissant ne lui demanda aucun effort si ce ne fut celui d’un réflexe avant qu’il ne profite de l’élan pour tourner sur une jambe, l’autre relevée pour se tendre brutalement faisant claquer son pied tout entier et surtout sa Dr Martens en plein centre du poitrail de sa victime dont le rôle d’agresseur semblait bien loin. Vinnie sembla entendre craquer son plexus solaire mais ne s’attarda pas sur les bruits, il était loin d’en avoir fini avec lui. L’homme recula de plusieurs pas pour ne pas perdre l’équilibre et ce fut Vinnie qui avança vers lui pour l’enchainer de coups de poing au visage. Deux, trois, quatre, un instant pour temporiser et un dernier. Un crochet simple où on entendit clairement quelques-unes de ses dents se déchausser quand il recula, les mains jointes pour récolter le sang qui coulait de sa bouche, courbé en avant, peinant pour garder l’équilibre. Les phalanges rougies, Vinnie les frotta à la paume de ses mains, avant de s’essuyer le nez d’un revers de la main, grognant


« Un petit conseil pour la prochaine fois que t’arriveras à parler, ferme juste ta gueule en fait. Et arrange toi pour ne plus me croiser sinon jte promet que je te monte en l’air. »



Alors que l’homme partait en vociférant des insultes noyées dans des grommellements de douleur et des gargouillis, Vinnie faisait face à la réalité. Ce qu’Aze venait de voir de lui s’apparentait à un coming-out. Iel était non-binaire, lui était violent, susceptible et avait de gros problèmes de gestion de sa colère. Honnêtement, il aurait été la dernière personne à lui en vouloir s’iel décidait de se détourner et de partir. Il en aurait été très triste mais il n’aurait pas pu se résigner à lui en vouloir. Alors, ce qui suivit fut le silence le plus pesant de toute sa vie.

Codage par Jibunnie sur [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
“Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.” Ft Anastase
Mer 16 Sep - 20:50
Lorsque l'inconnu l'interpella, Aze se contenta d'ignorer la remarque, tournant à peine la tête dans la direction du petit crétin. Ce n'était pas la première ni la dernière fois qu'il se prenait une réflexion, et celle-ci était plutôt anecdotique par rapport à d'habitude. Il s'apprêtait à relancer la conversation, mais lorsqu'il se retourna vers Vinnie celui-ci avait disparu. Surpris, l'idée qu'il se soit cassé après son coming-out le traversa à peine quelques secondes. Car il avait entendu.


Vinnie était passé à l'action. Une action devant laquelle Anastase resta figé, comme prisonnier du spectacle qui se déroulait devant ses yeux. Aucune expression ne s'installa sur son visage pâle, tandis qu'il assistait à la scène d'une violence aussi soudaine qu'inouïe. Son cerveau analysait pourtant parfaitement ce qui se tramait à quelques mètres de lui. Les menaces. Les esquives. Les coups. Le sang qui gicle et entache un trottoir qui a déjà connu cette scène à de nombreuses reprises, dans l'indifférence générale. Car c'était Willowbrook. La partie de la ville où tout le monde était désintéressé des joutes verbales et des règlements de comptes. La partie de la ville où il fallait esquiver, trouver les bons horaires, se faire discret. Peu importe que l'on s'appelle Anastase ou Mehdi. Ici il s'agissait de savoir cogner plus fort que l'autre. La loi du plus fort. Personne ne réglait ses problèmes de voisinage en utilisant lâchement un flingue. C'était la règle, bien que jamais énoncée.

Lorsque Vinnie eut fini avec le petit con, Aze revint au temps présent, conservant malgré tout un visage qui ne racontait plus rien. Et pour cause, que devait-il penser ? Cet acharnement de force brute l'avait projeté des années en arrière, dans des souvenirs d'enfance et d'adolescence qu'il pensait pourtant avoir digérés et classés loin dans son crâne. La violence le terrifiait toujours terriblement, bien qu'il la côtoie tous les jours. Cependant il ne s'agissait pas de deux ou trois inconnus, impliqués dans il ne savait quels histoire ou trafic. C'était Vinnie. Vinnie qui avait toujours été neutre en sa présence, et même protecteur lorsqu'il l'avait raccompagné alors que la nuit était tombée. Vinnie qu'il pensait changé. L'était-il vraiment ? Certes, il s'en était pris à ce type pour le défendre. Mais pourquoi. Pourquoi. Alors il se tourna vers lui, détournant lentement son regard du liquide rougeâtre qui ruisselait maintenant dans le caniveau et ne serait bientôt plus qu'un lointain souvenir, mêlé au sang déjà versé, à la pisse et au vomi. Lorsqu'il se retrouva de nouveau face à cet homme qui était entré dans sa vie presque par effraction, il planta son regard dans le sien, l'obligeant à soutenir ses yeux d'un bleu limpide, sans qu'aucun sentiment ne les habite. Et il lui posa sa question.

- Pourquoi ?

Cette interrogation simple fut prononcée sur un ton monocorde, tout aussi inexpressif que son visage qui d'habitude était habité par de multiples tics et émotions. Il n'avait pas fuis car il avait espoir d'obtenir une réponse qui expliquerait cet acharnement. Quelque chose qui le rassurerait quant à l'homme qui se tenait en face de lui et dont il avait attendu les SMS avec passion. Quelque chose qui éloignerait les souvenirs de son propre corps tuméfié par les Autres. Une raison, peu importe laquelle. Y avait-il encore de l'espoir pour Vinnie ? Et pour lui ? Qu'adviendrait-il ? Obtiendrait-il une réponse à sa question, ou Vinnie partirait-il sans s'expliquer ? Il ne savait que faire de lui-même à cet instant, et commença à voir apparaître des points noirs dans sa vision, et une faiblesse soudaine le pris. « Non Aze, ce n'est définitivement pas le moment de faire un malaise. »
Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
“Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.” Ft Anastase
Jeu 17 Sep - 22:15


Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] & Vinnie Woodford
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]

Autour de lui, tout semblait se calmer. Comme si, lorsqu’il avait porté les coups, lorsqu’il s’était battu, tout était devenu flou autour de lui. L’air s’était mis à crépiter, chargé en électricité et en tension. Et puis, l’homme s’était éloigné, devenant de plus en plus petit jusqu’à n’être qu’un point à l’horizon et puis plus rien. Rien que les bruits de fond, des gens qui vivaient, des fenêtres ouvertes, les odeurs de la rue et des cuisines des immeubles aux alentours, le bruit des pneus sur l’asphalte, plus rien. Vinnie était immobile.


La voix d’Anastase brisa ce faux silence, résonnant à ses oreilles aussi fort qu’un défibrillateur qui aurait redémarré son cœur, une décharge électrique à la fois violente et salvatrice. Mais sa voix n’était pas douce comme elle l’avait l’habitude d’être avec lui, et son visage ne l’était pas non plus. Même de dos, il pouvait sentir les lames acérées de ses yeux lui transpercer le dos, si fort et si brutalement qu’il n’osa pas en bouger pendant plusieurs longues secondes. Une sensation de chaud englobant ses poings, puis ses bras, puis tout son corps, l’odeur du sang dans les narines, la tête qui tournait encore à cause de l’adrénaline, les yeux qui n’arrivait pas à faire le focus, des sensations de picotements sous la peau qui lui donnait envie de se l’arracher pour les faire taire.


Il ne s’en voulait pas vraiment d’être violent, l’homme n’avait pas mérité une simple remise à niveau et s’il avait été seul, Vinnie aurait été allé bien plus loin et ne l’aurait sans doute pas laissé fuir. S’il s’en voulait, c’est parce qu’il avait aimé ça. Ces sensations lui avaient manqué autant qu’elles le dégoutaient et il adorait ça. Vinnie était violent, sanguin, susceptible. Au-delà de son look de skinhead, on avait peur de lui parce qu’on le voyait, les poings sans arrêts serrés, le regard vif, la respiration courte, sans contrôle, sans repos. Son cas était-il sans espoir ? Arriverait-il un jour à se racheter ou peut-être allait-il finir par mourir assassiné par Alex ou Andrew ou même Nina dans une ruelle sombre ou un caniveau ? Sa mère lui avait souvent conseillé de se mettre au sport, de faire de la boxe, et il lui arrivait souvent d’aller courir, sans rythme, juste pour décompresser. Il rêvait de faire de la boxe ou de prendre un abonnement dans une salle de sport… Mais avec quel argent ? Si sa mère lui avait promis qu’ils arriveraient à se serrer la ceinture si c’était réellement ce qu’il voulait, il avait refusé. Il ne pouvait pas lui infliger ça. Pas à elle. Pas elle qui n’avait rien été d’autre qu’une bonne mère pour lui. Pas à elle qui se saignait littéralement pour qu’il puisse vivre et qui ne recevait rien en retour, parce que Vinnie était impuissant, qu’il ne pouvait rien faire sans l’accord de sa mère et celle-ci peinait à trouver le courage de le lui donner.


Au bout d’un long moment de silence, il finit par souffler, d’une voix douce mais étonnement sûre d’elle :



« Les impunis. »



Deux mots, deux mots lourds de sens qui l’avaient accompagné toute sa vie.



« Je déteste, les impunis. »



Les impunis. Ceux qui jouissaient d’une certaine forme d’immunité, comme lui à l’époque. Lui aussi avait été un impunis, à se permettre des choses illégales, à répandre la terreur, à ne pas se soucier ni des règles ni des lois, et il s’en voulait.  

Codage par Jibunnie sur [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
“Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.” Ft Anastase
Jeu 17 Sep - 23:50
« Je déteste, les impunis. »

Cela avait le mérite d'être limpide. Une réponse aussi sèche que la question d'Anastase avait été brutale. Ils avaient été formés à la même école. Se contenter de quelques mots lorsque la situation ne se prêtait pas aux longs discours.

Bien que brève, cette phrase donnait du fil à retordre à Aze, dont les yeux étaient toujours figés sur Vinnie. Pourtant son esprit dérivait bien loin, se promenant à travers la bibliothèque mentale qu'il avait constituée en même temps qu'il prenait des cours, se renseignait et apprenait. Anastase résolvait les problèmes de sa vie par la raison, ne suivant pas son cœur. Enfin, cela c'était ce qu'il pensait. Actuellement il n'avait aucune conscience du fait que si cela n'avait pas été Vinnie, il se serait déjà barricadé à double tour dans la maison et n'en serait ressorti qu'une fois certain que l'homme n'était plus dans les parages.

Après un long temps à parcourir les étagères couvertes de connaissances, il lui fallut renoncer et admettre que la réponse ne se trouvait pas entre les pages de tous les ouvrages qu'il avait pu consulter. Il était question ici de morale. Anastase n'était pas croyant. Mais nul besoin de l'être pour se questionner sur la moralité de ce qui nous entoure ou des actions auxquelles nous assistons ou participons. La violence n'était pas prohibée par l'esprit d'Aze. Mais il lui semblait qu'il fallait une raison valable de l'utiliser. Vinnie avait-il réagi de la bonne manière ? Non. Cependant il l'avait fait pour une cause qui touchait à Aze. L'homme au crâne rasé avait surréagis, cela n'était qu'une simple phrase et à vrai dire il avait déjà oublié le propos. Mais il fallait prendre en compte un passé qu'Anastase n'avait fait qu'imaginer puisque Vinnie ne s'en était pas encore confié à lui.

Un autre élément penchait dans la balance, et il était malheureux. La fierté. Sa fierté d'avoir été capable de se débrouiller seul pendant vingt six ans dans Willowbrook. Il avait apprécié d'être raccompagné un soir, mais cela ne faisait pas de lui une demoiselle en détresse attendant telle une potiche qu'un quelconque prince vienne la secourir. Il n'avait jamais été entraîné dans une baston générale, non. Par contre il connaissait très bien les combats à un contre trois, au petit matin ou au coucher du soleil. Il s'en était toujours sorti. Parfois avec des contusions, et surtout la satisfaction d'avoir détruit en partie l'ego de machistes en puissance qui venaient de se prendre une leçon de bienséance par un minuscule être humain qu'ils pensaient sûrement pouvoir faire ensuite tourner dans une cave.

Après avoir cillé pour faire de nouveau le point sur l'homme en face de lui, il prit la parole. Sans être certain d'avoir la bonne réponse. Y en avait-il une d'ailleurs ?

- Je comprends. Lâcha-t-il tout d'abord, avant de poursuivre d'une voix quelque peu agressive.

- Mais tu crois quoi, qu'il faut fracasser le crâne de tous ceux qui auront le malheur de m'adresser un regard concupiscent ou une parole inappropriée ? Tu crois que je ne connais pas tout ça ? J'ai grandi ici Vinnie. Tu n'as aucune idée de ce que j'entends et vis ici tous les jours où tu n'es pas là. Pas la moindre idée, parce que tu n'es pas moi, tu n'es pas de ce microcosme qu'est Willowbrook. Ici les insultes on les ignore. Les coups on apprend à faire avec. Ce que tu viens de faire, c'est me prendre pour quelqu'un de faible. Tu m'as méprisé. Oui, j'ai compris tu n'aimes pas les injustices, mais ici elles sont maîtresses et ce n'est pas toi qui changera ça. Ni toi, ni moi, ni personne !

Ce déchaînement de mots se finit par des cris alors qu'il lui plantait férocement son index contre le plexus.

- Si tu me vois comme une petite chose fragile, tu peux dégager immédiatement. Je ne suis et ne serai jamais ta caution pour ce genre d'action. Je suis de ce milieu, je sais me démerder seul. Tu m'entends ?

Il se recula enfin, et malgré leur différence de taille il le toisa, le mettant au défi de répondre quelque chose qui ferait pencher la balance de son côté. Aze attendait des excuses. Des excuses et peut-être... Peut-être la proposition d'oublier ce qui venait de se passer pour poursuivre la journée comme ils l'avaient initialement prévu. Maintenant Vinnie avait toutes les cartes en mains, il ne lui restait plus qu'à trouver lesquelles poser pour que ce qui ressemblait à un début de relation se poursuive. A moins qu'il souhaite faire marche arrière.
Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
“Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.” Ft Anastase
Lun 21 Sep - 17:59


Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] & Vinnie Woodford
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]

Il y avait trois ans de ça, Alex s’était penché sur une table sur laquelle il avait apposé les plans d’une résidence grossièrement dessinés à l’aide de photos trouvées sur Google image.


« Et là, on rentre, on prend tout et on ressort, c’t’aussi simple que ça. »


Beaucoup plus dubitatif, Andrew avait froncé les sourcils


« Et s’ils sont armés t’en fais quoi ? »



Alex avait souri

« On envoie Vinnie. Tu crois que je l’ai recruté pourquoi ? Ce mec c’est un taré, met lui un flingue dans les mains et désignes lui la maison de ces enfoirés de nègres et il massacrera tous ceux qui se trouvent sur son passage. »


« Tous ? »


« Tous. Hommes, femmes, enfants, j’t’ai dit, il est parfait. Il sait se servir d’une arme, il est silencieux, méthodique, il a juste besoin qu’on lui donne l’ordre. »




Et l’ordre était venu, à trois heures du matin, l’écran du téléphone portable de Vinnie s’était éclairé en pleine nuit pour lui donner le top départ. Vinnie ne dormait pas, toujours habillé dans son lit, il avait juste enfilé ses rangers et un sweat à capuche pour recouvrir sa tête et était descendu au rez-de-chaussée. Comme prévu, ses parents dormaient déjà. Alors, il avait ouvert la porte silencieusement et s’était glissé à l’extérieur, dans la cage d’escaliers, puis dans la rue. On n’osait pas le regarder. A 3h du matin, un jeune homme de son âge qui marchait à sa vitesse habillé comme il l’était ne présageait rien de bon.


Il marcha à pleine allure pendant une vingtaine de minutes dans un silence total, le crâne toujours couvert, les mains protégées par des mitaines de laine abîmées, de la musique imaginaire dans les oreilles, attentif au moindre bruit. Ce n’était plus le jeune homme de 25ans qui aimait se promener.
C’était un soldat. Un soldat élevé à la dure qui avait une mission et qui aurait sans doute préféré mourir que de l’échouer

Devant la résidence, Nicholas l’attendait. Le colosse tatoué qui allait devoir le tabasser trois ans plus tard lui tendit un sac à dos noir que Vinnie cala sur une de ses épaules sans discuter. Les deux se regardèrent à peine avant que le jeune homme n’escalade le portail trop bas de la résidence pour être une véritable sécurité.

Le reste alla rapidement. Très rapidement. Trop rapidement. Un coup dans la porte pour la faire céder, le bruit de la glissière du sac, du chargeur engrangé dans l’AK-47, un coup, un seul. Dans la porte de la chambre. Vinnie allait apprendre plus tard qu’il n’avait aucune victime et que le couple d’afro-américains qui dormaient paisiblement avant de se réveiller en sursaut n’avait même pas eu le temps de le reconnaître avant qu’il ne s’enfuit, laissant tout de même une note portant les mots : « Right Wing Resistance, get the fuck out nigger ! »


Vinnie aurait pu aller bien loin. Si on lui avait demandé, il aurait pu défoncer plus de porte, tirer sur plus de gens… Mais les ordres avaient été clairs. Les skinheads savaient exactement jusqu’où ils pouvaient aller pour garder les autorités de leur côté. Aucune enquête n’allait être ouverte, et ils le savaient.

***

Trois ans plus tard, être violent lui manquait terriblement. Mais il n’avait pas envie d’utiliser sa force comme avant. Il ne ressentait plus cette haine de l’autre, il n’avait plus peur de l’inconnu, il avait abandonné toutes ses anciennes idées pour se repentir et avait emprunté le chemin de la guérison. Mais où était-il exactement sur ce chemin ? Avec le jeune homme qui avait osé s’en prendre verbalement à Aze, il aurait bien voulu aller plus loin. Le faire fuir n’était pas assez.


« Parce que tu crois que moi non ? Ok j’ai jamais été du côté des victimes mais j’ai pas envie de rester un témoin. J’ai pas envie de penser que je dois juste rester sans rien faire, j’aurais fait la même pour n’importe qui d’autre. T’as cru quoi ? Que je te méprisais ? Que je te pensais faible ? »



Il se frotta activement le visage de ses mains baguées et secoua la tête pour faire circuler le sang


« T’es pas faible. J’ai jamais dis que t’étais faible. Mais j’ai pas envie, j’ai plus envie, que les gens pensent que « parce que c’est comme ça » ils ont le droit d’agresser n’importe qui dans la rue. J’ai pas envie qu’il pense que y’a personne qui peut faire changer les choses. Alors tu as le droit de penser que c’est peine perdue et peut-être que tu auras raison mais je suis trop souvent resté impuissant et j’en ai marre de ne pas faire ma part pour changer les choses. Et si ça te pose un problème, je comprendrai et je comprendrai très bien que tu ne veuilles plus me voir. Tu ne serais pas le premier. »


Codage par Jibunnie sur [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
“Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.” Ft Anastase
Lun 21 Sep - 19:05
Aze écouta le discours de Vinnie. Il n'en décrocha pas un instant, ne tenta pas de l'interrompre. A vrai dire il était bien trop absorbé par ses mots pour penser à ouvrir la bouche ou à effectuer le moindre mouvement. Il était appréciable d'entendre l'homme reconnaître qu'il n'avait jamais été du côté des victimes. C'était même un aveu de taille, que ne manqua pas de souligner le cerveau cartésien du blondinet.

Le comportement quelque peu agité de celui qui lui faisait face ne l'effrayait pas, non. Il se rendit compte qu'il ne craignait pas Vinnie. Même après l'avoir vu mettre cet inconnu au sol couvert de son propre sang. Vinnie savait s'expliquer, et chacun de ses mots créait une nouvelle fissure dans la morale d'Aze. Car chaque phrase était une balle qu'il prenait dans l'estomac et qui lui rappelait qu'il était globalement quelqu'un qui fuyait. Un lâche.

Un lâche avec quelques batailles à son actif, mais cela n'était pas le sujet de l'instant. Anastase venait d'apprendre en un coup de gueule ce qu'il n'avait jamais voulu apprendre. Pourtant des livres sur le sujet, il en existait et il en connaissait parfaitement l'existence. Mais pour certains sujets, il était faible et mettait des œillères. Ce qu'il peinait généralement à reconnaître. Mais Vinnie s'était exprimé avec autant – voire plus – de clarté que lui face à ses étudiants les plus revêches. Et il l'avait convaincu, dissipant la brume dans laquelle il s'était fondu pour mieux nier la réalité de ce qui se passait sous ses yeux. Ce qu'il vivait. Ce qu'on lui faisait vivre. Subir même.

Il secoua brusquement son corps malingre et attrapa la main droite de Vinnie pour poser sa paume - immense comparée à la sienne – sur son cœur, dans un geste irréfléchi. Sans même se rendre compte que sous le tissu il y avait son sein. Rien de sexuel ici. Juste un cri du cœur qu'il ne tarda pas à expliquer par des mots. Simples, sans fioriture.

- Merci Vinnie. Tu m'as réveillé. Tout entier.

Il lui offrit un sourire lumineux, qui paraissait étrange dans cette ruelle où le sang venait d'être versé. Mais c'était probablement un des sourires les plus sincères qu'elle ait distribué de sa jeune vie.

- Je ne veux pas que tu partes. Je veux que... Il hésita et sa voix se fit toute petite. Je veux que tu restes avec moi. Mais je veux un deal. Si jamais je me fais emmerder, je me débrouillerai seul. Parce que j'ai su le faire et je saurai le réapprendre. Avec ton aide, si je la sollicite. Réfléchis-y. Et puis... J'aime bien te voir tu sais. Confessa-t-il dans un souffle.

Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
“Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.” Ft Anastase
Lun 21 Sep - 20:06


Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] & Vinnie Woodford
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]

La main sur son cœur, les joues de Vinnie se teintèrent de rouge, tellement qu’il eut un léger mouvement de recul, pas au point de retirer sa main mais plutôt au point de devoir détourner le regard. Même devant Alex, même devant ce colosse de Nicholas, même devant des personnes capables de le coucher d’un simple coup de poing, sans doute capable de lui briser la nuque avec les dents, même devant ces gens, il n’avait pas détourné le regard. Il n’avait pas eu peur, il n’avait plus peur depuis bien longtemps mais il n’avait pas détourné le regard. Il n’y avait que devant Anastase.


Même Nina n’avait pas eu ce traitement de faveur. Elle qu’il avait rencontrée quand on le pensait encore –à raison- comme étant un chien fou, même devant Nina qui avait été tant d’années de sa vie, qui avait été la femme de sa vie, avec qui il avait fait sa première fois, Nina, pour qui il serait mort sans problèmes et surtout sans réfléchir une seule seconde, Nina, pour laquelle il aurait et avait fait tant de choses sans même y réfléchir. S’ils avaient été un couple tout ce qu’il y avait de plus normal, ils seraient sans doutes mariés. Mais la réalité était toute autre. Aujourd’hui, elle devait sans doute être en train de séduire un autre novice pour l’amadouer à reprendre la place de Vinnie, faire le sale boulot. Mais au fond, Vinnie était bien le meilleur pour son boulot : intimider, braquer, voler, dealer, tant d’autres actions dont il était tout sauf fier aujourd’hui. Tant d’actions qu’il aurait bien voulu oublier. S’il avait pu revenir dans le passé, il aurait voulu y changer tant de choses, mais ce n’était pas possible. Alors il se contentait d’améliorer le présent, être la meilleure version de lui-même.

Et Anastase était sa providence. Une chance de prouver qu’il n’était pas un lascar, ou du moins qu’il n’était pas que ça. Qu’il valait mieux que ça, qu’iel avait raison de lui donner sa chance et qu’il allait tout faire pour qu’iel ne regrette pas de lui avoir fait confiance.
Alors, d’une voix assez hésitante qui se cassait légèrement quand il sortait de sa zone de confort, il souffla



« Je… Enfin… Tu veux, ça te dis d’aller dîner ? Avec moi je veux dire… »



Question idiote. A ce stade, Vinnie était bien sûr qu’iel allait refuser. Il y avait mieux comme parade de séduction que de tabasser un mec devant ses yeux. Alors, pour évacuer son stress ou plutôt pour faire croire à son corps qu’il était en train de déstresser, il sortit un paquet de cigarettes de la poche de son blouson en cuir et l’ouvrit pour en sortir une, la porter à ses lèvres puis l’allumer. Tendant le paquet à Anastase, il souffla en même temps que sa fumée


« Tu fumes je crois ? »


A vrai dire, il l’avait déjà observé.e au temps où il pensait qu’iel était une femme cis, prendre ses pauses clopes, sans jamais oser l’aborder.

Codage par Jibunnie sur [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé
Contenu sponsorisé
Contenu sponsorisé
“Darkness cannot drive out darkness: only light can do that. Hate cannot drive out hate: only love can do that.” Ft Anastase
Revenir en haut Aller en bas
Page 1 sur 2Aller à la page : 1, 2  Suivant
Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas

glitter in the air :: A little break :: archives :: rps abandonnés+