Big Talk || June

Il était déjà tard lorsque June quitta enfin le studio.
La journée avait été longue. Elle avait un léger mal de crâne.
« Is there anything else I can do for you today, Ms Stewart ? »
June leva la tête vers l’assistant aux traits juvéniles qui avait glissé la tête dans son bureau. Malgré sa lassitude, elle sourit l’air de rien.
« Nah, you’re good John, you can piss off and go back home, » plaisanta-t-elle, faussement aggressive.
Le garçon eut un sourire et la salua avant de disparaître, la laissant s’enfoncer dans le fauteuil noir, rembourré, dans lequel elle s’était installée une heure plus tôt pour parcourir les teneurs du dernier plan de communication qu’on lui avait envoyé pour son prochain album. Une journée entière au studio. Le genre de jour dont elle se passerait bien. Qui lui donnait envie de disparaître sans préavis, et de ne réapparaître que quelques jours plus tard.
Qui lui donnait envie d’aller chercher la présence de Lynn.
Elle leva les yeux vers la fenêtre du bureau. Le ciel était parsemé de nuages blancs comme le coton. Quelques points noirs, ombres d’oiseaux lointains, parsemaient l’étendue azur uniforme, qui ne tarderait pas à changer de couleur.
Le calme du ciel lui rappelait la paix qu’elle trouvait auprès de son amante. Elle ferma les yeux un moment pour retrouver le visage aimé au creux de l’obscurité de son esprit.
Son sourire, la tendresse de son regard.
Sa pondération, sa douceur.
Les paupières se relevèrent quand le téléphone portable se mit à vibrer sur son bureau.
Shit, I’m late to meet with Eirlys ! réalisa-t-elle brusquement.

June laissa un pourboire conséquent au chauffeur de son taxi. Elle n’avait pas pris la voiture ; quand elle sortait avec sa meilleure amie, il était rare qu’elle soit en état de conduire à la fin de la soirée. Elle salua chaleureusement le conducteur qui l’avait reconnue, lui laissa un autographe en passant, et referma la porte derrière elle. Par réflexe, elle réajusta sa veste en cuir brun sombre, remit en place ses cheveux frisés afin que les boucles n’accrochent pas le col de sa veste.
Elle sentit sur elle un regard, trouva rapidement la source de cette impression : juste à l’entrée du Planet, une ancienne conquête la fixait avec envie. June se fendit d’un sourire et tira sur son t-shirt rouge vif pour souligner son décolleté de façon avantageuse. Elle lissa son jean juste après, puis laissa ses talons claquer sur le bitume pour rentrer dans le café où Eirlys l’attendait très certainement.
Elle passa la porte et vérifia l’heure une dernière fois, s’assurant qu’elle était bel et bien en retard. Elle n’eut aucun mal à repérer la tête blonde dans la foule. Une tête blonde déjà occupée à faire son marché parmi les jolis minois de la soirée. June haussa un sourcil, leva les yeux au ciel avec un sourire et, après une courte pause, franchit la distance entre Lys et elle.
En silence, elle croisa les bras et se plaça juste derrière son amie, observant son manège d’un œil amusé. Son sourire se mua en un rire quand Eirlys fut prise par surprise.
« You should see your face, » railla-t-elle alors qu’un bras passait par-dessus ses épaules.
Elle se laissa conduire jusqu’à la table, docile, non sans un dernier regard à la cible choisie par Eirlys, cette fois-ci pour retenir son visage – elle ne voulait pas empiéter sur ses plates-bandes plus tard si la soirée dégénérait.
En attendant, elle s’installa face à la blonde et attrapa le verre qui lui était destiné. Elle jeta un œil à la couleur ambrée du liquide, le porta à son nez pour s’assurer que Lys n’ait pas fait d’erreur de commande – après toutes ces années, c’était peu probable, mais elle agissait par réflexe.
« Thanks for the rum. Next round’s on me, » la remercia-t-elle sobrement en portant le verre à ses lèvres. « So… it’s been a long time, Lys, what have you been up to ? » demanda-t-elle dans la foulée, sourire aux lèvres. « I was afraid Scarlet might have killed you after one of your hooks up, » taquina-t-elle.
Il n’était pas inhabituel que June se moque des infidélités d’Eirlys ; non pas qu’elle puisse la juger, pensa-t-elle.
Elle reposa son verre sur la table en le tenant du bout des doigts et désigna du menton le bar – elle ne pensait pas que sa plaisanterie pouvait avoir touché un sujet sensible – pour poursuivre tranquillement :
« You sure I’m not ruining your night ? I can drink my rum and let you go back to business if you don’t want to make this cutie over there wait. »
Et elle ponctua Eirlys d’un regard clairement moqueur, avant de relever son verre pour trinquer à sa santé et de tremper à nouveau ses lèvres dans le breuvage.

La raillerie fit rire Eirlys qui avait l’habitude avec June. Il faut dire, elles passaient plus de temps à s’envoyer des vannes qu’à discuter normalement. Ce n’était bien sûr pas un manque d’amour de la part l’une de l’autre : elles étaient meilleures amies depuis des années maintenant et ça avait toujours été comme ça. C’était une façon comme une autre de montrer leur affection au final sans rendre les choses bizarres entre elles.
Un sourire étira les lèvres de la blonde lorsque son amie annonça qu’elle offrait la prochaine tournée. Encore une fois, c’était une sorte d’habitude. Elle porta son verre à ses lèvres puis réfléchit une seconde à la question, avant de grimacer à la mention de Scarlet. C’est vrai que c’était pour ça aussi qu’elle voulait la voir à l’origine. Eirlys garda le verre entre ses doigts et posa sa main libre juste au-dessus de son coude. Elle laissa son amie poursuivre, haussa un sourcil à sa question – elle, ruiner sa soirée ? Jamais de la vie – et secoua la tête en souriant.
« Nah, don’t worry. You can’t ruin my night, plus I’m sure that cutie can wait a little. And if not I’ll just go find someone else to end up with. I mean, you know me. Plus, you’ve seen me. »
Eirlys se redressa et présenta sa personne des deux mains, bien que tenant toujours son verre. Elle lâcha un rire et le posa enfin après avoir bu une nouvelle gorgée.
« As for Scarlet… Well… I’d have to find her to have her kill me. »
Elle pinça les lèvres et poussa un soupir. Maintenant elle allait devoir expliquer la situation de façon plus détaillée, même s’il n’y avait pas grand-chose à dire. En voyant la réaction de son amie elle se lança toutefois pour ne pas la faire trop attendre.
« I kind of have been up to my usual, but one day when I got home Scarlet wasn’t there and there was just a note. She said she couldn’t do it anymore, wished me luck and she just left, apparently. » Nouveau soupir de la part de la blonde. Elle secoua la tête et finit son verre cul sec, clairement affecté par la rupture, plus qu’elle ne voudrait le laisser paraître. « I mean. I get it. I guess I just didn’t see it coming, you know. It’s been all these years and she leave me now, when… I don’t know… I don’t know why she left so suddenly. And I just feel weird. I’ve been with her for so long, and I thought so many times about leaving myself, I don’t know, I always thought I’d be the one to do it. I feel kinda lame, to be honest. »
Son regard était troublé, et ses sourcils froncés. Elle ne savait pas quoi faire de toutes ces informations, elle avait du mal à se rendre compte du départ de sa petite amie. Si elle devait être honnête, elle était un peu perdue qu’après plus de dix ans de vie commune elle disparaisse comme ça en laissant juste un mot derrière elle.
Eirlys regrettait déjà d’avoir fini son verre, parce que là elle en aurait bien eu besoin encore. Et elle n’allait pas aller en rechercher un tout de suite alors que June offrait la tournée suivante. Elle savait que son amie avait une bonne descente ceci dit, donc avec de la chance le suivant ne tarderait pas à arriver.
« Anyway, whatever, you should tell me what you’ve been up to. You’re the one on your way to become a superstar ! »

« Hmm… That’s a fair point. »
June hocha la tête avec une gravité de circonstance quand son amie fit briller son arrogance habituelle. En plus de dix ans, June n’avait jamais vu Eirlys rentrer seule de soirée si telle n’était pas son intention. Elle leva son verre en signe d’approbation et avala une courte gorgée de rhum. Le liquide brun lui rappelait ses origines familiales. La saveur sucrée qui roulait sur sa langue la renvoyait à la bicoque dans laquelle elle avait grandi, à la musique colorée qui s’élevait le dimanche matin dans son quartier, au papier peint jauni de la salle à manger de ses parents, aux disputes de ses frères, aux cris des voisins.
Elle s’humidifia les lèvres, récupéra les reliquats d’une saveur qui s’échappait déjà, avant de poser un regard tranquille sur Eirlys. Elle ne fut pas trompée par l’humour acerbe de la blonde. Elle fronça les sourcils, soucieuse d’en savoir plus. Le bruit ambiant couvrit le claquement sonore que fit le verre qui heurta le bois de la table. June l’avait reposé un peu trop brusquement. Elle croisa les bras et attendit que son amie développe son idée. Elle n’avait pas besoin de la presser de question, ce serait mal venu, et Eirlys savait parfaitement qu’il ne servait à rien de la faire mariner.
Le résumé fut succint. Deux phrases, courtes, efficaces, droit au but.
« I see, » commenta la chanteuse d’un voix neutre.
Elle soupira en détaillant l’attitude d’Eirlys. Elle leva les yeux vers le verre de whisky qui se vida, puis dévisagea Eirlys en silence. Au fond, c’était une bonne nouvelle. Elle avait essayé de convaincre son amie que sa relation était toxique depuis des années, et il semblait évident qu’aucune des deux femmes ne s’épanouissait dans ce couple.

Elle garda ses pensées pour elle alors qu’Eirlys s’ouvrait, de façon assez surprenante. Et de façon tout aussi surprenante, elle tenta grossièrement de changer de sujet.
June ne retint pas un rire amusé et un haussement de sourcils surpris.
« Really, Eirlys ? Does it look like you can change subject that easily ? » fit-elle remarquer en se redressant sur sa chaise.
Légèrement agacée, elle secoua la tête et détourna le regard, le temps de balayer la salle autour d’elles. Le bar était bondé de groupes d’amis et de couples, tous plongés dans leur conversation ; certains semblaient sérieux, d’autres riaient de bon cœurs, amis venus se détendre, intellectuels absorbés dans un débat quelconque, personnes préoccupées par un problème qui leur tenaient à cœur. Des gens aussi ordinaires que June et Eirlys.
Le regard de la métisse tomba sur le verre à whisky vide.
« If you need to know about how I’m doin’ as a superstar, you can just open any magazine, I’ve been doin’ a few headlines and interviews. Plus, I’m just doin’ great ‘cuz I’m great, there’s nothing interestin’ to talk about there, sweetie. »
Elle ponctua sa phrase d’une longue forgée de rhum. Elle n’allait certainement pas laisser Eirlys l’attendre pendant trop longtemps pour faire une seconde commande.
« You’re usually not that easily beaten down Lys, I’m surprised, » poursuivit-elle ensuite comme si la conversation n’avait pas été interrompue par leur digression. « I get that you’ve been used to this relationship but… Scarlet took a lot away from you… » Elle hésita une seconde à donner un exemple, mais préféra éviter de rappeler de mauvais souvenirs à son amie dont le moral n’était manifestement pas aux beaux fixes, « …You were scared she might hurt herself if you left her – don’t you feel at least a little bit relieved that she left ? »
Elle interpela de loin une serveuse en même temps qu’elle posait sa question, lui demanda qu’on leur serve la même chose, même si elle n’avait pas fini sa boisson, et elle poursuivit à nouveau comme si de rien n’était.
« Plus, hasn’t it been your goal ? Pushing her to leave you with your infidelities ? »
Cette fois-ci, elle haussa les épaules et vida le fond de son verre.
Lorsqu’elle le reposa, elle fixa un instant le verre transparent, momentanément absente, absorbée par ses pensées. Que pouvait-elle bien dire sur la relation d’Eirlys de toute façon, vu la façon dont elle géreait les siennes… ?

Nom de code de la mission : Changer de Sujet.
Statut de la mission : échec.
Evidemment la meilleure amie d’Eirlys n’allait pas se laisser avoir par ses techniques d’évitement. Elle était la seule personne au monde – avec qui Lys était encore en contact – à réussir à esquiver ses méthodes pleines de mauvaise foi. Elle ne put cacher son bref pincement de lèvres derrière son verre cette fois-ci et se contenta de jouer avec l’un de ses nombreux bracelets. Son regard suivit celui de son amie sans revenir pour autant, seulement pour sourire lorsque June évoqua ses apparitions de plus en plus nombreuses dans des magazines. Oui, elle pourrait suivre la vie de June depuis les pages en papier glacé, mais elle n’aimait pas ça. Elle préférait la chaleur de la voix de June, l’accent qu’elle offrait à ses idées, à ses projets, comme le souffle qui alimentait une flamme brûlante de passion derrière des airs plus froids.
« Meh, » fit-elle avec toute l’éloquence du monde. « I prefere to hear it from you, at least I get to enjoy your beautiful voice. »
June revint sur le sujet principal, celui qu’Eirlys aurait aimé balayer sous le tapis. Bien sûr, elle avait raison sur bon nombre de points évoqués : Scarlet avait été un poids pendant des années, une inquiétude de fond dont Lys ne pouvait pas se défaire par peur de provoquer la mort de celle qui avait tenu une place importante dans son cœur un jour, et en effet elle avait tenté de s’en débarrasser sans prendre de responsabilités émotionnelles. C’était que la blonde était particulièrement mauvaise pour ça et les fuyait autant qu’elle le pouvait, se mettant ainsi souvent dans des situations impossibles.
Eirlys laissa flotter la question le temps que la serveuse dépose les verres devant elle. Elle sourit à la jeune femme, se permit un clin d’œil lorsqu’elle la remercia, puis revint vers sa meilleure amie et la discussion déplaisante qu’elle avaient.
« Yeah, it was, and yeah she did put a strain on my life. » Elle prit son verre et le conduisit à ses lèvres pour boire. « And yeah, she took a lot from me. » L’américaine n’avait pas vraiment besoin de préciser ce à quoi elle pensait, June connaissait l’histoire.
Eirlys ferma les yeux une seconde, puis soupira en les rouvrant.
« I guess somewhere I am relieved, but I als have so much stuff to take care of now. Like, I don’t know what I’m supposed to do with the house. Like… I could keep it, I guess, but it’s a big place and I don’t really need it. And even if we kept most things separated, I’ll have to take care of everything we had together. It’s a lot. I don’t even know if I should like… contact the police because she disappeared. »
C’était une possibilité après tout. Ou alors Eirlys devrait juste arrêter de regarder des séries policières. D’autant qu’Eirlys n’avait pas la meilleure relation avec les forces de l’ordre en général – quoique ça s’était amélioré depuis les dernières années, maintenant qu’elle manifestait moins et se contentait surtout d’aller chercher des jeunes de son association pour les sortir de là après une manifestation ou une nuit trop arrosée, et qu’il ne savait pas trop vers qui se tourner à part elle.
« Like, I know I’m supposed to be happy, but I mostly feel bitter right now. Like, she could have done it better. Well, I guess it’s Karma. »
Elle soupira et but une large gorgée.

La voix d’Eirlys tira June de ses réflexions moroses. Elle croisa les bras sur la table, ramena le verre plein ramené par la serveuse vers elle et le garda au creux de sa main tout en observant son amie d’un air posé. Elle ne pouvait s’empêcher de dresser un parallèle entre l’attitude de Lys envers Scarlet et celle qu’elle avait pu avoir avec la drogue. Scarlet n’était guère qu’une addiction destructrice, et ce depuis qu’elles étaient au lycée. A l’époque, elle n’avait pas pu le voir. Même si elle blessait répétitivement Eirlys, celle-ci ne savait pas comment vivre sans elle, alors elle était restée… et avait fait n’importe quoi de sa vie amoureuse.
Elle garda pour elle sa réflexion. Elle doutait que la blonde trouve le parallèle pertinent, et elle se moquerait certainement de June si celle-ci essayait de lui proposer de gérer sa rupture à l’aide du Twelve Steps program qui l’avait sortie, elle, de son addiction.
Elle se contenta donc de l’écouter, en bonne amie. Elle eut un sourire ironique lorsque Lys parla de la maison. Elle-même partageait un espace assez réduit avec son frère et sa sœur, et cela lui convenait. Elle concevait sans mal que vivre seule, dans un espace trop grand, puisse causer des angoisses à Lys. Elle n’allait que rarement à l’appartement seule pour cette raison : le vide l’angoissait.
Et puis elle dut retenir un rire sardonique quand Eirlys mentionna la police. Elle dissimula son amusement derrière son verre de rhum et se contenta de hocher la tête pour indiquer qu’elle écoutait toujours. Elle croyait en Dieu, mais pas particulièrement au karma ; si celui-ci existait, Lys n’aurait pas été coincée pendant tant d’années avec l’autre tarée.
« If she hasn’t been leaving any note or nothing, you definitely should inform the cops, » fit-elle calmement en reposant son verre sur la table. « Because real karma would be for her to be dead somewhere on a back alley and you don’t wanna become the first suspect in a police investigation. That would be shit karma, and I don’t want to bail you out girl. »
Elle avait adopté un ton particulièrement sérieux, presque sinistre, en même temps qu’elle développait ces idées morbides ; et puis elle se laissa aller contre son dossier, avant de se fendre d’un rire amusé.
« That would be a hella story, wouldn’t it ? » observa-t-elle joyeusement cette fois.
Apparemment, Lys n’était pas la seule à regarder un peu trop de séries policières.
Toutefois, il pouvait être plus prudent qu’en effet, Lys ne reste pas sur l’incertitude et que quelqu’un vérifie qu’elle allait bien, que ce soit une personne de la police ou un agent privé.
Un nom apparat dans l’esprit de June, comme le chant impromptu d’un rossignol dissimulé dans le feuillage d’un arbre.
« But surely she ran away. I can ask a fri-… an acquaintance of mine to investigate. »
Elle baissa les yeux à sa maladresse.
Elle ne pouvait pas considérer Lynn comme une amie, elle ne pouvait pas non plus lui mettre une étiquette plus précise que « connaissance », elle n’allait tout de même pas parler de « la femme mariée avec qui elle couchait ».
« She’s a P.I., she could just check she’s still well and alive – though that would ruin all the fun of it. You wouldn’t have to pay anything for it, I’m sure she’d do it as a favor. » Ou contre une invitation à diner au restaurant.
Quoi que, elle n’était plus sûre de rien avec Lynn.
« You’re right though, she could have done things properly. I guess Scarlet will always be an annoying bitch, won’t she ? » fit-elle dans la foulée, levant son verre pour inviter Eirlys à trinquer à cette triste verité.

Scarlet avait laissé un mot, mais pour être honnête Eirlys doutait que ce soit suffisant pour l’écarter de la liste des suspects si sa désormais ex venait à réapparaître découpée en morceau – ou de quelque autre manière que ce soit, peu importe comment un potentiel taré aurait pu la tuer et disposer du cadavre par la suite. Pas qu’Eirlys pensait que c’était ce qui était arrivé, ni que c’était ce qu’elle méritait. La blonde avait ses torts dans la relation, même si elle ne voulait pas l’admettre tout haut, et elle ne pouvait pas s’empêcher de se sentir coupable.
Elle but une nouvelle gorgée puis rit à la constatation de sa meilleure amie. Oui, ce serait certainement une histoire intéressante, digne d’une série criminelle.
« Yeah, but I kinda don’t want to end up in the middle of a story like that. Weird right ? »
Le sarcasme crépitait dans ses mots comme les étincelles d’un feu où l’on vient de déposer une nouvelle bûche. Ce serait le pompon si quelque chose était arrivé à la garce qui lui avait gâché la vie qui viendrait gâcher encore plus sa vie. Mais encore une fois, probablement un retour de Karma, parce que même si June ne pensait pas que Lys méritait d’être punie, ce n’était pas le cas de la blonde.
Encore quelque chose qu’elle n’admettrait pas comme ça, pas tant qu’elle continuerait inconsciemment de nourrir sa misère sentimentale.
Finalement Eirlys haussa un sourcil à la recommandation de June, et surtout à la façon dont elle buta sur ses mots, quelque chose de particulièrement inhabituelle chez la brune. Elle connaissait une détective privée ? Qui en plus ne ferait pas payer Eirlys pour l’investigation ? Cette femme était très certainement plus qu’une simple connaissance, et si June s’était reprise sur la façon de la qualifier, c’était que les incertitudes planaient.
Elle but une gorgée de son verre en fixant June avec suspicion et sans le poser jaugea son amie. Elle fit tourner le liquide ambrée dans sa main avant de le lever et de laisser ses suspicions dans leurs coin. Après tout elle pouvait l‘interroger là maintenant tout de suite.
« She sure will. »
Elle trinqua, but une gorgée, puis posa son verre. Elle fixa l’alcool avant de regarder de nouveau June une fois sa décision prise.
« Yeah, I think it would be the most sensible option to ask a P.I., this way I’ll know she isn’t in a ditch somewhere and that I won’t end up in prison. » Même si Eirlys avait déjà une assez bonne idée de ce que ce serait de finir enfermée entre quatre murs sans pouvoir s’échapper. Raison de plus pour ne pas y aller, ceci dit.
Elle préféra changer de sujet pour revenir à l’interrogatoire qu’elle comptait mener auprès de June.
« So, who exactly is this P.I. ? I mean, it would be a pretty huge favour to ask to give me a freebie like this. Especially if you’re just an acquaintance. »
Elle laissait à June la possibilité de ne pas expliquer dans les détails. Après tout sa question ne concernait que l’identité de la personne pas leur relation à proprement parler, non, là l’interrogation était sous-entendue aussi elle pourrait très facilement l’ignorer. Elles avaient toutes les deux leurs secrets parfois, même s’ils étaient rares, et Eirlys le respectait.