sailing away. (rosalind)

La ‘ronron thérapie’ n’était pas un mythe. Du moins, c’est ce que venaient lui signifier les clients du bar à chats dans lequel elle travaillait, chaque fois qu’était venu pour eux le moment de partir. Beth leur adressait alors son meilleur sourire tout en leur signifiant qu’elle était heureuse qu’ils aient passé un bon moment. Mais en réalité, son nouveau poste l’exténuait et elle était de plus en plus sceptique concernant les bien faits fournis par le fait de travailler à cet endroit. S’occuper des chats était une chose mais s’occuper des commandes des clients en était une autre. N’ayant pas l’habitude de mettre de l’eau dans son vin, la jeune femme avait du mal à se contenir lorsque certains clients se montraient désagréables. Et surtout, elle avait du mal à supporter le fait de finir plus tard. Elle était perpétuellement en quête de liberté et ces nouvelles contraintes ne lui correspondaient pas. Cela l’empêchait de sortir, lui faisait louper des soirées auxquelles elle tenait. Et surtout, Karma et Rosalind lui manquaient. Les choses se bousculaient ainsi dans son esprit, ce qui l’avait obligée à s’ouvrir à ce sujet. Lorsqu’elle en avait fait part à sa patronne, celle-ci lui avait dit qu’il lui suffisait de s’accorder un temps d’adaptation pour que tout s’arrange.  La discussion s’était terminée lorsque sa patronne lui avait dit de prendre une journée de repos. Beth l’avait remerciée avant de s’empresser de retourner à son appartement. Elle s’était directement affalée dans le fauteuil afin de scroller les réseaux sociaux. Rapidement, elle avait flairé le bon plan. Une soirée dans laquelle elle pouvait facilement rentrer. Et elle comptait bien trainer sa meilleure amie avec elle. Elle envoyait un message à Rosalind afin de la prévenir, avant de se mettre à se préparer. Lorsque la blonde rentra à l’appartement, Beth était déjà vêtue d’une robe moulante noire décolletée. Elle l’accueillait d’une brève étreinte avant de la presser pour qu’elle se change. Le tout était chronométré, puisque la brune craignait que sa meilleure amie ne change d’avis. « Allez Rosie ! Il faut qu’on y aille, j’ai envie d’un Burger King avant et on n’aura pas le temps d’aller chercher un menu si on traine. » plaidait-elle en faisant irruption dans la chambre de Rosalind, sans prendre la peine de frapper au préalable. La blonde semblait déjà regretter l’idée de sortir. « Pourquoi tu tires cette tête ? On va sur un yacht, ça va être génial ! » tentait de la motiver Beth. « Et tu devrais mettre ça. C’est l’idéal pour mettre tes yeux en valeur. » Elle la conseillait. Après tout, Rosie avait l’air d’hésiter.

Comme à mon habitude je m’étais levée tôt et avait fait mes corvées habituelles - notamment dans le jardin de la maison-, je m’étais ensuite dirigée vers le restaurant dans lequel je travaillais en tant que serveuse. Après avoir effectué mon service et mangé un repas sur le pouce, j’étais partie dans le centre de bénévolat prendre connaissance des missions du jour. C’était une petite routine qui s’était installée, et même si je n’étais pas à 100% satisfaite de mon train-train quotidien, au final j’étais plutôt contente de moi. Je continuais quand même à chercher un moyen de me sentir plus utile qu’en étant une simple serveuse. C’était un travail qui ne me convenait vraiment pas, mais pour le moment je n’avais d’autre choix que de faire avec. J’étais au centre de bénévolat quand j’ai reçu un texto de Beth me pressant de rentrer à la maison pour qu’on aille à je ne sais quelle fête. D’habitude mon téléphone était éteint. Je regrettais que ce ne soit pas le cas à ce moment. Mais puisque j’avais vu son message, je ne pouvais pas ne pas répondre. Alors je lui ai répondu que j’arrivais. Je finis quelques tâches au centre avant de récupérer mes affaires et de rentrer à la maison comme Beth me l’a demandé. J’ai à peine passé la porte qu’elle me saute dessus et me pousse vers ma chambre pour que je me change. En soupirant je m’exécute, je prends une douche express avant de me planter devant mon dressing qui n’offre pas énormément de choix. Je reste plantée là quelques secondes. Quelques secondes de trop visiblement puisque Beth fait irruption dans ma chambre pour me dire d’aller un peu plus vite. « Euh je… réfléchis à quelle tenue porter. » je réponds simplement. Je n’ai pas le moins du monde envie d’aller à une soirée sur un yacht avec des inconnus. Mais je ne peux pas laisser Beth y aller toute seule. Je n’ai pas vraiment d’autre choix que de la suivre. « Pourquoi tu tires cette tête ? On va sur un yacht, ça va être génial ! Et tu devrais mettre ça. C’est l’idéal pour mettre tes yeux en valeur. » Je dois reconnaître que j’admire sa capacité à s’émerveiller de tout et n’importe quoi, cette façon qu’elle a d’être aussi enjouée. J’admire ça, vraiment. C’est juste que… « Est-ce qu’on pourrait pas simplement rester ici ? Allez chercher des menus Burger Kings si c’est ce que tu veux, et passer la soirée tranquille à la maison pour une fois ? » je tente. Mais je sais bien que c’est peine perdue. « Parfait, allez sors que je me change. » je lâche finalement avant d’attraper la robe qu’elle m’avait désigné. Une robe que je n’avais jamais portée parce que je la trouvais un peu trop courte à mon goût. Mais elle était jolie. Toute simple, blanche, col rond, le bas un peu évasé. J’enfile donc ma robe et rejoins Beth dans le salon. Je me dis que je peux peut-être nous retarder un peu, ce sera peut-être assez pour rater le départ du yacht ? « Il y a une raison particulière pour que tu veuilles faire la fête ce soir ? » Je suis prête à parier que la réponse est non, ou alors “profiter de la vie et s’amuser”. Je l’adore, mais toutes ces fêtes, ça me fatigue. « Tu connais des gens sur ce yacht d’ailleurs ? »

Depuis qu’elle était sortie de la prison que représentait son ancienne communauté, Beth profitait de la vie, cherchait à s’imprégner de chaque instant. Et lorsqu’il n’y avait rien de suffisamment hors du commun qui se profilait à l’horizon, elle s’arrangeait pour créer l’évènement elle-même. C’était ainsi qu’elle était revenue à la colocation afin d’embarquer Rosie avec elle. Chaque fois qu’elle se rendait quelque part, elle mettait un point d’honneur à lui trouver une invitation, sachant qu’il s’agissait du seul moyen de la faire sortir. Pourtant, il y avait tellement de choses à voir dans ce nouveau monde qui s’offrait à elle depuis des années ! Beth œuvrait pour son bien, et elle était certaine que si Rosalind trainait toujours un peu les pieds, elle finissait par rentrer ravie du moment qu’elle avait passé dehors. Cette croyance résidait tellement fort dans son esprit qu’elle ne pouvait envisager un seul instant qu’il puisse s’agir d’une illusion. Alors elle continuait d’insister, de presser sa meilleure amie pour que celle-ci se mette en route. « Est-ce qu’on pourrait pas simplement rester ici ? Allez chercher des menus Burger Kings si c’est ce que tu veux, et passer la soirée tranquille à la maison pour une fois ? » La proposition parvenait à surprendre la brune, qui restait interdite durant quelques instants. « Mais… On aura l’occasion de passer plein de soirées à la maison. Là c’est quelque chose d’unique… » protestait-elle. Son ton se faisait un peu moins assuré qu’à l’accoutumée, tant la surprise s’était faite présente. Pourtant, cela semblait suffisant pour convaincre Rosie. « Parfait, allez sors que je me change. » Beth se laissait mettre à la porte et allait s’asseoir sur le canapé en attendant que sa meilleure amie change de tenue. Elle s’impatientait quelque peu, ne tardant pas à oublier la tentative de protestation de Rosalind. Elle avait sûrement dû faire ça pour la forme, rien de plus. Par plaisir de protester. Oui, ce devait être ça. Rosie finissait par réapparaître, avec une unique question sur les lèvres : « Il y a une raison particulière pour que tu veuilles faire la fête ce soir ? » Beth se tournait vers elle. « Pour s’amuser ? Profiter de la vie ? » Ses sourcils froncés s’effaçaient pour laisser place à un large sourire encourageant. « Tu connais des gens sur ce yacht d’ailleurs ? » demandait Rosalind alors que Beth se relevait finalement du canapé. « Peut-être que Tom sera là. C’est celui qui m’a filé les entrées. » Elle répondait en haussant les épaules, comme si c’était évident. Attrapant Rosie par la main, elle l’entrainait ensuite vers l’extérieur. L’arrêt au Burger King fut un passage incontournable. Ce fut alors qu’elle finissait sa dernière bouchée de hamburger que les deux amies arrivaient enfin face au yacht. « J’ai rien autour de la bouche hein ? » demandait-elle en se tournant vers Rosalind. Elle accompagnait ses mots par un geste de l’index. « Et j’espère que toi t’es toujours prête. Enfin… Que tu te prépares psychologiquement ? » Elle hésitait. La nonchalance de Rosalind était toujours difficile à gérer en début de soirée. « Allez, après quelques verres tu vas passer la meilleure soirée de ta vie. » C’était la première fois que l’impression que Rosie n’avait pas du tout envie de participer à la fête, se faisait aussi persistante.

J'adore Beth, mais parfois elle m'exaspère. Je ne comprends pas son désir - ou même son besoin - de faire sans arrêt la fête. Pour profiter de la vie, qu'elle me dit. Est-ce qu'il n'y a pas autre chose à faire qu'aller boire de l'alcool sur un yacht avec des inconnus ? J'admet que je ne vois pas ce qu'il y a de bien là dedans. Mais je ne peux pas la laisser y aller toute seule. Je ne pourrais plus me regarder en face s'il lui arrivait quelque chose. Alors je suis bien obligée de la suivre, et d'au moins faire semblant d'y prendre un minimum de plaisir. On mange à Burger King et j'admet que ça, c'est sympa. C'est pas dans notre communauté qu'on pourrait manger ce genre de choses ! Et mine de rien, j'adore quand même passer du temps avec elle. On mange donc notre repas, évidemment elle s'assure qu'elle est parfaite avant de se rendre à la fête. « Non, c'est bon tu n'as rien. » je la rassure avec un petit sourire. « Et j’espère que toi t’es toujours prête. Enfin… Que tu te prépares psychologiquement ? » « Ne t'en fais pas pour moi, ça va ! » je réplique, toujours munie de mon sourire. Ce n'est pas un secret que je n'aime pas les fêtes. Du moins Karma le sait. Est-ce que Beth le sait ? C'est vrai qu'en y réfléchissant, je fais toujours de mon mieux pour qu'elle soit heureuse, je vais jusqu'à faire semblant de m'amuser à toutes ces fêtes où elle m'emmène. Alors peut-être que j'ai un peu trop fait semblant après tout. Mais ce n'est pas grave. J'accepte ce fardeau que je me suis imposée toute seule. C'est ce qu'il se passe quand on ment après tout, on doit gérer les conséquences de nos actes et de nos paroles. Tant pis pour moi. « Allez, après quelques verres tu vas passer la meilleure soirée de ta vie. » Dommage que je ne boive pas. Ce n'est pas tant à cause de la religion, plus une question de goût. Je n'aime pas vraiment le goût de l'alcool. Trop... âpre ? Je ne sais pas si c'est le bon mot. Peu importe. « Tu dois avoir raison. » je renchéris. Je ne sais pas comment je vais faire pour me dépêtre de tous ces mensonges, mais ce soir ce n'est pas le moment d'y penser. « Allons-y ! » je m'exclame finalement alors qu'on sort du fast-food. « Tu sais, tu n'as peut-être rien de spécial à célébrer, mais je crois bien que moi si. » je reprends tout à coup, repensant à ma conversation avec Ariella il y a quelques jours de ça. « Tu sais qu'en plus du bénévolat et du service au restaurant, je fais de la garde d'enfants. Et bien l'une des mamans est enseignante. Dans un lycée je crois ? Je ne sais pas très bien, il faudrait que je lui pose la question. » je commence simplement tandis qu'on se met à marcher. N'ayant aucune idée de la direction qu'il faut prendre, je me fie entièrement à Beth. « Et bien la dernière fois que j'ai gardé son fils, elle est rentrée et m'a invitée à rester manger. Donc on a discuté, je lui ai demandé comment c'était passé sa journée, et de fil en aiguille nous avons un peu abordé le sujet de l'éducation. » Je crois que je me perds un peu dans les détails mais c'est tout moi ça. Toujours à faire en sorte d'être absolument claire. Mais je sais qu'il faudrait que j'apprennes à abréger un peu mes histoires. Surtout que ce n'est pas si croustillant. « Et je lui ai dit que c'était triste que certains de ses élèves ne soient pas attentifs ou dorment en cours, parce que certains n'ont pas la chance d'avoir ce genre d'éducation. Moi y comprise. » Je sais que Beth n'aime pas aborder le sujet de la communauté Amish ou de tout ce qui y touche de près ou de loin. Alors je tourne un peu autour du pot, j'essaie d'expliquer sans vraiment mettre les pieds dans le plat. « Et c'est là qu'elle m'a parlé de passer un diplôme en candidat libre ! Alors je me disais que je pourrais faire ça. Ariella est prête à m'aider à étudier tous les sujets qu'il faut, et puis je n'aurais pas à arrêter le travail. En plus en période scolaire j'ai beaucoup moins de garde d'enfant à faire, alors j'ai beaucoup plus de temps libre. Et je me disais que mettre ce temps à profit pour obtenir un diplôme ce serait bien. » je lâche finalement en haussant les épaules avant de me retourner vers elle. « Qu'est-ce que tu en penses ? » Une preuve de mon envie de m'intégrer dans ce monde qui me parait toujours aussi étranger après toutes ces années. Ce n'est pas si mal, si ?

Beth sentait que Rosie n’était pas réellement enchantée par la perspective de cette sortie. C’était étrange. Jamais elle ne l’avait sentie flancher de cette façon. Mais la Hostetler savait que sa meilleure amie avait une journée de travail derrière elle, qu’elle était sans doute un peu fatiguée. Il lui suffisait de la remotiver un peu pour que tout aille mieux. Beth en était convaincue. « Tu dois avoir raison. Allons-y ! » Un large sourire venait prendre place sur les lèvres de la brune, tandis qu’elle percevait un changement dans l’attitude de son amie. Elle semblait déjà reprendre des couleurs. Elle cessait de se terrer dans son petit train-train. « Tu sais, tu n'as peut-être rien de spécial à célébrer, mais je crois bien que moi si. » reprenait Rosie alors qu’elles sortaient toutes les deux du fast-food. « Ah ouais ? » Le visage de Beth trahissait son étonnement. Elle attendait la suite, restait pendue aux lèvres de Rosalind. « Tu sais qu'en plus du bénévolat et du service au restaurant, je fais de la garde d'enfants. Et bien l'une des mamans est enseignante. Dans un lycée je crois ? Je ne sais pas très bien, il faudrait que je lui pose la question. » La brune hochait la tête. Effectivement, elle savait que sa meilleure amie s’employait à toutes ces choses. Beth attendait la suite tandis qu’elle ouvrait la marche, commençant à entrainer la blonde vers leur destination. « Et bien la dernière fois que j'ai gardé son fils, elle est rentrée et m'a invitée à rester manger. Donc on a discuté, je lui ai demandé comment c'était passé sa journée, et de fil en aiguille nous avons un peu abordé le sujet de l'éducation. » La Hostetler se demandait où Rosie voulait en venir. Avait-elle abordé le sujet de leur ancienne communauté ? L’idée ne l’enchantait pas réellement. Pourtant, Beth n’hésitait pas à en parler, de son côté. Sauf que pour Rosie, c’était différent. Elle semblait regretter cette époque passée. « Et je lui ai dit que c'était triste que certains de ses élèves ne soient pas attentifs ou dorment en cours, parce que certains n'ont pas la chance d'avoir ce genre d'éducation. Moi y comprise. » Forcément. Beth serrait la mâchoire. La perspective de la fête paraissait soudainement bien loin. Elle cherchait toutefois à faire bonne figure. Après tout, Rosalind présentait ça comme une bonne nouvelle. « Et c'est là qu'elle m'a parlé de passer un diplôme en candidat libre ! Alors je me disais que je pourrais faire ça. Ariella est prête à m'aider à étudier tous les sujets qu'il faut, et puis je n'aurais pas à arrêter le travail. En plus en période scolaire j'ai beaucoup moins de garde d'enfant à faire, alors j'ai beaucoup plus de temps libre. Et je me disais que mettre ce temps à profit pour obtenir un diplôme ce serait bien. » Un vent de soulagement s’emparait de Beth. Pendant un instant, elle avait cru que sa meilleure amie comptait prendre la parole dans une classe afin de présenter la communauté Amish. Ou quelque chose du genre. « Qu'est-ce que tu en penses ? » Le sourire se ravivait sur le visage de la brune. Elle s’arrêtait de marcher pour prendre son amie dans ses bras, rassurée. « T’as failli me faire peur ! » s’exclamait-elle, laissant paraître son soulagement dans sa voix. « C’est une super idée ! Tu vas pouvoir t’occuper comme ça. Et puis, imagine la fierté que tu auras quand on te remettra ton diplôme ! Parce que c’est sûr, tu vas l’avoir ! » Beth était lancée et il allait être compliqué de l’arrêter. Le soulagement avait laissé place à une grande excitation. Rosie avait les capacités pour aller loin, la brune le savait. « C’est le diplôme de fin de lycée ? Tu le passerais en un an alors ? Tu sais déjà ce que tu feras quand tu l’auras ? » Questions légitimes aux yeux de la Hostetler. Rosalind courrait tellement dans tous les sens qu’il semblait difficile qu’elle puisse se poser. Mais Beth croyait en elle. Elle y arriverait. « Tu pourras encadrer ton diplôme au-dessus du canapé ! Comme dans les films ! » Elle avait des étoiles dans les yeux. Cette annonce était peut-être préférable au fait d’aller à une soirée, finalement.

Je ne suis pas certaine de la façon dont je dois prendre son commentaire. Tu vas pouvoir t'occuper comme ça. Est-ce seulement dans mon esprit ou est-ce que ces mots sont particulièrement condescendants ? Je suis occupée ! Je m'occupe à rendre le monde meilleur, comme je peux. Et justement mon objectif est d'en faire plus. Parce que j'ai l'impression de ne pas en faire assez, j'aimerais pouvoir aider plus de gens, les aider à une plus grande envergure. Mais en étant personne, en n'ayant aucun diplôme, en se contentant de donner des coups de main à droite à gauche, en étant bénévole durant tout mon temps libre... non, je n'ai pas l'impression que ça suffise. « Merci Beth. » je dis simplement quand elle m'assure que je l'aurais ce diplôme. Pour le coup, ça booste un peu ma confiance en moi. Faut dire qu'avec l'éducation qu'on a reçue, je ne suis pas totalement rassurée concernant les études "classiques". Mais j'ai envie d'essayer, et comme dans tout ce que je fais, je me donnerais à fond et je n'abandonnerais pas. « Oui, le diplôme de fin de lycée. Je crois que ce sera une sorte d'équivalence je suppose ? J'en sais trop rien. Mais oui, je le passerais en un an, à la fin de cette année scolaire en théorie. » je réponds en haussant les épaules. J'imagine que j'en saurais plus au fil du temps, au fur et à mesure de mes cours avec Ariella et ses collègues professeurs. « Je ne sais pas trop à vrai dire... Je ne veux plus être serveuse parce que ça n'aide pas particulièrement les gens. Mais je ne sais pas vraiment vers quoi je devrais me tourner. Peut-être que je pourrais faire des études à l'université et voir par la suite si je trouve quelque chose qui me passionne vraiment ? Je sais que ça coûte très cher mais on a quelques économies, et puis si j'ai des notes exemplaires et que je les éblouis avec ma candidature, j'obtiendrais peut-être une bourse d'études qui me permettrais d'entrer à l'université. Mais je sais toujours pas quoi faire exactement. Il y a tellement de choix ici ! Dix ans, et j'en découvre encore chaque jour ! » je m'exclame alors. Il faut dire qu'en dix ans je ne me suis pas énormément ouverte à la nouveauté non plus. J'essaie de m'intégrer tout doucement dans ce monde, mais je sais bien que je suis à la traîne, que je m'accroche à mes racines. Et ça non plus je ne sais pas si c'est une bonne ou une mauvaise chose. Peut-être qu'en étudiant, je trouverais une sorte d'équilibre entre mon passé et mon présent. Je l'espère du moins. « Il faut déjà que je l'obtienne ! » je lâche finalement quand elle me dit qu'on pourra accrocher mon diplôme au mur. Mine de rien, lui en avoir parlé me fait du bien et me motive d'autant plus à aller jusqu'au bout. « Alors, on y va à cette soirée ? » je demande, bien que je regrette presque cette question. Si j'y vais c'est uniquement pour elle, mais peut-être que j'arriverais à me laisser aller un peu, comme je l'ai fait avec Karma la dernière fois.