Rayan • Don't judge me like a picture book you're to dumb to read

Selon les probabilités la rencontre des parents de Rayan était quasi impossible, et pourtant… le destin, le hasard ou peu importe a fait leurs chemins se croiser. Rajoutez à cela la flèche de Cupidon et paf ça fait un couple heureux. Lui futur vendeur de voiture, stagiaire dans une concession Chevrolet, elle serveuse dans un starbuck pour payer ses études de biologie. Ce n’est pas en lui parlant bagnole qu’il l’a séduite mais lors d’une scène ouverte dans un bar durant lequel il jouait avec son groupe. Il était le batteur, il lui a taper dans l’œil. Une histoire simple et classique. La passion des premiers moments, l’aventure un peu, l’amour beaucoup. Les années passent, ils s’installent ensemble, puis leurs familles qui questionnent de plus en plus souvent « Le mariage c’est pour quand ? Et les enfants ? ». La suite logique, le chemin tracé et il mène à Rayan. Moi-même.
L’heureux événement avec son lot de surprise. Etait attendu un petit garçon, il s’appellerait Ryan. C’est une fille qui est née, et bien elle s’appelle Ryan quand même, à une petite faute près sur l’acte de naissance. Mais au moins il a le mérite d’être original ce prénom, non ? Et si je suis très marquée par les origines irlandaises de mon paternel de par mon patronyme, ce dernier aurait pu se poser des questions quant à sa paternité tant je ressemblais de plus en plus à sa mère chaque année passant.

Etait-ce facile de s’appeler Rayan McHalway et avoir une apparence pas “raccord“ aux yeux des gens ? Pas toujours, surtout à l’école. Le problème n’était pas tant mes camarades mais plutôt les professeurs qui parfois ne voyaient pas plus loin que le bout de leur nez. De nature plutôt discrète je me suis petit à petit forgée un réel sens de la répartie et un goût certain pour ce qui est d’amuser la galerie. Et là ça devenait pratique quand à l’accusation « C’est la faute de Rayan. » c’était un garçon qui prenait la punition à ma place. Un joker rarement utilisable plusieurs fois et qu’en début d’année lorsque personne ne me connaissait.

Sociable, mais pas en quête de quelconque popularité, je me suis toujours entourée de peu de personnes. De nature réservée et mystérieuse, tenant probablement ça de mon père qui m’a toujours répété depuis mon plus jeune âge que la confiance est une denrée rare que l’on ne peut pas donner à n’importe qui, au risque de s’exposer. En grandissant j’ai fini par comprendre que ce discours était surtout lié à ses activités officieuses, des petites escroqueries pour “rehausser un peu notre niveau de vie“ s’était-il justifié quand ma mère l’avait découvert. Ce jour là j’ai découvert une facette de mon père que je ne connaissais pas. Il avait raison, peut-on connaitre vraiment quelqu’un ?

Je n’ai manqué de rien, j’avais des parents aimant et je fréquentais des établissements scolaire tout à fait corrects. Mais tout était moyen, dans la moyenne. A mon entrée dans l’adolescence j’étais persuadée d’être d’une affligeante banalité, un individu de plus dans la masse, et cette idée m’effrayait un peu. Une chance pour moi d’avoir croisé la route de quelqu’un d’inspirant, qui m’a fait comprendre que je serai banale seulement si je m’en persuadais et faisais tout pour le rester au lieu de vouloir m’élever. Quand j’ai eu pris conscience de ça, mes résultats scolaires ont décollés et ma progression au volleyball a été fulgurante, d’ailleurs c’est là que j’ai délaissé les autres sports, ayant trouvé celui dans lequel je m’épanouissais.

Mon père m’a souvent répété qu’aucun homme ne serait jamais assez bien pour moi. Parce que je suis sa fille, et qu’il a toujours eu un penchant à jouer un peu les durs pour les apparences. Je leur ai quand même laissé leur chance malgré les menaces paternelles de “castrer chaque petit con qui toucherait à sa fille“. Des amourettes de jeunesse sans importance jusqu’à l’histoire un peu plus sérieuse que les autres. La première fois et quelques mois plus tard le premier vrai chagrin d’amour. “Un de perdu, un de perdu“ me disait ma mère, pragmatique.

Fin du lycée, dilemme. J’avais comme ambition d’entrer au MIT, mes résultats en science me permettaient d’en rêver en tout cas et j’étais prête à tenter ma chance. Et puis j’ai reçu une proposition de bourse d’une Université dont l’équipe féminine de volleyball était le sésame pour une potentielle sélection en équipe nationale. Mon choix a finalement été celui du sport et d’une carrière professionnelle dont je rêvais déjà.

Un rêve de trop courte durée, mais une période de ma vie dont je garde de merveilleux souvenirs, et mes premiers doutes vis à vis de mon attirance strictement envers les hommes...
La pression, l’envie d’être au top pour l’équipe et de se faire sa place m’ont poussé à repousser mes limites et m’entrainer plus fort. Je connaissais les risques, mais j’avais l’illusion de maitriser, de savoir parfaitement ce que je faisais. Et quand le corps ne peut plus encaisser, il lâche. Pendant ce match de championnat c’est mon genou gauche qui a lâché. Rupture des ligaments, opération obligatoire et toute la rééducation ensuite. Huit mois plus tard je remettais les pieds sur un terrain, j’appréhendais de ne jamais retrouver mon niveau et petit à petit j’ai fini par me faire à cette idée. J’avais perdu trop de temps, une autre fille avait fait sa place et je laissais mon rêve s’éloigner.

C’est tout juste à la fin de mes études pour devenir professeur de sport que j’ai rencontré Adam. Jusque là, peut-être parce que j’étais trop jeune, je ne m’étais jamais vraiment projetée dans l’avenir comme je l’ai fait avec lui. Tout semblait naturel et simple. Alors quand il m’a annoncé avoir décroché un poste à Los Angeles je l’ai suivis sans hésiter. Il y a trois ans je découvrais la cité des Anges et la Californie. Tableau idyllique pour continuer notre histoire, c’était en tout cas ce que je pensais jusqu’à ce que petit à petit les choses deviennent différentes il y a un peu plus d’un an. Adam était de plus en plus pris, de moins en moins présent et j’avais la sensation que nous devenions des colocataires plus qu’un couple. Les disputes sont devenues plus fréquentes et un jour il m’a simplement dit qu’il ne m’aimait plus. On ne fait pas plus clair je crois. Il en aimait une autre… dommage pour moi.

J’espère être pour mes élèves cette même professeur qui m’a ouvert les yeux sur l’importance d’être actrice de sa propre vie. Et en parlant d’être actrice, je me suis découverte une passion pour le théâtre il y a deux ans. Ou plus exactement j’ai enfin fini par me lancer alors que secrètement – ou peut-être pas tant – je voulais le faire mais n’avais jamais osé. Je prends des cours plusieurs fois par semaine et j’adore ça. Une amie avec qui je prends des cours est la professeur d’un groupe d’ados, s’absentant plusieurs semaines elle m’a proposé de la remplacer. Je ne me sens pas légitime, j’ai moins d’expérience qu’elle, mais enseigner c’est mon boulot alors j’ai accepter. Bon choix ou erreur ? L’avenir le dira.

Il y a peu de temps mon père a frôlé la mort. Episode marquant de sa vie qui lui a fait prendre conscience de certaines choses et le transformant quelques peu. Adepte des secrets, comme ses escroqueries passées des années inaperçues aux yeux de tous, c’en est un beaucoup plus lourd qu’a révélé mon paternel sous le coup de sa nouvelle dynamique de vie. Se lançant sur le chemin de l’honnêteté et du pardon après avoir failli rendre son dernier souffle, il a avouer avoir eu une aventure avec une autre femme que ma mère. Révélation d’autant plus difficile a encaisser que de cette union extra-conjugale est née une petite fille. J’ai donc récemment appris avoir une demi-sœur de quelques années ma cadette, laquelle a été adopté par un couple vivant à Los Angeles. Ce n’est pas mon genre mais je vois ça comme un signe… de quoi je n’en sais rien mais j’y pense souvent, j’ai envie de savoir qui elle est. Maintenant il va falloir la retrouver et pour ça je n’ai que peu d’éléments à ma disposition. Et puis rien ne dit qu’elle vit toujours à L.A…