Silas n’était pas mécontent de retrouver Oliver pour une séance photo aujourd’hui. Il appréciait ce garçon et le courant passait bien. Voilà déjà trois fois qu’ils se voyaient et les photos étaient meilleures au fur et à mesure qu’ils apprenaient à se connaître. Oli avait beaucoup de potentiel et il était terriblement beau sur les photos. Okay, en vrai aussi, Sil ne pouvait le nier. Aujourd’hui il avait quelques idées en tête pour le sublimer une fois de plus. Ce n’était pas son agence qui les lui avait soufflées mais bien l’inverse, comme assez souvent. Il n’était là que depuis un an pourtant Silas avait une grande liberté, c’était un peu comme s’il était photographe freelance. Bien sûr, on lui imposait parfois des shootings, notamment quand il s’agissait de mannequins très connus. Mais la plupart du temps il pouvait faire ce qui lui passait par la tête du moment que le rendu était bien et que le mannequin était partant lui aussi. Parce qu’un modèle qui faisait la gueule sur les photos bah… Ca n’était pas très attractif. Et le Oli, pas sûr qu’il accepte de se prêter au jeu aujourd’hui. Silas était assez curieux d’avoir sa réaction et si bien sûr il n’était pas d’accord alors il accepterait aussi. Toujours avoir un plan B ! Et un plan C. Un plan Z peut être utile parfois aussi…
Eh merde, le voilà en retard ! Il avait un peu trop tardé à déposer Aaron chez sa mère. En même temps, difficile de résister à ses petits yeux bleus… Enfin, quand il arriva devant le studio il vit qu’Oli était déjà là à l’attendre. Il s’approcha et lui sourit, lui rendant sa bise. « Salut ! Excuse pour le retard. Bien et toi ? » A sa question il lui montra les clés et ouvrit les portes du studio. « On reste ici pour aujourd’hui. On ira batifoler une autre fois ! » Il le laissa entrer et ferma derrière lui, fermant la porte. « J’suis content de te revoir en tout cas ! J’ai quelques idées pour aujourd’hui… » Et c’était le moment délicat du shooting. « On n’a pas encore parlé de ça. Tu te situes comment toi, par rapport à la nudité… ? » N’allez pas croire qu’il voulait se rincer l’œil ! Bon, si ça arrivait par inadvertance par contre… Ce ne serait pas de sa faute, n’est-ce pas ? « Rassure-toi, personne ne verra rien. Fin… Sauf moi, du coup. Mais ça compte pas non ? »
Silas n’aurait pas cru que sa proposition passerait aussi facilement. Oliver ne sembla ni choqué ni vraiment surpris. Il était même partant ! Le photographe en avait connu des plus compliqués à mettre à poil ! Il se souvenait d’ailleurs de sa première séance dans le genre. Cette séance où il avait été plus gêné que le modèle lui-même. Comme quoi on pouvait s’habituer à tout ! Maintenant il se montrait à l’aise, comme si tout était norm… Attendez. Qu’est-ce qu’il venait de dire, Oliver ? On aurait dû photographier la tête de Silas à cet instant car elle valait probablement le détour. Oli lui demandait de se désapper aussi, tout simplement. Pour être plus à l’aise. Ah bah oui, c’est sûr que lui, il serait plus à l’aise ! Mais Silas ? Il n’avait pas honte de son corps, bien au contraire. Il ne se trouvait pas moche, il plaisait même et il le savait. Mais de là à se foutre à poil à la moindre occasion, peut-être pas. « Ah bah c’est la première fois qu’on me la fait, celle-là… » Il fallait reconnaître l’originalité de la demande ! Oliver n’était définitivement pas un mannequin comme les autres. Il avait ses propres caprices, bien différents de tous ceux qu’il avait pu entendre. Et si Oliver blaguait, au fond ? Il avait l’air tellement sérieux.
Silas réfléchit un moment. Bon… Si ça pouvait le mettre plus à l’aise. « Bon, okay. Mais je n’enlève que mon t-shirt, tu n’en verras pas plus ! » C’était très bizarre comme phrase. Mais soit… « D’ailleurs, j’aimerais que tu ne commences par enlever que ton haut aussi. On va le faire progressivement okay ? » Et pour donner le ton, il retira son t-shirt. Silas ne put s’empêcher de rire, c’était totalement ridicule comme situation. « Non mais sérieux… Y’a que toi pour me demander ça, hein. Allez, à ton tour, pendant que je prépare mon appareil ! »
Silas se demanda vaguement si Oliver n’était pas en train de le draguer. Et si c’était le cas, alors il était bien aveugle de ne pas l’avoir remarqué avant ! S’ils s’étaient rencontrés dans d’autres circonstances, Silas aurait pu le draguer aussi. Oliver était beau, intelligent, plein de vie. Mais deux choses le bloquaient : son âge et le fait qu’ils travaillent ensemble. Si sa patronne était plutôt cool et ouverte d’esprit, il n’était pas sûr d’avoir le droit de se taper ses modèles. Et puis c’était un coup à foutre une sale ambiance aussi ! Alors il n’avait pas du tout envisagé cette possibilité et s’était contenté de se comporter comme avec n’importe lequel de ses modèles sans même chercher les sous-entendus ou les potentielles insinuations salaces. Sauf aujourd’hui, peut-être, en cédant à son petit caprice et en se dénudant partiellement. « Le chauffage n’est pas allumé non. » répondit-il, se retenant de faire une quelconque réflexion ambigüe. Mais du coup, il ne put s’empêcher d’admirer un peu le garçon… D’un œil professionnel, bien sûr !
« Allez, en place. Donne-moi tout ce que t’as ! » Il lui donna quelques directives sans non plus trop en faire. Dans un souci de naturel, il laissait beaucoup de place à l’imagination de ses modèles, quand ils en avaient bien sûr. Certains étaient aussi raides qu’un piquet et sans aide, ne donnaient rien d’intéressant. Oliver savait poser, il était doué pour ça alors les premières photos ne tardèrent pas. « T’es nickel là, vraiment à tomber. » Ne voyez pas ce genre de commentaires comme de la drague. Encourager les mannequins à se lâcher c’était aussi son job et il n’était jamais avare de compliments. Mais cette fois… Peut-être qu’ils avaient une autre signification.
Quelques photos plus tard, Oli laissa tomber le pantalon pour ne garder que son boxer. Silas commença lui-même à se demander si personne n’avait touché au chauffage… Mais il fallait rester professionnel jusqu’au bout. « Ca va tu te sens à l’aise pour le moment ? »
Une fois pris dans son boulot Silas avait oublié son torse nu alors oui il était plutôt à l’aise. Jusqu’à ce qu’Oliver ne lui demande, très probablement. Il se redressa et haussa les épaules, regardant distraitement les photos déjà prises pendant qu’il buvait de l’eau. « On s’en fiche de moi. L’important c’est de te mettre à l’aise toi. Mais sinon oui, ça va. » Il mentait un peu. Rien qu’un peu… Parce que de plus en plus il regardait Oliver non pas avec les yeux d’un professionnel mais avec les yeux d’un homme. Et c’était très mauvais, ça. Alors maintenant qu’il était en boxer, en plus… N’aurait-il pas pu proposer une séance de ce genre à un modèle qui n’était pas du tout son genre ?! Bon… Les clichés auraient été moins… Parfaits. Il fallait savoir faire des sacrifices dans la vie.
Silas arqua un sourcil quand il entendit la musique. L’ambiance était bien différente de leur première séance où ils avaient avant tout appris à se connaître l’un et l’autre. Maintenant Oliver semblait se sentir à l’aise au point de mettre de la musique ce qui ne dérangeait absolument pas Silas. Le fait qu’ils soient collègues aidait beaucoup pour l’ambiance d’ailleurs. L’un n’était pas plus haut placé que l’autre et même s’il arrivait à Silas d’être exigeant – c’était dans sa nature, il était assez perfectionniste – il écoutait beaucoup les propositions et idées du plus jeune. C’était une vraie collaboration même si pour aujourd’hui, le thème était plus ou moins imposé. Si vraiment Oli n’avait pas voulu se dénuder ils auraient fait autre chose et ça n’aurait jeté aucun froid. « J’aime beaucoup tes goûts musicaux ! » Et sur ce ils reprirent les photos en boxer cette fois.
Silas redoutait de plus en plus le moment où il retirait ce dernier bout de tissu. Difficile de rester professionnel quand le modèle en face nous plaisait vraiment. Parce que oui, Oli lui plaisait. Mais mélanger le privé et le professionnel c’était beaucoup trop compliqué et il ne connaissait pas l’avis de Mia sur ce genre de relations au travail. Il n’arrivait même pas à déterminer si du sérieux l’intéresserait ou si c’était simplement une question de physique. Oliver semblait lui plaire par bien des aspects, il fallait juste creuser un peu. « Tiens viens voir un peu les photos, elles sont top ! » Ce n’était pas bien difficile de sublimer quelqu’un qui était déjà beau naturellement. Il laissa Oli s’approcher et lui montra quelques-unes de ses photos. Avant de passer à la dernière partie, celle qu’il appréhendait le plus, il voulut poser une question qui lui trottait dans la tête. « Tiens, en fait… J’ai entendu dire que Coachella c’était bientôt. Ca te dirait ? » Sous-entendu : d’y aller ensemble. Lui proposer une date c’était une façon de quitter le monde du travail pour faire connaissance en dehors. C’était peut-être une très mauvaise idée car si ça se passait mal, ils étaient destinés à travailler ensemble un paquet de fois encore. Mais ça pouvait tout autant bien se passer, non ? Sans dire qu’Oli était l’homme de sa vie, il lui plaisait vraiment beaucoup.
« J’avoue qu’elle a l’air pas mal ! T’es vraiment bien dessus. C’est ce que je cherchais aujourd’hui. » Enfin pas totalement car il lui restait encore son boxer. La photo semblait bien, oui, et Oliver était totalement craquant dessus. Il prenait toutefois des pincettes pour parler de ses photos. Tant qu’elles étaient sur l’appareil il n’était jamais sûr du résultat une fois qu’elles seraient agrandies. Pour autant il aimait bien les montrer aux modèles afin qu’ils puissent en parler. Discuter notamment de l’expression, des poses utilisées. Avec Oliver il n’avait quasiment jamais rien à dire, le jeune homme était professionnel et attentif à ses conseils, si bien qu’il n’avait pas besoin de les répéter trente fois.
Silas proposa finalement au blond d’aller ensemble à Coachella. Autant dire qu’il ne le proposerait pas à n’importe qui… Il prit un air faussement outré quand Oli lui demanda s’il le draguait. Il était totalement grillé, pas très subtil le Silas. En fait, il était partagé par l’envie de le draguer et celle de rester simplement amis du boulot. Mais il fallait croire qu’à l’instant où il proposa à Oliver un trajet de 200 kilomètres, quelque chose en lui avait fait ce choix. Après tout on ne vivait qu’une fois… Et ce gars-là lui plaisait beaucoup malgré son âge ou le reste. A l’instant il ne cherchait pas un père pour Aaron, simplement quelqu’un avec qui passer de bons moments, et qui sait… Voir ce que ça pouvait donner ? D’autant qu’Oliver savait qu’il avait un enfant et que ça n’avait pas l’air de le repousser non plus. D’un autre côté, quand on avait le projet de coucher avec quelqu’un sans le rappeler, ça nous importait peu qu’il ait un gosse ou pas… Merde Sil, tu pars trop loin. Just relax. Calm down. Profite un peu, tu réfléchiras plus tard. C’était un garçon impulsif. Mais en amour, il avait toujours un frein. La sensation de devoir quelque chose à Aaron, de devoir trouver quelqu’un de stable et qu’ils aimeraient tous les deux. C’était une sacrée pression. « Peut-être que je te drague. Ou peut-être que je propose à tous mes modèles d’aller à Coachella parce que j’ai vraiment envie d’y aller, et que t’es le seul à avoir dit oui… » Il sourit largement, content de sa connerie. Bien sûr que c’était une blague. Apparemment Oliver était opérationnel pour rentrer dans son jeu de séduction. Ca sentait mauvais mais c’était aussi très flatteur. « Vas-y, enlève ce qui te reste, on verra si tu fais toujours le malin. » C’était une très mauvaise idée de lui dire de se mettre à poils alors qu’ils commençaient à se taquiner. Il valait mieux stopper cette discussion le temps de la séance…
« C’est pas tout près Coachella. On prend ma voiture, je passe te chercher ? » Il n’avait pas encore trouvé de babysitter pour Aaron. Mais… Il trouverait. Parce qu’il voulait vraiment apprendre à connaître Oliver autrem… Ah, il venait d’enlever son boxer. Oui, là aussi il le découvrait autrement ! Il resta impassible, tenta de garder son professionnalisme et attendit qu’il se place pour commencer les photos. Photos sur lesquelles on ne voyait jamais son sexe – lui par contre, il l’avait bien en vue.