Now that I'm here (#Leiri2)

Je ne pensais pas que renouer un semblant de lien avec ma mère puisse me faire autant de bien. J’ai mis de l’eau dans mon vin quant aux reproches la concernant, je prends du recul, je grandis. A vingt-cinq ans il faut bien, je crois. Moi qui pensait justement qu’à mon âge on peut se foutre de s’entendre ou non avec sa mère… Je suis bien obligée de constater que je me sens bien mieux depuis que la hache de guerre s’enterre doucement. Je n’ai toujours pas trouver de truc qui soit bien à moi, je ne m’ouvre pas vraiment sur le sujet, encore moins avec elle… Sorte de complexe d’infériorité qui ne m’a jamais quitté et pour lequel je lui en ai voulu, sans doute à tort. Si je reste discrète sur certains sujets, nous partageons d’avantage, ça fait partie de ce processus pour renouer un lien mère-fille solide. J’ai envie d’y croire, besoin aussi. Le tournage de son dernier film touche à sa fin, un soulagement pour elle, mise à l’épreuve par ce rôle qu’elle a accepté pour redorer son image, se défaire de l’étiquette d’homophobe collée suite à des refus successifs de rôles qui la sortaient de sa zone de confort. Si je lui en veux encore pour son comportement vis à vis de mes propres préférences, notre dernière vraie discussion m’a permis de voir les choses sous un autre angle. Le plus gros défaut de ma mère c’est de porter un masque, vouloir paraître parfaite, là où j’aimerai juste voir ses failles pour ne plus avoir honte des miennes et trouver du soutien dans son regard de femme imparfaite qui essaie juste de faire de son mieux. Aujourd’hui j’ai décidé de lui faire la surprise de la rejoindre sur les lieux du tournage, j’ai su par son agent que c’est en studio que se déroule cette avant dernière journée. Je prévois que nous allions manger un truc toutes les deux le temps d’une pause qu’elle peut s’octroyer comme bon lui semble ou presque. A l’entrée des studios mon nom suffit à m’offrir mon droit de passage, je suis à la recherche du studio où se déroule le tournage ou au moins de la loge de ma mère, quand un jeune homme m’arrête « Vous cherchez quelqu’un ? » je hoche la tête « Oui, je viens voir... » « Je sais, je vous ai reconnu en fait. » me dit-il dans un sourire « Suivez moi. » ce que je fais, zigzagant comme lui dans les couloirs arpentés par tout un tas de personnes bossant ici. Il s’arrête devant une loge, frappe deux coups et ouvre la porte après y avoir été invité « Quelqu’un pour toi. » dit-il alors que je m’étonne de tant de familiarité envers ma mère, c’est inhabituel. Je lui souris, le remercie et il s’éclipse avant même que je ne sois entrée dans la pièce. Je fais un pas en avant « J’ai pensé que… » je me stoppe nette. Mais il est complètement con ce type ou quoi ? Je pensais qu’il m’avait reconnu comme la fille de Rose Galea… Pas comme la fille que l’on pouvait voir en compagnie de Leilani Blake. Je lui adresse un sourire gêné et un petit geste de la main « Hey. Euh… Je… » putain l’abruti, je fais quoi maintenant ? On s’est pas revu depuis l’autre fois, on s’est pas recontactées non plus, vu l’état dans lequel ma mère était après avoir vu les photos, valait mieux pas. « Tu vas bien ? » puisque je suis là autant demandé, être polie.

J’ai bien senti une sorte de malaise encore plus important de la part de Rose, depuis que les photos de Terri et moi sont sortis dans la presse. Mais on en a même pas parlé. J’ai bien essayé, mais mâdame n’était pas encline à la discussion. Je respecte ça, je n’ai pas insisté, et puis pour quoi faire ? Elle n’aurait sans doute pas compris. J’ai juste passé une superbe soirée avec sa fille, et une superbe nuit aussi, mais ça je ne le crie pas sur tous les toits. En tout cas, depuis ce soir là, plus aucune nouvelle de la brunette. Pas que j’en attendais particulièrement, mais je garde un bon souvenir de cette soirée et de cette nuit et… si. En fait j’attendais de ses nouvelles. Mais j’en ai pas donné non plus, je suis plutôt pas mal occupée. Heureusement le tournage se termine demain et je suis rassurée qu’on puisse enfin souffler avec ces quelques mois hauts en tensions. Pas pour moi, mais plutôt pour l’actrice avec qui je partage l’affiche, qui a de sérieux problèmes avec l’homosexualité, si je comprends bien le langage de son corps. Elle s’est pas si mal débrouillée au final, après tout c’est une bonne actrice. Il est assez tôt quand je finis ma dernière scène de la journée, et je m’éclipse sans tarder dans ma loge, parce que je n’ai pas vraiment envie de traîner, j’ai plutôt envie de rentrer chez moi, prendre un bon bain, mater une série, ce genre de chose. Quelques coups frappés à la porte de ma loge me font soupirer, parce que je suis fatiguée et que ça arrive si souvent qu’on me rappelle pour un raccord, un morceau de scène qui n’a pas été enregistré, filmer un bout de main, ou simplement une esquisse pour un contre champs alors que je ne joue même pas dans la scène. Qu’importe. J’offre la possibilité à la personne d’entrer, et je vois un des assistants, casque sur les oreilles, qui me dit que quelqu’un est venu pour moi. Surprise, je le vois se décaler, et une voix se fait entendre, avant qu’elle ne s’arrête, visiblement plus surprise que moi de la voir ici. « Hey. Euh… Je… » Je ne peux réprimer un rictus, déjà parce que je suis contente de la voir, et puis parce que je sens bien que ce n’était pas tout à fait ce qu’elle avait prévu. « Tu vas bien ? » Je hoche la tête en lui souriant. « Ça va je te remercie. Ça fait plaisir de te voir. Même si visiblement c’était pas vraiment ton but. » Je ne m’en formalise pas, je trouve ça plus amusant qu’autre chose. « Si tu cherches ta mère, elle est encore en train de tourner, il lui restait une scène ou deux quand j’ai fini tout à l’heure. » Je ne la lâche pas des yeux, penchant un peu la tête sur le côté. « Tu peux rester là en attendant qu’elle finisse si tu veux, sinon je peux te guider jusqu’à sa loge, puisque Jake n’a pas fait son boulot correctement… » Je ne veux pas la forcer à rester si elle n’était pas là pour me voir.

Je suis le technicien jusqu’à une loge, pensant qu’il m’emmène directement à ma mère. Erreur. C’est à la porte de celle de Leilani à laquelle je me retrouve. Gênée de lui imposer ma visite imprévue je bafouille un vague bonjour et lui demande comment elle va. Elle sourit, beaucoup moins mal à l’aise que moi, amusée même, on dirait. La jolie brune n’hésite d’ailleurs pas à mettre les pieds dans le plat, affirmant être ravie de me voir, même si ce n’était à priori pas mon objectif d’origine. Je fais une légère moue et hausse les épaules, inutile de nier « Non, pas exactement, mais je suis contente de te voir aussi. » et c’est une réalité. Si les choses n’avaient pas été si compliquées avec ma mère, je l’aurais sans doute rappeler, parce que j’ai apprécié chaque moments passés en sa compagnie, intimes ou non. La jeune actrice n’a pas de difficulté à trouver la raison de ma présence, et m’informe qu’il reste encore à ma mère quelques scènes à tourner. Je hoche la tête « Ok. » elle me propose alors d’attendre là ou de m’accompagner jusqu’à la bonne loge cette fois. J’échappe un petit rire « C’est un peu ma faute… Il a dit me reconnaître et m’a guidé jusqu’ici. » je secoue la tête « J’aurais dû me douter qu’il était probablement plus au fait des photos de toi et moi, que de mon lien de parenté avec Rose. ». Ça fait un peu bizarre de parler de ça, surtout après ne pas s’être recontactées après cette soirée et nuit passées ensemble. « Je voudrais pas t’embêter. Tu voulais peut-être partir, si tu as fini. » à en croire son sac posé là, comme si elle avait été prête à quitter les lieux. Mais peut-être qu’elle a prévu de partir quoi qu’il arrive ? Me proposant juste de rester dans sa loge plutôt qu’ailleurs ? Je me perds toute seule « Enfin… Je… ». Ça ne me ressemble pas tellement d’être comme ça, mais définitivement un truc me trouble. Je souffle un coup, je ne suis plus à ça près, et lui adresse un sourire « Ouais je veux bien rester, si ça t’embête pas, évidemment. ». C’est dingue comme la simple présence de Lei est agréable, elle a ce côté sociable, avenant qui met tout de suite à l’aise. « Désolée, c’est juste que ça me prend de cours. J’avais pas pensé te croiser. » je ris un peu « C’est un plaisir, mais comme on a pas reparler après… » je hausse les épaules, elle sait à quoi je fais allusion « Les choses ont été un peu compliquées avec ma mère quand elle a vu les photos, tu t’en doutes. » nous échangeons un regard entendu « Mais paradoxalement ça nous a rapproché. » ok, dit comme ça, ça pourrait être bizarre que Leilani soit un sorte de lien « Enfin, qu’elle me tombe dessus en pensant que j’avais tout calculé pour l’emmerder, ça a ouvert le dialogue, on a pu mettre un peu les choses à plat. » c’est pas encore parfait, mais y’a du mieux, c’est indéniable.

La jeune femme ne cherche pas à nier, au contraire même, elle avoue que ce n’était effectivement pas son but, mais elle n’en est pas moins heureuse de me voir. Ce serait mentir de prétendre que ça ne me fait pas plaisir. « C’est un peu ma faute… Il a dit me reconnaître et m’a guidé jusqu’ici. J’aurais dû me douter qu’il était probablement plus au fait des photos de toi et moi, que de mon lien de parenté avec Rose. » Je ris un peu et hausse les épaules. « Disons que la dernière fois qu’on t’a vue dans la presse comme étant la fille de Rose et Jacob, tu avais sûrement encore des couettes. » J’exagère un peu, mais il y a quelques années qu’on ne l’avait pas vue dans les tabloïds, alors forcément… « Je voudrais pas t’embêter. Tu voulais peut-être partir, si tu as fini. » Je secoue légèrement la tête. Généralement, on nous demande de rester là une bonne demi-heure après la fin du tournage de notre dernière scène de la journée, au cas où. Et ça ne fait pas encore trente minutes. Je vois que la jeune femme est mal à l’aise, quelque chose cloche, et j’attends qu’elle ait fini de balbutié pour comprendre ce qu’il se passe. « Ouais je veux bien rester, si ça t’embête pas, évidemment. » Finalement, un sourire étire mes lèvres et je lui désigne le canapé de ma loge, pour qu’elle y prenne place si elle a envie. J’envoie un sms à une des assistantes pour qu’elle me ramène deux cafés. La jeune femme s’excuse d’avoir été surprise par la situation, ça me fait sourire plus qu’autre chose. Elle s’embourbe un peu dans des explications, ne met pas vraiment les mots sur ce qu’on a partagé, je me demande où elle veut en venir. « Les choses ont été un peu compliquées avec ma mère quand elle a vu les photos, tu t’en doutes. » Je hoche la tête. Rose ne m’en a pas parlé, ça a été un sujet qui est resté dans les oubliettes, parce qu’elle est professionnelle et que je n’avais aucune envie de mettre des tensions entre nous, par peur de faire foirer le tournage. Elle m’avoue que ça les a rapprochées, et je suis un peu surprise de l’entendre, mais heureuse pour elles au final. « Enfin, qu’elle me tombe dessus en pensant que j’avais tout calculé pour l’emmerder, ça a ouvert le dialogue, on a pu mettre un peu les choses à plat. » J’ouvre un peu plus grand les yeux, surprise surtout par le début de sa phrase. « Que tu avais calculé ça pour l’emmerder ? » Je ne peux réprimer un léger rire. « Ah ouais, elle a un beau syndrome de persécution. Ou alors elle est super mégalo… » Je fais une petite moue, faudrait peut-être pas que je commence à dire du mal de sa mère quand même. « Enfin, l’important c’est que ça aille mieux, qu’elle ait compris que tu avais pas fait ça pour l’emmerder… Tu lui as dit que c’était moi qui t’avait invitée ? » Je lui souris, charmeuse plus ou moins malgré moi. L’assistante arrive avec nos cafés, je la remercie et la laisse repartir, donnant son gobelet à Terri. « Et du coup, c’est toi qui n’avait plus envie de me voir pour pas qu’elle t’en veuille, ou c’est elle qui t’a demandé de ne pas me revoir ? » J’ai besoin de savoir à quel point Rose a une influence sur sa fille, j’ai aussi envie de savoir si Terri m’aurait rappelée, s’il n’y avait pas eu sa mère entre nous…

J’admets sans détour que ma présence dans la loge de la brune est totalement fortuite, le fruit d’une erreur d’interprétation de ce technicien qui m’a guidé jusqu’ici. Alors pourquoi si je le reconnais je me sens malgré tout mal à l’aise ? Elle n’est pas la première personne avec qui j’ai passé une nuit et que je recroise par la suite. Pourtant c’est bien une certaine gêne que je ressens. Sans doute parce que j’appréhende un peu cette discussion après un silence radio dont je ne suis pas particulièrement fière. Les circonstances étaient particulières et je crois que dans le fond je crains que ma mère n’apprenne que je suis là avec Leilani. Elle aurait vite fait de se faire des films – normal pour une actrice – et penser que je me suis foutue d’elle en promettant n’avoir rien prémédité. Non, il faut que j’arrête de raisonner comme ça, avoir un peu plus confiance en elle et ce lien qu’on semble toutes les deux enclines à rétablir. J’accepte de rester dans la loge de la jeune femme, je me vois mal aller camper dans celle de ma mère sans savoir pour combien de temps elle en a, ça peut durer des heures. Je prends place sur le canapé comme la brune m’invite à le faire et continue maladroitement mon discours. Je ferais sans doute mieux de me taire et faire comme si de rien était, ça serait pas la première fois. Mais là je n’y arrive pas, j’ai l’impression d’avoir à me justifier, ou plutôt apporter un explication, alors que concrètement on ne s’est rien promis, je ne crois même pas que l’on se soit dit que devait s’appeler. J’explique à Leilani que les photos dans la presse ont eu un effet plutôt radical sur ma mère dont la réaction a été aussi paranoïaque qu’immédiate. Ça a l’air de la surprendre, et elle enchaine sur un portrait peu reluisant de Rose, qui pourtant colle assez bien. Si avant j’aurais surenchéris, je n’en fais rien cette fois, sans doute parce que j’ai essayé de changer de perspective, me mettre un peu plus à sa place. C’est loin d’être simple. Je hausse les épaules avec un petit rictus amusé, je vois bien qu’elle se retient d’en dire plus « Pour sa défense j’ai fait pas mal de truc pour l’emmerder. ». Elle enchaine me demandant si j’ai dit qu’elle était à l’origine de l’invitation « Non. Je lui ai juste dit la vérité, y’avait rien de prémédité. » je lui renvoie une œillade malicieuse en réponse à cet air légèrement charmeur qu’elle affiche « N’est-ce pas ? ». Après tout Lei pouvait avoir une idée derrière la tête dès le début, mais je ne crois pas. Le feeling entre nous étant indéniable et le contexte de la soirée aidant, c’est juste qu’une chose en a entrainé une autre… Nos cafés sont servis et la jeune actrice n’hésite pas à se montrer directe. Elle m’interroge sur la cause de mon silence, je fais une légère moue « J’aurais eu envie de te revoir, mais je t’ai pas appelé pour pas risquer de la froisser. » avoué-je avant de boire une gorgée de café, je ris un peu « Valait mieux pour tout le monde que je lui évite une syncope, non ? » dans l’éventualité où elle aurait refusé de continuer le tournage ou quelque chose comme ça, c’était mieux de ne pas tenter le diable. « Vous terminez demain, c’est ça ? » je pose la question à titre d’information, même si j’en connais déjà la réponse. Et peut-être aussi un peu pour tendre une perche à la jolie brune, si jamais ça lui donnait une idée. « Et toi ? Planning trop chargé ? Mauvais timing ? Ou… pas envie de me revoir ? » je sais que je peux parler franchement avec Leilani, c’est d’ailleurs un des trucs qui me plait chez elle, entre autres.

« Pour sa défense j’ai fait pas mal de truc pour l’emmerder. » Je ne sais pas si ça défend vraiment sa mère d’avoir réagi comme ça au quart de tour. J’ai beau essayer de me mettre à sa place, je ne comprends pas pourquoi elle ne se contente pas seulement d’être heureuse pour sa fille, si cette dernière l’est, ça va de soi. « Non. Je lui ai juste dit la vérité, y’avait rien de prémédité. » J’ai un juste retour à mon petit air malicieusement charmeur, et ça me plait beaucoup je dois avouer. « N’est-ce pas ? » Cette fois je ris un peu, arquant un sourcil pour lui mettre le doute. « Je sais pas, peut-être. » J’ai été pleinement moi-même ce soir là, sans artifices, juste la Leilani que je suis dans l’intimité, pas celle qu’on placarde sur les tabloïds, même si nous en avons malheureusement fait les frais. Je demande quand même à la jeune femme si le fait qu’elle ne m’ait pas rappelée vient d’un manque d’envie ou d’une forme de protection envers sa mère. Elle m’avoue avoir eu envie de me revoir, mais c’est la seconde solution qui entre en ligne de mire. Ne pas avoir eu envie de froisser Rose. Hum. Ça ne va pas m’aider à aimer davantage la mère Galea, je dois bien avouer. « Valait mieux pour tout le monde que je lui évite une syncope, non ? » Je ris et hoche un peu la tête. « Surtout pour la prod ouais… » Même si je doute qu’elle aurait pu faire une syncope si Terri et moi nous étions revues. Une crise de nerfs au pire. « Vous terminez demain, c’est ça ? » Je hoche la tête. « Oui c’est ça, le tournage physique en tout cas. On aura sûrement des prises voix à faire pour des raccords, mais pas nécessairement besoin d’être dans la même pièce elle et moi, j’avoue que ça va me faire des vacances ! » Je ris un peu, mais faudrait pas que je sois davantage désobligeante non plus. Remarque, elle connaît sa mère, elle sait quand même comment elle est. Mais je ne dirai pas de mal d’elle, surtout que ce n’est pas du tout dans mon tempérament. « Et toi ? Planning trop chargé ? Mauvais timing ? Ou… pas envie de me revoir ? » C’est de bonne guerre. Je fronce un peu le nez et hausse légèrement les épaules. « Concours de circonstances ? » Je lui souris et ajoute. « Quand mon agent m’a dit qu’il y avait des photos de nous, j’me suis douté que ça risquait de foutre la merde. Je m’attendais à un ras de marée de la part de ta mère, mais elle en a même pas parlé, elle s’est comportée comme si de rien n’était. Enfin bref. J’me suis dit que le mieux c’était encore d’attendre la fin du tournage pour te rappeler, en prenant le risque que t’aies plus envie de me voir. » Je suis sincère, et même si je suis actrice, c’est pas mon genre de baratiner, surtout pas dans ce genre de situation. Cette fille me plait, je sais pas à qui elle ne plairait pas remarque, et le courant passe bien, notre complicité et évidente. Je vois pas pourquoi je n’aurai pas eu envie de la revoir.

La situation n’est pas vraiment faite pour me mettre à l’aise. Je me retrouve face à Leilani de manière totalement imprévu, et si c’est un plaisir de la revoir, j’aurais souhaité que ce soit dans d’autres circonstances. Mais le hasard fait bien les choses paraît-il, alors pourquoi ne pas lui faire confiance pour une fois ? C’est ce que je choisis en acceptant de rester le temps que ma mère ai fini son tournage. Impossible de passer à côté de notre absence de nouvelle mutuelle et la brune aborde le sujet de manière directe. Sa franchise est une des choses que j’apprécie chez elle, et je réponds avec sincérité, expliquant la situation un peu délicate avec ma mère suite à la parution des photos dans la presse. J’ai pris la décision de ne pas en rajouter, risquer de mettre de l’huile sur le feu… Après tout, ça aurait pu mettre pas mal de monde dans la merde en cas de crise de la part d’une des actrices principales. Même si notre rencontre aujourd’hui est fortuite elle ne tombe pas si mal, le tournage prenant fin demain, j’en ai la confirmation par la jeune femme. Des raccords seront sans doute à prévoir, mais globalement les interactions entre elle et ma mère vont être limitées et elle s’en réjouit. La brune, rit, mais se retient aussi un peu, vis à vis de moi, parce que Rose est quand même ma mère et je viens de lui dire qu’on s’est un peu réconciliées. Cependant je comprends que les choses n’ont pas été simples, et je suis bien placée pour savoir combien Rose peut être dure, cassante, pas franchement facile à vivre. Si je me suis expliquée sur mon silence je compte bien obtenir une réponse de la part de Lei, qu’est-ce qui l’a retenu de son côté ? Les hypothèses sont diverses, mais c’est le concours de circonstances qui répond le mieux à ma question. Je suis un peu surprise que ma mère ne lui ai absolument pas parlé des photos, mais même pas une petite allusion. Elle aurait pu envoyer une pique ou deux, sans vraiment rentrer dans le vif du sujet, mais non, elle n’a rient dit, pas un mot. Leilani a prit le parti d’attendre la fin du tournage, prenant le risque que de mon côté je n’ai plus envie de la revoir. Je hausse les épaules, arquant un sourire malicieux « Je suis une fille de star, je pourrais faire la diva, c’est vrai. » et même si j’ai essayer de prendre ce rôle, de faire croie que je suis une sorte de peste, ce n’est pas moi. Je secoue la tête puis la regarde « J’ai pensé que tu préférais éviter de prendre des risques. Parce que t’as déjà bien assez à gérer avec ta notoriété sans avoir besoin d’en rajouter si on est vu ensemble. » je hausse les épaules « Et puis avant de me calmer, j’avais pas la meilleure réputation qui soit. » j’ai agis connement en pensant que si je donnais à ces rapaces ce qu’ils voulaient j’aurais un peu de répit. Sauf que ça a été pire encore et j’ai tout simplement pris la fuite, en ayant pris goût aux conneries au passage. J’ai l’impression que c’est une autre époque, d’être une autre personne aujourd’hui, plus proche de celle que je suis vraiment. Et bien que le passage de la brune dans ma vie ai été bref, je crois qu’elle a eu son rôle à jouer dans cette reconnexion avec moi-même. « Imaginons que je ne sois pas contre te revoir… Qu’est-ce que tu dirais ? » demandé-je avec un petit air innocent avant de siroter mon café.

Oh je suis loin d’être parfaite, j’ai moi aussi déjà baratiné quelques fois pour obtenir gain de cause, sur des choses plutôt minimes. Ma mère détestait le mensonge et je me pliais à l’exercice de la vérité sans broncher. Mais en grandissant, on est facilement perverti, et le mensonge apparaît comme un échappatoire parfois, une solution de facilité. Mais j’aime à penser que la vérité, même parfois douloureuse, si elle est dite avec tact et bienveillance, est largement plus bénéfique qu’un mensonge. Tout ça pour dire que je ne joue pas les actrices en répondant à la question de la jeune femme. Si je ne l’ai pas rappelée, ce n’est pas que je n’en avais pas envie, mais plutôt parce que ce n’était pas le bon moment à mon sens. Terri pensait que je voulais éviter les risques, les paparazzi, parce que j’ai selon elle autre chose à gérer dans ma carrière. Elle n’a pas tout à fait tort au fond, mais je crois que malgré tout ça, j’aurai bien aimé la revoir malgré tout. « Et puis avant de me calmer, j’avais pas la meilleure réputation qui soit. » Je lève un peu les yeux au ciel en souriant. « Ça m’est égal ça. » Elle peut avoir fait toutes les conneries du monde, je m’en fous. Le passé appartient au passé, moi ce que je vois, c’est la fille qu’elle est maintenant, et cette fille là me plait. C’est tout. Peut-être parce qu’elle ne laisse pas voir qui elle est à l’importe qui, si tel est le cas je me sens chanceuse. « Imaginons que je ne sois pas contre te revoir… Qu’est-ce que tu dirais ? » lache-t-elle sur un ton malicieux, sourire au coin des lèvres. Je souris aussi, la regarde un peu plus longuement, faisant mine de réfléchir. « Hum… avant de répondre, est-ce que tu crois que je vais devoir demander la permission à ta mère si je veux sortir avec toi ? » Sortir avec elle, pas dans le sens se mettre ensemble, mais le sens le plus littéral qui soit, sortir, l’emmener quelque part, dîner, ciné, ou juste boire un verre, peu importe. « Non parce que si c’est ça, c’est pas grave, faut juste que je me prépare à affronter le dragon d’une manière différente de ce que j’ai pu expérimenter jusque là. » Je ris à nouveau, elle sait que je plaisante, même si ce n’est qu’à moitié. J’en rajouter, mais elle n’est pas idiote, elle sait la réputation qu’a sa mère sur les plateaux de tournage. Ça a beau être une actrice incroyable, bourrée de talent, que tout le monde admire, mais bordel ce qu’elle est casse couilles. « Ils viennent d’ouvrir un nouveau cinéma dans la rue derrière chez moi, un petit truc qui paye pas de mine, où ils passent que de vieux fils et de vieux dessins animés. Je suis allée voir Peter Pan la semaine dernière, ils vont passer Le Roi Lion, Le magicien d’Oz… j’pourrai te filer le planning si ça t’intéresse… » Oui, c’est une invitation plus ou moins déguisée.

Leilani se fout de ce qu’à pu être ma réputation, bonne ou mauvaise ça lui est égal. Elle me dit ça avec tant de spontanéité que je la crois sans problème. Une nouvelle fois je sens ce truc simple et naturel chez elle qui m’a tant plus, jusqu’à me laisser aller à lui tomber dans les bras. J’ai la sensation de pouvoir être totalement moi avec elle, et c’est une sensation bien trop rare pour que ça ne me fasse rien. Je me suis protégée derrière une image, j’ai voulu être quelqu’un que je n’étais pas, je me suis un peu perdue à vrai dire et depuis plusieurs mois j’essaie de me retrouver. J’émets l’hypothèse que je ne pourrais apprécier de la revoir, lui laissant ensuite la main quant à cette éventualité. Qu’est-ce que ça lui inspire ? Avant de répondre ou proposer quoi que ce soit, la brune veut s’assurer de tous les paramètres, surtout un, ma mère. Je ne peux me retenir de rire « Non t’auras pas besoin. Y’a bien longtemps qu’elle a renoncer à essayer de contrôler mes sorties. » je ne prends pas mal ce petit portrait que la jeune actrice dresse de ma mère, sa réputation n’est plus à faire… Elle est plutôt chiante quand elle s’y met. Je secoue la tête, sourire aux lèvres « Ne t’en fais pas, y’aura pas de dragon à affronter. » confirmé-je une seconde fois. La voie est libre, elle se lance, m’expliquant qu’un petit ciné de quartier vient d’ouvrir dans le sien, spécialisé dans les vieux films et dessin animés. Si c’est un truc qui m’intéresse elle se propose de me donner le planning, je hoche la tête, charmée par l’idée « Intéressant. Je suis une inconditionnelle du Roi Lion. » je hausse les épaules « Mais aller au cinéma seule, c’est pas trop mon truc. » je bois une nouvelle gorgée de café « Si ton emploi du temps s’y prête, on pourrait trouver une séance pour y aller ensemble ? » demandé-je avec un fond de malice. Je lève l’index, ce n’est pas sans conditions « Mais pas de moqueries sur d’éventuelles larmes qui se perdraient en route. Ok ? » je peux être une vraie madeleine quand je regarde un film, c’est une catastrophe. Je ne pense pas que ce soit le genre de Leilani de se moquer, je dis ça comme ça avec légèreté, parce que c’est ce qu’elle m’inspire.

Terri me rassure quant à sa mère. Selon elle, je n’aurai pas de problème avec elle, il y a longtemps qu’elle ne se mêle plus de la vie de sa fille. Enfin, ça a quand même son importance j’imagine, ça reste sa fille. Mais je ne crois pas être une mauvaise fille, je ne vais pas faire plonger Terri dans les conneries ou les excès. Je suis clean, ce qui est assez rare dans le métier. Pas de dragon à affronter alors. Je hausse les épaules en souriant. « Tant pis, je range mon épée de chevalier servant. » Prendre les choses à la légère quand je le peux, ça fait partie de ma personnalité. Je ne perds pas de temps et lui parle de ce cinéma que j’apprécie, à deux pas de chez moi. Terri m’avoue être une ‘inconditionnelle’ du Roi Lion. En même temps, c’est la base j’ai envie de dire. « Mais aller au cinéma seule, c’est pas trop mon truc. Si ton emploi du temps s’y prête, on pourrait trouver une séance pour y aller ensemble ? » Un sourire naît au coin de mes lèvres, en même temps, je n’ai pas proposé ça pour qu’elle y aille seule, ça va de soi. « Mais pas de moqueries sur d’éventuelles larmes qui se perdraient en route. Ok ? » Je joue l’outrée en l’entendant. « Parce que tu crois que je te laisserai te moquer de moi quand je vais pleurer ? Parce que évidemment je vais pleurer ! Je pleure à chaque fois… » Je sais qu’elle parlait d’elle, mais c’est simplement pour lui signifier qu’on est dans le même bateau, et que non, je ne suis pas du genre à me moquer. Je pense que si ça avait été le cas, j’aurai pu trouver des choses pour le faire bien avant une projection du Roi Lion. « Je t’enverrai le planning par sms, il est quelque part chez moi, je devrai pas avoir trop de mal à le retrouver. Parce qu’ils ont pas de site internet ni de réseaux sociaux. A l’ancienne quoi ! » Et ça me plait aussi. A l’intérieur, tout a été fait comme un vieux cinéma, même si je suis sûre que les sièges étaient moins confortables à l’époque. Mais ce n’est qu’un détail. On frappe à ma porte, c’est une assistante qui me demande sur le tournage pour un raccord. Heureusement que je ne suis pas partie. Je lui fais signe que j’arrive et repose mon regard sur Terri. « Tu veux venir ? Je pense que ta mère doit avoir bientôt fini, si on en est aux raccords… » Je me lève et lui tends la main pour l’inciter à se lever. Main de laquelle elle se saisit, la sensation est agréable. Une fois la porte franchie, je lâche sa main, plus pour la protéger qu’autre chose. Rose nous voit arriver ensemble, je crains le pire, mais elle ne dit rien, se contente de sourire à sa fille. Il ne nous faut pas longtemps pour faire les quelques plans serrés dont ils avaient besoin, et le tournage prend vraiment fin. Tout le monde applaudit comme à chaque dernière journée de tournage. Ce sera d’autant plus intense demain. « Elle est venue pour te voir ? » me demande Rose, ce qui me surprend un peu. « Non, c’est toi qu’elle est venue voir. Bonne soirée ! ». Je fais un signe de main à Terri, de loin, et m’éclipse sans plus tarder.