IN THE DARK • Keala & Johan

Appuyer sur pause et tout oublier. Il est évident que cette croisière au large ne pourra pas tout effacer, mais si ça peut me permettre d'essayer de me changer les idées, après tout, pourquoi pas. Autant profiter des activités proposées sur le bateau sans se soucier du reste. Ce soir, c'est une expérience bien particulière qui s'offre à nous. Un diner dans le noir. En tête à tête avec un ou une inconnue. Apprêtée d'un simple jean à trous et d'un top blanc, je me dirige vers le restaurant en question. Même si je ne sais pas trop à quoi m'attendre, je n'appréhende pas forcément. Au contraire. J'ai toujours été à l'aise pour tenter de nouvelles choses. L'inconnu ne me fait pas peur. Et, après tout, cette soirée peut s'avérer amusante. Le serveur me guide par le bras jusqu'à la table où je dois m'installer. Apparemment, il y a déjà quelqu'un. Se retrouver dans le noir complet, ça surprend un peu sur le moment. Mais ça a quelque chose d'excitant. Je romps rapidement le silence, curieuse de savoir qui sera mon partenaire pour cette soirée. Homme ou femme ? Peu importe. Tant que je peux partager un bon moment. « C'est ta première fois ? » Je lâche un petit rire amusé d'entre mes lèvres. Cette question peut paraitre bizarre dit comme ça, mais c'est volontaire. Autant se mettre à l'aise tout de suite et ne pas trainer. « Je m'appelle Johan, enchantée. »

Il fait chaud, je meurs de chaud. C’est clair que c’est pas dans ma Russie natale qu’on aurait eu ce genre de températures que je trouve franchement extrêmes. Là j’ai juste envie de me promener nue. J’imagine que ça dérangerait pas grand monde, pas que je me trouve particulièrement bien foutue, mais la plupart des personnes présentes sur ce bateau sont en chasse. Enfin, je serai pas tranquille non plus, n’exagérons rien. Bref, ce soir, j’ai décidé de sortir des sentiers battus. Loïs s’est inscrite à une activité pour rencontrer de nouvelles personnes, j’en fais de même, même si je sais que je ne tomberai pas avec elle au jeu du tirage au sort. Je me rends donc au restaurant et je suis calmement le serveur qui m’annonce que je suis seule pour le moment, mais que mon ou ma partenaire arrivera rapidement. Le noir me déstabilise, comme n’importe quel autre mortel j’imagine, ce n’est pas naturel. Mais heureusement, mon attente n’est que de courte durée, que déjà je sens la table bouger, aïe, un genou dans le pied je présume. « C'est ta première fois ? » Mon rire se mêle au sien, belle entrée en matière. « Oui ! Toi aussi ? » J’attends que ça se calme, qu’elle soit assise, et elle se présente. « Enchantée Johan, moi c’est Keala. Ne m’en veux pas si je te tends pas la main mais le coeur y est. » Je ris un peu et enchaîne. « Ça va, tu t’es pas perdue en chemin ? » Finalement, c’est amusant.

Un sourire se dessine sur mes lèvres lorsque j'entends la voix de ma partenaire. C'est une femme. Sur le coup, je suis plutôt contente. Pas que les hommes me déplaisent, bien au contraire. Mais disons que dans le contexte actuel de ce speed-dating, je préfère ne pas avoir affaire à un homme un peu trop collant. Bon, certes, certaines femmes peuvent s'avérer l'être également. Mais c'est tout de même beaucoup plus rare. Et aux premiers abords, même dans le noir, cette jeune femme n'a pas l'air de faire partie de cette catégorie. Tant mieux pour moi. « Effectivement. » C'est notre première fois à toutes les deux. C'est symbolique et amusant. « Enchantée Johan, moi c’est Keala. Ne m’en veux pas si je te tends pas la main mais le coeur y est. » Nos rires se mélangent. La jeune femme a l'air de se sentir tout aussi à l'aise que moi et c'est agréable. « Ça va, tu t’es pas perdue en chemin ? » Je rigole légèrement avant de répondre. « Je ne me suis pas encore écroulée sur toi, c'est déjà une bonne chose. Ça l'aurait foutu un peu mal comme première approche. » Je tâtonne avec mes mains sur la table pour essayer de trouver mon verre. « Trinquons à notre première fois alors. » Keala en fait de même et on essaye tant bien que mal d'entrechoquer nos verres. « Bon, alors, Keala, si tu peux m'en dire un peu plus sur toi... » Le noir me rend extrêmement curieuse. Encore plus que d'ordinaire. L'apparence ne rentre pas en ligne de compte pour se faire un jugement. Il ne nous reste pas d'autres choix que d'en apprendre plus l'une sur l'autre avec les mots.

« Je ne me suis pas encore écroulée sur toi, c'est déjà une bonne chose. Ça l'aurait foutu un peu mal comme première approche. » Je ris et secoue légèrement la tête, amusée. « Oh, ça dépend, ça aurait pu être une anecdote amusante à raconter, une belle entrée en matière ! » Je suis en train d’imaginer la scène et je dois bien avouer que ça me fait rire. « Trinquons à notre première fois alors. » Je l’entends récupérer son verre et je crois que c’est le moment d’en faire de même. Tout est plus compliqué dans le noir, je ne m’attendais pas à ce que ce soit facile, mais les difficultés se succèdent. J’arrive enfin à faire tinter mon verre avec le sien, et je peux boire une gorgée du cocktail non alcoolisé servi par le serveur à mon arrivée. J’avais pas grand choix de toute manière. Alcoolisé ou non. Point. Heureusement, le breuvage est agréable. « Bon, alors, Keala, si tu peux m'en dire un peu plus sur toi... » Grrr, je crois que j’adore sa voix. Je me racle un peu la gorge et tente de faire court. « Que te dire…j’ai 29 ans, je vis à Los Angeles depuis environ quinze ans, je viens de Russie, j’imagine que tu as dû entendre un petit reste d’accent quelque part… » Je ris un peu et poursuis. « Hum quoi d’autre, je travaille pour GQ, enfin, je suis l’assistante de la rédactrice en chef, mais c’est déjà pas mal. Et… j’ai la chance de partager ce repas en charmante compagnie, avec une jeune femme que je devine pétillante et… non je vais m’arrête là, ta voix m’a perturbée. » Je ris à nouveau et bois une gorgée de mon cocktail. « A ton tour, je t’écoute. » Au tant que le jeu se fasse dans les deux sens après tout.

La curiosité est un vilain défaut. Ou pas. C'est naturellement que je lui propose de commencer à me parler d'elle pour lancer les hostilités. Trop impatiente de savoir qui se cache derrière ce prénom. Après tout, c'est le but de ce rendez-vous. Ne pas aller par quatre chemins pour apprendre à se découvrir l'une et l'autre. Et surtout ne pas rester focalisé sur les apparences. Bon, sur ce point, je dois avouer que je suis quelque peu frustrée. Faut dire que j'aime quand même particulièrement voir les visages - et les corps, de ceux avec qui je suis en rendez-vous. Mais ça ne peut pas me faire de mal de me concentrer sur autre chose, pour une fois. « Que te dire… j’ai 29 ans, je vis à Los Angeles depuis environ quinze ans, je viens de Russie, j’imagine que tu as dû entendre un petit reste d’accent quelque part… » Alors c'est ça, le petit arrière goût sexy dans sa voix. Je souris à moi-même prenant soin de bien mémoriser toutes les informations qu'elle me donne sur sa personne. « J'aime beaucoup, c'est mignon. » Pour ne pas volontairement employer le mot sexy. Mais en soit, je n'en pense pas moins. « Hum quoi d’autre, je travaille pour GQ, enfin, je suis l’assistante de la rédactrice en chef, mais c’est déjà pas mal. Et… j’ai la chance de partager ce repas en charmante compagnie, avec une jeune femme que je devine pétillante et… » Et ? Je reste pendue à ses lèvres comme pour attendre la suite de sa phrase. « Non je vais m’arrêter là, ta voix m’a perturbée. » Raté. « Non mais la suite m'intéresse, tu peux continuer. » Soufflais-je du bout des lèvres en rigolant. « Tu en as déjà trop dit. » En tout cas, c'est plutôt flatteur. Ce n'est pas tous les jours que je reçois des compliments de ce genre sur ma voix. Faut croire que notre ouïe se décuple plus facilement dans le noir. « A ton tour, je t’écoute. » Je me racle un peu la gorge faisant mine de jouer les sérieuses. « J'ai vingt-quatre ans et j'ai toujours vécu à LA. Je suis serveuse dans un bar, le planet, peut-être que tu connais. » La réputation du planet n'est plus vraiment à faire. « Et apparemment j'ai une voix perturbante. C'est déjà pas mal pour un début. » Je bois une gorgée de mon verre avant de reprendre. « Pour ma part, je t'imagine... » Je m'arrête une seconde. « Blonde déjà. » Allez savoir pourquoi, dans mon esprit, une russe est forcément blonde. Un cliché en somme. « Mystérieuse et envoûtante. Voilà les trois mots qui me viennent à l'esprit quand je t'écoute. Peut-être que je suis complètement à côté de la plaque, hein, mais c'est pas grave. » L'exercice s'avère tout de même plus délicat que prévu.

Elle trouve mon accent mignon, et ça me fait sourire. C’est pas la première fois qu’on me le dit, de toute manière, pratiquement tous les accents sont mignons, c’est exotique, ça fait voyager. C’est d’ailleurs pour cette raison que je ne cherche pas à le faire totalement disparaître. Je continue sur ma lancée mais avant de dire que je trouve sa voix carrément sexy, je m’arrête. C’est peut-être un peu tôt. « Non mais la suite m'intéresse, tu peux continuer. Tu en as déjà trop dit. » Je ris un peu et finis donc ma voix. « Sexy, c’était le mot que j’osais pas avouer, mais oui, je trouve ta voix carrément sensuelle. J’imagine que c’est pire à cause du noir… » Oui enfin là c’en est presque indécent. Je retourne la question et la laisse y répondre, j’y suis attentive, curieuse. 24 ans, c’est un âge tout à fait convenable, je vais pas avoir l’intention de draguer une gamine. Serveuse au Planet. « Je connais oui, j’y ai mis les pieds une fois ou deux, mais faut dire qu’avec le boulot, j’ai pas vraiment de temps à passer dans ce genre d’endroit. Malheureusement. » Oui, surtout si j’ai le loisir de l’y croiser. Je souris lorsqu’elle remet sur le tapis sa voix envoûtante, et elle poursuit sur la manière dont elle m’imagine. Blonde. « Très juste. » même si facile. « Mystérieuse et envoûtante. Voilà les trois mots qui me viennent à l'esprit quand je t'écoute. Peut-être que je suis complètement à côté de la plaque, hein, mais c'est pas grave. » Je laisse échapper un rire amusé. Je suis bien contente d’être tombée sur elle. « J’aime à croire que ça me correspond assez. » Faudrait demander aux gens qui m’ont déjà rencontrée. « Alors dis-moi, Johan. Tu es venue ici toute seule ou accompagnée ? Et est-ce que tu as fait de jolies rencontres depuis le départ de Los Angeles ? » Quoi ? Je me renseigne, sait-on jamais… Même si je suis sur le bateau avec Loïs, nous ne sommes pas un couple, je peux bien faire ce que je veux.

« Très juste. » Gagné. Et cette réponse me donne encore plus envie de découvrir l'apparence de la jeune femme. « J’aime à croire que ça me correspond assez. » Apparemment, je suis plutôt sur la bonne voix. « Alors dis-moi, Johan. Tu es venue ici toute seule ou accompagnée ? Et est-ce que tu as fait de jolies rencontres depuis le départ de Los Angeles ? » Elle se renseigne, droit au but. Et là encore, elle marque des points. Nous sommes sensiblement sur la même longueur d'onde à ce niveau-là. « C'est con, ils auraient pu penser à nous faire des bracelets fluorescents pour l'occasion. » Ces fameux bracelets distribués en début de croisière. Pour nous caractériser, nous mettre dans des cases. Ça a au moins l'avantage de savoir exactement à qui on a affaire. Pas de perte de temps possible. Même si, parfois, les bracelets ne révèlent pas forcément la vérité. « Je suis venue avec ma meilleure amie. Juste pour profiter, nous changer les idées. » Une réponse qui, en soit, reste évasive sur la question. De toute façon, le 'couple' que je forme avec Zelda n'est plus vraiment ce qu'il a été. C'est plus facile - même naturel pour moi de jouer les célibataires. « Et je n'ai pas encore eu la chance de faire des rencontres intéressantes. Sur ce point là, tu es encore ma première. » Après tout, nous sommes qu'à notre deuxième jour de croisière. « Je vais finir par croire que c'est un signe. » Chose qui ne me déplairait pas, bien au contraire. « Et toi alors ? » Autant que les choses soient claires dès le départ. Avant même de la laisser répondre à la question, j'enchaîne sur une envie que je contiens depuis déjà le début du rendez-vous. « Tu me permets de faire quelque chose ? » Elle acquiesce sans même hésiter et je viens naturellement prendre sa main dans la mienne pour la toucher. « Les mains, c'est bien souvent ce que je regarde en premier chez les autres. Mais comme là je ne peux pas regarder... » Je ris un peu avant de me concentrer sur la silhouette de sa main.

Je suis pas trop du genre à passer par quatre chemins, elle va vite s’en apercevoir. La question est surtout de savoir si elle le prendra bien, ou si elle va se braquer comme d’autres pourraient tout à fait le faire à sa place, je le conçois. Mais le jeu en vaut la chandelle, après tout, le noir est propice au rapprochement, c’est inévitable. « C'est con, ils auraient pu penser à nous faire des bracelets fluorescents pour l'occasion. » Je ris un peu et acquiesce en lui montrant que je suis bien d’accord avec elle. Si je savais ce qu’elle cherchait, je pourrai sans doute faire en sorte d’en faire partie. « Je suis venue avec ma meilleure amie. Juste pour profiter, nous changer les idées. » Intéressant… « Et je n'ai pas encore eu la chance de faire des rencontres intéressantes. Sur ce point là, tu es encore ma première. » Je laisse échapper une petite onomatopée du style ‘hmm’ qui supposerait que je trouve ça intéressant. « J’ai toujours beaucoup aimé être la première. » Ma voix se fait plus charmeuse, étrangement ou pas. Je sens que je vais aimer cette soirée, définitivement. « Je vais finir par croire que c'est un signe. Et toi alors ? » « Ça l’est peut-être… » Je n’ai pas le temps de poursuivre qu’elle m’interrompt, me demandant si elle peut se permettre quelque chose. Intriguée, je la laisse poursuivre. Elle vient chercher ma main qui heureusement se trouvait sur la table. « Les mains, c'est bien souvent ce que je regarde en premier chez les autres. Mais comme là je ne peux pas regarder... » Je frissonne légèrement à son contact et la laisse glisser ses doigts le long des miens. Je peux moi aussi sentir sa peau, douce, ses doigts longs et fins, ses ongles ni trop longs ni trop courts. Je l’imagine assez grande et élancée, féminine, tout juste ce qui me plait. Je viens entrelacer mes doigts avec les siens pour capturer sa main. « Fais gaffe… les mains c’est érotique chez moi. » Je joue, j’adore ça. « Pour répondre à ta question, je suis venue avec une amie, c’est elle qui m’a traînée ici, parce que c’est pas réellement mon genre de traîner sur une bateau pendant des jours. Et… pas de rencontre intéressante non plus, jusqu’à ce soir… » Le serveur s’annonce avec nos plats et je sépare ma main de la sienne à regret. « Si tu devrais te décrire en quelques mots, tu choisirais lesquels ? »

Un petit jeu de séduction s'est installé entre nous un peu naturellement. Je ne sais pas si c'est parce que nous sommes dans le noir ou pas mais c'est agréable. Ce n'est pas moi qui vais m'en plaindre... au contraire. Mes doigts glissent le long des siens à la découverte de sa main. Pour être honnête, j'apprécie fortement ce contact. Je sais pas, il y a un truc. Elle a un truc. « Fais gaffe… les mains c’est érotique chez moi. » Je ne suis pas surprise de voir que Keala joue autant que moi sur ce terrain là. A vrai dire, ça s'est senti tout de suite. Elle n'a pas froid aux yeux. Et moi non plus. « Ta main est exquise. » Douce, fine et délicate. Tout ce que j'aime. « Ça me donne envie d'en découvrir un peu plus... » Ma voix devient plus sensuelle. La jeune femme semble dans le même cas que moi. Pas de rencontres intéressantes jusqu'à maintenant. Là encore, on peut voir ça comme un signe. C'est à ce moment là que le serveur décide de nous interrompre en amenant nos plats. Nos mains se séparent à contre coeur. « Si tu devrais te décrire en quelques mots, tu choisirais lesquels ? » Je tente tant bien que mal de goûter une bouchée du plat qui se trouve devant moi. La tâche s'annonce plus difficile que prévu. A savoir si c'est le noir qui me perturbe autant ou si c'est la jeune femme qui me fait face. Peut-être un penchant pour la deuxième option. « Hum. » Je prends quelques secondes pour réfléchir avant de répondre. « Intense, spontanée et joueuse. » Trois mots qui correspondent plutôt bien à mon caractère. « Et physiquement, tu m'imagines comment ? » La frustration du noir me donne vraiment envie de savoir à quoi elle ressemble. Et je suis curieuse de savoir si elle aussi a envie de savoir comment je suis physiquement. Le mystère a quand même le don d'entretenir une certaine excitation. Je ne saurais pas réellement comment l'expliquer mais c'est intense. Comme si nos sens étaient curieusement décuplés. « Qu'est-ce que tu aimes en particulier chez une femme ? » Un moyen de savoir si je rentre dans ses critères ou pas. Je ne voudrais pas qu'elle soit déçue du résultat.

« Ta main est exquise. Ça me donne envie d'en découvrir un peu plus... » Je frissonne en entendant ses mots, et j’avoue que ça donne envie de connaître la suite. Je me contente de sourire, de toute manière je n’ai pas le temps de répondre quoi que ce soit puisque nous sommes interrompues par le serveur. Une fois ce dernier reparti, je demande à la jeune femme de se décrire en quelques mots, et ces derniers me plaisent beaucoup. Ça correspond tout à fait à ce que j’avais pressenti d’elle depuis le début de notre courte rencontre. Joueuse. J’adore ça. Intense, j’en frissonne rien qu’en entendant le mot de ses lèvres. C’est grisant. « Et physiquement, tu m'imagines comment ? » Je finis ma bouchée, pensive un instant avant de répondre. « C’est super difficile comme question, en plus si je me plantes tu vas jamais vouloir me voir dehors. » Je ris un peu, ajoutant un peu plus de légèreté à l’échange. « Je t’imagine plutôt menue, assez grande, plus grande que moi, ce qui est pas difficile cela dit. » Un nouveau rire enfantin s’extirpe de mes lèvres avant que je ne poursuive. « Les cheveux longs, peut-être bruns, avec les yeux clairs. Ou blonde ? C’est trop difficile… » C’est un peu la loterie, parce que ce n’est pas une voix qui peut donner des indices sur un physique. « Qu'est-ce que tu aimes en particulier chez une femme ? » « Ça c’est facile ! » Je bois une gorgée de mon verre d’eau avant de répondre réellement à sa question. « J’aime avant tout la grâce et la douceur des femmes. Pas seulement, parce que j’aime bien aussi qu’elles aient un côté un peu sauvage, affirmé, rebel. J’ai jamais aimé que ça soit trop facile. Et puis les femmes avec du caractère sont tellement plus attirantes… » Jusque là, j’ai l’impression que Johan entre dans les critères. « Physiquement j’ai pas de goûts particuliers, je suis pas difficile, c’est ce que la personne dégage qui est le plus important, et l’alchimie qu’il peut y avoir, naturellement… » Encore une fois, j’ai la sensation que c’est exactement ce qui semble nous lier ce soir. Je ne cherche pas quelqu’un avec qui vivre une histoire sur le long terme, à savoir ce qu’elle veut, elle. « Et toi, qu’est-ce que tu cherches exactement ? »

Le jeu des devinettes. C'est tout ce que j'ai trouvé pour essayer de palier à la frustration du noir. Mais finalement, c'est plutôt amusant. Je suis curieuse de savoir comment la jeune femme m'imagine. En se basant uniquement et simplement sur ma voix. Et sur son esprit joueur, évidemment. Même si l'exercice n'est pas facile, son esprit doit bien s'imaginer des choses. Au final, sa description n'est pas si mauvaise. Bien au contraire. Grande, menue, cheveux longs, yeux clairs. Elle a trouvé les principales caractéristiques de mon physique. Coup de chance ou réel coup du destin ? « Hum... peut-être, peut-être pas. » Je continue à laisser planer un minimum de mystère. Le but du rendez-vous n'est justement pas de tout dévoiler. Mais quelque chose me dit qu'elle ne devrait pas être déçue du résultat. « Je te laisse la surprise au moment venu. » Si Keala décide de poursuivre après, en dehors. Mais à en croire le sous-entendu qu'elle vient de faire, je suppose qu'elle en a autant envie que moi. « Je ne voudrais pas trop en dévoiler... au risque que toi non plus tu ne veuilles plus me voir. » Ça serait quand même con. Si on joue le jeu du rendez-vous dans le noir depuis le début, autant aller jusqu'au bout. « J’aime avant tout la grâce et la douceur des femmes. Pas seulement, parce que j’aime bien aussi qu’elles aient un côté un peu sauvage, affirmé, rebel. J’ai jamais aimé que ça soit trop facile. Et puis les femmes avec du caractère sont tellement plus attirantes… » Sur ce point là, je ne peux pas la contredire. Nous partageons la même vision des choses. Les femmes avec du caractère, un mélange des deux, c'est tellement mieux. Ni trop dans l'extrême ni pas suffisamment. Le juste milieu. « Physiquement j’ai pas de goûts particuliers, je suis pas difficile, c’est ce que la personne dégage qui est le plus important, et l’alchimie qu’il peut y avoir, naturellement… » Je ne peux m'empêcher de sourire à sa réponse. Là encore, elle marque des points. « Autrement dit, tu marches au feeling. Un peu comme moi. » C'est bien beau d'avoir le physique d'une top modèle mais s'il ne se passe rien derrière, c'est inutile. Le charisme d'une personne est important. « Et toi, qu’est-ce que tu cherches exactement ? » Profiter. « Un échappatoire. » Les mots se délient instinctivement de mes lèvres. Dit comme ça, ça peut faire peur. Mais je me reprends rapidement. « Enfin, disons que je cherche principalement à ne pas me prendre la tête et à profiter. » Rien de concret, rien de sérieux. Théoriquement, je suis censée être en couple. Même si, là, tout de suite, ça n'a plus vraiment d'importance. « Ça serait tellement dommage de se priver... » Au moins les choses sont claires.

La jene femme me laisse sur ma faim quand elle me dit vouloir garder la surprise, je ne sais donc pas si j’étais pas le juste ou dans le faux concernant son physique. Mais je suis sûre que le jeu en vaut la chandelle. Alors je ne râle pas et continue sans plus tarder mon petit jeu. Répondre à ses questions est un réel plaisir, je m’en donne à coeur joie, essayant de répondre au plus proche de ce que je ressens réellement. Ça a l’air de lui plaire, je ne la vois pas mais j’entends son sourire. Oui, on peut entendre un sourire. « Autrement dit, tu marches au feeling. Un peu comme moi. » Je ris légèrement avant d’ajouter. « On est faites pour s’entendre. » C’est exactement la sensation que j’ai. Je suis vraiment contente d’être tombée sur elle, ce serait mentir que de dire le contraire. Sans plus tarder, je lui demande ce qu’elle recherche, toujours pour être sûre que nous soyons sur la même longueur d’ondes. Sa réponse est sans appel. « Un échappatoire. » Je n’ai pas envie de poser plus de questions. Pas à ce propos en tout cas. Un échappatoire, ça peut vouloir dire beaucoup de choses, mais ça ne me regarde pas après tout. « Enfin, disons que je cherche principalement à ne pas me prendre la tête et à profiter. » Un sourire étire délicatement mes lèvres et je hoche la tête même si dans le noir, cette action ne sert strictement à rien. « Ça serait tellement dommage de se priver... » Cette fois c’est un petit rire qui franchit la barrière de mes lèvres. « Tu as tout à fait raison, je suis bien d’accord. » Encore une fois, nous sommes sur la même longueur d’ondes. Le repas se termine, le dessert est avalé, et il est déjà l’heure de quitter le restaurant dans le noir. « Alors, ça te dit de poursuivre la soirée avec un verre ailleurs, avec un peu plus de lumière que tu aies tout le loisir de regarder mes mains ? » Mutine, joueuse, j’attends sa réponse avec impatience.

Le repas se termine mettant déjà un terme à ce rendez-vous dans le noir. En sa compagnie, je n'ai pas vu le temps passer. Et pourtant, en même temps, le rendez-vous m'a paru une éternité. Peut-être parce que finalement, depuis le début, je n'ai attendu qu'une chose : le moment fatidique où nous pourrions enfin sortir à la lumière. J'ai passé une agréable expérience avec elle. Si c'était à refaire, je n'hésiterai pas une seule seconde. Je suis consciente que j'ai eu de la chance de tomber sur elle. Avec quelqu'un d'autre, le feeling n'aurait peut-être pas été aussi fort. En tout cas, je ne regrette pas. Et quelque chose me dit que la soirée ne fait que commencer. « Alors, ça te dit de poursuivre la soirée avec un verre ailleurs, avec un peu plus de lumière que tu aies tout le loisir de regarder mes mains ? » Ses mains et plus encore. Je souris frôlant légèrement son genou sous la table. « Avec plaisir. » Je me lève finalement de ma chaise plus impatiente que jamais. Comme une gamine de dix ans à qui on a promis une belle et grosse surprise. C'est un peu ça finalement. « C'est bien parce que tu m'as laissé sur ma faim toute la soirée. » Soufflais-je d'entre mes lèvres en riant. Ce petit jeu entre nous a réussi à attirer notre curiosité à toutes les deux. Comme une certaine excitation difficile à décrire. Quelque chose de fort, intense. « Je te suis. » J'arrive difficilement à lui prendre la main alors qu'elle se fait guider par l'un des serveurs pour nous aider à sortir du restaurant. Une fois dehors, il me faut quelques minutes d'adaptation. Je fronce un peu les yeux avant de tourner la tête en direction de la jeune femme. Je ne peux m'empêcher de la dévisager des pieds à la tête sans aucune gêne. Si ça aurait pu paraitre déplacé dans un autre contexte, là, tout de suite, il n'y a rien de malplaisant. « Tu m'excuseras hein, mais je suis obligée d'admirer le paysage. » Un large sourire s'affiche sur mes lèvres, un brin séducteur. « C'est encore mieux que ce que j'avais imaginé. » Cette femme est magnifique. Ce qu'elle dégage physiquement est aussi intéressant que ce que j'ai pu découvrir par son caractère. Les deux vont parfaitement bien ensemble. Une harmonie synonyme d'une beauté naturelle.

Je ne suis pas su genre timide, et je n’ai pas peur de rencontrer de nouvelles personnes. Ce soir, j’ai fait un début de connaissance avec une jeune femme qui me semble tout à fait délicieuse, et ce serait mentir de dire que je n’espère pas qu’elle soit jolie en plus de toutes ses autres qualités. Le courant est passé, je n’ai plus qu’une envie, sortir et la découvrir sous un autre jour. Johan semble du même avis que moi puisqu’elle accepte ma proposition avec plaisir, et déjà nous sommes en train de sortir du restaurant, sa main dans la mienne, mon autre main sur l’épaule du serveur comme à l’aller. Il nous faut quelques secondes pour nous habituer à la lumière, la sortie du restaurant donne sur le pont du bateau et même s’il fait nuit, les éclairages sont toujours plus agressifs qu’un noir complet. Lorsque j’arrive à ouvrir correctement les yeux, je les pose sur cette douce créature avec qui j’ai donc passé ce repas plus qu’étonnant. Nous nous comportons de la même façon, nos regards virevoltent pour apprécier la vue. « Tu m'excuseras hein, mais je suis obligée d'admirer le paysage. » Je laisse échapper un rire franc et adorable. « Ne t’excuse pas, j’admire autant que toi. » Petit sourire mutin lorsque je croise pour la première fois son regard qui en dit long. Elle a des yeux magnifiques. « C'est encore mieux que ce que j'avais imaginé. » Le sourire que je lui offre est radieux. « J’ai essayé un maximum de ne pas trop t’imaginer mais c’est exactement ce que j’espérais. » C’est une sensation grisante, j’aimerai pouvoir revivre ça plusieurs fois. Une fois, unique, où on découvre le physique de la personne qui nous a plue dans le noir. J’adore. « Alors, on va le boire ce verre ? »