It's a new life for me, ooh. And I'm feeling good (Loan&Reed

Ma vie n’a jamais été du genre à être réglée comme du papier à musique. Et ce depuis toujours. De toute manière je crois que je me ferai chier avec une vie toute bien rangée. Moi j’aime le désordre, j’aime les challenge, j’aime quand c’est difficile et que je dois me battre pour avoir ce que je veux. Trop facile ne m’intéresse pas. Je crois même que je me mets moi-même des bâtons dans les roues parfois. Ce bar, c’est une de mes plus grandes fiertés, mais il a créé aussi mon plus grand échec : mon divorce. On n’a rien sans rien dit le dicton. Mais je ne désespère pas, je sais que Stella a toujours des sentiments pour moi, autant que j’en ai pour elle. Mais en attendant de pouvoir nous retrouver, j’en profite pour vivre une seconde jeunesse. Le plus difficile au final, c’est ma relation avec mes filles. Ma cadette est partie vivre avec son autre mère, et ma benjamine est en pleine crise d’adolescence. Tout est en train de partir en vrille, mais je tiens le cap, et je me raccroche à mon bar, et à ces conquêtes, sans doute un peu trop jeunes, sans doute un peu trop nombreuses.

Ce matin, c’est seule que je fais l’ouverture. Il est neuf heures et les premières clientes n’arriveront sans doute qu’aux alentours de dix heures, pour les plus habituées qui viennent chercher leur café à leur pause. En général, j’assure le service le matin, jusqu’au rush de midi où une ou deux serveuses/barmaid viennent me prêter main forte. Pour le moment, tout roule très bien, en semaine. Pour le week end, l’effectif est plus important. Je suis en réserve, les oreilles alertes au bruit de la porte d’entrée du bar à laquelle j’ai ajouté une petite clochette, pour les moments seulement où je n’ai aucune visibilité sur la porte d’entrée. Je termine de ranger le dernier carton quand j’entends une voix se faire entendre. « salut ? Il y a quelqu’un ? » Je me frotte les mains et reviens dans la salle principale, rejoignant le bar où une charmante demoiselle m’attend visiblement. « Bonjour ! Bienvenue au Planet, je vous sers quelque chose ? » Toujours souriante, toujours avenante, c’est de cette manière que j’ai réussi à fidéliser ma clientèle, et j’en suis très satisfaite.

La jolie blonde semble hésitante, je lui laisse le temps de la réflexion, jusqu’à ce qu’elle commande un simple café noir. Je hoche la tête en lui souriant et me tourne dos à elle, la laissant s’installer confortablement pendant que je prépare son café. Mes gestes sont précis, habitués, comme une chorégraphie apprise par coeur tant elle a été répétée maintes et maintes fois. La tasse dans la coupelle, j’ajoute une cuillère, un sucre et un petit chocolat noir, avant de déposer le tout devant la jeune femme. « Ça faisait, longtemps que je n'avais pas bu un aussi bon café » dit-elle assez rapidement après avoir bu la première gorgée. J’affiche un large sourire satisfait. « Heureuse qu’il vous plaise. » Je continue de m’activer légèrement derrière le bar pour finir de ranger et organiser pour le rush de midi. « C'est un chouette endroit. Vous engagez du personnel ? » me demande-t-elle sans plus attendre. Mon regard se repose sur elle, s’attardant avec plus d’attention sur les traits de son visage. De là, je ne peux pas juger le physique de la blonde, mais je ne doute pas qu’elle ait des arguments valables. « Vous cherchez du boulot ? » Répondre à une question par une autre question est un jeu auquel j’adore jouer, pour déstabiliser les gens en général. « Le personnel tourne pas mal, j’engage pas mal d’étudiantes, et une fois leurs études terminées elles nous quittent pour de nouveaux projets. Il y a des filles qui restent plus longtemps, d’autre sont là juste quelques mois. Vous avez déjà travaillé dans la restauration ? » L’air de rien, c’est une sorte d’entretien d’embauche qui commence. Je jauge la jeune femme, écoute avec attention ses réponses, m’attarde sur ses expressions, sa manière de parler, de se tenir. Je la charme légèrement de mes regards, de mes sourires, pour voir sa manière de réagir. Mon radar a tendance à penser qu’elle aime les femmes, mais on ne peut jamais être sûre, et il y a toujours le facteur ‘je me cache’, bien qu’elle n’ait pas vraiment l’air de se cacher. J’attends de voir.

Je ne mets pas bien longtemps à sentir le regard de la petite blonde sur mon corps. Plus aucun doute, elle aime les femmes et n’est pas là par hasard. D’un naturel avenante et charmeuse, je m’adresse à la jeune femme sur un ton agréable, l’incitant à me parler davantage d’elle. Ma question est ciblée, j’aimerai savoir ce qu’elle recherche dans ce boulot. On est rarement serveur par vocation. « Si vous incluez de devoir réchauffer les rations de survie lyophilisées de l'armée dedans... Alors, oui. Sinon aucune. » Je penche la tête légèrement sur le côté face à cette réponse pour le moins étonnante et déconcertante. « En tout honnêteté, je n'ai jamais travaillé dans un bar, ni dans une cuisine. » C’est bien qu’elle soit honnête effectivement. Elle m’explique avoir travaillé dans l’armée. Je l’écoute avec grande attention, me posant un millier de questions qui resteront pour le moment sans réponse, parce que ce ne sont pas des questions qu’on pose à une personne venant de quitter l’armée. Elle doit trouver un nouveau travail, c’est compréhensible. « Puis quoi de mieux pour recommencer une vie d'un bar où on peut rencontre de nouvelle personne... Et j'ai bon goût » J’arque un sourcil, intriguée face à sa dernière réplique. « Pour ce qui est de l'alcool et des endroits où on fait un bon café. » Je laisse échapper un petit rire aussi flatté qu’amusé. J’aime les compliments sur mon bar, je ne vais pas m’en cacher. « Si vous êtes un minimum adroite, et motivée, le job est à vous. »[/color] Je la vois assez surprise, alors je prends les devants. « Je vous fais visiter ? » Un signe de tête pour l’inciter à me suivre. « On peut peut-être se tutoyer ? J’ai l’habitude de tutoyer mes employés, ça n’empêche pas le respect mais ça réduit un peu la barrière patron/employé. » Un nouveau sourire à l’attention de la blondinette, et je prends les devants pour lui faire visiter le bar. La partie plus lounge, la partie pour les personnes voulant déjeuner ou dîner, le coin avec le billard, les toilettes, et je finis par la porte où il est marqué ‘personnel uniquement’. « Et derrière cette porte la cuisine, la réserve, la salle de repos, et mon bureau. » Je m’appuie contre le mur, croisant mes bras en la regardant sans failli. « Tu es dispo pour commencer quand ? »