you can't avoid me eternally ☽ athenix #1

Je tourne en rond dans mon appartement résistant violemment à l'appel de la bouteille de vodka qui trône au milieu du salon. Est-ce que j'ai vraiment envie de ça ce soir ? Je sais pas, je sais plus. Pour être honnête, ça fait trop longtemps que je ne réfléchis plus. Les actes guidés simplement par la détresse. Cette douleur qui ne cesse de me comprimer la poitrine. Six mois que l'enfer ne fait qu'empirer. Six mois dans ce long tunnel toujours plus profond. Je ne suis plus que l'ombre de moi-même depuis qu'il n'est plus là. Je m'empare de la bouteille, la regarde pendant quelques secondes avant de la reposer. Je suis consciente qu'une fois que j'aurais cédé à un verre, les suivants se succéderont jusqu'à ce que mon corps finisse par capituler. Et depuis le temps, ce con est devenu un habitué. Il lui en faut beaucoup pour sombrer maintenant. D'un geste habile de ma main droite, j'attrape mon téléphone portable pour faire défiler mes contacts. Si je dois résister à l'alcool, il faut bien trouver une occupation. Une raison de ne pas craquer. Quelqu'un. Mon regard s'arrête sur un prénom, le sien. Felix. Depuis notre nuit passée ensemble, c'est le silence radio. Elle ne répond pas à mes appels ni même à mes messages. Rien. Comme si elle n'avait jamais existé. A croire qu'elle n'assume pas la petite. Et ça, ça me rend dingue. S'il y a bien une chose que je ne supporte pas, c'est ça. Sur un coup de tête, je décide de me rendre à son appartement. Si elle compte m'éviter encore longtemps, c'est mal me connaitre. Avec moi, elle est plutôt mal tombée. Cette visite imprévisible me permettra au moins de ne pas finir une nouvelle fois comme une épave. Une fâcheuse routine qui ne cesse de se répéter encore et encore. La jeune femme ouvre rapidement la porte après lui avoir signalé ma présence. Elle parait étonnée de me voir, là, tout de suite. Surprise. « Tiens, t'es pas morte. » Je la provoque volontairement d'un ton sarcastique sans attendre son invitation pour me permettre d'entrer dans son appartement. Sans aucune gêne, je ne me fais pas prier. « Tu comptais m'éviter encore combien de temps ? » Je ne peux pas être plus directe que je le suis à cet instant. Autant ne pas passer par quatre chemins. J'ai besoin de la confronter en face à face sur le sujet qui m'intéresse. C'est pour ça que je suis venue.

Plongée dans mes cours, je ne vois pas le temps qui passe. Ce début d’année s’annonce encore plus complexe que les précédentes. Ca va que j’aime ce que je fais, ce que j’étudie. Sinon ce serait contraignant. Enfin après quatre années dans ce domaine, ce serait un peu idiot de m’infliger ça si je n’aimais pas l’astronomie. Surtout les cours de maths. C’est chiant, c’est compliqué et pourtant, c’est utile et c’est plus ou moins la base de tout. Alors je planche, je suis sur ce cours depuis près de quatre heures. Mon cerveau bouillonne mais je ne lâche pas. J’y arriverai. Je n’ai pas vraiment le choix en plus du reste. Tout se bouscule dans ma tête, c’est l’heure de prendre une pause, de se détendre un peu. Mes cours ouverts partout sur la table basse, je me glisse dans la salle de bain pour prendre une douche que j’espère salvatrice. Une vingtaine de minutes plus tard parce que bon je ne roule pas sur l’or pour gaspiller l’eau, je sors et enfile un short et un tee shirt large. Pour être à l’aise, pour continuer mes révisions. Cheveux mouillés laissés libres sur mes épaules, je place mes lunettes sur mon nez et reprends ma lecture. Calculatrice dans une main, crayon dans l’autre, je fais défiler les chiffres. Je commence à comprendre les rouages de l’exercice demandé lorsque la sonnette retentit. J’attends personne, j’ai rien commandé et j’aime pas les visites surprises. Je débarrasse mes genoux de mon cahier que je laisse tomber sur la table et me dirige vers la porte. Je l’ouvre pour découvrir Athena, posée là. Je pense que je m’attendais à tout le monde, sauf à elle. Bon presque tout le monde. Mais ouais, je suis surprise. ” Tiens, t'es pas morte. “ J’écarquille les yeux, la dévisage. ” Je… Euh… non. “ Oui bah j’ai rien de mieux à lui offrir… Elle profite de mon moment d’incompréhension totale pour entrer dans mon appartement. Je reprends mes esprits et referme la porte derrière elle avant de me tourner face à elle. ” Tu comptais m'éviter encore combien de temps ? “ A vie très certainement. Parce que je vois pas trop comment faire face à tout ça. ” Je ne t’évite pas. “ C’est plus facile du coup de mentir. ” Qu’est ce que tu fais là ? A part vérifier que je respire encore bien sur… “ Je me dirige vers la table basse, ferme mes cahiers, mes livres et les entasse. Parce que je sens qu’elle va camper là un moment vu son regard et son attitude.

Je débarque un peu chez elle comme un ouragan. Faut dire que je suis légèrement sur les nerfs aussi, un peu en manque surtout. En manque d'alcool, oui. Mais pas que. En manque d'une présence. D'un besoin affectif pour combler le trou béant dans ma poitrine. C'est comme ça que je fonctionne depuis des mois. Alternant entre les bouteilles et les conquêtes. Tout ce qui peut me faire sentir encore vivante. Et avec Felix, j'ai réussi à me sentir un peu différente. Cette femme attise ma curiosité et me pousse à vouloir creuser davatage. Surtout depuis notre nuit ensemble et que mademoiselle s'efforce à jouer les fantômes. « Je… Euh… non. » Elle bégaye et ne sait pas trop comment réagir. Je l'ai prise au dépourvue et c'était le but. Si je lui avais envoyé un message, elle n'aurait encore pas répondu. A quoi bon ? « Je ne t’évite pas. » Bien sur, très crédible. C'est bizarre tiens, son regard semble vouloir dire tout le contraire. « Qu’est ce que tu fais là ? A part vérifier que je respire encore bien sur… » La jeune femme évite mon regard et s’empresse de ranger ses affaires pour ne pas avoir à me regarder. Je me rapproche d'elle et vient ancrer mon visage dans le sien. Je ne veux pas qu'elle continue de m'éviter comme elle a pu le faire. Ma main gauche vient frôler sa joue pour lui remettre une mèche de cheveux derrière l'oreille. « J'avais envie de te voir, c'est une raison suffisante pour toi ? » J'ai surtout envie d'avoir des réponses. Pourquoi nous impose-t-elle ce silence ? « Je pensais pas que tu étais du genre à couper les ponts après avoir obtenu ce que tu voulais. » Je parle de moi, de mon corps. De cette nuit endiablé où nous avons franchi le pas de notre intimité.  « Ou peut-être que tu n'assumes tout simplement pas. » Vu sa tête, c'est probablement ça. « Mais tu ne peux pas te mentir à toi-même. Ni à moi d'ailleurs. » Encore moins. « Ce qui s'est passé entre nous était réel. » C'était intense, différent. Il y a eu ce petit quelque chose que je suis incapable de décrire. D'ordinaire, je ne passe pas autant de temps avec quelqu'un que je veux juste mettre dans mon lit. Felix n'est pas une conquête comme les autres. Elle est plus que ça. Et je sais qu'elle a ressenti la même chose.

Je lui mens ouvertement. Je le sais, j'en ai conscience. Mais j'ai conscience aussi du fait que la dernière fois qu'on s'est vues, tout ne s'est pas passé comme je l'avais prévu. Je dis pas que je regrette parce que je ne pense pas. Enfin je crois. Je suis juste paumée. Mais si je l'admets, ça veut dire que j'admets que y'a un soucis. Ca veut dire que j'admets que quelque chose me perturbe. Et ça veut dire aussi que j'admets que possiblement, peut être, il se pourrait qu'avec Rose, ce soit plus compliqué que ça ne l'est déjà. Et ça en fait, c'est pas possible. Parce que ce serait se prendre la tête pour des choses qui ne seront jamais réelles. Il ne faut pas que je pense à ça. Alors oui, j'ai évité Athéna. Et je ne l'assume pas du tout. Du coup je range. J'aime pas ça mais ça m'évite de la regarder. Puis le sarcasme, les phrases détournées et l'ironie ça me connait bien. J'en use et abuse. Sauf qu'elle est joueuse elle. Je le suis aussi mais on va dire que ce soir, ça me fait défaut. Alors elle est là, proche de moi. Elle est là et me regarde. Je n'ai pas d'autre choix que de faire de même. Tout comme ma peau se met à frissonner lorsqu'elle replace une mèche de cheveux derrière mon oreille. Ses doigts qui frôlent ma joue, nos épidermes en contact. " J'avais envie de te voir, c'est une raison suffisante pour toi ? " J'ai un non qui résonne dans toute ma cervelle de colibri mais impossible de le laisser sortir. Alors je ne dis rien. Juste rien. " Je pensais pas que tu étais du genre à couper les ponts après avoir obtenu ce que tu voulais. " Mes yeux s'écarquillent, ma bouche s'arrondit. " Mais non ! Je... " C'est pas comme ça que je veux qu'elle me voit. C'est pas comme ça que j'ai envie d'être vue tout simplement. " Ou peut-être que tu n'assumes tout simplement pas. Mais tu ne peux pas te mentir à toi-même. Ni à moi d'ailleurs. Ce qui s'est passé entre nous était réel. " Bon okay, elle m'a eu. Je me laisse tomber dans le canapé, totalement lasse. Comme si cette discussion durait depuis de nombreuses heures maintenant. Alors que ce n'est pas le cas. C'est pas vrai. Elle a juste mis le doigt sur un point sensible. Le genre de point qui fait mal quand on appuie dessus. " Je sais. " Y'a un mais qui va arriver. Parce que y'en a toujours un. " Mais c'est bizarre non ? Enfin t'es une fille et puis moi aussi. " Bravo Einstein, c'est la découverte du jour. Puis c'est pas du tout une remarque à la limite de l'homophobie ça. On avance mais clairement en moonwalk. " Pardon... C'est juste que c'est bizarre pour moi tout ça d'accord ? " Je ne m'énerve pas mais mon ton monte légèrement dans les aigus. " Je fais pas ça... " Léger mouvement de va et viens entre elle et moi avant de reprendre. " ... d'habitude. Je sais pas quoi te dire ou quoi faire. " C'est pas comme ci elle m'avait demandé en mariage, je sais. Mais faut surtout avouer que c'est plus profond que ça. Parce que je l'aime bien Athéna. Vraiment bien.