Le Deal du moment :
Nike : Jusqu’à 50% sur les articles de ...
Voir le deal

You were made to keep my body warm - Einar

 :: A little break :: archives :: rps abandonnés
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
You were made to keep my body warm - Einar
Mer 28 Nov - 18:50
You were made to keep my body warm
Einar & Gabriel



[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] La sensation est presque étrange. Sortir, côtoyer du monde, boire quelques verres, frôler des corps autres que des corps malades. Après tant de temps passer dans le fin fond de son hôpital, plus particulièrement les urgences, il s'est perdu Gabriel. Persuadé que c'est bel et bien ça la vraie vie, il s'est étonné lui-même d'accepter l'invitation d'un collègue. Le night club est alors bondé ce soir-là et il lui affirme qu'ils vont rentrer rapidement parce qu'il connaît du monde qui est déjà à l'intérieur. D'après lui, ils ont payé deux bouteilles de champagne et entament la troisième, ce qui autorise quelques privilèges. "Qu'est-ce qu'ils fêtent?" Demande-t-il alors, un peu penaud. Si c'est l'anniversaire de quelqu'un, lui qui est invité à la dernière minute aura certainement l'air d'un idiot. Ce n'est pas qu'il a peur d'être gêné ou ridicule, ce n'est plus quelque chose qui l'intéresse réellement. Cela ne l'empêche pas d'être poli. Au moins un peu. "La liberté mec. Le droit de s'amuser et la vie." Gabriel reste un long moment interdit devant la réponse qui semble comme naturelle à son collègue. La liberté. La vie. Fêter la vie en côtoyant si souvent la mort, c'est presque contre nature, au contraire pour lui. Pourtant, ça ne semble pas le déranger et enfin ils se faufilent. A cet instant, Gabriel se sent projeter dans un monde parallèle.

Il se rappelle de ses soirées, se souvient qu'il y prenait beaucoup de plaisir et les voilà, ces bras tant attendus qui se cognent, s'entrechoquent, se mêlent et se défont, presque aussi rapidement. Les regards également, il en sent un bon nombre sur lui et il sait pourquoi. Il n'est pas immédiatement à l'aise et ne fait clairement pas partie du bon décor. Cela se sent à des kilomètres à la ronde. Suivre Paul n'est pas une mince affaire mais il y arrive, jouant des coudes, apprenant certains mouvements à son corps pour en éviter d'autres. Il y a foule. Le groupe que Paul lui présente est déjà lui-même rempli d'individus mais à peine est-il arrivé qu'une demoiselle, présentée rapidement sous le nom de Jazz lui tend une coupe. Il la remercie, d'un hochement de tête. Lui qui a pourtant une mémoire de maître perd un peu la masse de prénoms au profit de la musique qui lui bousille les neurones, inlassablement. Impossible de se rappeler de tout le monde alors qu'en général, il n'en oublie pas un. Gabriel, il se souvient aussi aisément d'un prénom que d'un visage et c'est un petit moment figé dans le temps lorsqu'il croise celui du dernier. Le dernier qu'on lui présente. Son prénom à lui, il l'entend clairement. Einar. Il le répéterait presque dans un souffle s'il n'était pas certain que cela ne servirait à rien. Pas besoin de l'appeler pour que cela se voit. Ils se sont reconnus.

"Vous vous connaissez?" Lui demande alors Paul. Son regard a dû s'accrocher une minute de trop et la réponse lui semble même du coup, évidente. "Vaguement. C'était il y a longtemps." Un peu plus d'un an en fait, ce qui, de là où il est lui semble être une éternité. Paul a un sourire, il se mêle toujours des choses qui ne le regardent pas et c'est une chose que Gabriel déteste par dessus tout. Il glisse alors une main entre eux pour l'empêcher de dire quoi que ce soit. Il n'a même pas besoin de le regarder pour le réduire au silence. Gabriel cesse de dévorer Einar du regard pour se concentrer sur tout autre chose, au moins le temps d'assimiler l'information. Il n'est pas timide pour un sou Gabriel mais il n'est pas non plus l'homme le plus amical. Paul fait signe à Einar de venir et Gabriel le voit faire. En clair, il ne lui laisse pas une seconde pour digérer. Il lève les yeux au ciel et se retourne pour l'avoir bien en face de lui. Il anticipe ses pas, son arrivée, son odeur. Même ça, il s'en rappelle assez bien. "Étrange coïncidence. Pas vrai?" Lui lâche-t-il alors en levant son verre dans sa direction. Il se doutait bien Paul que Gabriel ne se laisserait impressionner par aucune situation. Pas même celle-ci. Il s'écarte pour les laisser parler. C'est fou, il a au moins le mérite d'avoir du bon sens, ce qui étonne Gabriel. "Gabriel. Nous n'avons jamais eu l'occasion de se présenter." Il le lui rappelle presque comme si Einar aurait eu, lui, le droit d'oublier alors que Gabriel, il sent encore ses mains sur sa peau. Son premier baiser. Jamais rêveur, il se demande pourtant. Que se serait-il passé s'il n'avait pas pris ses jambes à son cou?
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
You were made to keep my body warm - Einar
Jeu 29 Nov - 14:33

You were made to keep my body warm.


Comment s’était-il retrouvé là, déjà ?
Ah oui. Il avait cédé aux suppliques d’une amie –Jazz- qui disait ne pas l’avoir vu depuis « trop de temps », que leurs soirées ensemble lui « manquaient », et qu’il fallait qu’il « sorte un peu le nez du travail et profite de la vie ». Si elle savait.
Si elle savait qu’il s’était retrouvé dans l’obligation de rendre badge et arme quelques mois plus tôt, par sa propre faute, parce qu’il avait salement dérapé, et qu’il en payait aujourd’hui encore le prix, recalé au rang de simple visiteur gênant lorsqu’il osait passer les portes du commissariat pour saluer quelques collègues, écarté des dossiers sensibles et des enquêtes qu’il menait avec son partenaire comme s’il était devenu un parasite, un handicap. Condamné à ravaler sa frustration et sa colère, à vivre avec les regrets de ne plus pouvoir se consacrer à son boulot, se dédier à sa vocation. Ce job, c’était sa vie. Simple et triste pour certains, mais pas pour lui, bien au contraire.
Alors oui, si elle savait, peut-être n’aurait-elle pas insisté, peut-être l’aurait-elle laissé à ses pensées noires et ses obsessions pas tout à fait saines, ou peut-être au contraire se serait-elle insinuée avec encore plus de véhémence dans les ténèbres au sein desquelles il se complaisait pour l’en sortir le temps d’une nuit, d’une échappée.
A vrai dire, il ne pourrait jamais le savoir, parce qu’elle ainsi que les rares connaissances qu’il avait parmi le groupe de gens réunis autour de ces bouteilles de champagne qui trinquaient à la vie et partageaient rires et danses, ne savaient rien de tout cela. Ils le pensaient toujours immergé dans le travail, à enchainer les heures sans compter, à s’oublier sous des montagnes de paperasse. Et à quel point il aurait voulu, désiré, souhaité que ce soit le cas. A quel point il aurait préféré être sorti ce soir malgré les préoccupations qui patienteraient jusqu’à demain lorsqu’il reprendrait ses affaires en cours, malgré les rapports en retard et les mandats en attente, les coups de téléphone qu’il espérait et le travail colossal qui l’attendait de pied ferme au petit matin.
Mais il s’était retrouvé là à la place, dans ce club dont la musique lui explosait les tympans et le rendait à moitié sourd, chandail étroit dont les manches étaient remontées sur ses avant-bras et pantalon sombre, dans une pénombre relative qui manquait cruellement d’intimité, à lever sa flute de champagne plus par réflexe qu’en y mettant du cœur, au milieu de gens dont il connaissait à peine la moitié (et encore, connaître, c’était un bien grand mot)  et dont le reste demeurait d’illustres inconnus (même s’il avait retenu quelques prénoms, imprimé tous les visages). Des êtres qui semblaient déterminés à célébrer la vie et embrasser l’existence ensemble, à coups de liqueur et de mouvements plus ou moins coordonnés au rythme des notes qui pulsaient dans l’air, vibraient jusque dans sa poitrine. Et Einar s’efforçait à donner le change, orchestrer ses sourires et dessiner ses rires, espérant lui aussi se faire agripper par l’ambiance festive, se faire charmer par l’atmosphère jusqu’à en occulter tout le reste, et juste vivre, comme il savait si bien le faire quand il venait se perdre dans ce genre d’endroits. Il fallait croire que même cet oubli-là commençait doucement à lui filer entre les doigts, lui échapper. L’abandonner.
Néanmoins, s’il restait une chose qui semblait inaltérable (pour le moment), c’était bien sa capacité à s’oublier au contact des autres, au gré des mélodies de leurs râles et leurs gémissements, sur la symphonie de leur plaisir.

Et quelques mètres plus loin, hors du groupe, il y avait cet homme aux boucles blondes dont le regard ne cessait de le trouver, et même en poursuivant avec un entrain en demi-teinte la conversation avec Jazz, il ne pouvait s’empêcher de répondre à ses œillades intéressées. Jeu de regards plaisant, qui faisait crépiter d’envie ses entrailles et le libérait peu à peu de ses sombres songes, malheureusement perturbé par l’arrivée de Paul et d’un nouveau membre à ajouter à leur troupe hétéroclite. Par politesse et respect, Einar se tourna naturellement vers les deux nouveaux venus alors que déjà Jazz lui tendait une coupe et que Paul s’essayait aux présentations. Mais l’Islandais ne l’écouta que distraitement, son entière attention capturée par celui qui accompagnait l’homme, ses prunelles intriguées rivées sur ce profil aux courbes familières, cette silhouette joliment esquissée qui le ramenait quelques temps en arrière.
Une nuit à s’improviser barman derrière un comptoir pour rendre service à un ami.
L’alcool qui noyait la tristesse et la peine dans les prunelles limpides, y tuait les larmes jamais cédée à la liqueur.
La saveur un peu désespérée mais brûlante d’une étreinte qu’il n’avait pu apprécier que le temps d’un baiser aussi imprévisible que furtif.
Il ne détourna pas le regard quand l’autre homme parut le reconnaître et le dévisagea à son tour, lui arrachant un rictus un brin amusé alors qu’il s’employait à satisfaire de quelques vagues paroles (mais pas moins reflets de la réalité de ce qui s’était passé entre eux, aussi fugitif que ce moment fut) la curiosité d’un Paul définitivement intrigué, mais qui parut comprendre le message sous-jacent –il n’en saurait pas plus. Paul dont l’Islandais ignora le sourire entendu, peu concerné par les idées que son imagination pouvait fomenter à leur propos, avant d’hausser un sourcil à son encontre quand il lui fit signe de s’approcher. Et si le policier n’était pas timide, il n’appréciait pas pour autant l’idée  de s’imposer –après tout, il n’avait jamais revu l’autre homme, et il lui était difficile d’oublier l’air perdu qui s’était immiscé sur son visage lorsqu’il avait mis fin au baiser. Ses prunelles se firent sensiblement plus graves dans celles, insistantes, de Paul, se parant d’un avertissement silencieux, d’une demande de leur laisser un peu d’air, qu’il sembla saisir avec un air narquois et sensiblement satisfait (un peu exaspérant, il fallait l’avouer) en cédant sa place à Einar quand ce dernier se faufila jusqu’à eux. Mais l’Islandais oublia bien vite les quelques inquiétudes et l’agacement léger qui lui tiraillaient les entrailles en gagnant la proximité du barbu, la chaleur vaguement familière de sa présence, ses iris se braquant aussitôt sur son visage pour en apprécier les traits séduisants figés dans une expression mitigée. Ni gêne, ni timidité pour masquer la franchise du regard de l’Islandais, le plaisir qui s’y dissimulait malgré tout, les souvenirs qui lui revenaient doucement, agitaient son cœur d’un souffle de nostalgie et d’envie, de curiosité et d’intérêt aussi.  
« Tu l’as dit. » approuva-t-il en levant son verre à son intention à son tour, en miroir à son geste.
Etrange coïncidence peut-être oui, mais pas désagréable, loin de là.
Et il osait déceler l’absence complète d’embarras dans les iris de son interlocuteur qui transpiraient d’assurance et d’aise, dans les intonations qui faisaient vibrer ses cordes vocales et lui permettaient enfin d’apprécier le son de sa voix en dépit de la musique qui leur bombardait les sens et qu’Einar regrettait sincèrement en cet instant, parce qu’elle arrachait des profondeurs au timbre qu’il se souvenait être si agréable.
C’était l’une des raisons pour lesquelles il aimait et méprisait les night clubs suivant les situations ; les notes recouvraient trop souvent la beauté des voix.
Ses prunelles s’adoucirent un peu, un sourire charmant mais sincère craquela la chair de ses lèvres, à peine marqué, lorsque l’autre homme mentionna des présentations avortées. Gabriel.
« Je me souviens. » clarifia-t-il avec tact, même s’il demeurait incapable de pressentir ce qu’une telle affirmation pourrait inspirer à l’autre.
Il se souvenait.
De son prénom d’ange, abandonné entre deux confessions timides motivées par la liqueur qu’Einar, à un moment, avait fini par remplacement par de l’eau, soucieux de le voir frôler le coma éthylique s’il persistait à cette allure.
Des quelques vérités mal dissimulées à son oreille attentive, disséminées ça et là au fil de la conversation, alors qu’il essayait de n’être qu’un réceptacle pour tant d’émotions à noyer, étrangler dans l’oubli de l’alcool.
Du moment précis où il avait réalisé, en constatant l’équilibre malhabile de l’autre homme sur le haut tabouret, qu’il s’inquiétait trop de son état avancé d’ébriété pour ne pas lui proposer de le raccompagner (en cela, il avait échoué, il était bien obligé de l’admettre, rétrospectivement).
Des pas qui se mêlaient aux siens, de la proximité qu’il avait instaurée sans trop laisser le choix à l’autre homme, inquiet que son ivresse ne le fasse trébucher ou ne le fasse céder trop brutalement à l’appel déchirant de la gravité.
Du corps musculeux qui l’avait totalement pris au dépourvu en se substituant soudainement à l’étreinte de la nuit chaude sur son être, des doigts qui avaient dévoré la peau de sa nuque pour l’amener à la rencontre d’autres lèvres, de la brûlure de la chair contre la chair, d’un souffle qui goûtait l’alcool et quelque chose de bien plus enivrant et indéfinissable.
De ses propres phalanges enroulées autour des vêtements de l’autre, dociles, à l’écoute de ce qui s’était imposé comme une envie partagée dans le feu de l’instant, vite délaissées par la surprise pour crépiter de désir, rapprochant, attirant ce corps jamais assez proche du sien qui se languissait déjà d’un contact à peine plus marqué, tout juste plus intense.
De l’entremêlement de plaisir et désir, de surprise et d’attentes, qui embrasait les battements un peu plus fous de son cœur.
Et des prunelles orageuses, étonnées de leur propre audace, soudainement si claires et perdues, qui avaient remplacé l’étreinte des lippes sur les siennes.

Einar se souvenait très bien ; peut-être que Gabriel aussi.
« L’ami que je remplaçais ce soir-là m’a dit que tu n’étais pas repassé, je crois. » observa-t-il, sans jugement ni accusation, juste une indicible curiosité.
Révéler à demi-mots qu’il avait, en quelques sortes, espéré le revoir ? A quoi bon s’en cacher ?
Le champagne pétilla contre ses papilles, un peu plus fade à présent que son âme avait soif d’autre chose. Ses prunelles aux élans sensiblement plus intenses se séparèrent quelques instants du visage de Gabriel, voguèrent sans grand intérêt autour d’eux plus par réflexe qu’autre chose, silhouettes anonymes et amies, coupes entrechoquées et rires à gorge déployée, avant d’être attirées de nouveau à leur point d’ancrage.
« Comment vas-tu ? »
Inutile de préciser que la première (et dernière fois) qu’ils s’étaient vus, Gabriel n’était pas au mieux de sa forme, et ça non plus, Einar ne l’avait pas oublié. Ce n’était peut-être pas l’endroit pour laisser ces timides inquiétudes s’exprimer. En soi, l’autre homme ne lui devait rien, avait peut-être justement envie d’oublier les circonstances qui les avaient, de manière imprévisible, liés l’un à l’autre le temps de quelques heures –une poussière dans une vie.
Mais le ton volontairement bienveillant de l’Islandais n’exigeait rien d’autre que la vérité qu’il voudrait bien lui offrir.

Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
You were made to keep my body warm - Einar
Jeu 29 Nov - 18:25
You were made to keep my body warm
Einar & Gabriel



[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] La tension est palpable, elle l'est à des kilomètres. Paul lui-même, le roi de l'indiscrétion n'arrive pas à la soutenir malgré tous ses efforts pour s'imposer. Les souvenirs se baladent entre eux comme des images venues d'une soirée sans saveur, immédiatement changée par sa seule présence. Il se rappelle avoir été lamentable, vu sous son pire jour pour la toute première fois de son existence. Une honte qu'il serait incapable d'assumer totalement, étant le premier à proscrire l'état lamentable dans lequel la trop grande consommation d'alcool peut mettre un être, même quelconque. Surtout quelconque, en fait. Ce soir-là, il n'avait plus rien à perdre, pas même à gagner. Il perdait sa femme, sa mère et n'avait toujours aucun remède contre la maladie d'un père mort dont il tentait toujours de sauver le fantôme. Même encore aujourd'hui. Il avait même eu l'impression de se perdre lui-même jusqu'à ce qu'il glisse ses mains sur sa peau. Jusqu'à ce qu'il lui redonne vie, par son souffle, par ses caresses. Jamais elles n'avaient paru aussi douces, jamais il n'avait été aussi brûlant. Ce contact, trop profond, trop puissant l'avait fait fuir et cela pour toujours. Il n'avait pas regardé en arrière, pas même une seule fois, trop effrayé par le fait de ne jamais réussir à repartir s'il osait faire demi-tour. Trop effrayé par la réaction qu'avait eu son corps face à celui de son bel inconnu. Incapable d'accepter que jamais rien ni personne ne lui avait procuré autant de plaisir. Pourtant il y avait repensé. Ô oui, il y avait repensé, impossible de l'oublier, de le sortir complètement de sa tête, de ne pas le comparer inlassablement aux conquêtes sans fin qui, à côté de lui n'avaient aucune saveur. Etait-ce parce qu'il l'avait trop idéalisé? Ou était-il tout simplement dans le vrai? Est-ce que ces mains, face à lui, seraient les seules capables d'éveiller en lui une once de sentiments, même une bribe, même une poussière?

L'amusement sur le visage de l'homme ne le dérange pas mais il l'intrigue. Qu'est-ce qui le fait rire? Il est pourtant certain de ne pas avoir l'air idiot ou goguenard, ce n'est pas quelque chose que son visage sait faire. Ce sont des expressions jamais expérimentés jusque là, ayant manqué, enfant, la faculté d'avoir réellement le droit d'en être un. Il semble toujours stoïque alors pourquoi se moquerait-il? Est-ce la situation qui lui semble si cocasse qu'il ait besoin d'en rire pour la rendre légère. D'ailleurs, elle peut l'être s'ils y mettent du leur. Légère et sans contrainte aucune de n'avoir à exiger des explications de l'un ou de l'autre. L'instant de vérité sur ce petit rictus amusé ne tardera pas à venir, il le sait parce qu'il le voit s'approcher. Le barman qui a hanté ses nuits, ses jours et même un peu sa vie, de par sa seule non présence. Gabriel a opté pour le mot coïncidence. Beaucoup auraient pensé au Destin ou encore à la chance mais aucun de ces deux-là ne sont les alliés de Gabriel. Bien au contraire, l'un s'est acharné sur lui tandis que l'autre a passé le plus clair de son temps à jouer à cache-cache sans jamais réapparaître pendant plusieurs années. Et la voilà, la légèreté qu'il espérait sans oser la demander, ni dans son regard, ni dans sa posture parce que jamais il n'imposerait une attitude. Son autorité et son jugement, sans aucun doute mais changer quelqu'un, sans son accord, il en serait somme toute bien incapable. Il lui répond mais il ne l'éclaire pas. Il n'avoue pas clairement s'il se rappelle de lui même si Gabriel est assez intelligent pour l'avoir deviné et surtout ressenti. Il ne sait toujours pas si le sujet peut réellement être abordé sans que l'autre n'ait envie de jouer à celui qui n'a pas le moindre souvenir. Pas même un iota.

Ce ne sont donc que des présentations sans assurance aucune qui traversent la barrière de ses lèvres alors qu'il se perd momentanément dans le regard bienveillant posé sur lui. Ses yeux qui le ramènent encore à cette soirée, le perdant, l'obnubilant. Cette oreille si attentive et cette attitude à laquelle il est encore incapable d'imposer un reproche. Pas même le plus petit. Cette perfection doit prendre fin et ceci dans les plus brefs délais mais il ne l'y aide pas avec sa gueule parfaite, attitude parfaite, approche parfaite. Ça l'emmerde un peu Gabriel, surtout lorsqu'il tente de casser le mythe. Ce serait plus simple. Ce n'est pas gagné. Encore moins à l'écoute de ce « Je me souviens. » teinté de pleins de promesses et de non-dits. Lancé avec tellement de pincettes que Gabriel penserait même, pour un peu, qu'il tente de le préserver en lui évitant un quelconque malaise. Qu'il le prend déjà, bien trop en considération mais il a raison son bel inconnu d'y aller lentement. Ses mots le retournent complètement, ils le chamboulent et relâchent même un espoir sourd et muet, tû pendant des années. Et si lui non plus ne l'avait pas oublié. Et s'il n'était pas qu'un baiser de plus au détour d'une ruelle sombre. Et s'il avait ressenti cette même énergie incomparable au milliard d'autres. Et si... Il en reculerait presque Gabriel s'il n'avait pas trop de fierté et d'amour propre pour montrer qu'il a été touché. Qu'il est même coulé. Parce qu'il semble voir d'autres souvenirs naître au fond des yeux de son mystérieux interlocuteur. Des souvenirs qui le font frémir mais peut-être se trompe-t-il? "Je vois." Alors qu'en réalité, il ne voit rien d'autre que le flou artistique qu'il laisse planer sous ses yeux. Celui de leurs deux corps enlacés, enflammant tout l'air qui les entoure, embrumant son cerveau et ses sens, en plus de la réalité qui s'était imposée à lui, le soir-même. Le champagne qui frôle ses lèvres puis coule dans sa gorge lui donne une contenance qu'il pourrait presque perdre Gabriel. Pourtant, ce n'est pas dans ses habitudes. En réalité, ça ne lui arrive même jamais.  

Et enfin, enfin, il comble le silence, l'empêche de sombrer dans la folie en replaçant le contexte mais surtout en l'éclairant réellement, cette fois. Il a tenté de le revoir. C'est lui, au final, le fugueur. C'est lui qui a empêché qui que ce soit de le retrouver. C'est Gabriel qui l'a gardé volontairement loin de lui et de toute évidence, non, il n'était pas qu'un baiser au coin d'une ruelle, tout du moins. Pas à cette époque, puisque maintenant, de l'eau a coulé sous les ponts. La seule chose qu'il est capable de conclure à haute voix, omettant le reste de ce qu'il a compris au silence. "Tu n'es donc pas barman." Une nouvelle gorgée de champagne avant de lâcher, enfin amusé. "J'aurais dû m'en douter. Tes cocktails étaient infâmes." Il avait dû se rabattre sur de l'alcool pure afin d'éviter une intoxication, ce soir-là. Même là, il avait fini par ne plus en trouver le goût au bout d'un moment, ignorant que le barman lui avait évité la pire des fins tragiques en lui servant de l'eau à la place. Puis, comme sortie de nulle part, une question le concernant. Comme s'ils étaient de vieux amis qui s'étaient quittés, le temps de quelques mois et qui reprenaient contact alors qu'en fait, Gabriel, il ne sait rien de ce faux barman. A part son nom. Par contre, lui, il avait parlé. Il est presque certain d'avoir même évoqué sa femme et sa mère, entre deux lignes incompréhensibles. "Si on compare au jour de - un moment d'hésitation il avait failli dire notre baiser mais se reprend - notre rencontre. Beaucoup mieux. J'ai divorcé, j'ai du boulot, j'ai fait le deuil et je n'ai jamais plus été aussi misérable et pathétique." Il ne l'avait déjà jamais été à la base avant ce jour-là. La musique aurait pu prendre le dessus. Elle semblait même le faire mais Gabriel était bien trop pendu à ses lèvres, à l'affût du moindre son de sa part pour ne pas entendre une de ses paroles. Il se rapproche pourtant un peu, le temps de comparer la véritable effluve de l'homme au souvenir. Ce n'est pas le champagne qui l'enivre, pas après deux gorgées. Il laisse même le temps à Gabriel d'observer ce cou, la base de sa nuque, ce torse alors qu'il semble regarder ailleurs pendant que lui, ne voit qu'Einar. "J'avais manqué de politesse ce soir-là, il serait peut-être temps de me rattraper en commençant par cesser de monopoliser la conversation et en apprenant plus de choses sur toi." Pour que le mystère soit résolu et qu'il perde, il l'espère de sa superbe parce qu'à cet instant, Gabriel ne rêve que d'une chose et ce depuis qu'il a croisé son regard. Vibrer à nouveau sous ses doigts. Il s'éclaircit la gorge. "Tu sais plus de choses sur moi que le commun des mortels." Juste pour pointer du doigt l'injustice, il a cru bon de préciser en attendant qu'il lui lâche au moins, une petite information. Deux, ce serait encore mieux.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
You were made to keep my body warm - Einar
Dim 2 Déc - 17:07

You were made to keep my body warm.


La tension qui les liait, les attirait inexorablement l’un à l’autre, grondait d’électricité. Magnétique, lancinante. Entêtante. Elle creusait des sillons brûlants sous la peau d’Einar, agrippait délicieusement ses muscles détendus, s’immisçait dans son esprit pour dévorer jusqu’au plus petit résidu d’obscurité dans un oubli libérateur, lui enveloppait le cœur dans un chant aux notes ensorcelantes. Puissantes. S’imposant sans leur laisser un espoir de repli.
Troublante coïncidence.
Quelles étaient les chances ? Qu’ils partagent manifestement une ou deux connaissances en commun, assez pour les réunir ce soir, entre les murs d’un night club remplis d’anonymes comme il y en avait des dizaines et des dizaines à L.A. ? L’Islandais n’en savait rien, ne prit pas même le temps de s’appesantir sur les étonnantes circonstances de ces retrouvailles, bien déterminé à saisir l’opportunité qu’il croyait à jamais hors de sa portée. Celle de partager à nouveau un moment avec l’autre homme, peut-être lever un peu le voile des mystères et des questions sans réponses qui planaient sur le dénouement de leur soirée, près d’un an plus tôt, ou bien juste apprécier sa compagnie alors qu’il se trouvait être complètement sobre, redevenu celui qu’il avait enterré dans les vagues de liqueurs pour s’y noyer l’âme le temps de quelques heures. Parce que le hasard, Einar avait cherché à le provoquer, plusieurs fois même, peu confiant vis-à-vis des motivations obscures des anciens dieux dont les histoires avaient bercé son enfance (il n’y croyait pas, mais se plaisait à leur imputer certains hasards heureux), encore moins confiant en la vie pour lui accorder une seconde chance. Les semaines qui avaient suivi leur rencontre, il avait demandé à plusieurs reprises à son ami barman d’ouvrir l’œil –la description qu’il avait fourni de Gabriel n’aurait su le tromper, le conduire à l’erreur ou l’empêtrer dans la confusion, tant il s’était montré précis, en partie par déformation professionnelle, surtout parce que ses prunelles s’étaient longuement rassasiées de sa silhouette et des traits séduisants de son visage, même un peu tordus par l’ivresse. Et il ne nourrissait aucune envie de s’en cacher, tout comme il n’avait aucune intention de faire croire au brun qu’il avait oublié leur soirée –et la façon plus que troublante, et définitivement marquante, dont elle s’était terminée. Iris rivés contre les traits de son interlocuteur, le regard bienveillant mais étreint d’une intensité qu’il peinait farouchement à réprimer, il ne pouvait qu’essayer de saisir ce que ces quelques affirmations de sa part, et les vérités qui y étaient cousues avec subtilité, éveillaient en Gabriel, alors qu’il devenait brutalement conscient de bénéficier de toute son attention –tout comme l’autre homme avait capturé la sienne, occultant en grande partie à ses sens tout ce qui n’était pas lui. Tenter d’effleurer les sentiments qui se tapissaient sous la surface lisse de son expression neutre s’apparentait à un challenge de grande haleine, mais l’Islandais ne manquait ni de courage, ni de motivation, même si déstabiliser son interlocuteur n’était clairement pas l’objectif qui se cachait derrière ses mots prononcés avec une certaine retenue et délicatesse teintées de franchise. Il ne désirait pas le mettre mal-à-l’aise –c’était plutôt le contraire qu’il avait en tête-, et quelque part, lui laisser le choix d’interpréter ses mots comme il désirait, sans lui imposer ses propres souvenirs et pensées mais plutôt en les gardant latents, c’était une façon, peut-être un peu maladroite, de lui laisser la liberté de croire qu’il se rappelait de la soirée, qu’il l’avait cherché, et sachant cela, qu’il n’insisterait pas si le désir n’était réciproque. Si Gabriel avait fui, Einar se doutait que ce fut pour des raisons qui peut-être le tourmentaient encore aujourd’hui. Il demeurait possible qu’il ressente encore à ce jour une certaine honte de s’être dévoilé comme il l’avait fait sous l’emprise libératrice de l’alcool –lui qui semblait si en contrôle, en face de l’Islandais, proche et pourtant difficilement atteignable, à l’opposé de ce qu’il avait paru être ce soir-là. Que le baiser n’ait été qu’une folie de l’instant, un geste profondément motivé par la liqueur qui imprégnait son sang, et qu’il ne sache quoi faire de ce comportement à présent qu’il se retrouvait face à lui. Ou peut-être la trahison d’un désir enfoui qu’il ne voulait pas éprouver, envers lui ou envers un autre homme.  Peut-être ne gardait-il de cette soirée que le poids lourd des regrets ; peut-être même l’avait-il oubliée en partie.
Mais si l’expression de l’autre homme ne lui abandonna aucun indice sur son ressenti, le trouble qui s’immisça dans son regard limpide et ne fit que s’intensifier sous la caresse des mots de l’Islandais, le trahit d’une touchante manière. La même mutinerie dont les prunelles claires s’étaient rendues coupables près d’un an plutôt dans cette ruelle mal éclairée et sans identité, alors que les lèvres qui embrasaient son être quittaient brutalement les siennes, les laissant assoiffées et orphelines, que les doigts qui prenaient possession de sa nuque se figeaient, que les propres phalanges du policier demeuraient indécises, incendiées par l’envie de se faufiler sous les vêtements pour aller à la rencontre de la peau nue, et pourtant retenues par l’incertitude de l’instant qui s’était écrasé à leurs pieds.
Comme ce soir-là, Einar l’avait atteint.
Quelque part dans sa poitrine, son cœur céda à un brutal sursaut de vie, une enivrante chaleur qui petit à petit s’y étendit.
Gabriel aurait pu être un énième baiser comme l’Islandais en avait tant partagés avec des gens qu’il ne connaissait que peu voire de complets inconnus –certains qui avaient fini dans ses draps, d’autres non. Rien de plus pour le marquer, pour s’imprimer durablement dans sa mémoire.
Gabriel aurait pu incarner un fragile moment de perdition comme tant d’autres, de ceux qu’il cherchait toujours à faire durer, dont il s’abreuvait à même le souffle des autres. Ephémère, vite oublié alors que seule persistait la nostalgie de l’instant.
Gabriel aurait pu être une vie et un visage occultés dans la danse interminable et ravageuse de la vie.
Mais il n’était rien de tout cela –en avait-il seulement conscience ?
Savait-il la foule de peut-être qui avaient torturé le policier durant des jours, qui en cet instant lui revenaient avec une violence affamée, embrasés d’un seul regard perdu dans le sien, bercés d’attentes et de filaments si vulnérables d’espoirs ?
Le dilemme cruel qui tiraillait l’esprit de l’Islandais –oser demander et obtenir un nouveau baiser, peut-être même plus, si leurs retrouvailles allaient en ce sens, ou préserver les souvenirs sûrement un peu embellis par le temps écoulé, qu’il gardait de leur rapprochement ?
Pour ressentir encore.
Pour le ressentir.

Einar hocha doucement la tête, une petite moue amusée aux lèvres –non, il n’était pas barman. Avant de céder à un rire furtif mais rayonnant de sincérité lorsque Gabriel releva avec amusement la piètre qualité de ses cocktails, charmé par la façon dont les traits de ce dernier se détendirent, trahirent la flamme d’une touchante familiarité –comme s’il se laissait enfin (un peu) aller.
« Je suis touché que tu t’en souviennes. » concéda le policier, malicieux, des rires au bord des cils.
Il porta sa coupe de champagne à ses lippes, tuant la dernière gorgée qui demeurait au fond sans plaisir aucun pour les bulles pétillantes et riches en saveurs qui coulaient dans sa gorge. Il ne comptait pas boire énormément ce soir, et à vrai dire, il n’avait pas envie de laisser filer le moindre instant en étant un peu éméché. Les traits plus graves mais toujours ouverts alors qu’il écoutait attentivement la réponse rassurante que Gabriel lui offrit concernant son bien-être actuel dans sa vie, sans s’attarder sur sa légère hésitation qui pourtant embrasa un peu plus sa curiosité, il lui offrit un sourire bienveillant, ourlé d’une tendresse indicible, un peu troublante. Il était tout simplement heureux (et soulagé) pour l’autre homme qu’il se soit relevé de cette terrible épreuve, qu’il ne se soit pas abimé un peu plus dans l’alcool (ou autres substances) pour tenter de noyer les sanglots de son âme.
Si son regard ne perçut pas le rapprochement léger, tout son corps en prit néanmoins conscience, alors qu’il s’orientait naturellement un peu plus vers Gabriel, sensible à sa proximité, à sa chaleur aussi, irrésistiblement attiré. Tout son être trahissait déjà son intérêt pour le brun, et il demeurait impuissant à réprimer le désir de répondre à chaque mouvement témoignant d’une certaine réciprocité chez son interlocuteur –pas qu’il le veuille, par ailleurs. Son parfum lui effleura les sens, léger, familier. Et les mots qui fendirent l’air qu’ils partageaient un peu plus intimement à présent lui arrachèrent un sourire charmant, criblé de plaisir, mais qui se voulait également rassurant.
Il n’en voulait pas du tout à Gabriel d’avoir plus ou moins tenu un monologue la dernière fois –la liqueur ne laissait souvent pas le choix, et c’était sûrement, sur le moment, ce dont il avait besoin : une oreille attentive à sa peine, même s’il ne l’avait pas trouvé de la plus saine des manières. Mais cela lui faisait plaisir que l’intérêt soit réciproque.
Son sourire trébucha, se fit plus discret, alors qu’il acceptait avec un léger étonnement et une certaine émotion au creux de l’estomac l’aveu qui suivit. Ses iris vrillèrent ceux de l’autre homme, attentionnés, transparents dans les désirs qu’ils ne dissimulaient plus dans leurs ombres.
« C’est un peu aussi ton cas, tu sais. » laissa-t-il échapper posément, relevant ce qu’il ressentait comme une vérité, ses prunelles dérapant rien qu’un instant sur les lèvres aux courbes sensuelles.
Certes, c’était loin d’équivaloir avec les révélations auxquelles s’était abandonné Gabriel, sur sa vie, sur son ressenti, mais c’était un petit quelque chose qui comptait dans la vie du policier –ces aveux qui n’avaient jamais été verbaux, s’étaient traduits en gestes pour sa part. Ces parcelles de lui que le brun avait goûtées avec ses lèvres, savourées du bout des doigts en s’insinuant dans son espace pour embrasser son corps de sa chaleur et de son désespoir. Ces miettes de son âme qu’il avait effleurées avec la sienne en fracassant leurs deux solitudes l’une contre l’autre avec la rage d’une envie qui dévorait les entrailles, la fureur d’un besoin qui étranglait le cœur.
« Eh bien, je suis Islandais, prononça-t-il doucement, ne sachant trop par où commencer, avant que l’assurance ne reprenne le dessus, même si j’ai fini par obtenir la double nationalité. Je suis né et j’ai vécu là-bas pendant un temps avant de venir ici avec mes parents. Et je suis détective, à la LAPD, brigade des mœurs. »
Ces  quelques morceaux fragiles de son palpitant que Gabriel avait emporté avec lui, dans sa fuite.
« Mais je pense que ce serait plus fair-play que tu participes un peu, poursuivit-il, un peu plus taquin. Qu’est-ce que tu voudrais savoir ? » lui offrit-il avec un sourire discret mais encourageant.
Ses prunelles quittèrent à regret celles de son interlocuteur lorsqu’elles perçurent un mouvement sur sa gauche –une bouteille de champagne tendue dans sa direction, agrémenté de l’air invitant d’une Jazz ravie qui ne prit pas le temps de les interrompre, déjà entrainée ailleurs. Einar haussa un sourcil à l’adresse de Gabriel  dans une invitation silencieuse, lui offrant de le servir.
Curieux de savoir ce que l’autre homme lui demanderait.

Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
You were made to keep my body warm - Einar
Lun 3 Déc - 17:57
You were made to keep my body warm
Einar & Gabriel



[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] Il semble gravé sous sa peau. Ce moment qu'ils ont partagé, cet instant qui, aux yeux de tout ce qu'il a vécu depuis semble n'être rien d'autre qu'un passage éclair. A peine les prémices d'une aventure et pourtant, Gabriel le ressent dans chaque pores, à chacune de ses respirations, celles d'Einar, pas les siennes, à chaque mouvements de ses lèvres, à chacun de ses gestes, surtout ceux qui sont dirigés vers lui. Et ses yeux, cette lueur qui y brille et qui lui donne l'impression de fondre comme neige au soleil sous la seule force de son regard, sous le seul poids de sa bienveillance et d'un intérêt si grand qu'il ne cherche même pas à le dissimuler. Pas même un peu. Sous cette intensité, Gabriel ne peut s'empêcher de se mordre un moment la lèvre inférieure. Il a l'impression, même furtive d'être un dîner appétissant et d'une qualité peu commune. Un regard qu'il n'a jamais eu le plaisir d'observer chez quiconque. Il a l'impression d'exister. Au moins le temps d'une soirée et la sensation est presque libératrice. Mieux encore, elle est salvatrice, comme si Gabriel trouvait enfin ce soir, de quoi respirer un peu, une véritable raison d'être là, ce soir, au milieu d'une belle poignée d'inconnus et de connus. Un homme le regarde, un homme que tout son être à reconnu comme étant le détenteur d'un plaisir auquel son corps appelle sans cesse et a appelé des années durant. Plus encore que le plaisir, la liberté, l'extase. Sous son souffle, sous ses caresses, il avait fondu Gabriel, littéralement et c'était sans doute cette force ultime, unique qui l'avait fait fuir en plus de l'évidence même sur sa situation. Gabriel, en plus d'être gay était irrémédiablement tombé sous le charme de ces caresses, de ses lèvres et de cet odeur que rien, jamais n'avait su égaler même dans ses rêves les plus fous.

Le charme qu'il dégageait était, à l'époque, déjà déstabilisant, troublant et un brin excitant. Entre ce visage empli de bonté mais ces yeux qui traduisent autre chose. Gabriel reste presque sans voix devant le mystère qui vit en lui, qu'il dégage. Il est tantôt sur la pente du démon, tantôt sur celle de l'ange. Face à lui, Gabriel ne le sait jamais, même si ce soir, c'est bien l'ange qui semble avoir pris possession de son corps. Au moment du baiser, il aurait parié sur le démon. Celui d'un plaisir sans nom, sans limite. Ce soir, son charme semble avoir encore pris en grade sur les années qui les ont séparé. Il est envoûtant, attirant. Gabriel a l'impression qu'on lui a posé la pire des tentations sous les yeux et qu'il ferait mieux d'éviter d'y succomber s'il ne veut pas finir complètement carbonisé. Et pourtant, le feu semble être, sur le moment, sa plus grande passion alors qu'il entend enfin la voix d'Einar s'élever au delà de celle des autres. Il dit être touché que Gabriel se rappelle de ce soir-là. Il a un petit rire ironique. Un souffle, une plainte même presque. "Comment l'oublier?" Elle sonne comme une question, elle s'exprime comme une question mais elle est rhétorique et la réponse est aussi évidente que tout le corps de Gabriel appelle à celui d'Einar en sa simple présence. Impossible d'en oublier même une miette. Au simple son de sa voix douce et grave à la fois, Gabriel réagit, le ressentant jusque dans ses tripes. Les mêmes sensations diamétralement opposées que face à ces traits de caractère. Le jour et la nuit. Le bien et le mal. Le bon et le mauvais. Le rapprochement et la fuite.

Il s'arrête un moment de respirer en voyant très distinctement Einar faire un pas vers lui. Il a besoin de reprendre une certaine contenance, d'être maître de lui et son interlocuteur, beau comme un Dieu, attirant comme l'Enfer, il ne l'y aide pas du tout. Les techniques de respiration dans un moment de crise, il les connaît par coeur, c'est lui qui les enseigne aux malades en temps normal, pourtant il lui semble bien avoir tout oublié sur l'instant. Faut-il expirer profondément ou inspirer? Pour sa survie, il expire, évitant un surplus d'effluves, une tentation insoutenable pour laisser place à la surprise. Qu'est-ce qu'il pourrait détenir de plus comme information sur Einar que le monde ne saurait déjà? Si ce n'est son attirance évidente pour lui. "Vraiment?" Finit-il par demander, pas parce qu'il manque de confiance en lui mais bien par curiosité. Une précision même minime lui serait d'une utilité folle même si, le voilà touché malgré tout. Malgré lui. A-t-il compté finalement? Au moins un peu. A quel point compterait-il toujours? Sur une soirée, une seule. Il ne s'attend pas à grand chose. L'espoir, lui, est un traître. Il espère tout.

Son premier désir étant bien évidemment d'en savoir plus sur l'homme qui hante encore ses nuits et ses rêves aujourd'hui. Peut-être espère-t-il trouver un élément qui expliquerait cette sorte d'addiction face à ce souvenir marquant, troublant. Oui, sans aucun doute cherche-t-il a l'expliquer, tel l'homme de science qu'il est. Il boit alors ses paroles, notant les deux détails importants au milieu de ce flot de parole si joliment prononcé. Gabriel a même un haussement de sourcil. Troisième surprise de la soirée et il semblerait qu'il ne soit pas au bout de ses peines. "Je m'étonne d'autant plus que tu aies fini derrière un bar." Un détective barman le temps d'une soirée. Gabriel s'en veut presque de ne pas avoir eu cette information avant. L'histoire est belle. Ce n'est pas un métier facile et dans sa complexité, il lui rappellerait presque le sien dans bien des domaines. Est-ce de là que vient ce côté sombre? Est-ce ce qui le rend si intriguant à ces yeux ou bien est-ce que ce détail vient de plus loin encore? C'est presque fou cette envie de le savoir. Comme si cette réponse lui serait destinée d'une manière ou d'une autre, qui devrait en être le détenteur. Encore une folie qu'Einar lui inflige à ses dépens. Comme celle de lui demander de participer alors qu'il est là, avide de ses mots et bien malgré lui, avide de sa peau. Gabriel arque un sourcil. Il est malin, Einar, bien trop pour être vrai. Malin et mature. Une explosion de saveurs, cet homme. Il tend son verre dans sa direction avec un coup d'oeil intrigué. "Puisque tu insistes." En vérité, il n'a pas eu à insister énormément. Tout en Gabriel crève d'envie de lui faire plaisir. "Serais-tu en train de tenter de m'enivrer à nouveau?" S'amuse-t-il pour une première question sans conséquences. Si ce n'est celle de sous-entendre qu'Einar aurait envie, à nouveau de passer par ce même schéma pour en arriver à un même résultat. Celui de leurs deux corps enlacés, embrasés.

"Tu ne me facilites pas la tâche." Il aimerait savoir tellement de choses Gabriel qu'il lui paraît difficile d'en cibler une seule, sur l'instant. Pourtant, il le fait, saluant par la même l'effort d'Einar quelques secondes auparavant pour se présenter. "Pourquoi ce métier?" Souffle-t-il alors que, n'y résistant plus, il pose sa main sur celle d'Einar pour cesser le flot du champagne dans sa coupe. "Merci." Dit-il simplement alors que l'onde de choc au bout de ses doigts lui donne l'impression d'avoir mis des doigts trempés sur un fil électrique. Il la retire pourtant en douceur, ne trahissant aucune émotion, sinon au fond des yeux ou lorsqu'il déglutit. Il le ressent jusqu'au plus profond de son être à présent Gabriel. La brûlure. Voilà une raison de plus de résister, celle d'éviter de se noyer, corps et âme. Sa voix ne semble plus qu'être un épais murmure, perdu dans un flot d'émotions qui vient littéralement de lui brûler les neurones alors qu'il tente de paraître normal, paisible. "N'est-ce pas un trop gros... Handicap à ta vie privée?" Et c'est à cet instant que flotte au dessus de sa tête le sous-entendu de la curiosité sur la dite vie privée, à peine voilé. Il n'a jamais été dans une telle position de faiblesse de toute sa vie Gabriel et s'il disparaît finalement, ce ne serait que la répétition peu méritée d'une situation sur laquelle, il n'a plus aucun contrôle. Le contrôle, c'est sa vie Gabriel et près d'Einar, il est absent. Les épaules droites, le corps qui semble à l'aise et le regard franc, Gabriel ne montre rien mais n'en pense pas moins. Est-il sont talon d'Achille?

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
You were made to keep my body warm - Einar
Mer 5 Déc - 18:19

You were made to keep my body warm.


Qu’est-ce que cela ferait, de vouloir plus ? De désirer plus de lui, plus de ce qu’ils avaient partagé, plus qu’un baiser, aussi marquant avait-il été –un voyage des sens à même les lèvres de l’autre, une brise d’une violence rare au cœur, un souffle de vie à l’âme alors que chacune de ses cellules s’embrasaient sous l’assaut du désir, du plaisir, du besoin ? Qu’est-ce que cela ferait, d’aller cueillir la chaleur enivrante de sa peau avec la pulpe délicate de ses doigts avides de lui offrir du plaisir, de lui faire ressentir la brûlure délicieuse qu’il lui avait inspirée sans même certainement s’en rendre compte ?  De se perdre contre l’incandescence de ses émotions à fleur de peau, de s’abreuver de ses lippes  jusqu’à l’ivresse, de s’oublier dans la mélodie voluptueuse de ses soupirs ? De se noyer dans l’océan tumultueux de son regard au risque de s’abimer contre les éclats tranchants des émotions qui s’y refugiaient ? De poursuivre chaque cicatrice d’encre apposée sur son épiderme, en esquisser chaque délié jusqu’à les imprimer sur la chair ses propres lèvres ? De savourer et engendrer l’extase en embrasant la courbe sensuelle de son cou, la courbure délicate d’une clavicule au-delà des épaules bien bâties, la force sauvage qui paressait silencieusement au sein des muscles qu’il n’avait pu voir mais devinait sans mal derrière les tissus de qualité ?
Qu’est-ce que cela ferait, d’étreindre son âme ?
Qu’est-ce que cela ferait, d’obtenir plus ?
Question obsédante, latente, qui louvoyait encore et encore sous la rage des vagues des pensées aux obscurités impénétrables de l’Islandais.

Comment l’oublier ?
Souffle trahissant une impuissance tiraillée entre douleur et émotion, ironie mordante et résignation. Espoirs et acceptation, Einar oserait-il espérer, lui-même un peu déstabilisé mais irrésistiblement charmé par ce que cette franchise de la part de l’autre homme dessinait, les doutes qu’elle achevait, les peut-être qu’elle embrassait et les autres qu’elle fracassait –ne laissant en vie que les plus douloureusement consumés par des espoirs aux illusions traitres et si promptes à l’insurrection contre leur propre auteur. L’aveu l’atteignit un peu trop brutalement, alors que conséquences et hypothèses s’insinuaient entre les mailles de ses réflexions, venaient caresser les émois de son cœur après avoir trompé les gardes et passé les barreaux des côtes. Pouvait-il s’abandonner à la pensée douce et encourageante, ensorcelante, que même si Gabriel regrettait certainement le déroulement chaotique de cette soirée lointaine –comment ignorer le timbre catégorique et sensiblement plus dur qui avait enveloppé ses mots lorsqu’il avait dit ne plus s’être retrouvé dans cet état de misère causé par l’alcool et la souffrance, l’emploi des termes porteurs d’une accusation à peine voilée envers lui-même-, il n’en était pas de même pour son dénouement inattendu ? Pouvait-il faire confiance au trouble qui faisait naître des frémissements vibrants d’émotions à la surface de l’océan des prunelles mystérieuses, à ce qu’elles concédaient à lui offrir en murmures timides, se permettant des trahisons et des vacillements que l’expression de l’autre homme ne s’autorisait pas ? Pouvait-il se fier à la danse troublante à laquelle ils se vouaient plus ou moins consciemment, concert de rapprochements et de regards qui se liaient, alors que leurs corps communiquaient en silence, soumis aux variations d’un langage connus d’eux seuls, sur les notes d’un désir affamé qui faisait écho chez l’autre ?
Pouvait-il seulement se faire confiance alors que clairement, son palpitant s’était déjà laissé envoûter par le charme puissant des souvenirs qui imprégnaient sa peau, que Gabriel avait réveillé au creux de ses veines d’un regard partagé ; ce même palpitant qui semblait capituler un peu plus à chaque seconde éprouvée contre la proximité de l’autre homme, rendant peu à peu les armes pour s’offrir sans la moindre défense aux émotions dévastatrices et déchirantes de vie que le brun lui inspirait par sa voix, sa présence magnétique, son esprit aiguisé et sa retenue délicatement trahie par les mots que ses gestes taisaient, les susurrements que ses iris lui offraient ?
Cela aurait été sûrement plus simple si cela n’avait été que charnel.
Mais c’était son cœur –et son âme- qui avaient soif de l’autre –de Gabriel.

A la curiosité si spontanée que le ton de l’autre homme laissa miroiter sans filtre, les traits d’Einar s’adoucirent légèrement sous le chant d’une timide tendresse, qui rendit son sourire plus discret, y dispersa quelques énigmes. Son tempérament plus secret, forgé dans les forteresses de protection derrière lesquelles il se refugiait lorsqu’il se sentait un peu trop vulnérable, l’exhortait à plus de retenue et de prudence, pas par envie d’épaissir les mystères le concernant, mais par réel besoin de préservation. Parce qu’avant même qu’il ne le comprenne lui-même (et encore, avait-il toutes les cartes en mains ? Il en doutait sérieusement.), ses instincts avaient reconnu et identifié les ombres qui se cramponnaient aux battements hésitants de son cœur, les rafales qu’elles lui soufflaient en silence. La pente sensiblement glissante sur laquelle il posait les pieds, un peu trop aveuglé et tenté par ces prunelles ciel arrimées aux siennes, les promesses qu’elles semblaient lui ronronner tout bas comme un secret inavouable, ces mêmes promesses qu’il aimerait un peu trop y voir pour pouvoir totalement se fier au compas déréglé de sa perception de l’autre. Ce gouffre béant dont le vide ne lui avait jamais semblé aussi attrayant.
Ce sentiment qui lui tordait doucement les entrailles au milieu des incendies que le regard et les mots de Gabriel lui infligeaient, douloureux et angoissant, délicieux et terrible ; ce même sentiment qui risquait de le dévorer s’il laissait trop faire, s’il s’abandonnait sans prudence à l’ardeur de ce qui le consumait, s’il prenait le risque de se dévoiler un peu trop au cœur du brun. Ils étaient si peu nombreux à s’insinuer sous la carapace, et jamais de la façon dont Gabriel s’y était pris malgré lui, alors que doucement, lentement, la séduction et ses protections échappaient à Einar, devenaient plus.
Il préféra garder le silence et se contenter d’un regard qui trahissait la demande respectueuse d’un pardon, alors qu’il demeurait intimement conscient que d’une façon ou d’une autre, c’était une réponse qu’il finirait par offrir à ces yeux-là, qu’importe ce que cela lui coûterait.

Se présenter spontanément n’était pas un exercice aisé pour l’Islandais, plus habitué à dégainer matricule et unité dans le cadre de son travail, mais il s’y soumit avec plaisir et curiosité, les prunelles rivées sur les réactions de son interlocuteur. Son haussement de sourcil évocateur, associé à une remarque qui taisait mal son étonnement, lui arracha un sourire en coin tiraillé entre satisfaction et amusement, qui allégea son expression. Policier-barman, la combinaison du siècle.
« Ce qu’on ne ferait pas au nom de l’amitié, plaisanta-t-il gentiment, même si la légèreté de son timbre cachait mal à quel point il tenait ce genre de liens en haute estime. Je ne pense pas qu’il me réengagera de nouveau néanmoins, il a malheureusement compris que mes talents étaient ailleurs, observa-t-il, un peu moqueur envers lui-même, avant que toute trace d’autodérision de s’évapore de son ton. Mais ça a été une expérience intéressante. »
Qualificatif qu’il ne se priva pas pour enjoliver d’un regard qui ne laissait pas grand doute sur les raisons derrière la façon dont il considérait cette expérience inédite, rétrospectivement. Regard brûlant et pourtant imprégné de respect et de douceur envers le brun, parce qu’il n’y avait pas eu que ce baiser pour s’imprimer dans sa mémoire, se tatouer sur sa peau si profondément que tout son corps s’en souvenait encore, l’éprouvait encore, mais également le parfum capiteux du désespoir pour ravager les veines et s’immiscer entre leurs échanges ce soir-là.
Retourner un peu la situation pourrait s’apparenter à une manœuvre de déstabilisation –pourtant, il n’en était rien. Einar avait juste cédé à l’immense curiosité qui le caractérisait et semblait toujours plus avide des informations, même tues, que Gabriel voudrait bien lui offrir. Couplée à son intérêt pour l’autre homme, c’était un cocktail qui ne lui laissait que peu de répit, exigences teintées d‘éclats incandescents d’envies. Ses doigts se refermèrent avec délicatesse sur le corps de la flute afin de l’incliner légèrement, tandis que ses iris abandonnaient à regret les traits de son interlocuteur pour se concentrer sur ses gestes et le servir dignement. La remarque amusée qui accompagna les premiers flots de liquide aux bulles dorées fit naître un rire grave sur ses lèvres, aussi furtif que quelques battements de cœur, qui s’échoua en un sourire cisaillé par le plaisir et l’amusement. Il releva à peine le goulot, juste le temps que son regard dérape sur les émotions qui imprégnaient le beau visage et les prunelles si expressives de Gabriel, avant de se remettre consciencieusement à la tâche. Précis, minutieux.
« Peut-être, taquina-t-il, sur un ton qui semblait peser le pour et le contre. Mais pas avec l’alcool. » reprit-il après un très court silence, le ton épris de franchise sous l’assaut d’une brûlante audace.
La tension qui persistait entre eux l’agrippa aux tripes, souffle de danger et d’une délicieuse tentation, avant de doucement le laisser lui échapper.
Non, il ne lui facilitait pas la tâche –mais Gabriel ne l’épargnait pas non plus, même si c’était définitivement plaisant pour le policier. Ses pensées s’attardèrent un peu sur la question qui le touchait de près, ses traits s’altérant alors qu’il s’enfonçait dans ses réflexions, processus aussitôt enrayé par les phalanges qui gagnèrent sa main, stoppant son geste avec calme. Sa respiration se raréfia dans sa gorge, s’y accrochant, se perdant quelque part entre ses poumons et ses lèvres alors que déjà les effrontées s’éloignaient, quittaient sa peau en y apposant leur douceur qui lui inspira un frisson violent au cœur, un tremblement au creux des veines tandis que son sang semblait s’embraser. Brûlure tatouée à même son épiderme, invisible et pourtant incandescente. Violence du ressenti qui le troubla ; vulnérabilité qu’il ne parvint à dissimuler alors que ses prunelles vrillaient celles de Gabriel tandis qu’il ramenait la bouteille vers lui, le geste contrôlé qui contrastait farouchement avec son chaos intérieur.
Il s’efforça à reprendre contenance, se raccrocher aux brides de la réalité –passer la bouteille à son tour (un inconnu à sa droite, qui l’accepta avec un sourire enchanté), se délester de sa propre coupe sur la table à deux pas d’eux, fuir mentalement rien que quelques instants, assez pour surpasser son trouble et s’arracher temporairement à ses griffes déstabilisantes, avant de se laisser de nouveau prendre parce que si les liait si fort, avec une intensité peu commune, réinstaurant leur proximité sans la moindre hésitation, et une envie indéniable. La question, Einar.
« Par désir d’aider et de protéger, répondit-il honnêtement, sans fioritures, le respect et l’humilité vibrant dans la voix posée, conscient qu’il pouvait s’agir d’un cliché aux yeux de certains, là où il s’agissait simplement de sa vérité. C’est un métier parfois éprouvant, physiquement et mentalement, reconnut-il avec justesse, mais également passionnant. Le contact avec les gens, les enquêtes, les complexités de la loi, le comportement criminel et la multiplicité des facteurs qui l’entourent. Il ne s’agit pas juste d’aider la justice à se mettre en œuvre ou de résoudre des affaires, c’est plus humain que ça, en réalité. »
Difficile de réprimer les éclats de dévouement qui se dispersaient ça et là dans ses mots. Einar adorait son travail, qu’il trouvait enrichissant autant intellectuellement qu’humainement parlant, et qui lui apportait un équilibre certain ; ce même travail qu’il s’est vu arracher par ses propres fautes –son désir d’aider, de protéger, qui l’avait poussé à l’obsession, à l’erreur, à l’horreur. Il s’efforça à ignorer les ombres que ces pensées-là déployaient en lui, s’accrocha plutôt aux lueurs qui imprégnaient le bleu des prunelles de son interlocuteur, peu enclin à briser ce qu’ils partageaient en cédant à son mal-être latent un peu trop de terrain pour s’exprimer.
Le moment précis où la voix un peu plus rauque de Gabriel le ramena à lui demeurait flou, mais la sensation le rassura étrangement. A ses tympans, les intonations graves se faisaient tantôt sûres, reflets de l’attitude détendue et crépitant d’assurance de l’autre homme, tantôt sensiblement plus vulnérables, à l’image des secrets qui se noyaient dans ses prunelles. Si le sous-entendu ne lui échappa pas, étirant un sourire discret mais appréciateur sur ses lèvres ; ses iris se firent un peu plus tendres, comme pour tenter de rassurer son interlocuteur, lui souffler qu’il n’avait pas à s’inquiéter, à craindre d’éprouver, de ressentir un peu trop fort ce qui les mêlait l’un à l’autre –parce qu’il n’était pas seul.
« Peut-être qu’il le deviendra un jour, avoua-t-il, pragmatique et pensif, après un court moment de réflexion, quand je partagerai ma vie entre mon travail et quelqu’un d’autre. Mais je pense que comme dans toutes relations, cela mènera à des compromis. »
Des compromis vis-à-vis de l’autre ; des compromis vis-à-vis du job.
Jusque-là, Einar était son propre handicap à ses relations. Il s’attachait trop vite ou trop peu, s’abimait dans des relations à sens unique ou sans réels lendemains depuis trop longtemps, pas assez bien dans sa peau pour laisser quelqu’un d’autre l’atteindre et le combler, se faire une place dans sa vie et dans son cœur meurtri.
Avec douceur, ses doigts embrassèrent la flûte que tenait Gabriel, récoltant la perle de champagne qui dégringolait vers les phalanges de l’autre homme fermement enroulées autour du verre. S’il se rapprocha –et il le fit, inconsciemment, alors que tous ses sens s’embrasaient en absorbant les sensations d’une proximité un peu plus accrue-, il ne le comprit que lorsque sa main s’évada en un effleurement plus tendre sur la peau incendiaire du brun, et que ses prunelles ne purent ignorer le rapprochement des lèvres qu’il désirait, celui des iris dans lesquels elles s’immergèrent sans crainte.
« Et toi, pourquoi cette vocation ? » demanda-t-il doucement, curieux, intéressé.
A ce stade, Einar demeurait persuadé qu’on ne pouvait même plus parler de métier, tant il fallait donner de soi pour les autres.
La main qu’il venait de caresser avait littéralement touché des vies, sauvé des familles, connu le sang pour vaincre la mort, là où les siennes avaient expérimenté le froid du plomb et la douceur de la poudre, éclaboussées de tant de larmes et de cris que son cœur usé finissait par en déborder.

Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
You were made to keep my body warm - Einar
Mer 2 Jan - 17:42
You were made to keep my body warm
Einar & Gabriel



[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] Il a l'impression d'avoir perdu quelque chose en cours de route Gabriel. Cela se situe plus ou moins entre la première fois qu'ils se sont rencontrés et ce moment  où ils se retrouvent enfin. Peut-être est-ce le bon sens qui l'abandonne? Peut-être est-ce autre chose, quelque chose sur lequel il n'arrivera pas à mettre le doigt immédiatement parce qu'il est bien trop déconcentré pour penser à quoi que ce soit d'autre que cette voix, ce souffle, ces yeux, ces lèvres. Tout ce qui appartient à Einar, qui lui est propre mais qui a pourtant une répercussion désastreuse sur Gabriel. Il pense désastreuse parce qu'il est loin d'y être accoutumé et que jamais, il ne perdra le contrôle. Pas même pour les plus beaux yeux du monde et bon sang, il pourrait aisément décerner cette médaille à Einar. Lorsqu'il le regarde, qu'il plonge ses prunelles au fond des siennes, sans la moindre vergogne, sans la moindre petite gêne, Einar s'insinue tout entier dans son être. Il a l'impression d'être vu, pour la première fois de sa vie, sans même avoir besoin de parler et c'est sans doute pour cela qu'ils ne le font pas autant. Tout se passe entre eux, dans cette atmosphère pesante, vibrante et dans cet échange de regard. Il le voit clairement et il est bien le seul. Est-ce une raison suffisante pour prendre à nouveau ses jambes à son cou comme il y a pensé un bon nombre de fois?

Sans aucun doute, pourtant, il reste là. Cloué, scotché, pendu à ses lèvres, à sa voix, prisonnier de ses yeux. Prisonnier de son aura. Tout en Einar lui donne envie de se rapprocher. Il meurt d'envie de tendre la main et de vérifier si cette barbe sous le menton pique ou lui adoucirait d'autant plus la main, le coeur. Si passer la main dans ses cheveux serait aussi excitant et attirant que cela semble l'être et pire que tout, si les effluves qu'il semble ressentir ne sont que l'imagination de son esprit et s'il pourrait le confirmer en glissant son nez le long de cette gorge, de ce cou. Où en serait-il le plus proche? Il le fixe, sûrement à la naissance de cette mâchoire. Il n'avance pas Gabriel ou à peine. Un millimètre, rien n'est gagné pour le moment. Il n'avance pas parce qu'il n'a aucune envie de se brûler et il a l'intime conviction que c'est ce qui risque de lui arriver. Dès qu'il le touchera, physiquement, mentalement, il sera perdu. Perdre un morceau de son âme au passage, c'est une chose mais se perdre totalement, le rendrait fou. Einar en est capable, il le sait parce que le jour où il a embrassé, il a volé quelque chose. Et durant toutes ses années, il l'a gardé, sans même le savoir.

Ce n'est pas faute d'avoir essayé de le sortir de sa tête. N'est-ce d'ailleurs réellement que la tête? A qui Gabriel essaie-t-il de mentir si ce n'est à lui même? Non, vraiment, ce n'est pas faute d'avoir essayé, tous les jours, toutes les nuits. A chaque fois que le maudit homme venait le hanter. Délicieusement, sans le moindre doute, lui faisant regretter un million de fois le fait de s'être enfui comme un, il faut le dire à présent, lâche. Oui, parce qu'il avait eu peur. Peur de chaque sensations, si fortes pour la première fois de sa vie, d'avoir senti son coeur battre au fond de sa poitrine alors qu'il était persuadé, à ce moment que ce n'était qu'une pierre, sans faille. Elle avait craquelé sous les doigts experts d'Einar et cela avait été aussi bon que douloureux. Ce sont deux sentiments contraires qui l'habitent lorsqu'il se trouve près de lui. L'excitation et la peur. C'est cependant l'excitation qui prend le dessus en percevant ce petit souffle de l'autre côté, au moment où il avoue ne pas avoir oublier parce que ça semble impossible. Non, il ne précise pas qu'il y pense chaque jours, que c'en est presque obsessionnel et qu'il s'en rappelle comme si c'était hier. Il ne le fait pas parce qu'Einar a assez de cartes pour l'abattre immédiatement. Il n'est pas assez fou pour oser lui en donner gratuitement. A ses risques et périls. Mais alors qu'il le regarde, encore une fois, droit dans les yeux, devrait-il dire, droit dans l'âme? Ou même oser penser, droit dans le coeur? Il oublie tout. Les risques, le danger et même combien il est périlleux de tenter de lui résister. Il oublie tout pour l'entendre à nouveau, enfin, parler.

Cette voix chaude qui lui a fait lever la tête de son verre lors de leur première rencontre. La seule qui lui aurait permis, en réalité de ne pas tomber dans les abysses et qu'il a rejeté malgré tout résonne comme une mélodie. Chaude, pas enfantine. Brûlante même et le bruit autour ne porte aucune atteinte aux conséquences qu'elle a sur lui. Elle l'enveloppe et le garde férocement accroché à lui alors qu'il ne le touche pas. Pas encore. L'amitié est le premier sujet qui lui vient spontanément, expliquant par là même la raison de sa présence derrière ce bar. Fidèle. C'est donc cela? C'est une qualité qui lui prête sans aucune difficulté. Il a l'air d'un roc, Einar. Quelqu'un sur qui l'on peut s'appuyer en toutes circonstances. Une fidélité à toute épreuve. Quelqu'un qui ne s'effondre pas, tout du moins pas d'apparence. Il n'a aucun doute sur la véracité de ses dires malgré le petit sourire sous lequel il tente de cacher modestement une douce qualité. Des talents ailleurs, il doit en avoir des milliers. Le seul qui lui vient malheureusement à l'esprit là, alors qu'il semble parler d'une chose toute simple, c'est combien il est doué pour embrasser. Embrasé, c'est ainsi qu'il avait terminé Gabriel à la rencontre de ses lèvres, au mélange de leur souffle, au contact de leur peau. Perdant le début de la phrase sur l'expérience intéressante. Il n'y a que cette dernière partie qui sonne si vraie à son oreille alors qu'ils ne pensent peut-être pas à la même chose. Le regard de Gabriel se raccroche à celui d'Einar et il se dit finalement que si, peut-être pensent-ils à la même chose. Exactement la même.

"J'aimerais pouvoir en dire autant." Il peut, à propos d'Einar. Pas le moins du monde à propos de l'alcool. "La rencontre l'était." Lui avoue-t-il pour le rejoindre. Intéressante. C'est même un euphémisme qui ne lui rend pas du tout justice. C'était bien plus que ça. La rencontre était explosible, merveilleuse, magique et gravée dans la roche. Celle qui recouvre encore l'organe qui lui sert maladroitement de coeur. Celui qui ne sait plus s'affoler, sinon en sa présence, ce soir. Des mois auparavant. Il sait qu'ils y pensent encore lorsque le regard d'Einar change, le consumant en un rien de temps. Une gorgée de champagne. Il croit bêtement qu'elle pourra le refroidir alors qu'il est trop tard. Il brûle dans les flammes de l'Enfer. Tout du moins, c'est ce qu'il croit. Il n'est pas au bout de ses surprises Gabriel.

Il n'a jamais été, en fait, aussi proche des flammes que lorsqu'Einar se rapproche pour le servir et lui donner ce qu'il a demandé. Exactement ce qu'il a demandé. Du champagne alors que ce n'est plus réellement ce qu'il veut boire. Sa soif n'est pas étanchée et il semble presque qu'elle ne le sera jamais autant que lorsqu'il a pu goûté à ses lèvres. Les avoir si proches, taquines, il le voit bien alors qu'il sourit en s'arrêtant pour croiser son regard, lui faisant raté quelques respirations primordiales, lui coupant le souffle, lui faisant perdre son sourire comme un imbécile. Il est évident que l'alcool ne pourrait jamais autant l'enivrer que n'importe quoi d'autre se rapportant à Einar alors il n'aurait vraiment aucune difficulté et ça le dérange, Gabriel. Ça le rend complètement dingue de se sentir à sa merci, même un court instant. Pourtant, tel un fan de son geôlier, il demande curieusement, sans réussir à détourner son regard du visage d'Einar. "Ah?" Espérant sûrement secrètement qu'il finisse par lui montrer de quelle autre manière il pourrait le faire. Très secrètement. En réalité, il est déjà enivré, Gabriel. Au moins à moitié. Par tout ce qu'il dégage, par tout ce qu'il semble cacher, par sa voix, surtout.

Et n'y tenant plus, attiré comme un aimant par l'homme qui lui a donné son tout premier baiser, il se rapproche. Peut-être pour vérifier une théorie qu'il a eu sur des années. Celle d'un songe bien trop parfait qu'il aurait inventer. Un tour que son esprit lui aurait joué. Il est certain d'avoir enjolivé cette histoire. Einar n'est pas si bon que ça et cet échange n'était pas merveilleux. Leurs corps ne sont pas parfaits lorsqu'ils sont l'un contre l'autre et les décharges électriques n'étaient que le fruit de son imagination. Il se le prouve, clairement, en le touchant enfin, en effleurant cette peau qui l'appelle sans arrêt. Tout comme chaque petites parcelles de son âme et à son grand damne, il a tort. Complètement tort. Il meurt sur place, Gabriel. Électrocuté, percuté, comme expulsé de son propre corps. Brûlé à un degré inimaginable, incalculable, Gabriel doit faire bonne figure et écouter la réponse à sa propre question alors que la seule chose à laquelle il arrive à penser de manière claire, c'est. Pourquoi discutent-t-ils encore? Heureusement, il s'écarte et se remet à penser comme un homme normal, bien que la normalité soit subjective, capable d'écouter attentivement. Il le couvre d'un regard bienveillant, sachant exactement ce que c'est que d'être passionné, voire même bouffé par son boulot. Il le comprend ou il en a l'intime conviction en tout cas. Il hoche la tête. "Même sans utiliser les mots justes, il suffirait de te regarder pour noter l'attachement profond. Cela semble passionnant Einar." Il lève son verre dans sa direction, de ce fait, comprenant qu'il n'est sûrement pas le seul à être loin de son travail, uniquement exceptionnellement et il dit doucement. "A une soirée loin de tout ça alors!" Finalement, c'est à ça qu'ils auraient dû boire depuis le départ.

Et alors qu'il s'apprête à laisser leurs verres se rencontrer, il laisse sans s'en rendre compte une raison à Einar de lui rendre la pareille pour cet essai scabreux. Une vengeance si violente et doucereuse qu'elle parviendrait presque à lui arracher un son rauque des lèvres qu'il retient alors que la main d'Einar lui procure pour la seconde fois de la soirée, un désir jamais ressenti auparavant, immobilisant son être en entier, l'empêchant de faire un pas de plus, de dire un mot de plus ou même de penser. Le frisson parcourant son échine n'est rien à côté du feu qui lui brûle les entrailles, se demandant follement. Que fait-il? Remarquant même son rapprochement alors que de son côté, Gabriel manque cruellement d'air. Il suffoque. Enfin, la torture s'arrête et l'oxygène se met à nouveau à passer aisément entre son cerveau et son coeur, lui permettant de comprendre qu'Einar lui a posé une question. Il est cependant si proche de lui qu'il trouve presque scandaleux de pouvoir réussir à lui répondre à cette distance. Il baisse les yeux vers la coupe de son interlocuteur avant de remonter doucement, sa gorge, son menton, ses lèvres. Il plante son regard dans le sien pour lui répondre et éviter de ne penser qu'au contact qui vient de le consumer. Il se rappelle rapidement pourquoi il a choisi ce métier, évitant de tomber dans des endroits sombres de son passé et lâche tout naturellement.

"Je crois que j'essaie toujours bêtement de sauver les gens d'un destin affreux et injuste. Tel un enfant." Pourtant, il n'en est plus un. Plus du tout. Il a tout perdu de ça. Il sourit en pensant à ses parents et aux vies qu'il a pu épargné alors que personne n'a rien pu faire pour lui, malheureusement. "En arrivant, je me suis dis, je veux tout révolutionner et aujourd'hui, j'en suis tout proche. Et pourtant... A chaque fois que je perds un patient, j'ai l'impression de retourner à la case départ." Malgré tout le travail, malgré l'expérience, malgré le nombre de personne sauvés. Malgré tout. "Je ne serais satisfait que lorsque j'aurais un taux de réussite à 100%." Il le frôle presque Gabriel, d'ailleurs mais il ne fait que le frôler et ce n'est pas suffisant. Il s'approche mais il ne le touche pas assez, exactement comme Einar, bien trop proche de lui mais pas assez pour qu'il ne puisse l'effleurer.  "Ce serait encore moins ringard de sortir quelque chose comme: Pour avoir la chance de récupérer des hommes comme toi sur mes brancards." Alors que cette dernière remarque est déjà ringarde à souhait, elle ne le met pas a nue. Contrairement à la première. Se dévoiler à Einar, c'est comme mourir à petit feu parce qu'au premier regard, il l'a eu, tout entier, avant même qu'il n'ouvre la bouche. Un petit sourire s'installe sur ses lèvres, cachant la frustration immense qu'il ressent. Etre frustré doublement en une seule soirée, c'est sûrement une fois de trop pour Gabriel qui choisit d'effacer une des distances. La seule qu'il peut contrôler ce soir ou tout du moins, c'est ce qu'il croit. Il sait qu'il se trompe lourdement lorsqu'il pose sa main sur le bras d'Einar, son torse touchant l'autre alors qu'il lui murmure à l'oreille. "Viens avec moi, on va prendre l'air." Et c'est bien plus un ordre qu'une suggestion ou une supplication mais il n'en a pas immédiatement conscience Gabriel. Des ordres, il en donne à profusion tout au long de la journée. Cependant, cet ordre ci ne donne-t-il pas envie de goûter à l'autorité? Juste pour quelques secondes. Quelques secondes d'intimité avec Einar. S'il pensait jouer avec le feu, Gabriel était loin de la vérité. A présent, il s'en rapproche encore un peu.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité
Invité
Invité
Invité
You were made to keep my body warm - Einar
Dim 13 Jan - 10:28

You were made to keep my body warm.


La folie envoûta ses doigts jusqu’à les pousser au bord du précipice, les égarer contre leurs homologues incendiaires, caresse incandescente en écho à celle qui déstabilisait son cœur quelques minutes plus tôt, n’avait été qu’à peine un toucher.
L’envie. Frissons brûlants qui s’immisçaient sous sa peau, se déployaient à l’orée de son palpitant, ébranlaient ses remparts de leurs vagues tantôt furieuses, tantôt doucereuses –deux extrêmes, entre douleur et plaisir, attente et prudence, dont les déchirures continuelles l’intoxiquaient, le perdaient en lui-même, en l’autre. En Gabriel.
Le désir. De vivre encore une fois la violence des sensations qui l’avaient possédé la première fois, lorsque l’autre s’était laissé aller à l’audace délicieuse d’un contact entre leurs peaux nues. De ressentir à nouveau les réminiscences intenses de ce qu’ils avaient vécu il y a bien plus longtemps, ces souvenirs abîmés par le temps qu’Einar espérait pouvoir abandonner dans l’écrin de sa mémoire en respirant d’autres moments comme celui qu’ils avaient partagé ce soir-là. Le désir d’offrir au brun la réciprocité de son geste, de lui murmurer à travers cet effleurement à peine appuyé tout ce que son regard immergé dans le sien lui susurrait déjà, mélodie révélant son intérêt pour Gabriel, mais aussi le plaisir et l’attirance irrépressible, magnétique, qu’il éveillait en lui.
La curiosité. De sa propre réaction, dont l’intensité laissait un parfum de surprise au creux de ses entrailles nouées ; de la réaction de l’autre, alors qu’il ne pouvait s’empêcher de percevoir les tensions qui le trahissaient à l’emprise de son regard, le trouble qui s’embrasait dans le bleu de ses yeux. Ces mutineries que le corps du médecin accusait malgré lui, et que le blond cueillait avec une attention minutieuse, capturé par les contradictions qui s’y murmuraient silencieusement. Les rapprochements, qui n’étaient pas que de son fait, les touchers, que Gabriel avait été le premier à initier, les émotions qui se bousculaient dans les teintes énigmatiques de ses iris clairs et l’ardeur des regards qu’ils échangeaient. Autant de signes pourtant contrebalancés par le contrôle qui emprisonnait les traits séduisants de l’autre homme, la retenue qui paraissait le hanter comme un spectre à l’étreinte un peu trop exigeante sur son être.
Cette impression que le brun luttait avec lui-même, jamais assez proche de céder à ce qui les liait si puissamment, et pourtant flirtant perpétuellement avec les limites de ses propres envies. Impression qui peu à peu prenait de la place en lui, s’imposait avec prudence, altérant la mécanique spontanée de ses gestes pour adopter une approche toujours aussi sincère mais plus subtile, plus douce. Peut-être Gabriel craignait-il quelque chose –la même qui l’avait poussé à fuir, cette nuit-là ? Peut-être n’était-il pas prêt à succomber à ce qui les tiraillait, les rapprochait inexorablement ou bien peut-être que ces désirs-là allaient un peu trop contre sa volonté. Einar ne pouvait que supposer, se reposer sur les impressions fragiles qu’il gardait du brun, et il se doutait, dans le fond, qu’il pouvait faire complètement fausse route ou bien au contraire appuyer sur ce qui paraissait retenir son interlocuteur. Le confronter à ce sujet restait une option qu’il envisageait sérieusement –mais pas maintenant.
Pas ici, alors qu’ils se trouvaient trop entourés et que la musique pulsait désagréablement contre leurs tympans.
Einar parvenait même à en regretter l’intimité offerte par le bar le soir où leurs chemins s’étaient mêlés.

Les prunelles enlaçant les siennes, Einar écouta avec attention la réponse de Gabriel, sourd à toutes sollicitations qui ne seraient pas les intonations graves de sa voix, les émotions qui s’emmêlaient dans ses mots, les sourires qui s’esquissaient sur les variations de ces derniers. L’Islandais s’abandonna à un sourire plus doux, charmé et touché par la dévotion et l’ambition pétrie de passion qui s’esquissaient dans les paroles de son interlocuteur. L’envie (le besoin ?) de sauver des vies, d’arracher des êtres à la fatalité des accidents, des maladies, de la mort elle-même. Ses lèvres s’étirèrent un peu plus, s’embellirent d’une émotion plus poignante à la plaisanterie qui visait sûrement à atténuer un peu le poids des mots qui s’étaient invités entre eux.
Mais le blond refusa de le laisser s’échapper. Pas cette fois.
« Je suis certain que tu en croises des plus charmants. » émit-il d’abord, la malice pétillant dans ses mots.
Puis son expression délaissa de sa légèreté, devint plus grave, trahissant sa sensibilité.
Celle-là même qu’il enterrait si profondément en lui la plupart du temps.
« Je ne pense pas que ce soit ringard, avança-t-il posément, le regard plus sombre et pourtant les traits toujours aussi ouverts. C’est une ambition magnifique et exigeante de vouloir sauver des vies, et ça demande beaucoup de force et de volonté d’y croire, surtout quand on fait continuellement face à des pertes. »
A trop côtoyer l’horreur de la nature humaine jour après jour, Einar s’était laissé atteindre, avait abandonné aux ténèbres des parts de lui qu’il ne recouvrerait jamais. L’innocence de ses jeunes années dans la police l’avait bien vite déserté, dévorée par les affaires souvent difficiles, moralement éprouvantes contre lesquels il avait peu à peu appris à se blinder, jusqu’à y laisser des morceaux fracassés de son humanité.
Peut-être était-ce pour cela que la force de Gabriel le touchait tant –et elle n’était qu’une des multiples facettes de l’autre homme qui l’attirait inexorablement à lui.
Et brutalement, leur dynamique trébucha, s’altéra, s’embrasa.
L’Islandais avait pressenti la proximité et le contact –la main qui s’enroula autour de son bras, invitante, tentatrice, le torse qui le frôla accompagné des lèvres qui s’enhardirent d’un murmure bien trop proche de l’endroit où il les désirait ardemment-, pourtant, tout son corps se crispa sous l’assaut de l’envie qui hurla dans ses veines, violemment attisée par ce rapprochement désiré. Il céda à l’envie de fermer rien qu’une seconde les yeux, pour retenir l’empreinte de cette voix aux notes autoritaires et rauques contre ses sens, les sensations qui électrisaient sa peau et  dopaient les battements de son cœur, le fantôme de cette présence presque intimement conjuguée à la sienne, le spectre d’un parfum musqué dont il aurait souhaité cueillir la saveur à même la peau du brun. Un sourire discret mais brûlant flottant sur ses lèvres, il obtempéra sans émettre la moindre objection, se laissant guider au milieu de ceux qu’ils étaient venus rejoindre ce soir mais restèrent aveugles à leur départ. La proposition de Gabriel suggérait qu’il souhaitait un peu plus de calme et d’intimité, ce qu’Einar désirait également avec force. Chaque pas creusait un peu plus ses tripes d’une envie viscérale aux appétits brutaux, aux feux inextinguibles, alors qu’ils évoluaient entre des inconnus sans visage, se faufilaient entre les silhouettes possédées par la musique et l’ardeur de la chaleur humaine. Instinctivement, ses doigts effleurèrent le dos du brun alors qu’il gagnait son côté,  dégringolèrent en un baiser éphémère le long de sa colonne vertébrale  pour se blottir au creux de ses reins, rassurants et protecteurs lorsque les souffles de la foule aux allures de marée vivante les rapprochèrent jusqu’à ce qu’ils se retrouvent presque épaule contre épaule.

L’étreinte plus fraîche de la nuit fit naître des frissons de bien-être au creux de sa poitrine –il se rendit compte qu’il devait un peu étouffer à l’intérieur, sensation largement noyée par celles que la proximité de Gabriel éveillait en lui. Ses iris inspectèrent par réflexe leur environnement direct, les quelques silhouettes regroupées qui partageaient des cigarettes en riant non loin, le videur à l’air renfrogné dont le regard noir suivait les voitures encore nombreuses à cette heure dans la rue adjacente, les hauts bâtiments en partie endormis et aux lumières lointaines. Puis toute son attention se focalisa sur l’autre homme, son visage aux reliefs tout juste masqués par la pénombre que faisait naître la lumière d’un lampadaire à quelques mètres d’eux. Un sourire indéfinissable aux lèvres, Einar osa s’éloigner un peu pour s’adosser au mur qui vibrait un peu sous l’assaut du rythme qu’il renfermait entre ses remparts, hors de la portée des odeurs de nicotine qui tiraillaient l’air. Manœuvre qui lui permit d’apprécier avec quelle passion son corps (et son cœur) l’en défendirent violement, s’insurgeant de cette distance après celle, plus intime, qu’ils avaient partagé durant de délicieuses minutes à l’intérieur, mais aussi de pouvoir se délecter des yeux de la silhouette du brun. Vision dont ses prunelles demeuraient insatiables, mais qui ne satisfaisait déjà plus le reste de son être, chaque parcelle de son corps encaissant le manque de proximité et de contact, chaque souffle de son palpitant déchainé réclamant plus.
Plus de Gabriel.
Les traits avenants et désespérément calmes, en contradiction complète avec les tourments-tempêtes qui éclataient en lui, tentaient de le renverser de leur impétuosité, ses lèvres succombèrent à l’assaut d’un sourire énigmatiques alors qu’il profitait du contraste entre la température extérieure (même clémente, et heureusement, car il ne portait qu’un chandail aux manches en partie remontées sur ses avant-bras) et le brasier qui sommeillait en lui, paressait sous son épiderme, n’attendant qu’un geste ou un mot de la part de l’autre homme pour soumettre à nouveau Einar à l’agonie de sa fureur.
Irrésistiblement soumis à son charme.
« Cette situation m’évoque quelque chose, pas toi ? » murmura-t-il d’un ton aux accents complices, animés d’un feu plus sombre et envoutant, lorsque le brun se rapprocha.
Gabriel, magnétique dans le charisme qui transpirait de chaque pore de sa peau, campé sur ses deux jambes à quelques dizaines de centimètres à peine ; Einar, dos contre le mur, silhouette à peine plus grande, aux contours parfois intimidants.
La dernière fois, c’était un baiser qui les avait éloignés ainsi.
Les prunelles du policier se jetèrent dans celles du médecin, vulnérables et pourtant assurées lorsqu’elles enlacèrent les teintes bleutées avec un entremêlement indissociable d’envie et de tendresse. Il s’arracha au confort relatif de son appui de béton pour retrouver la proximité de l’autre homme, s’immiscer dans son espace de confort jusqu’à partager son souffle. Ecartelés entre attente et impatience, ses sens demeuraient aveuglés par la chaleur presque palpable du brun, cette même brûlure qui rendait sa peau assoiffée d’un contact, de la franchise d’un toucher, de la douceur d’une caresse. Instant qui s’étirait et semblait pourtant ne durer que le temps d’un battement de cœur. Et pourtant, encouragé par cette intimité qui se tissait douloureusement entre eux, faite de tensions et de regards, de retenues et de désirs à fleur d’âme, Einar se brisa sur la brèche d’un appel bien trop enivrant.
Ses doigts s’élevèrent sans brusquerie entre eux, fracassèrent les barrières de leur rapprochement jusqu’à effleurer la gorge de Gabriel, se lover contre sa nuque alors que sa paume épousait sa peau avec douceur, son pouce s’égarant contre la courbe de sa mâchoire.
Là, sous sa peau, les respirations d’un cœur aussi bouleversé que le sien.
« Pourquoi es-tu parti ? » demanda-t-il doucement, la voix propre de la moindre trace de reproche mais salie par l’émotion qui lui dévorait les cordes vocales.
Il ne désirait pas que Gabriel se sente obligé de justifier sa fuite, mais il ressentait le besoin de comprendre les sentiments qui avaient obscurci le bleu de ses iris ce soir-là, qui l’avaient précipité loin de cette étreinte déstabilisante et pourtant à peine éprouvée. Le besoin de le comprendre.
Afin qu’il reste.
Mais il y avait aussi cette autre question, que taisaient ses lèvres désespérément silencieuses, mais que ses prunelles trahissaient, dans l’intensité fragile et enivrante de l’instant.
Vas-tu partir, encore une fois ?

Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé
Contenu sponsorisé
Contenu sponsorisé
You were made to keep my body warm - Einar
Revenir en haut Aller en bas
Page 1 sur 1
Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas

glitter in the air :: A little break :: archives :: rps abandonnés+