mauvaises graines [chrisjen]

mauvaises graines

chrisjen & renee

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Les familles, elles devraient être un havre de paix. Le lieu protecteur par excellence. Le bien-être assuré et l’avenir dégagé d’embuches. J’en vois des familles. Toutes celles que je vois de près, c’est le contraire absolu. Ça se déchire, ça se tire dans les pattes, dans les dents, dans la tête. Parce que oui, parfois y’a des morts, des vrais, de ceux qui ne se relèvent pas après le combat. Les meurtres et les suicides sont aussi des éléments à prendre en considération quand on met face à face X et Y. Je ne parle même pas des gamins laissés sur le pavé parce que ce n’est pas la préoccupation première de X et Y. Ou que le conflit, c’est eux. Aujourd’hui comme hier, j’ai été témoin de la nullité humaine. Ça’m dégoute. Pourquoi je fais c’boulot ? Ouais, dis-moi. Pourquoi tu fais c’boulot ? J’ai envie d’aller tagger le mur en face du tribunal, une belle bite qui dit “j’irai enculer tous les cons de cette ville”. Ouais. Non. Y’en a trop. Trop de taff. Enculé Y par contre...

Je sors de la confrontation. Il faut que je trouve quelque chose pour mettre mon adversaire au tapis. Sors tous les dossiers. Pose-les sur mon bureau. Commande moi à grignoter. Je vais y passer une partie de ma soirée. Merci.

Renee pianote sur son portable le message pour sa secrétaire. Elle déteste perdre. Elle déteste voir une cliente, un client se retrouver en mauvaise situation, dépecé par l’autre. Mieux vaut une bonne résolution à l’amiable. Là, avec mister Y, c’est mal engagé. En tailleur, talons hauts, le sac à main à l’épaule, l’attaché-case dans son poing serré, téléphone dans l’autre. A gauche. Elle utilise toujours son portable de la main gauche. Elle marche d’un pas rapide. Que le piéton dégage de son chemin, ce n’est pas elle qui fera un écart. C’est une question de détermination. Quelqu’un qui avance sans l’ombre d’un doute sur sa direction, on le laisse passer. Il faudrait être aveugle pour imaginer que Renee puisse hésiter en voyant une personne arrivée vers elle. Elle a ses habitudes aussi. Quand elle marche dans la rue, c’est le moment où elle gère ses sms. Rien d’anormal, ce type qui prend une trajectoire par sa gauche. Un peu serré le chemin, ils vont se frôler. Touche “envoi”. Le sms part. Une fraction de seconde pour lever le nez. Une fraction de seconde, une main se pose sur son portable. Bousculade. Disparition. Elle lâche son attaché-case. Elle manque de peu de se retrouver au sol avec lui.
Le genre de situation qui la met en rogne. Elle se tourne. Il s’est mis à courir. Baskets aux pieds, elle lui aurait filé le train. En talon haut, jupe serrée, pas la meilleure tenue pour un jogging. Elle ramasse sa mallette. Pas tout perdre ! Mauvaise journée.
Le cri du coeur et de la colère.

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Mauvaises graines

Renée + Chrisjen

Capuche largement rabattue sur le visage, tête baissée et main dans les poches, Chrisjen avançait le plus incognito possible entre les passants qui ne portaient pas la moindre attention à celui qui ressemblait à n’importe quel citoyen lambda en jeans troués. Il avait faussé compagnie à son garde-du-corps, pour changer, et sentait son téléphone vibrer furieusement dans la poche de son pantalon. Probablement le Men in Black, ou son manager au bord de la syncope. Il ne supportait pas que Chris puisse sortir sans son malabar scotché à ses bask. Le problème était que Chrisjen n’avait pas forcément envie de devoir se coltiner un baby-sitter à chaque fois qu’il foutait les pieds hors de chez lui. Et franchement, il passait bien plus inaperçu comme ça qu’avec une armoire à glace – qui avait imprimé le mot bodyguard sur le front malgré sa tenue « civile » - à côté de lui.

Il était sorti sans réelles raison, juste une envie de prendre l’air, de trainer dans les rues de la ville comme le ferait n’importe qui d’autre voulait s’aérer l’esprit. Il jetait de temps à autre un coup d’œil aux vitrines, s’allumait une clope mais ne restait jamais statique plus de 2 minutes maximum et n’entrait nulle part, trop de risques d’être reconnu et la dernière chose dont il avait envie là tout de suite était de signer des autographes et de poser sur des selfies à la con avec des crétins qui ferait le signe V incliné de leurs doigts ou le désignerait de l’index avant de prendre bien soin de poster cette photo ridicule absolument partout pour se la péter face au reste du monde. C’était bien là ce qui le dérangeait le plus au final, le revers de la médaille de la célébrité. Les paparazzis étaient déjà une plaie mais le reste de la population étaient bien souvent encore pire. Combien de fois avait-il été dérangé alors qu’il tentait juste de boire tranquillement un café au Starbuck du coin ? Pas plus tard que la veille il avait vu le présentoir du Los Angeles Time uniquement parce qu’il venait d’en acheter un exemplaire.

Plongé dans ses pensées, Chris continuait d’avancer tête baissée lorsque le doux son d’une phrase pleine de finesse posée sur un ton mélodiquement élevé se fit entendre non loin devant lui. Il eut à peine le temps de relever la tête qu’un autre type en capuche et jeans lui fonçait dedans comme un con en prenant la fuite.

Sans vraiment réfléchir et mû par un instinct soudain, Chrisjen profita de la collision pour attraper le type par la veste et le coller à une porte, réflexe acquis suite à de nombreuses bagarres alcoolisées dans les bars. Forcément, en face, cela se débattait mais aussi fluet qu’il puisse être, Chris avait l’avantage d’appuyer de tout son poids sur le voleur à la tire.

Dans la pseudo lutte, la capuche de Chrisjen en vînt à retomber en arrière, dévoilant son visage au voleur qui se figea soudainement avec un air médusé… Avant d’avoir la réaction la plus prévisible en temps normal mais la plus incongrue qui soit sur le moment.

Oh putain !!! T'es ce connard de Chris Machin ? J’peux prendre un selfie mec ?

Ce fut exactement à cet instant que la musique du générique de X-files se mit en route quelque part dans un des compartiments du cerveau de Chrisjen.

Mais t’es sérieux là ?, demanda-t-il avec la tête qui viendrait de voir apparaitre un alien avant de profiter de l’euphorie de l’autre crétin toujours coincé contre sa porte pour lui arracher le téléphone, qu’il supposait volé suite au cri quelques secondes plus tôt, des mains. Donnes-moi ça !

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mauvaises graines

chrisjen & renee

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C’est exactement ce qu’on appelle une journée pourrie. Rencontrer l’ex de sa client, le vicieux manipulateur à l’état pur, et se faire voler son portable dans la rue. Renee ne s’abandonne pas à une méditation philosophique pour savoir lequel des deux événements est le plus déstabilisateur. Inutile les ronds de jambes de ce genre de réflexion. Tout rentre dans la même case : VDM ! Et le premier qui va jouer les toutous bienveillant peut s’attendre à recevoir un flot de paroles libératrices. Pas de chance, c’est une dame âgée qui pose sa main sur son épaule pour savoir si elle n’a pas de mal. Renee se retient, non quand même c’est gentil et puis elle n’a pas de raison de prendre la tête à cette dame qui lui propose de prendre un verre au bar plus loin pour la remonter.
Elle arrête là la discussion parce que trop peur que le verre au bar finisse par le récit complet d’une vie sans intérêt d’une sénior, pas envie de la voir couler en larmes après le chapitre trois. Autre chose à faire, se préoccuper de la scène qui se joue un peu plus loin. Un “gentleman” vient de stopper son agresseur. A grandes enjambées, faute de pouvoir se lancer dans une course, dixit précédemment, elle rejoint les deux hommes. La scène phénoménale la laisse sans voix. Bis repetita, Renee reste quasi silencieuse comme avec la petite vieille aimable. Ses collègues avocats et les juges applaudiraient sans discontinuer si cela pouvait être d’avantage le cas au tribunal. Renee, la reine du “objection” ! Chris ? Chris machin ? C’est qui ce Chris Machin avec qui le gars veut prendre un selfie ? C’est une émission de caméra cachée dans la rue dont elle est la victime. Sa cervelle est déjà en marche pour formuler un dépôt de plainte, atteinte à la tranquillité des citoyens qui arpentent les rues, séquelles dues à l’agression, une liste longue comme le bras d’éléments à charge. Les gars mordront juridiquement la poussière. Le portable passe d’une main à une autre pour finir dans celle de l’avocate.
Un selfie, le type voulait un selfie, qu’à cela ne tienne, on va lui offrir de quoi faire le buzz.
Renne n'hésite pas, vengeance légitime. Un coup de pied dans le genou, faute de pouvoir atteindre une zone bien précise, le gars qui brame comme un âne, dix secondes d’une vidéo qui ira alimenter les réseaux sociaux avec en légende “Quand un voleur minable se fait baiser la gueule par Machin et Machine.” Utopie. Elle ne postera rien, elle sait très bien que si elle était l’avocate du voleur minable, elle tirerait un profit substantiel d’une telle mise en ligne. La petite vidéo restera dans son téléphone dans la rubrique “trophée de chasse”. Jouissif tout de même. Cette action exemplaire mérite qu'on congratule le héros.Son sauveur doit être connu, mais qui est-il ? Ils ne doivent pas trainer dans les mêmes zones urbaines. Elle n'a pas de nom à mettre sur son visage.

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